Matthieu
Bonjour Madame la
Première ministre. Bonjour à toutes et bonjour à tous. On est ravis de vous
accueillir ici à Matignon. On ouvre aujourd'hui la 4e rencontre jeunesse de
Matignon qui s'inscrit dans un cycle qu'on a ouvert depuis le mois de janvier
et qui va nous conduire à un plan d'action pour les jeunes d'ici au printemps
prochain. Merci vraiment à chacun d'être là, merci au ministre qui nous font
l'honneur de leur présence et merci vraiment Madame la Première ministre de
nous accueillir. Sans plus attendre, je vous laisse le mot d’introduction.
Élisabeth BORNE
Merci beaucoup.
Bonjour à toutes et à tous. Moi, je suis très heureuse d'être là aujourd'hui
parce que quelles que soit les circonstances, moi j'ai une priorité, c'est vous
les jeunes. Donc Mathieu l'a dit, on veut bâtir une feuille de route complète
pour la jeunesse. Et aujourd’hui, on va parler d’un sujet fondamental. On a
parlé d’écologie, on a parlé de vie quotidienne, d’avenir professionnel.
Aujourd’hui, on va parler d’un sujet fondamental qui est l’égalité des chances.
L’égalité des chances, c’est essentiel. Moi, c’est ce qui me motive en
politique. De se dire que chacun doit pouvoir, quel que soit son origine sociale,
quelle que soit son origine, quelle que soit la couleur de sa peau, qu’il soit
une femme ou un homme, pouvoir accéder à tout le champ des possibles, qu’on lui
montre tout ce qu'il peut faire, et puis qu'on l'aide à réaliser ses rêves.
Donc on va aborder cela au travers de différents sujets. Et puis, je voudrais
vraiment remercier aussi l'Association Rêv’Elles. On vient d'échanger avec des
jeunes femmes formidables. Et moi, ça m'a beaucoup touché, beaucoup émue, et ça
donne vraiment aussi beaucoup de force de vous entendre, la façon dont vous
vous battez pour réaliser vos projets. En tout cas, voilà, je suis vraiment à
votre écoute et je le redis, je suis là pour vous, je suis là, pour que chaque
jeune puisse réaliser son projet, d'où qu'il vienne, quel que soit son origine
sociale, quelle que soit son origine, quel que soit l'endroit où il habite.
Merci Matthieu.
Matthieu
Merci beaucoup.
Alors la tradition lors de ces rencontres jeunesse à Matignon, c'est de
l'ouvrir par une carte blanche qu'on confie souvent à l'un d'entre vous qui
veut bien être volontaire. Alors aujourd'hui, c'est Dylan qui est derrière moi.
Dylan, toi tu présides une association qui s'appelle Une voix pour tous, pour
les lycées professionnels. Et tu veux nous dérouler quelques chiffres pour nous
interpeller sur différents points. Je te laisse la parole.
Dylan
Merci beaucoup
Matthieu. Bonjour à toutes et à tous. Madame la Madame la Première ministre,
Mesdames et Messieurs les ministres. Du coup, moi je préside une association
qui s'appelle Une voix pour tous, sur laquelle je reviendrai rapidement après,
mais on a effectivement voulu partager quelques chiffres qui montrent à quel
point l'inégalité est encore trop présente et trop forte. Alors on peut d'abord
voir qu'en France, il faut encore 6 générations pour sortir de la pauvreté. 6
générations pour sortir de la pauvreté via l'école qui est censée être le seul
lieu où on devrait tous être égaux et au même niveau dans la situation (phon).
5 fois plus d'élèves issus de milieux défavorisés, sont au niveau minimal de
lecture à 15 ans. Ça veut aussi dire qu'il y a une inégalité sur les
compétences et sur l'acquisition des savoirs. Qu'est-ce qu'on met en place
quand des parents n'ont pas les capacités ou n'ont pas le temps ou pas les
moyens, tout simplement d'accompagner leurs enfants comme il le faudrait ? Un
jeune sur deux, donc de 15 à 17 ans, est mal informé sur son orientation au
niveau des études et de l'orientation professionnelle. Et dans une enquête,
pardon, qu'on a sortie, on se rend aussi compte que 52 % des Français
considèrent que le milieu social joue aussi dans l’information face à cette
orientation. Il y a au moins 2 % de jeunes en situation de handicap dans
l'enseignement supérieur. Ce qui traduit aussi une forte inégalité à ce
niveau-là, et un manque de moyens pour leur permettre l'accès aux études. On a
9 % d'écart salarial entre les femmes et les hommes à poste équivalent et à
compétences égales. On sort d'une semaine justement qui posait la question de
l'égalité entre les femmes et les hommes. Et c'est aussi un sujet qu’il est
important de lever, et je pense qu’on en reviendra un peu plus tard. Des jeunes
mal informés au moment de l’orientation sont plus nombreux en zones rurales
qu'en l'agglomération parisienne. Ça montre aussi justement la difficulté
territoriale, qu’il y a de donner les mêmes moyens à tout le monde qu'importe
leur milieu d'origine, à la fois sociale mais aussi territoriale. Et enfin
300 000 jeunes qui sont sous la protection de l'enfance, c'est les jeunes qui
sont encore plus exposés aux difficultés sociales, aux difficultés économiques
qui sont abandonnés assez tôt à eux-mêmes, et il y a aussi un enjeu d'éducation
et de suivi pour ces jeunes-là. Du coup, comme Matthieu l’introduisait, moi,
j'ai fondé une association qui réunit des élèves et des anciens élèves de
lycées professionnels parce que finalement, tous les chiffres qu'on voit là se
concentrent dans ces voies-là. On a 600 000 élèves en lycée professionnel, dont
plus de la moitié sont issus de milieux défavorisés. Et donc quand on a lancé
la structure, on est tombé sur un certain nombre de chiffres, dont le neuvième
qui montre que lorsqu'on est issus de milieux défavorisés, on a deux fois plus
de chances d'être orienté dans la voie professionnelle. On a 169 % de plus
d'être orientés en CAP quand on est issu de milieux défavorisés, et ça montre
qu'il y a un vrai enjeu de reproduction sociale dans la voie professionnelle.
Et enfin un autre chiffre qui est assez marquant, et je pense qu'on peut tous
se poser la question en le voyant, c'est un rapport du ministère de l'éducation
nationale qui, en 2019, indique que 75 % des garçons issus d'Afrique
subsaharienne sont scolarisés dans la voie professionnelle. Ça fait trois
quarts. On voit aussi dans ce rapport qu'il y a plus de 50 % des garçons
d'origine portugaise et plus de 50 % des garçons d'origine turque qui sont
scolarisés dans la voie professionnelle. Donc, au-delà de la dimension
territoriale, au-delà de la dimension sociale, il y a aussi une dimension
manifestement ethnique dans l'orientation dans la voie professionnelle. Donc, ça
pose aussi l'enjeu de l'avenir, de la possibilité qu'on donne à tous les élèves
de réussir de la même façon et la façon dont on leur permet aussi de pouvoir
aller au-delà de ce qui leur est bloqué. Merci. [Applaudissements]
Matthieu
Merci beaucoup
Dylan, merci pour les applaudissements. Vous l’avez dit Madame la Première
ministre, on a eu la chance d’accueillir ce matin et ce midi à Matignon une
association merveilleuse qui s’appelle Rêv'Elles, qui accompagne des jeunes
femmes au collège, au lycée ou dans leurs études et plusieurs ont travaillé ce
matin sur des propositions. Et je voulais commencer peut-être par donner la
parole à l'une d'entre elles. Eva, tu ouvres le bal, on va te donner un micro,
je vais te donner le mien et je te laisse... Regarde juste à droite, tu as un
micro qui t'arrive. Et je te laisse ouvrir le bal pour nous proposer tes idées.
Eva BOURAMAN
Bonjour à tous. Je
m'appelle Eva BOURAMAN, j'ai 19 ans et je suis en première année de BUT MMI,
métiers du multimédia et de l'Internet. J'ai pu faire le constat qu'encore
aujourd'hui, en 2023, être une jeune fille et de plus venant de milieux
modestes, nous conduit à un déterminisme. Nous ne sommes pas encouragés à aller
vers les voies générales ni à aller vers des secteurs à dominante masculine.
J'aurais aimé que dès le collège, que l'on sème une graine à toutes les jeunes
filles qui permettraient de faire germer rêves et ambitions. Nous, les jeunes
filles, sommes contraintes de vivre et de se développer dans une société
sexiste. C'est pour cela que nous souhaitons une mise en place de dispositifs,
nous donnons les armes pour combattre cette société qui ne veut pas de femmes
puissantes et haut placées. Nous voulons des cours permettant de donner
confiance aux jeunes filles et de déconstruire les préjugés dans lesquels nous
avons grandi depuis notre venue au monde. Nous voulons des meilleurs cours
d’orientations et d'informations concernant les études supérieures, avec des
professionnels qui sont experts en la matière et non des jeunes professeurs qui
n'ont pas forcément connaissance de toutes les possibilités qui s'offrent à
nous. Car en effet, pour beaucoup, la conseillère d’orientation n'est pas assez
suffisante. Nous voulons, dès le collège et le lycée, connaître la variété des
formations et des débouchés à l'aide des intervenants afin d'avoir des
connaissances sur des domaines qui pourraient nous plaire, mais malheureusement
qui ne sont pas assez connus du… qui sont moins connus, pardon, du public. Nous
ne voulons pas des bourses selon notre choix d'études dans le supérieur, nous
voulons que le problème soit traité dès la racine, soit dès le collège et le
lycée. Car si peu de femmes s'orientent vers certains secteurs, ce n'est pas à
cause de nous, mais bien à cause de cette société. Merci beaucoup.
[Applaudissements]
Matthieu
Merci Eva, et bravo
de t’être jetée à l'eau. À côté, il y a Ensaf qui a aussi, je crois, une
proposition à nous partager.
Ensaf
J'ai 18 ans et je
suis Alumnae chez Rêv’Elles. Donc depuis la création de l'école, les méthodes
d'enseignement ont très peu évolué, alors que de nombreuses études
scientifiques expliquent qu'il est important de varier les méthodes
d'apprentissage. L'objectif est donc d'améliorer les conditions
d'apprentissage. Pour y procéder, nous avons proposé d'explorer différents
modèles d'apprentissage, notamment la classe inversée. La classe inversée
permet une participation active de la classe et une meilleure compréhension des
cours. Ceci éviterait une surcharge de la mémoire et facilitera l'apprentissage
des élèves. Une autre solution serait d'utiliser la technologie pour
systématiser les agendas personnalisés ou encore des tests ou des quiz à faire
en groupe ou individuellement. Merci pour votre écoute. [Applaudissements]
Matthieu
En face de toi, on
a aussi Linda. Linda, toi, tu es en collège, en troisième je crois. Et tu
voulais aussi, je crois que tu es accompagnée par une association qui s'appelle
ASAD, qui fait du soutien scolaire. Et je te laisse prendre le micro qui est
devant toi si tu veux pour nous dire un petit mot sur ton expérience et
éventuellement ce que tu as à nous proposer.
Linda
L’association ASAD,
en fait, quand je suis entrée à ASAD, je suis entrée ASAD en CE1. Et bah,
depuis que je suis à ASAD, enfin, ça nous aide beaucoup dans les… par exemple à
l'école, dans nos devoirs, dans des
choses, par exemple parfois pour mieux nous aider dans l’école, bah on fait des
choses plus avancées que notre niveau actuel. Ce qui nous permet que plus tard,
par exemple, si on est en cours, on aura déjà de la base des connaissances et
on pourra être meilleurs. Comme nous sommes dans un milieu défavorisé, par
exemple, le 93, du coup, c'est très difficile pour nous de bien se faire voir
par la société parce qu'il y a beaucoup de préjugés qui disent que les enfants
du 93 sont mal vus. Enfin, nous ne sommes pas de bons élèves alors que
vraiment, il y a vraiment des bons élèves, des bonnes personnes, par exemple,
bah à ASAD, pendant les vacances, nous avons des sorties qui nous emmènent au
musée dans plein d'endroits différents, par exemple. Il y a une année où on est
parti dans le musée du Louvre, je crois. Cette année, on est parti au Musée du
Quai-Branly. On part découvrir beaucoup de choses que tout seul nous n'aurions
pas pu faire parce que bah, on vient du 93 quoi, bah c'est mal vu. Et voilà.
Merci. Comment ?
Matthieu
Vous en êtes où
dans votre parcours aujourd’hui ?
Linda
Je suis en 3ème
dans un collège public de la Courneuve.
Matthieu
Merci. Merci Linda
pour ce témoignage. Juste derrière la Première ministre, on a aussi la chance
d'avoir un enseignant qui est là avec nous, qui nous écoute attentivement là
depuis tout à l'heure. Sylvain, toi, tu es enseignant à Romainville, sauf
erreur de ma part, en lycée professionnel. Et en écoutant ces suggestions sur
la classe inversée, des nouvelles méthodes pédagogiques, des soutiens
scolaires, je suppose que ça résonne un petit peu. Je te laisse la parole.
Sylvain
Bonjour à toutes et
à tous. Oui, effectivement, ça résonne forcément. D'autant plus que je suis
référent décrochage scolaire de mon établissement depuis 5 ans. Et donc
évidemment, ce sont des choses et des propositions qu'on met un peu en place
pour du raccrochage scolaire. Moi, ce qui me touche un peu, ce qui est
particulier quand on entend ces témoignages, c'est un peu le côté humain. Et
effectivement, du coup, on a envie d'aider au plus proche des élèves. Alors
effectivement, moi je suis professeur en Seine-Saint-Denis et c'est,
effectivement très compliqué, ce qui a été dit pour les enseignants, de
connaître toutes les filières, de faire de l'orientation, de faire de la
construction de parcours professionnel avec de la pédagogie différenciée au
plus proche des besoins de tous les élèves, et en fonction de tous et de tous
les parcours et tous les profils. C'est également très compliqué quand, voilà,
les conditions de travail des enseignants font qu'on doit se retrouver avec 30
élèves et 30 projets à monter, voilà. Ce qu'on essaye du coup de mettre en
place et des choses depuis, depuis la Seconde, on essaie de mettre en place des
choses assez tôt, depuis la 3ème, pour essayer de lier les parcours et de… et
voilà, d’avoir une meilleure orientation ainsi que de meilleurs liens avec les
professionnels des secteurs concernés par les filières professionnelles. Il
faut savoir qu’en voie professionnelle, il y a aussi une grande distinction
entre les différents territoires en France, les différentes filières. Voilà, on
n'est pas sur les mêmes types d'égalité des chances partout et on se rend
compte aussi que la construction d'un parcours, le fait d'avoir ensuite des
élèves autonomes, curieux et ouverts d'esprit, ça commence aussi dès la
maternelle. Au lycée finalement, on se rend compte que on arrive un peu tard
parce qu’à 15 ans, on a aussi envie de faire plein d'autres choses que de
découvrir seulement des métiers. On a envie de se construire en termes
d'identité. Et donc du coup, quand on commence dès la maternelle et quand on
voit, moi, je suis dans une filière particulière qui s'appelle SSP, soins et
services à la personne, c'est une filière où on fait beaucoup de visites, de
stages en école, en école maternelle, en centre de loisirs, en Ehpad, en
clinique auprès de… au plus proche des personnes qu’on dit dans le besoin,
c'est-à-dire les enfants et les personnes âgées ou les personnes en situation
de handicap. Bon, on a besoin de… On a besoin de forces vives. On a besoin de
personnes et de jeunes motivés. Mais on se rend compte qu'à travers ces
parcours-là, il y a une multiplicité de parcours d'orientation. Il y a une
multiplicité de… j'imagine, d'envies et de désirs quand on est jeune, de faire
ce qu'on a envie. Et c'est très difficile de le relier avec le travail de l'enseignant
qui n’est pas forcément très bien outillé, pas forcément très bien valorisé et
qui a encore besoin, peut-être un peu de moyens. Mais voilà, dès la maternelle
pour essayer d'encourager la communauté éducative, voilà, à être mieux
outillées et effectivement, pourquoi pas avoir la charge mentale de tester des
classes inversées, de tester d'autres processus qui peuvent marcher… quand on
fait la lutte contre le décrochage scolaire, tout simplement, mais de le faire
à l'intérieur de la classe et aussi de pouvoir, bah, accompagner aussi les
parents, accompagner les familles puisqu’il y a des élèves qui n'ont pas
forcément le soutien à la maison, qui ont aussi des situations compliquées, il
y a aussi les élèves qui ont complètement le soutien à la maison mais qui, du
coup, peut-être par facilité, vont faire autre chose, enfin voilà. On est sur
une diversité et une spécificité, voilà, qui fait qu'on a envie de croire en
cette égalité des chances avec des moyens qui commencent très tôt. Merci.
Élisabeth BORNE
(inaudible)
décrochage scolaire, les moyens qu’on vous donne permettront de (inaudible).
Sylvain
Alors sur le
décrochage scolaire, on a… on va dire qu'il y a, il y a deux, on peut dire, il
y trois piliers dans le décrochage scolaire. Mais les deux principaux, c'est
qu'on fait de la prévention et de la remédiation. Aujourd'hui, notamment les
régions notamment, l'Etat investit énormément dans la lutte contre le
décrochage scolaire. Mais du coup, elle arrive pour des actions de remédiation.
En termes de prévention, si les moyens étaient mis un peu à la base pour le
manque de personnel, pour les conditions de travail des enseignants, on aurait
moins de situations de décrochage, donc on aurait forcément moins de
remédiation à faire. Donc c'est bien la remédiation, ça permet d'aller déblayer
beaucoup, voilà, beaucoup d'histoires et d'essayer de redonner un peu de
réussite, enfin de la réussite et des chances à nos élèves. En lycée, c'est
peut-être un peu tard, enfin c'est compliqué et ça prend du coup beaucoup plus
de temps d'avoir d'avoir un élève. Moi, au quotidien, je rencontre des élèves
qui, en terminale à trois mois du bac, me disent qu'ils n'ont pas choisi cette
filière et qu’ils sont mal dans cette filière. Moi, je dis mais dans deux mois,
il y a les épreuves enfin il y a un moment en fait, mais voilà, tout au long de
leur parcours, il suffit que dans une équipe, il y ait un peu moins de… un
manque de personnel et du coup, voilà, on perd ces situations-là.
Matthieu
Merci beaucoup
Sylvain. Parmi les jeunes filles qui étaient là ce matin, on a aussi avec nous
Louane sur ma gauche. On va te donner aussi un micro. Et Louane, je crois que
tu avais aussi des propositions sur ce qui se passe potentiellement après le
collège ou après le lycée. Je t'en prie.
Louane
Bonjour à tous, je
m'appelle (inaudible) Louane, j'ai 18 ans et j'ai fait des études de sciences
politiques. Je suis honorée de me tenir devant vous pour représenter la voix de
la jeunesse. J'aimerais vous faire part des difficultés que nous rencontrons
dans l'enseignement supérieur. Beaucoup d'élèves ne peuvent plus vivre avec le
peu d'argent que la Bourse leur donne. Avec l'inflation, il est devenu
difficile de subvenir à nos besoins. De plus, il y a une inégalité entre les
régions de France. En effet, un étudiant de Paris du même échelon qu'un
étudiant de Tours aura un pouvoir d'achat plus bas et donc aura plus de
difficultés à subvenir à ses besoins. Ainsi, il faudrait indexer le montant de
la bourse au cadre de vie de l'étudiant. Dans un second temps, j'aimerais vous
faire part du sujet des logements Crous. De fait, beaucoup d'entre nous
souffrent du manque d'hygiène de ces établissements. Nous aimerions que les
logements existants soient rénovés pour être aux normes sanitaires et pour que
les étudiants s’y sentent mieux. J'aimerais également vous alerter sur le fait
que le besoin en ces structures est croissant et qu'il faut en construire
davantage. Les prix des loyers deviennent exorbitants, l'insécurité financière
touche les jeunes. Il est nécessaire que plus d'étudiants puissent y avoir
accès. Il est également nécessaire que ceux-ci se trouvent proche des
universités pour plus de sécurité et de praticité. Je vous remercie.
[Applaudissements]
Matthieu
Merci beaucoup
Louane. Peut-être un rebond, on a la chance d'avoir aussi dans la salle
quelqu'un qui est à la fois encore étudiant et aussi responsable d’une
association qui fait du soutien social à des jeunes qui en ont besoin. Mohamed,
je te laisse la parole.
Mohamed
Merci. Bonjour à
tous et à toutes. Je m'appelle Mohamed, j'ai 23 ans. Je viens d'un quartier
populaire dans le 20ᵉ de Paris et je suis engagé dans une association
d'éducation populaire, où nous, notre truc, c'est le concept suivant :
l'accompagnement global. En gros, l'idée, c'est que pour que les jeunes de nos
quartiers réussissent, il faut qu'on agisse sur tous les freins à leur
réussite. Et ça suppose que pour répondre à cet enjeu de l'égalité des chances,
bah, on agisse concrètement sur ces origines. Et ce qu'on se rend compte, c'est
que pour que ça marche, il faut que, en plus de l'accompagnement scolaire et à
l'insertion professionnelle qu'on propose, bah, on propose des réponses aux
problématiques sociales que rencontrent les familles. C'est pour ça qu'on met
en œuvre des dons alimentaires, des dons de vêtements, mais aussi
administratives. On accompagne les familles dans leurs démarches
administratives, les étudiants, dans le Crous, par exemple, dans leurs demandes
de bourses, leurs demandes de logements, leurs demandes de mobilité. Bref, tout
ça pour dire que l'idée, c'est de compartimenter la thématique pour essayer
d'en extraire les sources et d'agir dessus. Donc concrètement, moi,
aujourd'hui, mon message est le suivant : je pense qu'il faut qu'on repense
l'égalité des chances de manière globale pour pouvoir y répondre et pour
pouvoir répondre aux problématiques que rencontrent nos publics. Il faut qu'on
arrête de penser juste par le prisme de la solution de l'insertion. Il faut
vraiment qu'on « décompartimente » les actions et concrètement, ça
passe par une meilleure prise en compte de l'innovation sociale dans les appels
à projets et à faciliter en fait donc ce que j'appelle l'innovation sociale.
C'est-à-dire permettre que quand vous allez dans une association ou quand vous
allez dans une structure administrative, on vous promeuve… je ne sais pas, vous
allez dans le club de foot du quartier, on vous dise qu’on est en partenariat
ou on connaît telle association qui fait de l'insertion. Donc ça permettra aux
jeunes footeux de bénéficier d'un accompagnement et vice versa, aux jeunes qui
bénéficient d'un accompagnement de faire du foot. Voilà, je vous remercie de
votre écoute [Applaudissements].
Matthieu
Merci
Mamad. Monsieur le ministre des Solidarités, je pense que ça résonne au sujet
de l'accompagnement global et de traiter les freins sociaux le plus tôt
possible. Peut-être au rebond un petit mot.
Jean-Christophe
COMBE
Oui,
je n’aurais pas dit mieux. Ça résonne d'autant plus que… Vous le savez
peut-être mais avant d'être ministre, j'ai été directeur de la Croix-Rouge
française et c'est un combat que j'ai conduit pendant 12 ans à la Croix-Rouge
de favoriser l'égalité des chances, de lutter contre les inégalités de destin.
On est dans un pays où il y a quand même un gros déterminisme social et notre
rôle collectif — pas seulement celui du Gouvernement, pas seulement celui des
associations, mais de chaque citoyen — c'est vraiment de favoriser et de lever
l'ensemble de ces freins. Alors je ne peux que saluer vraiment votre action
parce que c'est vraiment ce qu'il faut faire à tous les âges et tout au long du
parcours, vraiment accompagner globalement les familles, et pas seulement
d'ailleurs, à partir de la maternelle, mais dès la petite enfance. Je suis
aussi ministre des Familles et de la petite enfance et c'est là que tout se
joue dans les 1 000 premiers jours. C'est là où on acquiert des compétences
psychosociales, où commence l'éducation et c'est là où on peut commencer à
lutter contre les inégalités de destin à la racine, effectivement avec un
accompagnement global. C'est l'accès à la santé, c'est l'accès à une
alimentation saine, c'est l'accès au logement et puis c'est l'accès à un
accompagnement et à une éducation auxquels chacun doit avoir droit. Et il
s'avère qu’encore aujourd'hui, malheureusement, et on le sait, les familles,
elles, n'ont pas toutes une égalité d'accès aux capacités et aux modes
d'accueil du jeune enfant et ça fait partie des missions prioritaires que m'a
confiée la Première ministre de pouvoir construire un service public de la
petite enfance pour accompagner les jeunes enfants dès le plus jeune âge et de
façon globale. Donc bravo et on est à côté de vous pour vous soutenir et
s'engager dans cette démarche d'accompagnement global.
Matthieu
Merci
beaucoup Monsieur le ministre. Juste à votre gauche, on a une spécialiste de
ces sujets de petite enfance et de l'égalité femme homme de manière plus large.
Maïmonatou, je te laisse la parole.
Maïmonatou MAR
Bonjour
à toutes, bonjour à tous. Madame la Première ministre, passée par le collège
Hector Berlioz, ancienne ZEP qui sert aujourd'hui de laboratoire à la mixité
sociale, j'ai pu, j'ai réussi à suivre ma passion pour les sciences et de
devenir ingénieure et docteur. Je parle de chance, tant les inégalités de destin,
en effet, sont fortes. Plus on me félicitait d'avoir pu emprunter la voie
royale, plus je percevais l'aveu de l'échec d'un système éducatif public. Puis,
en entrant dans la vie active, le plafond de verre m'a fait douter quant à mon
avenir en France. Et pire encore, j'ai pris conscience de l'absence de
propositions d'avenir professionnel pour ma mère, Aminata DIOUF, qui était
garde d'enfants aux compétences multiples, complexes et recherchées et qui
travaillait 50 heures par semaine pour veiller sur ce qu'il y avait de plus
cher pour les parents. Comment croire alors à la méritocratie qui ne reconnaît
pas les essentiels ? Aujourd'hui, justement, à l'heure où la pénurie de
professionnels dans la petite enfance est criante, on appelle tous les jeunes à
se découvrir une vocation dans le prendre soin de l'autre. Mais d'abord, ces
métiers précaires, qui n'attirent que les précaires, doivent voir leur modèle
évoluer. D'autant qu'ils resteront incontournables d'après toutes les études
sur le futur du travail. En 2017, ma mère, clairvoyante, était déterminée à
reconnaître son métier et à le faire reconnaître. Je la rejoignais alors pour
cofonder l'association Gribouilli, une association qui réunit 1 000 gardes
d'enfants aujourd'hui invisibles au mieux, esclaves modernes au pire. Avec
elle, des associations, des collectivités, la Cnaf et bientôt France Travail,
nous réinventons ce secteur pour faire de l'emploi décent et de la mobilité
socioprofessionnelle les vecteurs d'émancipation et de cohésion sociale. Pour la
première fois, nous avons créé des évolutions professionnelles pour elles. Ce
modèle d'avenir, qui est multi récompensé jusqu'à l'international, a fait de
nous, effectivement, une des structures soutenues par la Fondation Obama. Mais
Madame la Première ministre, aujourd'hui, c'est de votre concours dont nous
avons besoin. Au colloque que nous avons co-organisé au Sénat avec #leplus
important et (inaudible), la prix Nobel Esther DUFLO déclarait : « Investir
dans les professionnels de la petite enfance est une solution triplement
gagnante ». Vous l'aurez compris, pour les professionnels, les enfants et les
parents. En effet, je vous ai parlé de ma chance. Ma mère, divorcée à l'âge de
24 ans avec 3 petites filles, avait choisi de renoncer à son insertion post-CAP.
Oui, car faire carrière dans la vente aurait signifié de nous laisser seuls
devant la télé, alors qu'un modeste mi-temps à la cantine scolaire lui
permettait d'investir dans notre soutien éducatif et émotionnel. Ce pari était
gagnant pour moi, mais il était perdant pour elle. Des dilemmes et de la
détresse, c’est souvent ce que nous entendons en accompagnant des centaines de
jeunes parents, chez Gribouilli. Aujourd'hui, 200 000 places manquent pour les
bébés, poussant ainsi et surtout des femmes, des jeunes femmes à démissionner,
renoncer à des opportunités de carrière ou d'insertion. Parce que si la
jeunesse hésite à fonder des familles pour sauver la planète, elle hésite aussi
par manque de soutien de l'Etat. Et comme dans un rite initiatique, on quitte
la jeunesse pour entrer dans l'âge mûr en parcourant le parcours du combattant.
Madame la Première ministre, alors que le service public effectivement de la
petite enfance s'apprête à être lancé après 3 quinquennats, je constate un
inquiétant rétropédalage de nombreuses institutions, sur le droit opposable,
sur la stratégie de qualité éducative, sur le maillage territorial pour les
relais et le congé deuxième parent. Chez Gribouilli et ailleurs, nous avons
développé des services de garde innovants pour les familles sans solution. Eux
aussi seraient exclus de ce service public. Les objectifs d'égalité des chances
dès les premiers pas fixés par le président de la République ne seraient pas
atteints, alors que la France a pourtant les moyens de rattraper son retard
vis-à-vis des autres pays de l'OCDE. Si elle concrétise maintenant cet
investissement social dont les effets seront mesurables dès l'entrée en
maternelle. Madame la Première ministre, ce service public concerne au moins
tous les ministres qui sont présents ici aujourd'hui en réalité, et autant
d'institutions qui doivent s'aligner autour d'une feuille de route unique, nous
impliquant nous aussi les acteurs publics et privés qui portons à bout de bras
et à bout de souffle les briques de la refondation. Accepteriez-vous de nous
inviter ici à Matignon pour des Assises de manière à ce qu'on puisse réussir le
lancement de ce service public qui manque tant à la France ? Merci.
Élisabeth BORNE
Alors
très volontiers de recevoir tous ceux qui peuvent nous aider à bien construire
ce service public de la petite enfance, vous l'avez dit. Ça concerne plusieurs
ministres. Ça concerne des collectivités aussi, des départements au titre de la
PMI, évidemment les communes qui sont en première ligne. C'est un enjeu majeur,
comme vous l'avez souligné, de pouvoir, pour les femmes, poursuivre leur
parcours professionnel en ayant une solution de garde où on a confiance sur le
fait que son enfant est bien pris en charge. Après, je pense que ça peut être
effectivement positif pour des enfants, si on peut leur donner un environnement
qui les aide aussi à se construire tout petit et ça renvoie au travail qui a
été fait dans le précédent quinquennat sur les mi-jours. Donc clairement on
peut compter sur moi. On cherche à bâtir le meilleur service public de la
petite enfance avec tous ceux qui peuvent nous y aider. Peut-être, vous avez
pointé aussi quelque chose qui me semble important, c'est qu'on a besoin que
des gens s'engagent dans ces métiers. Et tous ces métiers de l'accompagnement,
du soin aujourd'hui, alors ils sont insuffisamment connus, je pense. Et
surtout, je pense qu'on n'a pas encore su, mais c'est un chantier énorme que
j'ai demandé à mes ministres de conduire tous ensemble, à proposer des parcours
professionnels. Je pense que l'une des difficultés peut être dans notre pays,
c'est le fait que l'on peut difficilement être enthousiaste d'aller à son
travail le matin si pendant des années, on fait le même métier, souvent payé
près du SMIC, et qu'il faut aussi, si on veut attirer vers ces métiers et vers
d'autres, qu'on soit capable, ça concerne aussi les employeurs, il faut se
parler franchement, de proposer des vrais parcours professionnels, de donner
des perspectives quand on s'engage dans une filière. Vous avez sans doute en
tête peut-être qu’il y a 5 conventions collectives d’où statue… Bon, donc c’est
un domaine qui extrêmement compliqué et qui, clairement, ne donne pas de
lisibilité sur la vision qu’on peut avoir de sa vie professionnelle quand on
s’engage dans ces métiers. C’est un chantier que je porte aussi et sur lequel
je pense que c’est essentiel d’aboutir. On peut inventer le meilleur service
public de la petite enfance. Si on n’arrive pas à motiver des jeunes ou des
moins jeunes à s’engager dans ces métiers, on aura raté la cible aussi, donc
travaillons ensemble là-dessus. [Applaudissements]
Matthieu
Merci beaucoup
Madame la Première ministre. On a parlé via le sujet de la garde d'enfant, des
problématiques d'attractivité et d'insertion professionnelle. C'est aussi des
sujets qui se posent en matière d'égalité des chances. Derrière vous, sur votre
gauche, on a Mamad qui est à la fois adjoint au maire en charge de l'emploi à
Cachan et également coach Mamad sur les réseaux sociaux. Tu connais très bien
les problématiques de jeunesse et les problèmes qui peuvent se poser pour
l'insertion professionnelle, en particulier pour ceux qui sont issus des
quartiers prioritaires de la politique de la ville. Je te laisse peut-être nous
dire un mot sur ce que tu veux.
Mohammadou GALOKO (Mamad)
Bonjour à tous.
Donc je vais essayer d'être très rapide et très factuel. Donc je suis élu
municipal effectivement et aussi créateur de contenu. Et nous, on a pris un
dispositif, le PRIJ, projet régional d'insertion jeunesse. À Cachan, l'objectif
de l'Etat, c'était de toucher 20 jeunes, donc 20 jeunes qui sont sortis
complètement des radars. Ça veut dire qu'ils ne sont ni à l'école, ni dans les
missions locales, ni repérés par les différentes associations. L'objectif,
c'était 20 jeunes, on en a eu 45. Pourquoi on en a eu 45 ? Parce qu'en fait, on
s'est adapté à la jeunesse. La jeunesse, elle, n'est pas forcément là où on
pense qu'elle est. Notre référent de parcours, par exemple, c'est quelqu'un qui
a été recruté et qui n'hésite pas à faire ce qui doit être fait, même si ça
sort de son cadre, ça sort de sa mission. Ça veut dire qu'il va chercher les
jeunes en bas des bâtiments, dans les chichas, là où ils sont et c'est pour ça
qu'on a réussi à avoir ces résultats-là. Je pense qu'aujourd'hui, si on veut
toucher les jeunes qui sont le plus éloignés, parce qu'aujourd'hui je vois que
c'est beaucoup de jeunes mais qui sont déjà dans les associations, beaucoup
d'étudiants, etc., ce qui est une très bonne chose, il faut qu'ils s'engagent
et c'est très bien, il faut continuer. Mais il y a aussi ceux à qui ça ne parle
absolument pas, tout ce qu'on est en train de dire parce que malheureusement,
ils n'ont plus confiance. Comment on arrive à donner confiance à des personnes
qui ne croient plus en rien ? Comment on arrive à faire en sorte
qu’aujourd'hui, tout le monde se sente concerné par un combat qui est
normalement légitime et qui est normalement « entendable » par tout
le monde ? C'est la question aujourd'hui que je vous pose à vous. Maintenant,
nous, on est malheureusement les premiers maillons, effectivement, dans les
communes, on essaie de faire avec le peu de moyens qu'on a, et, bah, j'espère
qu'on aura de plus en plus d'aide pour atteindre ces objectifs. Et soit dit en
passant, on parlait d'égalité des chances juste avant par rapport aux
étudiants. Nous, on a la chance d'avoir un campus étudiant de 8000 étudiants
avec des écoles magnifiques, une école d'intelligence artificielle, une autre
école qui s'appelle EPF. Et on arrive en fait à créer de la mixité avec ces
personnes, ces étudiants qui sont magnifiques, qui se déplacent dans les
quartiers pour justement sensibiliser sur l'entrepreneuriat, par exemple, sur
l'engagement citoyen. Et je pense qu'avec plus de mixité dans ces différentes…
enfin avec plus d'échanges des différents publics, on peut arriver à obtenir
quelque chose de beau. Et notre jeunesse a des qualités, il faut leur faire
confiance. Et peu importe ce qu'on fait, si on ne les inclut pas dès le départ,
ça risque d'être compliqué. Donc voilà.
Élisabeth BORNE
Peut-être, j’aurai
une question. Les jeunes du PRIJ, c’est de 16-25, non ?
Mohammadou GALOKO (Mamad)
Alors on a fait le…
Excusez-moi. Alors nous, justement, en parlant d'innovation et
d'expérimentation, on a fait le choix d'aller au-delà de 25 ans et de faire du
16-30 ans. Et on a réussi à avoir autour de ce PRIJ, des acteurs économiques et
beaucoup d'entreprises qui s'investissent pour justement avoir des sorties
positives. Parce que si on ne travaille pas justement avec ces partenaires-là,
malheureusement, on ne va faire que du vent.
Élisabeth BORNE
Et du coup, vous
vous êtes raccroché au contrat d'engagement jeune ?
Mohammadou GALOKO (Mamad)
Exactement, avec
les missions locales et Pôle emploi. Mais vous connaissez la situation mieux
que moi par rapport aux missions locales qui sont sous-dotées maintenant, avec
une réduction des budgets, donc, enfin par rapport à la région.
Intervenant non identifié
(inaudible).
Mohammadou GALOKO (Mamad)
Ah, (inaudible)
Merci.
Matthieu
On parlait de la
région. Merci. Merci beaucoup. Mamad, tu as en face juste devant toi le
ministre de la Ville et du Logement. Cher Olivier KLEIN, peut-être un petit mot
en rebond.
Olivier KLEIN
Bonjour à tous !
Merci… Ça marche ? Oui. Il y a beaucoup de sujets qui touchent le ministre de
la Ville et du Logement et l'élu de Seine-Saint-Denis, notamment dans la
première partie, et je pense que quand
on habite les départements, quand on habite les quartiers populaires, il ne
faut surtout pas réduire ses ambitions et vraiment penser que c'est là que la
République se construit. Un mot sur le logement des étudiants. Avec Sylvie
RETAILLEAU, on a lancé un travail particulier. Parce que oui, il y a une
urgence, les Crous, la refonte du logement étudiant, la disponibilité des
logements étudiants à proximité des universités et la qualité de ce logement.
On a tous eu un certain nombre d'images assez insupportables et avec la
ministre, on est extrêmement mobilisé là-dessus. La question de la petite
enfance avec le président de la République et la Première ministre dans ce
qu'on appelle un quartier 2030, il y a une vraie ambition, un vrai pilier
autour de la petite enfance. On est persuadé, comme vous, Madame, que tout se
joue dans les premiers jours, les premières années, la passerelle entre la
petite enfance, l'entrée en maternelle et en petites sections. Et ça fera
partie des sujets sur lesquels on souhaite travailler : la formation des
assistantes maternelles dans les quartiers populaires, le lieu d'accueil, c'est
quand on habite dans les quartiers populaires, on le sait, ce n'est pas facile
d’accueillir des enfants quand on habite dans une tour et c'est un vrai sujet.
On veut travailler sur les MAM, les réseaux d'assistantes maternelles. Au-delà
des accueils classiques, crèches collectives, crèches familiales, il y a à
reconstruire un réseau, à former, comme vous l'avez dit. Ça sera vraiment, je
crois, un des piliers importants de Quartiers 2030. Et puis, et puis, comme
cela vient d'être redit, les missions locales jouent un rôle extrêmement
important dans nos quartiers. On travaille aussi avec le ministre du Travail,
Olivier DUSSOPT, dans le cas de France Travail, à des réflexions pour que les
dispositifs lancés dans le quinquennat précédent 1 jeune, 1 solution continuent
à jouer leur rôle de manière plus forte ; ceux que vous appelez les invisibles
dans nos quartiers, qui sont pas si invisibles que ça, parce que très nombreux
et sur lesquels il faut qu'on mette l'accent avec tous les acteurs,
re-réfléchir à ce qu'est la prévention spécialisée et ce qu'elle doit être dans
nos quartiers, le rôle des des missions locales. Moi, j'ai été souvent
président de Mission locale comme élu local. J'ai vu aussi comment les
dispositifs lancés par la Première ministre dans sa vie précédente et elle est
venue à la Mission locale de Clichy, à la mission locale de la (inaudible), ont
changé les relations entre la Mission locale. Souvent, quand étaient élus, la
Mission locale, c'était un peu comme le conseiller d'orientation, souvent le
mauvais objet. Et aujourd'hui, je trouve que les relations ont profondément
changé. Parce qu'il y a le CEJ, parce qu'il y a le PRIJ, parce qu'il y a eu la
Garantie jeunes. Mais il ne faut pas s'arrêter là-dessus. C'est pour ça que ça
a été dit aussi, il faut construire des relations avec les entreprises de nos
quartiers avec… faire venir aussi des entreprises pour pouvoir marquer l’essai,
si j'ose dire, parce qu'il n'y a rien de pire que de rentrer dans le CEJ et
puis ensuite retourner là où on était. Et donc c'est vraiment un enjeu majeur.
Et c'est vrai que nos quartiers ne sont pas égaux dans cette situation-là,
parce qu'il y a ceux qui sont proches des transports, il y a ceux qui sont
éloignés, il y a ceux qui sont proches de pôle universitaire, il y a ceux qui
sont proches de grands pôles économiques. Et le rôle du ministre du Logement,
c'est aussi de réduire ces fractures territoriales et y travailler avec les
élus locaux et avec les moyens qu'on souhaite donner avec la Première ministre
dans le Quartier 2030. Et je suis désolé, je devrais vous quitter et je n'aime
pas du tout ça. Mais on fait à peu près le même exercice dans la ville dont
j'étais maire. On fait un CNR décentralisé avec les jeunes de Clichy-sous-Bois
et j'ai envie de les écouter. Voilà [Applaudissements].
Matthieu
Merci Monsieur le
ministre. Peut-être en face, Monsieur le ministre de l'Éducation nationale
également. Cher Pap NDIAYE, vous voulez dire un mot ?
Pap NDIAYE
Oui, merci. Merci.
Bonjour à vous toutes et à vous tous. Bien sûr qu’en matière d'égalité des
chances, l'École est centrale et nous pouvons, nous devons faire mieux. Vous
savez qu'en comparaison internationale, l'école française ne se situe pas
exactement bien lorsqu'il s'agit de mesurer la manière dont nous effaçons les
inégalités de naissance. Les inégalités de naissance, elles, ne sont pas si
bien effacées que ça. Elles sont parfois reproduites, parfois même un peu
accentuées. Ça, c'est un constat objectif que l'on fait, et c'est évidemment
une priorité que de faire mieux. Et on doit faire mieux. On le doit pour la
jeunesse de notre pays. On le doit pour simplement consolider la République.
Parce que la République, elle est fragilisée lorsque les promesses de l'école
ne sont pas tenues. Alors pour cela, on agit à l'échelle générale, notamment en
travaillant sur la mixité sociale et scolaire. Vous savez que c'est une des
priorités du ministère de l'Éducation nationale. On va proposer des mesures
assez fortes en la matière dans quelques semaines. Et puis j'ai entendu des
choses évidemment très importantes, intéressantes en matière d'orientation, de
découverte des métiers. Ça provenait notamment en première partie, sur le fait
qu'effectivement la découverte des métiers, pendant longtemps, elle a été très
tardive dans les parcours scolaires. Donc on propose maintenant, à partir de la
5ème, sous forme expérimentale, des demi-journées de découverte des métiers qui
doivent se prolonger ensuite vers la 4ème et la 3ème. Un des sujets aussi,
c'est les stages de 3ème, qui sont souvent très inégalitaires parce qu'ils
dépendent de la capacité des familles à trouver les bons stages. Et donc, pour
moi, ces stages de 3ème aussi doivent être vraiment travaillés pour que ce soit
vraiment une manière d'ouvrir le champ des possibles, de découvrir des métiers
bien au-delà de ce que l'on sait, puisque les jeunes en troisième, ils sont
capables de nommer à peu près une dizaine de métiers et on veut que ce soit au
moins 5 fois plus. J'ai entendu des choses très importantes aussi de ma
voisine, par exemple, en matière de lutte contre les stéréotypes ; lutte contre
les stéréotypes, j'ajoute lutte contre les discriminations, lutte contre toutes
les formes de racisme, d'antisémitisme, de haine anti-LGBT. Avec la Première
ministre et avec Isabelle ROME qui en parlera peut-être, on est vraiment aussi
très mobilisés là-dessus. Il y a un plan qui a été lancé. C'est aussi dans les
fonctions que j'ai eu avant celle que j'exerce aujourd'hui, c'était une de mes…
c'est toujours une de mes spécialités, et on doit vraiment faire mieux, à la
fois en matière pédagogique, enseigner, bien entendu, c'est la première mission
de l'école mais veiller aussi à ce que les stages, veiller aussi à ce que les
parcours professionnels ne soient pas limités pour une partie de notre jeunesse
parce qu'on n'a pas la bonne adresse, parce qu'on n'a pas la bonne couleur de
peau, parce qu'on n'a pas la bonne orientation sexuelle, que sais-je. Ça, je
trouve ça absolument… c'est intolérable, en fait. Ce genre de situation, il
faut reconnaître qu'on a évidemment des progrès à faire. J'ai aussi entendu des
choses intéressantes de la part du professeur, cher collègue de Romainville, à
propos des projets et de ce que vous faites dans votre lycée professionnel. Je
peux peut-être vous inviter à développer un projet CNR, notre école, faisons-le
ensemble. Il y en a plus de 2 700 aujourd'hui que l'on finance. Et donc il y a
notamment des professeurs de lycée professionnel que j'ai rencontrés hier, qui
ont développé des projets autour de l'orientation, de la conduite des stages,
de tout ce qui fait que nos élèves peuvent ensuite s'insérer sur le marché du
travail. C'est aussi une manière de changer l'école que de faire confiance aux
acteurs, aux communautés éducatives, aux professeurs. Et puis, je terminerai
enfin par un mot, même si c'est en dehors du champ du ministère de l'Éducation
nationale, sur les bourses universitaires. Alors je ne sais plus qui a fait
allusion, je crois que c'était, oui vous, effectivement, simplement pour vous
dire qu'on est très conscients des difficultés financières des étudiants qui se
sont accrues ces dernières années. Aucun doute là-dessus. Et donc, il y a un
grand chantier de réforme des bourses universitaires. C'est Sylvie RETAILLEAU,
la ministre de la Recherche et de l'Enseignement supérieur, qui y travaille de
façon très, très intense depuis plusieurs mois. Donc ça, c'est un élément
essentiel. J'ajoute aussi pour les étudiants, la question de la santé mentale,
enfin, la question de la santé en règle générale, qui s'est très fortement
dégradée avec la crise sanitaire. Donc, on a évidemment du pain sur la planche.
Ce n'est pas moi qui vais vous dire que tout va bien en matière d'égalité des
chances. Ce qui est sûr, c'est qu'il faut y aller de manière extrêmement
déterminée et qu'il faut absolument lutter contre les déterminismes sociaux,
contre les inégalités de naissance et puis contre, au fond, toutes ces formes
de discriminations qui paralysent une partie de notre jeunesse. Pour moi, c'est
la priorité, peut-être de l'Education nationale aujourd'hui avec la question du
niveau scolaire. [Applaudissements]
Matthieu
Merci beaucoup. Je
crois que la ministre de l'Égalité entre les femmes et les hommes, vous voulez
réagir également, chère Isabelle ROME.
Isabelle ROME
Oui. Bonjour à
toutes et à tous. Alors évidemment, lutter contre les préjugés, lutter contre
les stéréotypes. Moi, j'ai vraiment bien entendu cela et j’allais dire, cela
correspond vraiment aux actions que je mène au sein de mon Ministère qui a une
vocation à travailler avec tous les autres auprès de la Première ministre et
qui engage, en fait, la plupart des ministres sur ces sujets. Peut-être
s'agissant justement de la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et les
discriminations, puisque nous avons souhaité cette année, lors du lancement de
ce plan national de lutte contre le racisme et l'antisémitisme, rajouter aussi,
avec la Première ministre, donc la lutte contre les discriminations liées à l'origine,
et donc d'inclure aussi un certain nombre de mesures liées à ces
discriminations. Alors, peut-être pour indiquer que des actions vont être
menées dans le cadre de ce plan, s'agissant par exemple de la formation des
personnels éducatifs donc en la matière, mais aussi de tous les personnels de
la fonction publique. Et puis aussi en matière de discrimination, indiquer par
exemple que nous allons multiplier les actions de testing, par exemple pour lutter contre les discriminations liées à
l'emploi notamment. Lutter contre les stéréotypes, pour moi, c'est aussi très
important, davantage là peut-être en tant que ministre en charge de l'Égalité
entre les femmes et les hommes, même si on voit bien que les stéréotypes, ils
ne concernent pas seulement l'égalité entre les femmes et les hommes, mais
plein de représentations que nous pouvons avoir. Mais c’est vrai que
l'existence de ces stéréotypes va conditionner souvent les choix aussi des
jeunes filles et des jeunes garçons dans les métiers, dans les filières qu'ils
vont ensuite emprunter. Et on voit qu'il est important, justement, de leur
faire mieux, je crois que ça a été dit, de leur faire mieux connaître les
métiers pour éviter aussi que les filles aillent toujours vers les mêmes
métiers, et notamment s'éloignent des filières scientifiques, par exemple, qui
sont des des filières qui sont souvent porteuses d'avenir et qui sont qui
proposent des métiers aussi souvent plus rémunérateurs et qu'elles ont tendance
à aller vers les métiers du soin qui, comme vous l'avez rappelé, sont moins
rémunérateurs. Donc là-dessus nous, nous allons aussi travailler, et notamment
donc avec le ministre de l'Education nationale et la ministre de l'Enseignement
supérieur. Et puis aussi dans le plan que nous avons lancé le 8 mars avec la
Première ministre sur l'égalité femmes-hommes et prévu aussi la mise en place
d'une plateforme de mise en relation donc des entreprises avec… enfin l'école
avec les entreprises pour permettre aussi aux étudiants, enfin aux élèves
d'avoir, en classe de troisième, des accès aux stages de manière plus aisée.
Voilà les quelques mots que je voulais ajouter.
Matthieu
Merci madame la
ministre. On a parlé des stéréotypes. Parfois, ils se traduisent par du
harcèlement à l'école. Élian, sur ma gauche, toi, tu as subi ça, tu as créé une
association. Je te laisse nous dire quelques mots.
Élian POTIER
Bonjour à tous.
Madame la Première Ministre, Mesdames, Messieurs les ministres et Mesdames,
Messieurs. Donc je m'appelle Élian Pothier, je suis en BTS SAM, support à
l'action managériale deuxième année en troisième prépa professionnelle. J'ai
été victime de harcèlement parce que j'ai assumé très tôt mon homosexualité et
pour moi, ça ne me posait ni problème à moi, ni à mes parents. Et donc dans ce
cas, ça ne posait problème à personne. J'ai dû quitter cet établissement parce
que mes camarades me harcelaient sans cesse en classe, dans la cour de
récréation, dans les toilettes, aux yeux de certains profs. Je vous parle de ça
il y a 5 ans, maintenant, ça a évidemment évolué et j'en suis conscient. J'ai
dû quitter mon établissement un an après mon harcèlement parce que je pensais
que ça allait s'arrêter. Je pensais que… bah, les gens qui venaient m'embêter,
me harceler tout le temps, allaient se calmer. Malheureusement, ça a continué
et j'ai dû partir un an après, au début de ma Seconde, parce que personne ne
voulait me protéger. J'ai dû partir pour ma sécurité et aussi pour continuer ma
formation, continuer mes cours en sérénité ; donc je suis allé ensuite à
Paris dans le 6ème arrondissement où tout s’est très bien passé et où j’ai pu
avoir mon bac sans problème et évoluer dans un monde parfait pour moi et là où
j’étais tranquille. En 2019 — je parle de ça du coup — en 2018, en 2019, un an
après, j’ai voulu créer une association parce que je me suis tout simplement
dit que soit je restais comme ça à me morfondre dans mon coin et à pleurer, ou
soit il fallait que je me lève et que je lutte contre ça. Et on va dire que
qu'aujourd'hui, c'est un peu mon médicament, lutter contre le harcèlement, me
déplacer dans les établissements scolaires pour parler aux jeunes, parler aux
collégiens, leur dire que le harcèlement, ça existe partout, dans tous les
établissements et que c’est puni et qu'il faut en parler et surtout pas le
garder, comme j'ai pu le garder en pensant que ça allait s'arrêter. Je me
déplace dans les établissements scolaires, donc chaque chef d'établissement me
contacte sur les réseaux sociaux. Je me déplace, je fais des ateliers avec les
collégiens principalement. Donc on va aborder 3 thèmes, on va aborder la
définition du harcèlement. Qu'est-ce que c'est la définition réelle du
harcèlement ? On va parler des différents acteurs lors d'une situation de lutte
contre le harcèlement. Et enfin, on va parler des différents lieux, les lieux
les plus propices au harcèlement. Donc ça se passe sous 1 heure par classe.
Généralement, ces élèves sont très source de proposition et se sentent vraiment
très investis. En guise d'exemple, quand je leur demande qui souhaite être
ambassadeur de lutte contre le harcèlement dans cette classe, j'ai plus de la
moitié de la classe qui se lève. Donc ça montre vraiment l'investissement de
ces jeunes et leur envie de changer ce monde. Et enfin, j'ai quelques
suggestions à vous proposer, évidemment, et ça serait de multiplier le nombre
d'ambassadeurs — donc là notamment, je m'adresse au ministre de l'Éducation
nationale et à vous, Madame la Première ministre — donc, de multiplier le
nombre d'ambassadeurs de lutte contre le harcèlement. Et pour moi, je pense
qu'il serait préférable d'avoir un ambassadeur au minimum de lutte contre le
harcèlement par chaque niveau, en commençant par un, peut-être plus si
possible, et enfin de contrôler surtout la bonne mise en place de cette mesure.
Je sais qu'elle est pas mal contrôlée, mais peut-être renforcer ce contrôle qui
pour moi n'est pas suffisant. Enfin, en plus du programme phare — Voilà,
pardon, excusez-moi — en plus du programme phare de demander aux établissements
et donc aux jeunes de trouver d'autres moyens pour dénoncer une situation de
harcèlement. Je vous donne en guise d'exemple, je pense à un établissement que
j'ai rencontré en début d'année dans la commune de Vassy. En fait, le chef
d'établissement a donné la possibilité aux jeunes de pouvoir signaler n'importe
quelle situation de harcèlement à travers un petit message que l'on met dans
une boîte aux lettres au sein de l'administration. Donc c’est les jeunes qui
ont trouvé cette idée et que je trouve merveilleuse pour quand même pour pouvoir
dénoncer une situation de harcèlement. Alors il y a encore d'autres exemples,
mais j'ai retenu celle-ci qui me paraissait vraiment intéressante. Donc
anonymement ou non. Et enfin, en ce moment, on parle beaucoup… souvent de la
place des harceleurs au sein de l'établissement scolaire et pour ma part, je
pense qu'il serait important de privilégier le départ du harceleur que de la
victime lorsque la situation demande et lorsque la situation n'a
malheureusement pas été traitée dès la racine. Parce qu'on sait qu'aujourd'hui,
le plus simple à faire, c'est de traiter le harcèlement dès la racine. Merci
beaucoup [Applaudissements].
Matthieu
Merci beaucoup
Elian. Toi, tu fais des visites dans les établissements pour sensibiliser. Je
crois qu'il y a deux jeunes femmes de l'association Rêv'Elles qui voulaient
aussi prendre la parole sur ce sujet suite… sur ce sujet de la sensibilisation
aux ateliers du matin. Je vous laisse nous décrire tout ça.
Zafira
Bonjour, je suis
Zafira, j'ai 19 ans et je suis étudiante. L'égalité, l'écoute et le respect
d'autrui ; des valeurs simples et importantes pour moi. Malheureusement, j'ai
souvent du mal à les retrouver au quotidien. Aujourd'hui, si je suis ici, c'est
pour pouvoir les retrouver et vous présenter ma proposition pour lutter contre
toute discrimination, le racisme et le sexisme. Je suis convaincu que la
solution, c'est l'éducation. Je propose alors qu'on mette en place des ateliers
d'éducation et de sensibilisation à l'islamophobie, l'homophobie, le racisme,
le sexisme et contre tout type d’harcèlement : sexuel, scolaire, etc., et
d'autres thématiques importantes s'il le faut. Les intervenants de ces ateliers
devront être des personnes spécialisées dans le domaine, faisant partie par
exemple, d'associations qui luttent justement contre ces injustices pour que
les idées soient mieux expliquées et comprises par tous. Ces ateliers devront
être rendus obligatoires du collège jusqu'aux études supérieures et dans les
milieux professionnels chaque année. En cas d'absence à ces ateliers, il
faudrait les compter comme matières non-validées pour les étudiants et marquer
un manque de formation pour les employés. Si nous sommes une nation, une et
indivisible, nous ne devons pas rester passif à la haine.
Liliah TUILE (phon)
Je vais me déplacer
pour vous parler de là-bas, pour pouvoir m'adresser à tout le monde, parce que
je n'aime pas tourner le dos. Et en étant là-bas, je tourne le dos. Donc
bonjour à tous. Bonjour à toutes. Bonjour Mesdames et Messieurs les ministres,
je suis super contente d'être là aujourd'hui, mais je pense que, avant de vous
dire ce qui m'a amenée vers vous, je dois vous dire du coup qui je suis. Je
m'appelle Liliah TUILE, j'ai 23 ans et je suis étudiante en cinquième année de
droit, spécialisée en droit international et européen. Avant de vous faire part
de mes propositions, je vais vous dire ce qui m'a amené vers le droit. Ce qui
m'a amené vers le droit, c'est le fait d'avoir connu et subi la discrimination.
Ce qui m'a amenée vers le droit international, c'est le perpétuel
questionnement de mon héritage culturel, justement causé par ces
discriminations. Parce que ces discriminations, on les subit pour qui on est,
être qui je suis. Une jeune femme, une jeune femme française, une jeune femme
racisées, issue des quartiers populaires. Être celles qui nous sommes, pour la
plupart des jeunes femmes présentes ici, c'est trop souvent subir son identité.
Une identité qui est trop souvent, à tort, résumée à des stéréotypes, à des
idées biaisées qu'on s'en fait d'elle. Et ça, je pense, c'est le résultat d'un
manque de connaissance et d'un manque de savoir. Un manque de savoir entretenu
par le manque de représentation des personnes qui nous ressemblent et des
personnes que je vois présentes aujourd'hui dans les médias, à des postes à
hautes responsabilités et partout ailleurs. Aujourd'hui, je m'adresse à vous
tous, je m'adresse à Madame BORNE et je m'adresse à tous les ministres présents
pour dire que si on est là, c'est pour co-créer ensemble, c'est pour
progresser, c'est pour proposer des idées qu'on a et participer au processus de
décision. Alors, comment faire ? Donc, je ne vais pas m’appesantir sur les
propositions, mais je vais juste souligner celle qu'a faite Zafira et celles
qu'on vient d'écouter là, c'est le fait de créer des ateliers de
sensibilisation et d'éducation qui sont rendus obligatoires dans tous les
établissements scolaires, qui commenceraient dans les établissements scolaires,
mais qui s'étendraient au parcours académique et au parcours professionnel de
tous et de chacun. Aujourd'hui, ces ateliers de sensibilisation, les
problématiques de toutes les discriminations, le racisme, le sexisme, l'égalité
de genre, ça doit faire partie des systèmes scolaires. Ça doit faire partie des
programmes. Les programmes scolaires aujourd'hui, ils doivent intégrer
l'histoire de la France, la vraie histoire de la France. Ces programmes
scolaires, ils doivent être fidèles à la réalité de la population française qui
est plurielle et qu'on représente tous aujourd'hui ici. Et pour cela, je pense
qu'il faut donner la parole aux personnes concernées, et je suis contente de
voir que c'est le cas aujourd'hui. C'est pour ça que je vous remercie d'avoir
organisé cette journée. Il faut pouvoir donner la parole aux personnes, aux associations
et aux acteurs de terrain qui participent tous les jours à ramener du
changement. Il faut pouvoir les consulter, mais surtout mettre en place des
mécanismes de travaux communs. Et ces mécanismes-là, et c'est le point sur
lequel j'aimerais assister, que j'aimerais que vous reteniez Madame BORNE
aujourd'hui, c'est des mécanismes de contrôle. Parce que c'est beau de faire
des propositions, mais c'est encore mieux de pouvoir les suivre. Nos
propositions aujourd'hui, moi, et je pense que tout le monde qui est présent
ici souhaiterait qu'elles puissent être concrétisées, qu'elles puissent être
suivies et qu'on puisse dire : voilà, on vous a rencontré aujourd'hui et voilà
où on en est, voilà le résultat. La jeunesse, elle est ouverte, elle veut
participer et elle peut participer. Aujourd'hui, nous, les jeunes, les jeunes
femmes des quartiers populaires, les jeunes des quartiers populaires
s'expriment, sont entendus et doivent pouvoir le faire plus régulièrement. On
est consultés et c'est super important. Et moi, je pense que ces prises de
parole qui au final ne sont pas vraiment des prises de parole, mais plus le
partage de nos vécus doit pouvoir être concrétisé et traduit en mesures
politiques concrètes. Et si aujourd'hui notre parole, le partage de nos vécus à
Matignon est écouté et traduit en mesures politiques concrètes, là on pourra
considérer qu'on a gagné. Merci.
Matthieu
Waouh ! Merci
beaucoup pour ce témoignage et cette interpellation. Derrière toi, tu as une
figure que vous connaissez probablement beaucoup, Fatou GWYNETH, tu es
créatrice de contenus sur les réseaux sociaux. Tu as un parcours très engagé
également et je t’ai vu applaudir également, assez fortement à tout ce qui
vient d'être dit. Je te laisse la parole, peut-être pour nous dire un mot.
Fatou GUINEA (phon)
Alors déjà, je
tenais à vous remercier pour l'invitation et écoutant en tant que créateur de
contenu aujourd'hui, moi, j'ai toujours dit que la culture, c'était quelque
chose d'hyper important et on devait s'en servir pour faire avancer notre
société chacun à notre échelle, chacun comme on peut. Et moi, avec des
plateformes comme Instagram, comme Snapchat, comme Twitter, comme Tik Tok sur
lesquelles on est visible, aujourd'hui, on a des opportunités qui sont énormes,
c’est-à-dire qu'on touche des publics qui sont grands, qui ont des âges
différents, on touche des parents, on touche des jeunes et on voit des choses
qui sont mais incroyables, inadmissibles. Moi, je vais souvent dans les lycées,
dans les collèges, je suis issue de quartiers populaires. Je suis né, j'ai
grandi à Aubervilliers, mon père était prof de math, ma mère aide-soignante.
Donc moi, parmi mes camarades, je faisais partie des chanceux qui avaient des
parents éduqués, donc du coup qui pouvaient me permettre de faire certaines
choses. Moi, j’ai un bac+5 en commerce et marketing international. Et à côté de
ça, c'est moi qui ai choisi d’être artiste. Et c'est vrai que pour mes parents,
c'était compliqué de se dire que voilà, une jeune fille issue des quartiers,
qui est noire, veut être actrice. Aujourd'hui, je le suis, mais c’est dit :
Mais tu ne pourras pas être actrice, il n'y a pas d'actrices noires. À ce
moment-là, il n’y a pas de représentation et je me suis dit, j'ai dit à mon
père puis à soi-même, bah, peut-être que je serais la première en fait. Si on
n'essaye pas, on ne peut pas savoir. Et aujourd'hui, voilà, je fais des films,
des séries et c'est je fais ma création de contenu et je suis très heureuse de
ça et je suis très heureuse d'intervenir dans les collèges aussi, dans les
lycées, parce que je lutte beaucoup contre le harcèlement scolaire. Je ne l'ai pas
vécu, mais j'ai vu les dégâts que ça pouvait faire sur certains de mes
camarades et jusqu'à aujourd'hui, ils sont marqués en fait. Et je me rends
compte qu'il n'y a pas de réelles solutions pour les jeunes à venir. Quand je
vois que ma nièce se fait harcelée à l'école à cause de ses cheveux, quand je
vois que des petits à l'école se font harcelés à cause de leur religion, quand
je vois que d'autres petits à l'école se font harcelés par rapport à leur
orientation sexuelle, je trouve ça quand même inadmissible que, aujourd'hui,
dans une société avancée comme la nôtre, il n'y ait pas de solution pour ça. Et
moi, je propose, déjà dans un premier temps, qu'il y ait des interventions de
gens qui leur ressemblent, c’est-à-dire que des gens qui viennent dans leur
classe, qui leur parlent et qui se sentent réellement concernés parce que ces
gens-là leur ressemblent. Quand moi, je vais dans les classes à Aubervilliers,
les petits, ils sont en confiance parce qu’ils se disent, bah, Fatou, elle est
issue des quartiers populaires comme nous, elle est noire, elle est musulmane.
Donc quand elle parle, elle sait de quoi elle parle. Donc si elle arrive à ce
niveau-là, bah, nous aussi, on peut y arriver, ça redonne ce qu'on appelle de
l'espoir. Et aujourd'hui, cette jeunesse, elle manque l'espoir. Il faut la
réanimer avec un pacemaker, avec un… je ne sais pas, quelque chose, mais il ne
faut pas la lâcher parce qu'il y a plein de jeunes qui sont tellement plein
d'ambition, qui veulent tellement bien faire les choses et qui sont mal
accompagnés, qu'au final, bah, soit ils ne le font pas, soit ils échouent, ou
soit ils lâchent l'affaire parce qu'ils se disent : Dans, tous les cas, ça ne
va rien changer. Et je trouve ça inadmissible parce que la France est un pays
où on a énormément d'opportunités. Moi, j'ai pu y aller à l'école, j'ai pu
participer à des projets associatifs, j'ai pu faire ce que j'avais à faire et
tout ça en respectant la loi et tout. Et je pense qu'aujourd'hui il y a trop de
stéréotypes en fait sur nos quartiers. Moi, je suis issue, encore une fois, des
quartiers populaires, je suis née à Aubervilliers, j'ai grandi à Aubervilliers
et regardez, je ne suis pas une voleuse, je ne suis pas un escroc, je ne suis
pas une fille bizarre. Et quand moi, j'arrive et que dans d'autres quartiers,
les gens me regardent un peu en mode : Ah, ouais, tu as vraiment grandi là-bas
? Bah, ouais, il y a grave des gens comme moi. Mais ce que je veux dire, c'est
que les jeunes aujourd'hui, quand on parle avec eux, moi je fais beaucoup d'interventions
dans les classes, notamment au collège, parce que je pense qu'il faut commencer
tôt. Au collège, je fais de l'aide aux devoirs aussi en primaire quand j'ai du
temps, parce que du coup, je travaille beaucoup. Mais quand j'ai du temps libre
ou quoi, j'essaie d'aller les aider parce qu'il n'y a personne. Ceux qui
doivent les aider, soit ils ne sont pas en capacité, soit ils ne viennent pas.
C'est-à-dire que les enfants, ils arrivent à 16h30, à 17h pour les aides de
devoirs, il n'y a personne. Donc nous, on n'est même pas payé. On fait ça parce
qu'on se dit, si on ne le fait pas, personne ne va le faire. Ils vont être
abandonnés à eux-mêmes, en fait. Et on prend des responsabilités parce que moi,
j'aurais aimé que, bah, quand j'arrive et qu'ils n’y aient personne d'aide aux
devoirs, bah, il y a quelqu'un qui a un certain niveau d'études qui viennent
m'aider en fait. Et peut-être que ça m'aurait permis de faire mieux, même si ce
que j'ai fait, je pense que c'est bien. Mais comme moi, j'ai dit, moi, j'ai la
chance d'avoir des parents éduqués, des parents qui sont allés loin dans les
études et qui m'ont permis en fait d'avancer, mes trois frères, ils ont fait
polytechnique, donc on parle encore d'autres choses. Moi, j'ai cette chance-là,
mais tout le monde n'avait pas cette chance-là dans les quartiers et c'est là
qu'on parle d'inégalités. Après, en tant que femme, je me rends compte que
c'est super difficile d'évoluer dans la société parce qu'on pointe du doigt,
prétextant que j'ai réussi, que je gagne correctement ma vie, etc. : Ouais,
mais une femme, elle doit faire ci, elle doit faire ça. Bah, non, une femme,
elle est libre de faire ce qu'elle veut, ce qu'elle entend et elle est libre
d'aspirer au métier qu'elle veut en fait. Elle est libre d'être entrepreneur,
elle est libre d'être femme au foyer si elle le veut, elle est libre d‘être
actrice, ce n’est rien, elle est libre d’être danseuse, elle est libre de faire
ce qu'elle veut au même titre qu'un homme. Et je pense que ça, ça doit
commencer déjà par l'égalité des salaires. Mais ça, c'est un autre truc qu’on
discutera peut-être une prochaine fois. Mais je pense qu'en tout cas, ces
jeunes, ils ont vraiment besoin d'aide, ils ont vraiment besoin qu'on leur
tende la main, et je vous jure que vous leur faites ça et ils vous font ça
aussi, et vous avancez ensemble. On peut construire des grands projets. Il y a
6 mois, je suis… Non, il y a moins d’un mois, excusez-moi, je suis venue là, à
l’Elysée, avec des jeunes parce que je lutte aussi contre le harcèlement et le
cyber harcèlement. Et on parlait en fait avec le Président, et on lui a
expliqué en fait les problématiques qu’il y a dans les collèges et lycées, et
jusqu'à aujourd'hui, je n'ai rien vu. Donc je suis ressorti de ce rendez-vous
très déçu. Et c'est vrai qu'aujourd'hui je suis venu, je suis venu parce qu'on
m'a invité, je suis venu parce que je pense que ma voix, elle compte, parce
qu'à travers mes millions de vues, je peux communiquer sur ça. Mais j'aimerais
surtout qu'il y ait du résultat en fait, que ce ne soit pas uniquement du vent
et que ces jeunes-là y soient réellement et parce qu'ils ont besoin d'aide.
Vraiment, si vous les aidez, je pense que ça va faire avancer notre société, il
n'y aura plus d'intellectuels et à tous les niveaux en fait. Ils ont envie,
vraiment. Il faut aller à leur rencontre, il faut les inviter, ils ont vraiment
envie de faire bien les choses. Donc voilà. [Applaudissements].
Liliah TUILE
Je ne voudrais pas
dépasser le temps de parole, mais moi j'ai grandi au quatre-chemin, donc
quatre-chemin, c’est à côté d'Aubervilliers. On représente ça aujourd'hui et
c'est une fierté, une fierté d'être là, de représenter le 93. Parce que dans
93, il n'y a pas que des Noirs et des Arabes et des stéréotypes sur le vol, je
sais pas quoi. Il y a aussi beaucoup, beaucoup de talents. Mais si ces
personnes-là n'ont pas les moyens, si ces personnes-là, on leur montre pas
qu'il y a des personnes qui leur ressemblent dans des zones qu'elles ne
s'imaginent même pas, elles ne pourront jamais arriver. Et c'est vraiment… je
suis trop contente que mon intervention, elle précède celle de Fatou parce
qu'en fait, elle le montre clairement. C'est une illustration concrète. Donc
voilà, je pense qu'il n'y a pas grand-chose à ajouter [Applaudissements].
Fatou GUINEA
C'était mon
surveillant en troisième, juste à côté de moi, et c'était… Ali, c’était
vraiment mon surveillant en troisième. Et je suis choquée de le voir ici. Et on
a trop évolué, mec. Genre on a trop évolué. Il m'appelait Mufasa avec mes
cheveux comme ça et tout. Donc voilà, je suis trop contente.
Olivier KLEIN
Juste un moment,
moi aussi, je ne voudrais pas dépasser mon temps de parole. C’est la solidarité
des habitants du 93. Non, juste pour dire aux jeunes qui sont présents. Donc,
j'ai parlé le Quartiers 2030 tout à l'heure et avec l'accord de la Première
ministre, on va lancer dans tous les quartiers populaires des CNR, des petits
et grands débats pour écouter la parole des habitants des quartiers populaires
dans les semaines qui viennent pour écrire la politique de la ville, les futurs
contrats de ville. Et si vous pouviez faire passer le mot autour de vous et
venir participer à ces petits et grands débats pour qu'on écoute dans ces
moments-là, pas toujours les mêmes, pas toujours les mêmes associations, etc.
Et on fera le tour et on récupérera vos fichiers pour qu'il y ait des jeunes
qui viennent parler, dire ce qu'ils ont besoin dans les quartiers populaires,
ce dont ils ont envie. Ça sera très utile à la construction des futurs projets
et de la politique de la ville, voilà. Merci [Applaudissements].
Matthieu
Merci Monsieur le
ministre. Alors, je vais donner la parole à quelqu'un que je vois piaffer
depuis tout à l'heure puisqu'on parle beaucoup des quartiers populaires. Mais
il y a aussi évidemment les jeunes qui sont issus des zones rurales qu'il ne
faut jamais oublier. Et Alexandre, toi, tu es jeune maire d'une petite commune
qui s'appelle Bagnols. Et je te laisse la parole pour nous porter aussi la voix
de ceux qui sont parfois plus éloignés géographiquement de nos grandes villes.
Alexandre
Madame la Première
ministre, Mesdames, Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs en vos
grades et qualités. Madame la Première Ministre, Messieurs les Ministres,
Madame la Ministre, je suis inquiet en vous écoutant. On parle des quartiers
populaires, on parle des zones urbaines, mais on ne parle pas des zones
rurales. Je suis là et je vous remercie de m'avoir invité pour ça. L'égalité
des chances, elle passe — on a tous dit — par l'Éducation nationale et par la
famille. Aujourd'hui — et j'en profite pour vous interpeller, Monsieur le
Ministre, l'Éducation nationale — on ferme des classes dans des petites zones
rurales pour boucher des trous dans les villes. Si ! Et le problème aujourd'hui,
c'est que ces enfants-là, si on veut leur donner une chance d'étudier
correctement, eh bien il faut laisser des professeurs dans les zones rurales.
De plus, la mobilité, la mobilité est un enjeu majeur. Clermont-Ferrand, je ne
reviendrais pas sur le débat du TGV, parce qu'aujourd'hui, il faut faire 3 h 30
à Paris, c'est compliqué. Aujourd'hui mouvement social en plus, ce n'est pas
sûr que je puisse être là aujourd'hui. Madame la Première ministre, je ne
reviendrais pas sur ces événements. Monsieur le ministre du Logement est parti.
Mais moi, ce que je regrette beaucoup, c'est qu'on a vu pendant la crise Covid
les milieux ruraux ont été, comment dire, l'échappatoire pour les enfermer dans
les grandes tours des villes, pour venir se loger à la campagne. C'est très
bien, c'est très bien, mais ça n'a pas duré longtemps. Et aujourd'hui, il faut
absolument qu'on donne aux milieux ruraux la possibilité de construire. La Zéro
artificialisation nette est un frein à notre développement urbain, à notre
développement pour les écoles, au développement de nos services publics. On est
toujours en train de nous dire les collectivités, vous êtes le premier maillon, etc, bien sûr, et on en est fiers. On est très
fiers. Tout ce qu'on peut faire, on le fait. La communauté de communes Dômes
Sancy Artense, par exemple, a pris la compétence enfance jeunesse, donc les
crèches, les centres de loisirs, etc., le service à la personne qui est un
service public qui coûte cher mais dont on assume la compétence. Mais seulement
à force de faire, eh bien le budget, il est dans le négatif. Et on se demande
comment maintenir ce service sans augmenter la fiscalité, parce qu'on a perdu
de la fiscalité des collectivités territoriales. Aujourd'hui, les dotations, je
ne vous ferai pas le portrait, mais (inaudible) les élus locaux qui sont là
peuvent le dire. Donc on est très inquiets pour ça.
Élisabeth BORNE
Elles ne baissent
pas globalement ?
Alexandre
Non, mais…
Élisabeth BORNE
Où sont cachés ceux
dont les dotations montent ?
Alexandre
Un peu partout. Il
faut vous dire où elles passent certaines, bref. Alors (inaudible) ça passe par
le biais de subventions au niveau de la DETR, etc. Mais les enveloppes, c'est
pareil, par département, elles se réduisent, donc on réduit notre investissement.
Donc c'est moins de travaux pour les écoles, c'est moins de travaux pour tout
ce qui est aménagement du territoire. Il y a cette inquiétude. Au niveau de la
formation, parce qu'on va revenir là quand même, je soutiens absolument l'idée
qu'il faut faire découvrir les métiers dès le plus jeune âge. Dans les
collèges, à une époque, il y avait l'option DP3, quand moi j'étais au collège,
donc ça fait 10 ans maintenant, mais ça existait et ce n'était pas mal. Mais ce
n'était pas assez évolué. On avait un chef d'entreprise qui venait tous les
mois, on va dire. Ce n'était pas suffisant. Il faut vraiment renouer la nation
avec le travail. Parce qu'on ne peut pas demander en même temps d'aller dans
des… on cherche des maçons, on cherche des couvreurs, on cherche des
électriciens, on cherche hommes, femmes, peu importe ça. Moi, quand on me dit
égalité des femmes-hommes, l'égalité femmes-hommes pour moi, si une femme a
envie d'être agricultrice et qu'un homme veut faire aide-soignant, eh bien il
n'y a rien qui me gêne. Aujourd'hui, on est vraiment dans ce mal où on a
vraiment le sentiment d'être les oubliés de la République, que ça soit au
niveau numérique et au niveau service public. Donc je compte sur vous. On a
besoin de faire découvrir ces métiers d'avenir, que ce soit dans toutes les
filières. Et faisons la promotion des filières professionnelles. Arrêtons de
toujours vouloir envoyer du monde en filière générale, dans les facultés, etc.
C'est plein, c'est plein. Les universités clairement sont pleines. Au bout d'un
moment, on s'aperçoit qu'il faut faire des réorientations parce que là, il y en
a un certain qui ne sont pas à leur place. Ils s’en rendent compte. Et
qu’est-ce qu'ils ont fait ? Ils ont perdu leur temps et malheureusement, ils
ont peut-être fait perdre du temps aux autres, pour l'enseignant, pour leurs
camarades et pour eux. C'est dramatique. Donc voilà, je voulais vraiment
attirer votre attention là-dessus. Les élus ruraux, les associations des
maires, etc., les départements, les régions, on sera au côté de l'Etat. Mais
que l'Etat nous laisse intervenir sur les territoires. Je vous remercie.
Matthieu
Merci Alexandre. Tu
as parlé des lycées professionnels, peut-être en un mot rapide, je me tourne en
face de toi, vers Thibault qui, toi, tu viens de la Nièvre, je crois. Et je
crois que tu voulais nous parler aussi un peu des problématiques de mobilité ou
de transport. Est-ce que quelqu'un peut lui donner le petit micro qui est juste
en face ? Merci beaucoup. (inaudible).
Vas-y, vas-y. Ça va
marcher.
Thibault
Donc oui, je viens
de Saint-Amand-de-Puisaye, une commune de la Nièvre, donc en zone rurale. Ayant
fait mon Bac horticole, mon CAP fleuriste et mon BEP fleuriste, le problème,
c'est la mobilité. Ça freine beaucoup de jeunes, je pense. Quand on a envie de
faire un tel métier, mais qu'on ne peut pas le faire par la voie
professionnelle parce qu'on n'a pas de moyens de déplacement. Donc c'est
vraiment un problème, sachant qu'on est les repreneurs des commerces et des
petits commerces de nos villages. Je rejoins Monsieur qui vient de parler
avant. Il ne faut pas nous oublier parce que plus ça va, et plus les zones
rurales, bah on devient les oubliés. On voit que les commerces ferment un par
un. Oui, c'est la mobilité dans les zones rurales, c'est ce qui manque
vraiment, je trouve.
Élisabeth BORNE
Alors, en tant que
ministre des Transports, j'avais porté une loi qui demandait aux collectivités
de prendre la compétence pour répondre à ces problèmes de mobilité. Je
comprends que tout le monde ne s'en est pas encore saisi, en fait. Oui, OK.
Alors creusons ça, creusons ça.
Matthieu
Thibaut, tu parlais
aussi du permis de conduire quand on discutait dans la salle-là de tout à
l'heure.
Thibaut
Oui. Alors le
permis de conduire, bah, c'est vraiment, nous, c'est dans nos campagnes, du
coup, c'est indispensable. Si on n'a pas le permis, bah, personnellement, moi,
si je n'ai pas le permis, je ne peux pas bouger de chez moi quoi. La ville la
plus proche c’est à 3 kilomètres, c’est vraiment important. Donc le permis à 17
ans, c'est vraiment, enfin ce serait vraiment quelque chose d'important, quoi.
Voilà. Et j'avais une autre suggestion à vous faire, j’allais dire. Ayant été
apprenti pendant 6 ans, j'ai remarqué un truc, c'est que bah, en fait on fait
le boulot, pas certes la première année de CAP, mais par exemple-là, là, je
suis en deuxième année de BP, on fait le boulot d'un salarié, voire plus. Et
les salaires, ils ne suivent pas. Personnellement, moi, à la fin du mois, enfin
je ne peux pas me faire plaisir, je touche 850… 860 par mois, excusez-moi.
Quand j'ai payé tout en sachant que je fais le boulot d'un employé quoi. Voilà.
Merci beaucoup.
Matthieu
Merci beaucoup
Thibaut. Peut-être que tu peux donner le micro juste devant toi à Emma, qui ne
vient pas non plus de l'agglomération parisienne et qui voulait aussi parler de
protection de l'enfance. Je t’en prie Emma.
Emma
Bonjour tout le
monde. Madame la Première ministre, merci de nous accueillir aujourd'hui
puisque je pense, c’est une sacrée expérience dans la vie de jeunes de 20 ans
donc c'est assez cool. Alors, aujourd'hui, je vais vous parler très rapidement
de mon parcours pour… non pas pour parler de moi et pour qu'on me plaigne, mais
plus pour montrer que ça existe et qu'il y a énormément de jeunes qui vivent ça
en France aujourd'hui. Il y a 320 000 jeunes qui sont confiés à L'Aide Sociale
à l'Enfance, donc ce n'est pas rien. Donc j'ai été confiée à L'Aide Sociale à
l'Enfance pour violences intrafamiliales. Bon, on va passer tout le côté où ma
parole n'était pas entendue et où j'ai dû écrire à Brigitte MACRON pour être
sauvée parce que c’est un peu ce qui s'est passé. Mais voilà, j'ai eu un
placement heureux au sein d'une fondation très, très bien, qui fonctionnait
bien, de laquelle on peut s'inspirer, je pense sur beaucoup de choses. C'est la
Fondation des Apprentis d'Auteuil. Aujourd'hui, je voudrais juste vous parler
du fait que j'ai beau avoir été très bien accompagné durant mon placement,
lorsque j'ai eu 18 ans, j'ai été lâché parce que, bah, parce que, en fait, il y
avait le Covid et du coup, mon contrat jeunes majeurs n'a pas été exécuté. Donc
je me suis retrouvé à galérer, à devoir gérer un appart, à devoir gérer toute
la vie d’étudiante, donc aller en cours. J’avais, je n'ai qu'une bourse et que
les APL parce que je ne peux pas travailler à côté, puisque j'ai des psycho-traumatismes
et c'est clairement impossible de travailler en plus de tout ce que j'ai à
faire. Donc je voudrais aujourd'hui vous faire deux propositions, donc les deux
sont en lien avec ce que j'ai pu vivre, mais avec ce que je peux entendre
aujourd'hui parce que je suis présidente et fondatrice d'une association qui
s'appelle Speak, donc j'accompagne
beaucoup de jeunes. Et alors, nous, ce qu'on aimerait vous proposer en lien
avec les associations Repères, en lien avec le collectif Jeunes majeurs, c'est
d'étendre le contrat jeunes majeur à 25 ans en fait. Parce que étendre le
contrat jeunes majeurs à 25 ans, c'est faire que des jeunes puissent entrer
dans l'âge adulte sereinement. Parce que ce n'est pas parce qu'on a 18 ans
qu'on sait tout faire, et ce n'est pas parce qu'on a 18 ans qu'on s'en sort.
Donc, quand on n'a pas nos parents derrière, on galère. Et quand on n'a pas…
quand on n'a pas le soutien qu'il faut, on galère. Alors oui, il y a le contrat
d'engagement jeune, mais ça ne couvre pas l'insertion sociale, ça ne couvre pas
tous les besoins affectifs et humains qu'on peut avoir. Donc ça, c'est ma
première proposition. Et ma seconde proposition, c'est d'avoir un parcours de
soins spécifique aux jeunes qui ont vécu des violences, que ce soit sexuel,
physique, psychologique, harcèlement, enfin toutes les violences pour les
accompagner dans le cadre des soins et dans le cadre de la vie. Parce que vivre
avec des psycho-traumas, c'est très compliqué, je pense qu'on vit avec la mort
au quotidien. Donc voilà ce que je voulais vous dire. Je pense que les derniers
événements nous ont prouvé qu'on avait tous beaucoup d'énergie à mettre dans
beaucoup de causes. Je pense que la protection des enfants devrait être la
priorité de tout le monde. Donc je vous remercie pour votre écoute.
[Applaudissements]
Matthieu
Madame la ministre,
peut-être, on a la chance d'avoir la secrétaire d'État en charge de l'enfance
avec nous, peut-être Charlotte CAUBEL.
Charlotte CAUBEL
Oui, simplement
pour rappeler qu'effectivement l'égalité des chances, ça ne se décrète pas, que
ça doit se travailler depuis la toute petite enfance et à toutes les étapes de
la vie et a fortiori au moment de la majorité, à un moment un peu clé. C'est
pour ça que dans le cadre du Comité interministériel de l'enfance, parmi les
priorités, outre la lutte contre les violences, qui est un grand combat, il y a
bien sûr l'égalité des chances et en particulier pour deux publics assez
fragiles, on y viendra, les enfants en situation de handicap et bien sûr, les
enfants qui n'ont pas des familles qui peuvent les accompagner au-delà même de
leurs quartiers, de leurs territoires, des territoires ruraux. Un ou deux
chiffres quand même. À 16 ans, 16 % des enfants placés sont déscolarisés Madame
la Première ministre et on a donc, comme tout le monde, ces 25 % des SDF qui
sortent de l’ASE, donc ça, c’est vraiment tellement une priorité que la
Première ministre me notera sur ce point-là et c’est l’insertion des jeunes
majeurs sortis de l’ASE, ça sera ma note à la fin de mon mandat à moi, voilà.
Très important. Alors, on l’a dit, ce qui est essentiel, c’est que c’est une
approche globale, d’ailleurs d'où mon positionnement près de la Première
ministre. C'est des enjeux d'éducation à l'école, de prise en compte. Et
actuellement avec Pap NDIAYE, on travaille à une convention spécifique pour les
jeunes de l’ASE pour qu'ils soient accompagnés, y compris en sortie scolaire.
Évidemment, avec Geneviève DARRIEUSSECQ, on travaille sur la question de
l'accompagnement des enfants en situation de handicap à l'école et pour une inclusion
maximale en fonction de leur vulnérabilité. Avec Sylvie RETAILLEAU, on
travaille la question de la coordination des bourses avec les contrats jeunes
majeurs, parce que les contrats jeunes majeurs, tous les 3 mois, alors même
qu'on a une bourse de deux ans, ça n'a aucun sens et il faut que tout cela soit
parfaitement coordonné. On a parlé logement, évidemment tout à fait essentiel.
Je connais… Tout à l'heure, j'étais au conseil d'orientation des jeunes avec
que des enfants de l’ASE et il y a une jeune fille qui, 8 jours après ses 18
ans, on lui a dit : c'est fini, dehors ! Elle a dû trouver un logement en
quelques jours. Donc ça, évidemment, c'est complexe. On a parlé transports.
C'est évidemment un enjeu fondamental quand on n'a plus du tout de papa et
maman pour faire quelques transports. Le transport, c'est fondamental. Ça passe
par des tarifs préférentiels dans les transports ou bien et/ou le permis de
conduire pour ceux qui habitent le plus loin. Essentiel, la santé, la santé
physique et la santé mentale. Les critères sont au rouge. Ils sont en
particulier au rouge dans ces deux catégories de jeunes plus en difficulté.
C'est l'objet des Assises de la santé que porte effectivement le ministre de la
Santé et dans lequel il y a les deux volets, volets santé et santé mentale et
bien évidemment, les enfants qui ont subi des traumatismes doivent, il faut,
doit faire l'objet. Et c'est des travaux que nous conduisons pour mieux
accompagner, enfin mieux accompagner les enjeux de santé mentale. Voilà. Alors,
après, effectivement, la question des tranches d'âge. Aujourd'hui, il faut le
savoir, la loi impose aux départements de s'occuper des 18-21 ans — ça depuis
le 7 février 2022 s'ils sont isolés et en situation de précarité — il faut que
ça rentre en vigueur, effectivement. C'est aujourd'hui encore une intention. Il
y a une très grande hétérogénéité des territoires. Comptez sur moi pour
stimuler tout le monde. Surtout que moi, j'ai mis un peu d'argent, enfin le
ministre. Le Gouvernement a mis un peu d'argent sur ce sujet. Il faut donc que,
derrière, ça corresponde à des vrais contrats et pas des contrats factices,
comme c'est un peu trop souvent le cas. Donc une approche globale auprès de la
Première ministre pour faire avancer toute la situation des enfants les plus en
difficulté. Merci [Applaudissements].
Matthieu
Merci Madame la
ministre. Peut-être sur votre gauche, il y a aussi quelqu'un qui peut nous
relayer l'importance d'avoir un regard différent. Arthur, tu nous fais aussi le
plaisir d'être avec nous. Toi, tu es en situation de handicap. Et le handicap,
c'est aussi évidemment un frein majeur pour l'égalité des chances. On essaye de
corriger, en tout cas d'accompagner ceux qui vivent cette situation. Et tu
voulais nous dire un mot là-dessus.
Arthur
Déjà, bonjour à
tous, bonjour à Madame la Première ministre, je suis très heureux d'être là. Du
coup, moi, je fais des vidéos sur les réseaux sociaux pour… Enfin voilà, je
montre ma vie de jeune handicapé et je montre, voilà, mes aventures, mes
galères qui sont nombreuses, et voilà, un peu tous mes moments de vie aussi
pour prouver aux jeunes qu’une personne en situation de handicap peut aussi
s'amuser, voyager, avoir des amis et une vie sociale et faire faire des choses
que ces personnes-là n'auraient pas pu penser. Donc voilà, moi, j'étais dans
un… Moi, j'habite à Bordeaux, mais avec mon activité, je suis beaucoup à Paris.
J'étais dans un collège avec une classe Ulis. Une classe Ulis, c'est une classe
où il y a des professeurs spécialisés pour les personnes en situation de
handicap. Donc, vu que moi, je n'en ai pas besoin, j'étais juste dans cette
classe pour faire mes devoirs, par exemple pendant EPS car je ne peux pas faire
EPS. Et donc voilà. Et j'avoue que dans ce collège-là, je n'ai jamais vécu de
harcèlement. Mais c'est vrai que les personnes de cette classe Ulis étaient vu
comme vraiment la classe des handicapés, vraiment la secte des handicapés. Du
coup, on avait cette image collée tout le temps de groupe…. C'était vraiment
dans une case « le mec de l'Ulis ». Et c'est vrai que c'était assez compliqué à
vivre parce que les gens ne se rendent pas compte que des petits qu’on entend
dans le couloir, bah, ça peut marquer. Et je pense que les personnes qui n'ont
pas les épaules, bah, ça peut très vite être un problème pour eux à vivre au
quotidien. Du coup, voilà, j'ai changé de collège, dans un collège où il n'y
avait pas cette classe et c'est dommage. Je me suis sentie 100 fois mieux et
100 fois plus acceptée et 100 fois plus normale, entre guillemets. Donc voilà,
je pense que… voilà, moi, j'essaye de faire du mieux que je peux sur les
réseaux sociaux, pour montrer que… enfin, voilà, je montre tout mon quotidien,
je réponds à toutes les questions : Comment on prend le train ? Comment je fais
pour voyager ? Comment je vais aux toilettes ? C’est une question bête, mais
qui intéresse aussi les gens, parce qu’ils ne savent pas. Du coup, voilà, je
pense que ce serait intéressant que dans les classes, il y ait une
sensibilisation au handicap et qu'une personne vraiment concernée vienne dès le
plus jeune âge dans les classes pour expliquer, bah, voilà, son quotidien et sa
manière de penser, de réfléchir. Et je pense que ce serait hyper intéressant
parce que… parce que voilà, quand j'arrive dans une classe à la rentrée, que ce
soit au collège ou au lycée, je trouve que ce serait bien avec l'accord de la
personne en situation de handicap qu’il vient se présenter, qu’il vient
présenter son handicap à la classe. Parce que moi, voilà, à la fin de l'année,
j'ai souvent entendu même des gens qui viennent me voir en me disant : Mais tu vois, c’est un problème du coup mentale,
tu es paralysé alors que ce n'est pas du tout ça. Et donc voilà, je pense que
j’ai beaucoup parlé et merci de m’avoir écouté. [Applaudissements]
Matthieu
Merci vraiment à
Arthur. Merci pour ce témoignage et merci aussi pour tout ce que tu fais sur
les réseaux puisque tu contribues beaucoup à changer le regard aussi par ton
activité, tu es assez modeste, mais voilà, c'est assez remarquable, ce que tu
fais. On va bientôt approcher de la fin de cette session. Et je voulais
peut-être, avant de terminer, on a parlé beaucoup d'entendre la voix des jeunes
et une des jeunes filles suivies par l'association Rêv’Elles avait une
proposition à nous faire là-dessus. Déborah, je te laisse la parole.
Déborah BAFUANGA
Alors bonjour à
tous. Je m'appelle Déborah BAFUANGA, j'ai 23 ans et je suis étudiante en droit.
Alors, aujourd'hui, on voit qu'on nous a donné l'opportunité de venir, de
discuter et de parler de la situation de la jeunesse. Mais la réalité, on a eu
un mot qui a été cité et qui est important à notre sens, c'est la confiance.
Aujourd'hui, enfin même l'année dernière, quand on regarde le taux d'abstention
des jeunes, lorsqu'il s'agit d'aller voter par rapport aux politiques publiques
qui sont menées, les jeunes, souvent, ils n'y vont pas parce qu'ils n'ont plus
confiance. On mène des politiques publiques, on vote des lois à leur sujet,
mais sans les consulter. On a vu, on a parlé Crous à 1 euro, mais à aucun
moment, nous, on a vu qu'on est venu nous demander notre avis sur est-ce que
c'est bien ou pas un repas à 1 euro pour tous les étudiants et quelle est notre
condition à nous et comment ça peut nous impacter. Alors à ce moment-là, nous,
ce qu'on veut chercher à faire, c'est renouer en fait le lien, renouer la
parole entre ceux qui vont prendre la décision et ceux qui vont vivre ou subir
ce qui va être décidé. Donc l'une des propositions qu’on voulait faire, c'est
qu'on sait qu'il existe des conseils régionaux, par exemple, que des jeunes
d'Île-de-France, des instances consultatives où on peut aller chercher la
jeunesse. Et il serait très intéressant de généraliser ce genre d'instances à
tous les échelons. Mais plus que de généraliser, ce serait de les rendre
obligatoire, rendre obligatoire le fait de donner la parole aux jeunes sur les
questions qui nous concernent. Et plus encore parce qu'aujourd'hui je ne viens
pas qu'en tant que Déborah, mais aussi en tant qu’Alumnae de l'association
Rêv’Elles, c'est prendre en compte la vie des jeunes filles dans les politiques
publiques parce que quand on est jeune, on est jeune. Mais quand on est jeune
et qu'on est jeunes filles, c’est des problématiques en plus qui se posent et
c’est des problématiques en plus qu'il faut prendre en compte. Donc, à partir
de ce moment-là, on aurait ces instances consultatives qui pourraient fournir
des rapports sur ce qui est mené au niveau de la mairie ou de la région, créer
du contenu numérique parce qu'on sait aussi que là où on peut trouver les
jeunes, c'est sur les réseaux sociaux. Donc c'est un moyen, non seulement de
les toucher plus, mais aussi, d'une certaine manière, de vulgariser la
politique. Parce qu'on parle parfois, on fournit des rapports, mais ce n'est
pas dans des mots qui sont tous en capacité d'entendre, enfin si mais parfois,
le vocabulaire, il est un peu trop technique. Donc il faut aussi se rendre
compte que si on veut tous leur parler, c'est un langage aussi que tout le
monde peut comprendre. Et une proposition en plus de manière un peu plus
concrète que plus que ces instances consultatives qui pourraient être mises en place,
c'est de créer simplement des listes de candidatures électorales. On peut voter
aujourd’hui pour des députés, on peut voter pour des maires. Et si on pouvait
voter aussi pour, nous, avoir dans des instances (inaudible) nationales ou
régionales, des jeunes pour qui on vote, parce qu'ils nous ressemblent, parce
qu'on a confiance en eux on pensait qu’ils vont pouvoir porter notre voix et
qui vont vraiment nous prendre en compte dans une diversité de couleurs, de
religion, d'orientation sexuelle ou de là où on vient, puisque ce serait aussi
au niveau national si c'est au niveau des députés, eh bien, en ce moment-là, ce
serait encore un peu plus pertinent pour, encore une fois, renouer la confiance
et prendre tout le monde en compte. Merci [Applaudissements].
Matthieu
Merci. Merci
beaucoup Déborah. Peut-être en dernière prise de parole, je m'entraîne vers toi
Ariana parce que tu voulais nous proposer une prise de parole un peu originale.
Pour terminer, je vous laisse découvrir et entendre.
Ariana DIARRA
Bonjour à tous et à
toutes. Je m'appelle Ariana DIARRA, j'ai 19 ans et déjà je voulais dire que
j'ai été vraiment honorée d'être là et d'avoir pu écouter tous mes camarades.
Parce que vraiment, vous êtes super inspirant toutes et tous. Et aussi, je
voulais juste rebondir par rapport au harcèlement. Parce que c'est vrai que
c'est un sujet qui est beaucoup ressorti. Et moi-même, j'ai étudié dans un
collège où le harcèlement était ambiant, en fait tellement ambiant que c'était
devenu une normalité, en fait, finalement, et ça, je trouve ça vraiment grave.
Et par rapport à… En fait, c'était devenu tellement ambiant que tout le monde
était harcelé, témoin et harcelé et passé par tous les rôles. Moi-même je suis
passée par tous les rôles. Et en fait, on devient même harceleur pour survivre,
parfois parce qu'on n'a pas le choix si on veut pas finir harcelée. Et je pense
qu'à l'école d'aujourd'hui, ça ne suffit plus d'apprendre à lire et à compter.
Il faut apprendre, comme ça a été dit, à prendre soin de soi et des autres.
C'est pour ça qu’en fait, j'avais une proposition qui regroupe un peu tout ce
qui a été dit. C'est pour ça que j'étais assez contente. C'était en fait de
lancer un projet que j'ai nommé PSSA — après, on peut faire un brainstorming
sur le nom, il n'y a pas de souci — donc PSSA pour prendre soin de soi et des
autres. Et en fait, ce serait un programme intégré dans le programme scolaire
et qui serait créé par des psychologues, des enseignants, des associations
spécialisées sur le sujet et surtout des jeunes. Et ce programme serait
organisé en deux temps, donc un temps d'ateliers en classe, exactement comme ça
a été proposé sur différentes thématiques : le rapport au corps, l'orientation
sexuelle, le sexisme, le racisme, etc, et un autre temps sur lesquels les
élèves travailleraient par groupes sur des projets autour des objectifs de
développement durable. Parce que oui, les jeunes ont des idées et ils peuvent
changer le monde, si seulement vous voulez bien les écouter. Donc voilà, c'est
ma petite parenthèse par rapport à ça. Et sinon, je suis bénévole dans une
association qui s'appelle Trouve ta voix. Et c'est une association qui forme
des jeunes à la prise de parole en public et qui par la suite, nous allons dans
des lycées prioritaires pour donner des cours d'éloquence à des Secondes. Et
donc, l'année dernière, j'ai été formatrice dans une classe de seconde. Et en
fait, à la deuxième séance, j'ai demandé aux élèves ce qu'ils voulaient devenir
plus tard et ils m'ont répondu quelque chose de particulier qui m'a inspiré un
texte que je voulais partager avec vous. Alors, que voulez-vous devenir plus
tard ? « On ne sait pas, on s'en fout. On n'a pas d'avenir ». C'est ainsi qu'en
un mot, en un regard, j'ai compris qu'il était plus que temps d'agir. Qui
sont-ils ? Des élèves que l'on a mis de côté à qui on a inscrit sur le bulletin
Échec assuré. À travers eux, je me suis vu à leur âge quand on vous disait «
Vous finirez au chômage ». Ces quelques professeurs — pas tous, entendons-nous
bien — qui nous expliquaient — que nos mots ne valaient rien. Nous nous sommes
donc fait une promesse silencieuse. On leur prouvera à tous combien notre
parole est précieuse. Certains ont écrit en prose, d'autres en rimes. Mais peu
importe la forme, c'est l'intention qui prime. Au fil des semaines, les doutes
s'envolaient pendant que les ambitions prenaient place. Médecins, artistes,
ingénieurs peuplaient maintenant la salle de classe. Ils criaient leur
détermination jusqu'au bout de leurs lèvres. Je me suis juré de les emmener
jusqu'au bout de leurs rêves. Le monde serait tellement différent si chacun
avait la chance de s'exprimer sans être jugé pour son visage ou son quartier.
Je le dis avec toute ma conviction, notre point de départ ne devrait pas
définir notre destination. Alors la prochaine fois, si un jeune vous dit « Je
m'en fous, je n'ai pas d'avenir », tendez l'oreille, il se pourrait qu'il ait
des choses à dire. Quant à nous les jeunes, ne restons pas muets. N’écoutons
pas ceux qui nous disent de nous faire discrets. Crions nos succès. Clamons
notre unicité. Hurlons nos rêves. Faisons résonner l’écho qu’une nouvelle ère
se lève. Par nos actes et nos mots, faisons passer le message que la grandeur
des idées ne se mesure pas à la grandeur de l’âge. Merci.
Matthieu
Des frissons. Merci
beaucoup Ariana DIARRA. Peut-être Madame la Première ministre, si vous
l’autorisez, une toute dernière prise de parole parce que Tasnime avait préparé
une petite proposition et je ne voudrais surtout pas engendrer de frustration.
Je te laisse la parole et puis ensuite on boucle.
Tasnime
Merci. Bonjour à
tous et à toutes. Je Tasnime, je suis (inaudible) de l'association Rêv’elles,
et je suis en classe de terminale. Donc, comme des milliers de terminales,
lundi prochain, je vais passer ma première épreuve de Bac. Et donc, pour
préparer au mieux cette épreuve de Bac, j'ai dû réviser. Et en révisant, je
suis arrivée à un constat et ce constat, c’était que je n'avais aucune méthode
de travail. Et en fait, le fait que je n'ai aucune méthode de travail, ça m’a
fait voir les révisions comme quelque chose de mal. Je les ai vues en horreur.
Et vu que je les voyais en horreur, forcément, je n'avais pas forcément envie
de les faire. Je procrastinais. Et avec cette procrastination, autant dire que
je n'allais pas très bien, et ça a provoqué chez moi, donc, tout à l'heure, on
a parlé de santé mentale, ça a provoqué chez moi des épisodes de stress intense
et répétés. Et je sais que mon cas n'est pas isolé. Je sais que c'est le cas
pour vraiment, peut-être la majorité des lycéens. C'est pourquoi je propose
d'instaurer des cours de méthodologie, des méthodologies qu'on pourrait
installer dès la Seconde aux heures de classe. Et donc dans ces ateliers, on
pourra traiter de différents sujets tels que comment faire une fiche de
révision ? Parce que c'est tout simple, mais on ne sait pas forcément comment
le faire. Comment réviser, comment appréhender les devoirs ? Et peut-être
comment lutter contre la procrastination qui, malheureusement, est extrêmement
répandue ? Et donc, l'objectif de ces cours de méthode, ce serait que les
lycéens aient des outils pour mieux appréhender les révisions non seulement
pour le contrôle continu, mais aussi pour les épreuves finales de Bac. Donc je
pense que moi, malheureusement, je n'ai pas eu la chance d'avoir ces
méthodes-là et j'ai dû faire avec. Mais c'est quelque chose que je souhaite
pour les prochaines générations de bacheliers.
Matthieu
Merci beaucoup.
Madame la Première ministre, je vous laisse le mot de la fin.
Élisabeth BORNE
Merci beaucoup pour
ces échanges, pour vos témoignages qui sont à la fois très, très stimulants,
très inspirants. Et bravo pour votre détermination et pour votre exigence.
Alors vous mettez la barre assez haut, mais je pense qu'avec les ministres, on
va relever le défi. Moi, j'ai bien noté que la confiance, c'est aussi de
démontrer qu'on prend vos propositions, qu'on en fait des mesures et qu'on suit
leur réalisation. Je suis convaincue que plus que jamais, redonner confiance
dans notre démocratie, c'est une priorité au-delà des sujets dont on est en
train de parler aujourd'hui. Ce sujet de l'égalité des chances, on a vu à quel
point il recouvre finalement beaucoup de thèmes. En tout cas, je suis vraiment
convaincu que si on veut tenir cette promesse d'égalité des chances, il faut
partir au plus tôt, dès la petite enfance, c’est des choses qui ont été faites
dans le précédent quinquennat, les mi-jours. Mais on va bâtir ensemble notre
service public de la petite enfance et c'est important de construire dès ce
moment-là. Je pense que c'est d'autant plus important que vous l'avez… vous
êtes beaucoup à l'avoir dit, si on veut permettre à chacun de réussir, il faut
qu'on l'aide déjà à avoir confiance en lui. Et je pense que c'est assez
crucial. C'est-à-dire que si à la fois on vous permet d'avoir des rêves et
qu'on vous donne confiance, alors tout devient possible. Je pense que c'est une
très bonne idée de se dire que finalement de montrer aux jeunes les réussites
de ceux qui leur ressemblent, c'est sans doute un élément déterminant et on ne
le fait pas assez. Donc je crois que c'est un levier important. On en avait
parlé avec les ministres quand on a fait le plan de lutte contre le racisme et
toutes les discriminations. Voilà, il faut qu’on s’attaque contre à
déconstruire les préjugés, à lutter contre toutes les discriminations, à lutter
contre le harcèlement, là aussi, à des choses qui ont été faites mais
manifestement, en vous entendant on se dit qu’il faut vraiment aller beaucoup
plus loin et qu’en plus, vous avez des outils à nous proposer. On a abordé un
thème qu’on avait traité ou évoqué lors d'une précédente réunion sur
l'orientation professionnelle. On a ce gros sujet de l'orientation qui est à
l'origine de la reproduction des inégalités dans notre pays. Il faut vraiment
qu'on… enfin qu'on travaille comme on en a pris l'engagement dans la campagne
pour ouvrir à chacun tous les horizons, pour prendre différemment le sujet des
stages parce que, là aussi, c'est évident que, aujourd'hui, quand on dit :
Chacun se débrouille pour trouver son stage, selon son réseau, selon le réseau
de sa famille, chacun n'a pas exactement les mêmes chances que les autres. Sur
la scolarité elle-même, je pense qu'on a, là aussi, fait des choses sur le
dédoublement des classes, on est en train d'agir, le ministre est très engagé
sur la mixité sociale dans les établissements. Je pense que c'est aussi un
élément très important d'assurer que notre nation, qui est une et indivisible,
comme vous le disiez, les gens se connaissent, se rencontrent et qu'on ne vit
pas chacun dans son quartier, dans son collège, dans son lycée. Il y a aussi
beaucoup à faire sur l'aide à la méthode, là ce que vous avez dit, aide aux
devoirs, accompagnement global. Et je voudrais en profiter pour vraiment
remercier toutes les associations qui s'engagent. On veut évidemment agir, mais
votre rôle est extrêmement précieux. On a parlé de l'association ASAD, on a
Mozaïk RH qui travaille aussi beaucoup avec nous, on a un Coaching RH qui est
aussi une association très, très engagée sur ces sujets. On a besoin des
associations pour arriver à donner ces réponses globales dont les jeunes ont
besoin. J'ai entendu des questions sur les bourses. Je vous confirme que la
ministre y travaille. Les logements Crous, il faut qu'on accélère la
réhabilitation des logements, la remise en état, c'est évidemment un sujet
majeur. L'ASE, ce n'est pas la compétence directement de l'État, mais je pense
qu'on va en parler fortement avec les conseils départementaux. Ce n'est pas possible
de laisser un jeune à 18 ans, théoriquement à 21 ans, livré à lui-même. Ça
n'est pas raisonnable dans le monde dans lequel on est de laisser un jeune du
jour au lendemain sans solution et on en parlait avec les jeunes femmes avant
aussi. Finalement, ces jeunes qui se retrouvent dans ces parcours de l'aide
sociale à l'enfance, on leur demande d'être des adultes avant l'âge adulte.
Donc je crois qu'on a quand même beaucoup de choses à repenser pour ces
300 000, je crois, jeunes de l’ASE, donc, c'est aussi un défi très important.
Et puis, je pense qu'il faut qu'on agisse pour tous les territoires, les
territoires ruraux qui ont leur défi, les quartiers prioritaires de la
politique de la ville qui ont leurs défis avec des enjeux de mobilité qui sont
très importants. Ça fait plusieurs fois qu'on nous parle du permis de conduire,
donc je crois qu'on va vraiment y réfléchir. Voilà, en tout cas, merci. Merci à
nouveau pour toute votre énergie, pour vos témoignages très, très inspirants.
Cette question d'égalité des chances, je le redis, c'est au cœur de la promesse
républicaine, donc c'est finalement au cœur de ce que la République doit à
chacun. Et vraiment, vous pouvez compter sur moi sur ce sujet à vos côtés.
Merci beaucoup.
Matthieu
Merci à tous.