Bienvenue à l'hôtel de Rothelin-Charolais

Publié le 18/09/2024 | Modifié le 11/09/2024

En 1703, Philippe d’Orléans, marquis de Rothelin (1678-1715) hérite d’un modeste édifice qu’il décide de démolir pour faire construire un vaste hôtel particulier. Il acquiert des parcelles contigües pour agrandir le terrain et il aurait fait appel à l’architecte Pierre Cailleteau, dit Lassurance (né en 1655) pour dessiner les plans de l’hôtel. Cette attribution reste toutefois discutée. Ce proche collaborateur de Jules Hardouin-Mansart, a participé à la construction du dôme des Invalides ainsi qu’à la ménagerie de Versailles. Il est l’architecte de l’Hôtel de Roquelaure (ministère de l’Écologie), du Palais-Bourbon (Assemblée nationale) ou encore de l’Hôtel de Lassay (résidence de la Présidente de l’Assemblée nationale).
Le marquis de Rothelin s’endette et dès 1713, il doit vendre l’hôtel à Antoine Hogguer.
Plan de l’Hôtel de Rothelin avant 1736. Jacques-François Blondel, Architecture françoise, ou Recueil des plans, élévations, coupes et profils des églises, maisons royales, palais, hôtels ; édifices les plus considérables de Paris.... T.1 - Source : Plan de l’Hôtel de Rothelin avant 1736. Jacques-François Blondel, Architecture françoise, ou Recueil des plans, élévations, coupes et profils des églises, maisons royales, palais, hôtels ; édifices les plus considérables de Paris.... T.1 Gallica.bnf.fr / BnF

Plan de l’Hôtel de Rothelin avant 1736. Jacques-François Blondel, Architecture françoise, ou Recueil des plans, élévations, coupes et profils des églises, maisons royales, palais, hôtels ; édifices les plus considérables de Paris.... T.1

Plan de l’Hôtel de Rothelin avant 1736. Jacques-François Blondel, Architecture françoise, ou Recueil des plans, élévations, coupes et profils des églises, maisons royales, palais, hôtels ; édifices les plus considérables de Paris.... T.1 - Plan de l’Hôtel de Rothelin avant 1736. Jacques-François Blondel, Architecture françoise, ou Recueil des plans, élévations, coupes et profils des églises, maisons royales, palais, hôtels ; édifices les plus considérables de Paris.... T.1 Gallica.bnf.fr / BnF
Antoine Hogguer de Saint-Gall (1682-1767), baron de Presles, est un banquier suisse.
A partir de 1704, et jusqu’à la fin du règne de Louis XIV, il prête des sommes considérables au Trésor royal pour financer les guerres. Les emprunts ne lui sont remboursés que très lentement ce qui le place dans une situation économique difficile. Pour y faire face et pour maintenir son train de vie, il loue l’Hôtel de Rothelin à des diplomates. Cela lui permet également de faire édifier en 1716 un hôtel particulier rue de Varenne (actuel ministère de l’Agriculture) où il installe sa maîtresse, Marie-Christine Desmarres, ancien modèle d’Antoine Watteau.
En 1735, il est en faillite et il est contraint de revendre l’Hôtel de Rothelin au maréchal de camp Thomas Legendre de Collandre (1673-1738), brigadier des armées du roi.
Plan de Turgot, 1710-1725 : vue sur l’hôtel de Rothelin et ses jardins - Source : Plan de Turgot, 1710-1725 : vue sur l’hôtel de Rothelin et ses jardins - Source : gallica.bnf.fr / BnF

Plan de Turgot, 1710-1725 : vue sur l’hôtel de Rothelin et ses jardins

Plan de Turgot, 1710-1725 : vue sur l’hôtel de Rothelin et ses jardins - Plan de Turgot, 1710-1725 : vue sur l’hôtel de Rothelin et ses jardins - Source : gallica.bnf.fr / BnF
Dès l’année suivante, en 1736, Thomas Legendre de Collandre vend l’hôtel à la princesse de Charolais,  Louise-Anne de Bourbon-Condé (1695-1758).
Fille de Louis III de Bourbon et de Louise-Françoise Bourbon (fille légitimée de Louis XIV et de Madame de Montespan), elle est également l’arrière-petite-fille du Grand Condé. Cette personnalité hors du commun ne s’est jamais mariée et a mené une vie assez libre.
Elle entreprend de nombreux travaux qui donne à l’hôtel son allure actuelle.
En 1758, à la mort de Mademoiselle de Charolais, son petit neveu, Louis-François-Joseph de Bourbon, futur prince de Conti, reçoit l’hôtel en héritage. Il y réside jusqu’en 1793, date à laquelle la loi révolutionnaire fait de l’hôtel un bien national. Louis de Bourbon émigre alors à Barcelone où il meurt en 1814.
Alexandre-François Caminade, Louise-Anne de Bourbon-Condé, Mademoiselle de Charolais (1695-1758), 1840. - Source : Alexandre-François Caminade, Louise-Anne de Bourbon-Condé, Mademoiselle de Charolais (1695-1758), 1840. Source : RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot

Alexandre-François Caminade, Louise-Anne de Bourbon-Condé, Mademoiselle de Charolais (1695-1758), 1840.

Alexandre-François Caminade, Louise-Anne de Bourbon-Condé, Mademoiselle de Charolais (1695-1758), 1840. - Alexandre-François Caminade, Louise-Anne de Bourbon-Condé, Mademoiselle de Charolais (1695-1758), 1840. Source : RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot
De 1793 à 1860, le ministère de l'Intérieur s'installe dans l’hôtel mais l’État n’en devient propriétaire qu’en 1825.
Plusieurs figures marquantes de l’histoire de France y ont travaillé :
  • Jean-Pierre Bachasson, comte de Montalivet : ministre de l’Intérieur de Napoléon entre 1809 et 1814 ;
  • Casimir Périer : Président du Conseil et ministre de l’Intérieur de Louis-Philippe entre 1831 et 1832, date à laquelle il meurt du choléra à l’hôtel ;
  • Adolphe Thiers : ministre de l’Intérieur de 1834 à 1836 (il deviendra ensuite Président de la République française entre 1871 et 1873) ;
  • Alexandre Ledru-Rollin : ministre de l’Intérieur du Gouvernement provisoire de 1848, date à laquelle il fait adopter par décret le suffrage universel masculin.
En 1860, le ministère quitte l’hôtel pour s’installer place Beauvau où il se situe toujours.
L'ambassade d'Autriche loue l’hôtel à partir d’avril 1861. L’Hôtel de Rothelin-Charolais devient alors l’un des pôles de la vie mondaine parisienne.
C'est dans ces salons que Pauline de Metternich, épouse de l’un des ambassadeurs, fait installer pour la première fois à Paris un sapin de Noël décoré comme en Alsace. Cette tradition se propage rapidement et après la guerre de 1870, le sapin de Noël n'est plus seulement une mode, mais devient une protestation muette contre l’occupation de l’Alsace par l’Allemagne.
Fête de Noël offerte par Mme la princesse de Metternich aux enfants pauvres du VIIe arrondissement - Source : Fête de Noël offerte par Mme la princesse de Metternich aux enfants pauvres du VIIe arrondissement. Source : L'univers illustré n°781, 1er janvier 1870.

Fête de Noël offerte par Mme la princesse de Metternich aux enfants pauvres du VIIe arrondissement

Fête de Noël offerte par Mme la princesse de Metternich aux enfants pauvres du VIIe arrondissement - Fête de Noël offerte par Mme la princesse de Metternich aux enfants pauvres du VIIe arrondissement. Source : L'univers illustré n°781, 1er janvier 1870.
L’ambassade quitte l’hôtel en 1869 à la suite de quoi l’État français reprend possession des lieux. Les ministères et grands corps de l’État s’y succèdent rapidement (ministère des Beaux-Arts, Conseil d’État, divers services du ministère de l’Intérieur, ministère des Postes et Télégraphes) avant que le ministère du Commerce et de l’Industrie ne s’y installe en 1887 pour 110 ans !
Le 1er décembre 1980, l'hôtel fait l’objet d’un classement partiel au titre des monuments historiques.
En 1997, le ministère du Commerce et de l’Industrie se fond dans le ministère des Finances et rejoint le site de Bercy nouvellement construit.
Depuis, plusieurs ministères se sont succédés. Aujourd’hui, il abrite le ministère chargé du Renouveau démocratique et le porte-parolat du Gouvernement ainsi que le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques.