Compte rendu du Conseil des ministres du 24 mai 2023
Olivier VÉRAN
Mesdames, Messieurs,
permettez-moi de commencer ce compte-rendu par une pensée émue, pour Carène,
pour Manon, Paul, Steeve, Stéphane. Ces prénoms sont ceux de femmes et d’hommes
qui avaient choisi l’intérêt général et œuvraient pour les Françaises et les Français.
La pensée émue que j’aie pour ces agents publics qui ont perdu la vie et pour
leur famille est aussi accompagnée d’une pensée solennelle pour celles et ceux
qui choisissent de servir la France. Ils sont plus de 5 millions qui œuvrent
pour notre pays.
Des cantines aux blocs opératoires, de la collecte des déchets
à l’entretien des routes, de l’éducation de nos enfants à l’accompagnement des
aînés, de la sécurité dans nos quartiers aux opérations extérieures. Grâce à
elles, grâce à eux, la France change un peu plus chaque jour. Ils la protègent,
elle s’améliore. Ils la soignent, elle grandit. Ils la bâtissent, elle rayonne.
Merci à Carène, Manon, Paul, Steeve, Stéphane. Merci à tous les agents publics.
Merci à celles et à ceux qui rêvent et servent notre pays.
Le président de la
République a fixé un cap de 100 jours. Fidèlement à son souhait, le
Gouvernement est à la tâche. Ce cap, c’est aussi celui de l’accélération. La
feuille de route, je vous le rappelle, repose sur quatre piliers, essentiels au
développement du pays : travail et plein emploi, ordre républicain, progrès
pour tous, et transition énergétique.
Le premier axe est celui du travail qui
est abordé cette semaine, puisqu’au cœur de notre projet pour la France, il y a
le plein et le bon emploi. Dans quelques instants, le ministre du travail,
Olivier DUSSOPT, présentera le projet de loi relatif au partage de la valeur en
entreprise. Pour le dire en d’autres termes, car je sais que cette expression
peut parfois intriguer, il s’agit que tous ceux qui travaillent bénéficient
d’une plus juste distribution des richesses produites par l’entreprise. Quand
l’entreprise gagne plus, les salariés gagnent plus. Dans le contexte de hausse
de prix que nous connaissons, cette nouvelle est évidemment bienvenue. Et le 10
février dernier, les organisations syndicales, je les cite : le Medef, la CPME,
l’UDP, la CFDT, la FO, la CGC, la CFTC, une quasi intersyndicale en somme,
s’est déclarée en faveur d’un plus juste partage de la valeur, conformément au
souhait du Gouvernement ; c’était d’ailleurs dans le programme du candidat et
le président de la République élu fait ce pour quoi il s'était engagé.
Dans
quelques jours, le Gouvernement présentera aussi France Travail pour que le
plein emploi rime avec le bon emploi, mais aussi plus d’emplois. Tout cela en
renforçant l'accompagnement et la formation. Mais en même temps, le dialogue
social bat son plein entre Gouvernement et syndicats, afin de bâtir ensemble un
agenda social synonyme de progrès pour les Français qui travaillent. Salaires,
emploi des seniors, début et fin de carrière, il n'y a aucun tabou pour bâtir
cet agenda social.
Le deuxième axe, je le disais, progrès, ordre républicain et
sécurité, deuxième pilier essentiel à la souveraineté de notre nation. Lundi, a
débuté à l'Assemblée nationale la lecture de la loi de programmation militaire.
Les engagements financiers qui sont contenus dans cette loi sont à la hauteur
des menaces qui s'invitent aux portes de l’Europe, mais aussi partout où les
intérêts de notre nation sont. Nos compatriotes ont en effet parfois le
sentiment que la guerre est loin, mais la défense stratégique, c'est aussi le
quotidien des Français. C'est par exemple la protection des systèmes
informatiques de nos hôpitaux, des installations électriques pour continuer,
donc, à être soignés ou à se chauffer. Après un quinquennat pour réparer notre
armée, voici un quinquennat pour transformer notre armée. Gageons que sur un
projet de loi aussi nécessaire qu'ambitieux, les oppositions républicaines
sauront s'engager aux côtés de la majorité.
Troisième axe : la transition
énergétique. La transition écologique, c’est un pilier incontournable de
l’avenir de la France, mais aussi de la planète. C'est donc un enjeu
fondamental pour le Gouvernement. Les résultats sont là puisque nous réduisons
nos émissions de gaz à effet de serre plus vite que prévu et nous allons encore
accélérer dans tous les secteurs pour devenir une nation zéro émission
conformément à nos engagements.
Lundi, vous le savez, s'est tenu le Conseil
national de la Transition écologique qui a été l'occasion, autour de la
Première ministre, de mettre autour de la table l'ensemble des acteurs de la
planification écologique. La planification, c'est l'action. Pour preuve, un
décret qui met en œuvre l'interdiction des lignes aériennes quand il existe une
alternative de moins de 2 heures 30 en train ; ce décret a été publié hier.
C'est une mesure qui est issue de l'intelligence collective de la convention
citoyenne pour le climat. Souvenez-vous de cette convention qui a apporté
beaucoup de propositions et elles se réalisent, elles se concrétisent, les unes
après les autres. Cette interdiction d'utiliser l'avion quand il y a des
alternatives en train à moins de 2 heures 30, c’est aussi, je le dis, une
première sur la planète. C'est un souhait citoyen, un souhait populaire, que le
Gouvernement traduit en actes. Très concrètement, ce décret a pour effet
immédiat d'interdire les liaisons aériennes entre Nantes, Bordeaux, Lyon et
Paris-Orly. Si nous planifions, c'est pour agir. Si nous fixons un cap, c'est
pour accélérer, et quand nous le faisons, c'est pour les Français.
J'en viens
au texte présenté, ce jour, en Conseil des ministres, à l'exception donc du
projet de loi sur le partage de la valeur qui vous sera présenté par Olivier
DUSSOPT juste après mon intervention. Le ministre de l'Économie, le ministre de
la Santé et le ministre des Comptes publics ont présenté un projet de loi qui
approuve les comptes de la Sécurité sociale pour l'année 2022. C'est la première
fois que cette approbation fait l'objet d'un texte distinct. C'est ainsi
l'occasion de rendre plus lisible, plus transparente, la situation des comptes
sociaux, notamment vis-à-vis des parlementaires. En 2022, le solde des régimes
obligatoires de la Sécurité sociale est déficitaire, et ce, à hauteur de 19,6
milliards d'euros. C'est un déficit qui s'est néanmoins résorbé de plus de 4
milliards d'euros. C'est aussi bien à la sortie de la crise sanitaire, que le
dynamisme de l’emploi, qui permettent cette amélioration de la santé financière
des comptes de la Sécurité sociale.
Le garde des Sceaux a ensuite présenté un
projet d'ordonnance qui porte réforme du régime des fusions, scissions, apports
partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales.
Cette ordonnance vient transposer une directive européenne qui traduit la
stratégie de la Commission européenne de renforcer le marché unique numérique.
Le ministre de l'Économie et le ministre de l'Intérieur et des Outre-mers ont
présenté une ordonnance qui modifie les dispositions du Code général de la
propriété des personnes publiques relative à la Polynésie française. C'est une
ordonnance qui transfère à l'Etat la compétence pour étendre les règles
applicables à son domaine privé et à celui de ses établissements publics.
Enfin, avant de prendre vos questions et de passer la parole au ministre du
Travail, je terminerai sur une bonne nouvelle, bucolique celle-ci, mais pas
que, puisque c'est aujourd'hui la fête de la nature. Le ministre de la Transition
écologique a présenté une communication à ce sujet, en Conseil des ministres.
Cet événement, qui débute aujourd'hui, se tiendra jusqu'au lundi 29 mai. C'est
un moment de partage, de célébration, mais aussi et surtout, de sensibilisation
autour de la nature et de la biodiversité, notamment, de sensibilisation des
enfants de notre pays. La Fête de la nature va compter cette année plus de
10 000 animations dans près de 2 000 sites partout sur le territoire. C'est
l'occasion de ramener la nature en ville, de reconnecter partout où elle se
trouve et où il faut la préserver. Cet événement existe grâce à l'engagement de
milliers de bénévoles, de centaines d'associations et du soutien de l'Office
français de la biodiversité et des collectivités locales. C'est l'occasion
d'une prise de conscience individuelle et collective.
Je vous remercie. Je suis
prêt à prendre vos questions avant de passer la parole.
Sami SFAXI
Bonjour Monsieur le
Ministre. Sami SFAXI pour BFM TV. Une première question, qui concerne la sécurité
dans les hôpitaux. Il y a eu ce drame au CHU de Reims, en tout cas à BFM, on a
une multiplication des témoignages de personnels hospitaliers qui ne se
sentiraient pas forcément en sécurité dans ces hôpitaux, de façon un peu plus
globale sur les agents de l'Etat. Est-ce que le Gouvernement a prévu des
mesures de sécurité ? Ou est-ce que tout simplement le Gouvernement n'a pas
tardé à prendre des mesures de sécurité pour protéger ces agents de l'Etat et
en particulier dans les hôpitaux ? Merci.
Olivier VÉRAN
Le Gouvernement est
déterminé à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger ces agents. Et
les drames qui sont intervenus, et auxquels j'ai fait allusion en ouverture de
ce compte-rendu, montrent l'urgence à continuer d'agir. Ce n'est pas le début
de l’action, c’est la continuité de l'action, voire l'amplification là où c'est
nécessaire. Mais interrogeons-nous, interrogeons-nous sur une société au sein
de laquelle les gens qui soignent, qui prennent soin, des gens qui portent la
blouse, des gens qui consacrent leurs journées, leurs nuits à préserver la
santé des autres se voient menacés, se voient menacés. Il n’y a même plus cette
limite, cette restriction, cette capacité à respecter celui ou celle qui sauve
la vie des gens et soigne. Je vais terminer ma réponse. Les violences
constatées dans le milieu de la santé, on les constate dans tous les autres
domaines. Elles ont peut-être été plus tardives dans leur mode d’apparition.
Mais, souvenez-vous, il y a déjà des années, des médecins, des SOS médecins,
qui se faisaient parfois dégrader leur véhicule ou menacer, des infirmières
dans les hôpitaux. J’ai moi-même, comme médecin hospitalier, dans les gardes
aux urgences, vécu des scènes de tension parfois avec des malades ou avec des
familles. Les causes peuvent être multiples, mais elles doivent nous interroger
sur ce qu’est une société, au sein de laquelle le respect fondamental pour les
agents publics, pour ceux qui soignent, pour ceux qui prennent soin, ceux qui
portent attention, ceux qui secourent, se verrait menacé.
Sami SFAXI
Comment vous expliquez,
vous, cette augmentation, notamment des médecins ? Je crois qu'il y a une
vingtaine de % d'agressions supplémentaires sur l'espace d'une seule année.
Comment est-ce que vous vous l'expliquez ? Beaucoup parlent du Covid, du
confinement de ces choses-là. Est-ce que vous avez, vous, des chiffres, une
analyse, quelque chose ?
Olivier VÉRAN
D'abord, lorsque j'étais
ministre en charge de la Santé, j'avais tenu à ce qu'on puisse justement
accompagner toute démarche qui permettrait de mieux enregistrer le nombre de
violences verbales ou physiques auxquelles peuvent être, dont peuvent être
victimes les soignants. Et donc parce qu'aujourd'hui nous mesurons mieux, nous
sommes capables de mieux cerner l'étendue du problème. Est-ce qu'il y a une
accentuation ? C'est l'évaluation dans la durée qui le permettra. Je ne le
souhaite pas, puisque que je souhaite que par l'action que nous allons
conduire, aux côtés, d'ailleurs, des représentants des professions de santé,
nous puissions faire freiner et faire reculer ces scènes de violence. Mais je
le redis, encore une fois, il peut y avoir, vous savez, dans les services
d'urgences hospitalières, parce que c'est là que sont constatées beaucoup de
situations de tension. Il peut y avoir de la peur, il peut y avoir de
l'angoisse et de la détresse. Vous avez quelqu'un qui est malade, vous avez
l'impression, peut-être, qu'on met trop de temps à le soigner ou que les
conditions, parce que c'est compliqué de travailler aux urgences. En aucun cas,
en aucun cas, cela ne justifie de faire pression ou de menacer, voire d'en
atteindre, d’en attenter à la santé de ceux qui soignent. C'est encore une
fois, dans une société fonctionnelle, c'est quelque chose qui ne doit pas
arriver. Dans une civilisation mature, c'est quelque chose qui ne peut arriver
et qui ne peut être toléré. Donc, comptez sur notre détermination, encore une
fois, aux côtés des professionnels.
Journaliste
Bonjour Monsieur le
Ministre, (inaudible) de CNN. Le président de la République a dit la semaine
dernière que la France est prête à former des pilotes ukrainiens. Et cette
semaine, vu qu’il y a eu beaucoup de discussions, de potentielles livraisons,
des jets F-16 en Ukraine, comment la France compte y participer, vu que la
France ne possède actuellement des jets F-16, comment la France pourrait former
des pilotes pour l'Ukraine ? Merci.
Olivier VÉRAN
Alors, je ne rentrerai
pas, pardonnez-moi, ici, dans le détail, dans les voies et moyens que la France
compte mettre en place pour former ou pour accompagner militairement l'Ukraine
dans le conflit dont elle est la victime. Je peux vous confirmer que le
dialogue bat son plein au niveau diplomatique, notamment entre la France,
l'Ukraine et l'ensemble des partenaires internationaux, notamment européens,
pour faire en sorte qu'on vienne en aide de manière efficace. Et l'engagement
de former, c’est le savoir-faire français qui doit être utile à la paix et
donc, utile aux Ukrainiens.
Journaliste
Merci.
Quentin CHATELLIER
Bonjour, Quentin
CHATELLIER, Liaisons Sociales. Une question sur le projet de loi immigration.
Les Républicains ont posé une ligne rouge, ce week-end, très claire sur le
titre de séjour : métiers en tension. Est-ce que pour vous, pour le
Gouvernement, cette disposition est négociable ? Est-ce qu'il est possible
qu'elle soit retirée dans le futur texte qui sera présenté dans les prochaines
semaines ? Merci à vous.
Olivier VÉRAN
Ce que le Gouvernement
veut, c'est une loi sur l'immigration et l'intégration qui soit utile et
efficace. Et donc, on entre dans cette négociation avec pragmatisme, avec le
souci de l'efficacité. Qu’entend-t-on, quand on discute avec des chefs
d'entreprise, dans le bâtiment, dans la restauration, on entend la nécessité de
faciliter le recrutement dans des métiers en tension. Que constate-t-on
d'ailleurs, quand on se déplace sur des chantiers ou qu'on va dans des
restaurants ? Je citais deux exemples, mais il y a bien d'autres domaines
encore qui sont concernés, vous parliez de la santé tout à l'heure, on constate
qu'il y a recours aujourd'hui à de la main-d'œuvre étrangère. Ce qu'on veut,
c'est donc permettre aux employeurs qui en ont besoin de faire fonctionner
leurs administrations, leurs entreprises, leurs commerces, dans les meilleures
conditions possibles. Il me semble que sur une position pragmatique, opposer un
refus dogmatique n'est pas la meilleure manière de démarrer un dialogue. Par
ailleurs, Les Républicains ont le mérite de faire des propositions. Donc, ils
ont mis au pot commun, au débat, des propositions. J'appelle la gauche
française à être capable à son tour d'émettre des propositions et de rentrer
dans cette discussion. Je n'imagine pas que la social-démocratie française
décide de rester en dehors du coup, lorsqu'il s'agit de parler de
l'immigration, de l'intégration dans notre pays. Et fort de l'ensemble des
propositions de la majorité, vous les connaissez, nos propositions, être
capable de mieux expulser ceux qui n'ont pas vocation à rester en France, de
répondre au plus vite aux demandeurs d'asile pour permettre à ceux qui peuvent
rester de travailler plus vite et de subvenir à leurs besoins et en même temps
de permettre à ceux qui n'ont pas vocation à rester de ne pas passer deux ans
sur le territoire dans l'attente. Et c'est aussi permettre aux secteurs en
tension de pouvoir recruter dans de bonnes conditions. Vous connaissez nos
propositions. On est ouvert à la discussion, mais pas à n'importe quelle
discussion et on a besoin de connaître l'ensemble des propositions des
oppositions républicaines.
Quentin CHATELLIER
Mais, est-ce que votre
réponse veut dire que la suppression du titre de séjour métiers en tension est
totalement exclue ?
Olivier VÉRAN
Ça veut dire qu'il ne me
revient pas aujourd'hui de discuter, ici, des conclusions qu'on donnerait à une
négociation qui s'est à peine ouverte. Et je vous le dis, il nous manque encore
des propositions d'une partie de l'opposition.
Quentin CHATELLIER
Merci beaucoup.
Jeff WITTENBERG
Bonjour Monsieur le
Ministre. Jeff WITTENBERG, France Télévisions. Une question qui concerne un
pays voisin, la Belgique, qui vient d'annoncer que les électeurs, à partir de
16 ans, pourront voter aux élections européennes. C'est déjà le cas en
Allemagne, en Autriche et à Malte, je crois. Que pensez-vous de cette
initiative ? Et est-ce que la France envisage aussi d'abaisser, un jour, le
droit de vote pour certaines élections, voire pour toutes ? Merci.
Olivier VÉRAN
Alors, j'étais justement
à Bruxelles il y a 3 semaines, je crois, pour rencontrer, notamment, la
ministre de l'Intérieur, avec qui j'ai abordé cette question du vote à 16 ans,
notamment. Donc, c'était une recommandation européenne que de permettre pour
les seules élections européennes pour l'instant. Ils l'ont mis en place dans le
cadre de la coalition gouvernementale belge et ils attendent d'en avoir une
première évaluation, à savoir qui va voter, comment les choses se déroulent.
Donc, on va regarder en tous les cas, à tout le moins, comment les choses vont
se passer là-bas. Il n'y a pas aujourd'hui de projet d'étendre le droit de vote
aux 16 ans et plus. Il y a des études d'opinion qui montrent d'ailleurs que
l'opinion est très partagée là-dessus. Moi-même, en charge du renouveau
démocratique, je consulte beaucoup les représentants des jeunes sur ces
questions. On voit que les avis sont partagés au sein même de cette population
jeune.
Jeff WITTENBERG
Quel est votre avis ?
Olivier VÉRAN
Mon avis, je suis
porte-parole du Gouvernement. Dans ce cadre, dans le cadre de cet exercice, je
me garde bien de donner un avis, sinon on ne s'en sortirait pas. Mais à
l'occasion, j'aurais plaisir à discuter du fond avec vous.
Adrien BECK
Bonjour, Adrien BECK,
Franceinfo. Votre collègue Charlotte CAUBEL, à propos de la proposition de loi
du groupe Liot sur l’abrogation d'une partie de la réforme dit : « Nous ferons tout pour que ce débat n'ait
pas lieu ». Est-ce que c'est vraiment l'intention du Gouvernement ? Et si c'est
le cas, est-ce que ce n'est pas un peu problématique de vouloir empêcher ne
serait-ce que le débat ?
Olivier VÉRAN
Ce qui est problématique,
c'est qu’un groupe parlementaire dépose une proposition parlementaire de loi dont
il sait qu'elle n'est pas conforme à la Constitution et qu'à la fin des fins,
vous ne trouverez aucun juriste pour vous dire qu'il y ait la moindre chance
que cette proposition de loi aille, comme on dit, au bout, dans le sens où il
n'est pas constitutionnel, pour des parlementaires, de prendre 15 milliards
d'euros par an dans le budget de l'État sans compensation. Et appeler à ce
qu'il y ait une concertation pour définir les moyens de compenser ce trou de 15
milliards par an n'est pas une compensation dans la loi. C'est l’ancien
parlementaire, rapporteur, que j'étais, rapporteur général du budget de la
Sécurité sociale qui vous le dit. D'ailleurs, la présidente de la Commission
des Affaires sociales, Madame Fadila KHATTABI, vient d'écrire à son homologue
de la commission des Finances, Monsieur COQUEREL, pour s'interroger sur
l'existence de cette proposition parlementaire de loi qui ne remplit pas les
conditions élémentaires constitutionnelles. Donc, il revient au Parlement, qui
est souverain en la matière, de déterminer, si oui ou non, cette proposition
parlementaire de loi a vocation à être examinée. Après sur un terrain plus
politique. Les oppositions et notamment le groupe Liot, nous ont reproché de
vouloir examiner une réforme des retraites en 40 et quelques jours, et
aujourd'hui nous explique qu'en quelques heures, ce serait suffisant pour
abroger. Je vous rappelle que dans le débat parlementaire à l'Assemblée
nationale, je l'ai dit plusieurs fois, nous voulions, le Gouvernement, aller au
bout de l'examen du texte et aller au vote. Certaines oppositions ont fait en
sorte que nous ne puissions pas aller au-delà de l'article 2 du projet de loi
sur plus de 40 articles, me semble-t-il. Olivier DUSSOPT le dira, me fera les
gros yeux si je me trompe. Expliquez-moi comment, en quelques heures, on peut
défaire ce qui n'a pas été possible de construire jusqu'au bout, d'après eux,
en 40 jours ? C'est très compliqué. Et puis, par ailleurs, cette loi est
promulguée depuis moins de deux mois, ça ne se fait pas d'abroger. Bref, il y a
énormément d'éléments là dedans qui posent problème d'un point de vue
logisitique et d'un point de vue de forme. Du point de vue du fond, encore une
fois, qui nous explique comment est-ce qu’ils comptent compenser les 15
milliards d'euros par an, est-ce qu'ils augmentent les cotisations des
Français, est-ce qu'ils réduisent les pensions des retraités ou est-ce qu'ils
alourdissent la dette pour les générations actuelles et à venir ? Donc, nous
verrons quelles seront les conditions du débat. Je vous le redis, cette
proposition parlementaire de loi, à nos yeux, n'est pas constitutionnelle,
n’est pas constitutionnelle. Et logiquement, le Parlement devrait être en
mesure de déterminer s'il y a lieu, ou non, de l’examiner.
Adrien BECK
Donc, vous ferez tout
pour que le débat n'ait pas lieu, comme l’a dit la secrétaire d’État ?
Olivier VÉRAN
Mais non, on ne fait
tout, là, on vous parle, je parle du Parlement. Vous avez ici le représentant
du Gouvernement. Il y a la séparation des pouvoirs entre le Gouvernement et le
Parlement. Nous, nous serons présents, au banc, si cette PPL était examinée, il
y aura le Gouvernement qui sera présent au banc et qui dira sa position. Mais
c'est une étape et c'est une démarche parlementaire. Épuisement des questions ?
Non.
Journaliste
Une toute petite question
de calendrier. Est-ce qu'il est prévu que le président de la République reçoive
les partenaires sociaux dans les prochains jours et si oui, à quelle date ?
Olivier VÉRAN
Alors, je sais que c'est
la Première ministre qui reçoit les partenaires sociaux et elle fera d'ailleurs
cet après-midi un déplacement, elle aura peut-être l'occasion de s'exprimer sur
le sujet, je ne peux pas vous le confirmer. Mais, donc, de la pré-définition
dans laquelle nous sommes de l'agenda social, il va être maillé, jalonné de
plusieurs étapes pour définir le contenu des discussions. On a laissé la main,
si je puis dire, aux partenaires sociaux et aux organisations patronales, pour
dire les voies et moyens par lesquels il souhaite discuter avec nous. Donc, je
ne peux pas vous confirmer, ni infirmer l'idée qu'il y a à un moment donné un
temps d'échange avec le Président. Je n’ai pas la réponse à cette question. Oui
?
Journaliste
Juste une toute petite
question de précision. J'aimerais revenir sur le texte sur l'immigration. En
fait, comment est-ce que vous pouvez trouver finalement un chemin avec les
Républicains, puisque vous aurez besoin des Républicains pour voter ce texte ?
Alors qu’eux, dans leurs déclarations ces derniers jours, notamment dimanche,
en fait, proposent des choses qui n'ont rien à voir avec ce que, vous, vous
avez proposé, c’est-à-dire suppression de l'AME, constitutionnaliser
l'assimilation ? Enfin, en fait, on a du mal à comprendre comment un texte
pourrait émerger et comment est-ce que vous pourriez trouver une forme de
consensus avec les LR sur cette question ? Est-ce qu’en gros, il y a un risque
qu’il n’y ait tout simplement pas de texte sur l'immigration, pas de vote ou
pas de majorité ?
Olivier VÉRAN
D'un point de vue
purement, réponse formelle, la Première ministre a chargé le ministre de
l'Intérieur, Gérald DARMANIN de réfléchir aux conditions d'un accord avec une
ou des oppositions, de manière à dégager une majorité sur ce texte. Et donc, il
y a plusieurs semaines pour pouvoir réaliser cela, avant qu'un texte soit
présenté en Conseil des ministres au mois de juillet. Après, moi, ce que j'ai
le plus de mal à comprendre, c'est la nature des propositions de certaines
propositions, en tout cas, des Républicains. Quand on est les garants du
Gaullisme, aller proposer de changer la Constitution pour pouvoir faire des
référendums sur des sujets pour lesquels les tenants du Gaullisme, eux-mêmes,
quand ils ont pensé à l'outil référendum, ont exclu de fait, par exemple, les
questions migratoires de ce champ. Bon, c'est un sacré virage pour les LR. Et
puis vous parliez de l'aide médicale d'Etat. Enfin, on a parlé d'un texte qu'on
souhaitait efficace, pragmatique et utile. Voilà. L'aide médicale d'Etat, c'est
juste le moyen, pour des hôpitaux qui, de toute façon, soigneront des gens
parce qu’ils sont malades, d'être payés pour les soins qu'ils ont donné. Donc,
à chaque fois que vous rognez sur l'aide médicale d'Etat, vous creusez la dette
des hôpitaux. La non assistance à personne en danger ne fait pas partie de
l'ADN de nos soignants et de notre pays. Donc, encore une fois, quand je parle
de solutions efficaces et utiles, restons dans l'efficace et l'utile. Merci. Et
je passe la parole à Monsieur Olivier DUSSOPT, ministre du Travail que vous
connaissez bien.
Olivier DUSSOPT
Bonjour à toutes et à
tous.
Peut-être quelques mots sur la question du partage de la valeur et des
différents dispositifs qui préexiste à l'accord national interprofessionnel
puisque depuis maintenant plusieurs décennies, nous avons à la fois des
mécanismes d'intéressement, des mécanismes de participation et depuis le début
du premier quinquennat d'Emmanuel MACRON, beaucoup de choses ont été faites en
la matière, que ce soit avec la loi Pacte, la simplification et l'allégement
d'un certain nombre d'éléments fiscaux sur les questions de participation et
d'intéressement, ou encore avec la loi de finances rectificative du 16 août
2022, que nous avions examiné avec le Parlement dès le début du second quinquennat,
qui a permis, là encore, de faciliter les accords d'intéressement, notamment
dans les plus petites entreprises, de faciliter la décision unilatérale en cas
d'échec du dialogue social sur ces sujets-là et de simplifier encore les
différents dispositifs.
En septembre dernier, j'ai demandé aux partenaires
sociaux d'ouvrir des discussions en vue de la conclusion d'un accord national
interprofessionnel sur le partage de la valeur, avec la volonté d'aller plus
loin. Plus loin que les systèmes qui existent et les dispositifs que j'ai
évoqués, et plus loin, notamment pour couvrir les petites entreprises, les
moins de 50 salariés qui étaient exclus, en tout cas, non couvertes par les
obligations qui concernent les autres.
Cet accord a été discuté pendant plusieurs
mois et je tiens à souligner l'aboutissement de cet accord dans la mesure où,
lorsque nous avons ouvert cette discussion au mois de septembre, bien peu
d'observateurs imaginaient que ça serait possible, ou en tout cas, imaginaient
que ça serait facile d'aboutir à un accord sur le partage de la valeur entre
les partenaires sociaux. D'abord, parce que c'est un sujet complexe, qu'il faut
savoir délimiter et qu'il faut savoir appréhender. Mais aussi parce que des
discussions autour de cet accord ont eu lieu parallèlement à d'autres
discussions, en particulier sur la réforme des retraites. Et c'est d'ailleurs
la démonstration que le dialogue social ne s'est pas interrompu pendant cette
période-là. Le 10 février, un accord a été conclu.
Cet accord a été signé par
les 3 organisations patronales représentatives et par 4 des 5 organisations
syndicales représentatives. Il s'organise et il s'articule en 4 points qui sont
les 4 points repris par le projet de loi. Le premier point consiste à favoriser
le dialogue social autour des questions de partage de la valeur, mais pas
seulement. Il y a à la fois la volonté de rappeler le principe de non
substitution entre les primes et les salaires. C'est un principe de droit qui
existe, mais que l'accord appelle.
Il y a aussi un engagement, qui est
important, des branches professionnelles consistant à négocier ou à renégocier
plus exactement les classifications, dans le cadre des conventions collectives
en matière de rémunération. C'est un point important parce que souvent, nous travaillons
sur les minima conventionnels, notamment lorsque le Smic est augmenté. Mais la
classification et la révision des grilles de classification permet de revoir
aussi l'éventail des salaires au sein des négociations collectives et donc de
donner des perspectives en matière de promotions et d'évolution salariale.
Le
deuxième pilier, qui est peut-être vu comme le pilier principal, concerne
justement tout ce qui permet de faciliter le partage de la valeur dans les
entreprises, avec notamment la possibilité de déroger aux formules légales de
calcul de la participation et de l'intéressement, dans le cadre d'accords de
branche, pour l'ensemble des entreprises de moins de 50 salariés, avec une
nouveauté qui est importante, qui consiste à dire que toutes les entreprises de
moins de 50 salariés, qui réalisent un résultat positif, au moins égal à 1 % de
leur chiffre d'affaires, pendant 3 années consécutives, devront mettre en place
un outil de partage de la valeur de participation ou d'intéressement, lorsque ce
n'est pas déjà le cas. Avec la volonté aussi de mettre en place des mécanismes
qui, lorsqu'il y a un résultat exceptionnel, permettent le versement d'un
montant de participation ou d'intéressement qui soit, lui aussi, exceptionnel
et ainsi d'associer les salariés à une réussite exceptionnelle de l'entreprise.
Il y a toujours, dans ce pilier-là, une volonté de favoriser la mise en œuvre
d'outils qui existent déjà. Je pense notamment à la prime de partage de la
valeur qui a succédé à la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, qu'on
appelle parfois la prime Macron, qui a concerné, l'année dernière, 5,5 millions
de salariés, pour 4,4 milliards d'euros et un montant moyen d'environ 790
euros. Et donc, l'accord prévoit de pérenniser certaines dispositions, comme la
possibilité de le verser en deux fois ou encore la possibilité de verser cette
prime de partage de la valeur sur des plans d'épargne salariale, ce qui serait
une nouveauté par rapport au dispositif qui existe.
Enfin, pour faciliter la
mise en œuvre de la prime de partage de la valeur, l'accord propose de proroger
pour 3 ans le régime fiscal et social particulier de la prime de partage de la
valeur, dans les entreprises de moins de 50 salariés. Le troisième point
concerne essentiellement des dispositions administratives de simplification et
coordination, je n'y reviens pas.
Et, enfin, le quatrième pilier concerne le
développement de l'actionnariat salarié, avec notamment une augmentation du
plafond de versements d'actions gratuites aux salariés et la possibilité de
favoriser la mise en œuvre de produits d'épargne verte, notamment dans le cadre
des plans d'épargne retraite.
Quels sont les débats qui nous attendent à
l'occasion de l'examen de ce texte au Parlement ? Il y en a 3. Le premier
concerne l'article 5 qui est celui qui prévoit la mise en œuvre d'un montant
exceptionnel de participation ou d'intéressement lorsqu'il y a résultats
exceptionnels. L'accord prévoit que c'est le chef d'entreprise qui décide si le
résultat est exceptionnel ou s’il ne l’est pas. A l’occasion de l’examen du
texte par le Conseil d’État, un certain nombre de remarques nous ont été
faites, dont nous avons tenu compte. Et avec l’accord des trois organisations
patronales, nous avons proposé au Conseil d’Etat une rédaction alternative
permettant de dire que le résultat est considéré comme exceptionnel sur des
critères établis dans une négociation d’entreprise et un accord d’entreprise.
Vous verrez que dans l’avis du Conseil d’État, celui-ci considère toujours que
le renvoi à une négociation d’entreprise n’est pas suffisamment solide et
pourrait faire courir un risque d’incompétence négative. Nous allons travailler
avec le Parlement et travailler avec les partenaires sociaux signataires de
l’accord pour venir consolider la définition du caractère exceptionnel, dans le
cadre d’une négociation d’entreprise, l’avis du Conseil d’État nous permettant
d’apporter des réponses à ce point là.
Le deuxième sujet concerne la
prorogation, pour trois ans, du régime fiscal et social très particulier et très
avantageux de la prime de partage de la valeur dans les entreprises de moins de
50 salariés. Le Conseil d’État considère dans son avis que cette prorogation
fait que cette prime de partage de la valeur n’aurait pas un caractère
expérimental ou exceptionnel comme c’était le cas précédemment et que cela
pourrait interroger, en matière de principe d'égalité devant l'impôt. Nous
savons ce risque, mais nous considérons que la fidélité à l’accord et la
volonté de transposer intégralement et fidèlement au profit des entreprises de
moins de 50 salariés nécessite d'avancer avec cette disposition.
Enfin, les
organisations syndicales signataires de l'accord, c'est-à-dire toutes à
l'exception de la CGT, nous ont signalé et nous ont indiqué qu'un certain
nombre de dispositions de l'accord n'apparaissait pas dans le projet de loi tel
que transmis au Conseil d'Etat. C'est la réalité. Il s'agit de dispositions
qui, à nos yeux et aux yeux de l'ensemble des juristes, sont déjà satisfaites
par la loi. Lorsque l'accord rappelle le principe de non substitution des
primes et des salaires, c'est une disposition qui existe déjà dans le Code du
travail. Il n'y a pas lieu de la répéter. Nous allons travailler avec les
partenaires sociaux et les parlementaires pour voir si, dans le cadre de la
rédaction, de l'amélioration du projet de loi au Parlement, nous pouvons
apporter des précisions sans remettre en cause l'existence juridique et la
clarté juridique qui aujourd'hui concerne la question de la non substitution
des primes aux salaires.
C'est un projet de loi qui sera présenté au Parlement
dans les prochaines semaines. L'objectif est qu'il soit adopté avant l'été pour
permettre une mise en œuvre extrêmement rapide. Il y a deux caractéristiques au
travail, qui ont conduit à l'élaboration de ce projet de loi. La première
caractéristique est que nous tenons évidemment l'engagement du président de la
République et de la Première ministre d'une transposition intégrale et fidèle
de cet accord. C'est tout l'accord et rien que l'accord.
La deuxième
caractéristique, c'est que nous avons veillé à une concertation des échanges
permanents avec les sept partenaires sociaux signataires de l'accord pour que
chaque modification — c'est le cas par exemple du renvoi à un accord
d'entreprise plutôt qu'à la seule décision du chef d'entreprise sur le
caractère exceptionnel des résultats — soit réalisée dans un consensus
avec l'ensemble des signataires. Et à l'occasion du débat au Parlement, je
veillerai à ce que l'avis du Gouvernement soit toujours appuyé sur un consensus
des organisations signataires pour respecter parfaitement la fidélité de la
transposition de cet accord.
Simon LEBARON
Bonjour Monsieur le
Ministre, Simon LEBARON pour France Inter. Est-ce que le Gouvernement considère
que cet accord, et la transposition dans la loi de cet accord, vous exonère
d'un grand débat ou d'une conférence sur les salaires ?
Olivier DUSSOPT
Non, et d'abord l'accord
lui-même ne traite pas de la question des salaires, à aucun moment, sinon pour
rappeler qu'il n'y a pas de substitution entre les primes et les salaires. Et
sur la question des salaires, il y a un aspect de l'accord qui nous semble particulièrement
intéressant, c'est le fait d'avoir une discussion entre partenaires sociaux sur
les questions de classification. En moyenne, les classifications sont révisées
tous les 12 ans. Et donc le fait d'accélérer et de fixer un rythme à 5 ans va
avoir un impact, un effet sur les éventails de salaires. J'aurais pour ma part
à réunir le comité de suivi des négociations salariales qui concerne chacune
des branches professionnelles, à la mi-juin, normalement le 14 juin mais la
date n'est pas encore tout à fait arrêtée et définitive, justement pour veiller
à ce que le dialogue social, puisque c'est comme cela que cela fonctionne, soit
le plus dynamique possible autour de la question des salaires.
Simon LEBARON
Cette question des
salaires donc doit être, selon vous, traitée au niveau des branches, au niveau
des entreprises, pas au niveau national ?
Olivier DUSSOPT
Exactement. La loi telle
qu'elle existe aujourd'hui, et telle que nous l’appliquons, prévoit depuis
longtemps que le salaire minimum est indexé sur l'inflation, avec un calcul de
la revalorisation du SMIC au 1ᵉʳ janvier, qui tient compte de l'inflation de
l'année précédente, et avec une disposition particulière que nous mettons en
œuvre depuis maintenant un peu plus de 18 mois qui consiste à dire que lorsque
l'inflation constatée depuis la dernière révision est supérieure à 2%, il y a
des révisions intermédiaires. Nous en sommes à de nombreuses révisions
intermédiaires, ce qui explique que, sur les douze derniers mois, le Smic ait
été augmenté de 6% ; et que sur les 15 derniers mois, depuis le 1ᵉʳ janvier
2022, l'augmentation soit de 8,2%. Par contre, la fixation des salaires relève,
pour les niveaux conventionnels, du dialogue social de branches, avec là aussi
une particularité, en tout cas un contexte, c'est le fait que la loi prévoit
que lorsqu'une branche voit un de ces niveaux conventionnels passer en dessous
du Smic, bien évidemment aucun salarié n'est payé en dessous du Smic, mais
lorsqu'un niveau conventionnel passe en dessous du Smic les branches ont une
obligation de négociation. Cette obligation était encadrée par un délai maximum
de 90 jours depuis la loi du 16 août 2022. Nous avons ramené ce délai à 45
jours pour accélérer et éviter que se crée un décalage trop long entre des
niveaux conventionnels inférieurs au Smic et le Smic.
Virginie RIVA
Virginie RIVA, Contexte.
Une double question peut-être sur l'enjeu central qui va être devant nous sur
la définition des résultats exceptionnels. Est-ce que vous pouvez d'abord nous
en dire un tout petit peu plus sur l'avis du Conseil d'État, sur les
recommandations ? Est-ce que ça porte sur la méthode de négociation en
entreprise ? Est-ce que l'idée, c'est de rester sur ce postulat qui avait été
posé et défendu notamment par les organisations patronales de renvoyer ça à
l'entreprise ? Ou alors, deuxième question, est-ce qu'on peut imaginer que, à
terme, dans vos concertations, c'est la loi et le Parlement qui va devoir fixer
un seuil, un peu sur le modèle de ce qui a été fait au niveau européen pour les
énergéticiens ? Merci.
Olivier DUSSOPT
L'avis du Conseil d'État
sera rendu public ce soir, donc chacun pourra voir très précisément ce que
propose le Conseil. Lors des discussions et des travaux du Conseil d'État en
section des affaires sociales, il a été dit, par la section, lors de l'avis de
la section, que le renvoi à la seule décision du chef d'entreprise souffrait
d'une incompétence négative. Et dans les échanges techniques qui ont eu lieu,
il nous a été suggéré — c'était une piste que nous avions déjà regardé
— de renvoyer à un accord d'entreprise. De ce que je sais et de ce que je
lis de l'avis du Conseil d'État en assemblée générale, la méthode est plutôt la
bonne. Après, il faut apporter des précisions sur les critères et sur
l'encadrement de cette négociation. C'est à cela que nous allons travailler
avec les parlementaires, en lien avec les quatre organisations syndicales et
les trois organisations patronales signataires, pour respecter cette règle de
consensus, et de consensus autour de toute modification qui se traduirait par
un léger décalage par rapport au contenu de l'accord tel qu'il a été signé.
Journaliste
Bonjour Monsieur le
Ministre. Toujours sur cette question des bénéfices exceptionnels, donc, vous
renvoyez à une négociation d'entreprise. Que se passe-t-il si la négociation
échoue ? Est ce qu'il est prévu…
Olivier DUSSOPT
Cela fait partie des
discussions qui auront lieu avec le Parlement. Dans l'accord, tel que l'accord
a été conclu par les partenaires sociaux, il n'y a pas de mécanisme supplétif.
Journaliste
Très bien. Et une autre
question sur le dispositif annoncé par le président de la République il y a
quelques semaines sur les rachats d'actions, il n'est pas dans le texte. Est-ce
que ça veut dire que cette mesure est abandonnée ou est-ce qu'il est prévu
qu'elle soit reprise dans un futur texte ?
Olivier DUSSOPT
Ça veut dire que cette
mesure n'est pas dans l'accord et que l'accord des partenaires sociaux que nous
transposons, nous le transposons de manière fidèle, tout l'accord rien que
l'accord. Et sur le dispositif annoncé par le président — et pour le texte que
je porte. Pour le dispositif annoncé par le président de la République, les
travaux techniques sont encore en cours à Bercy et ils ne sont pas achevés.
Donc, nous verrons dans les prochaines semaines si un véhicule législatif et,
dans le pire des cas, les PLF et les PLFSS sont les véhicules les plus
appropriés, se présente pour pouvoir porter ce dispositif, mais il est encore
en cours d'instruction d'un point de vue technique.
Journaliste
Merci.
Sylvie CORBIN
Sylvie Corbin. Associated
Press. Une précision sur les entreprises françaises qui sont des filiales de
groupes internationaux : comment ça se passe au niveau de l'intéressement, du
calcul des bénéfices ? Est-ce que ça va être les bénéfices en France qui sont
pris en compte ou… Parce qu'on sait qu'il y a des entreprises qui absorbent en
fait les bénéfices via la maison-mère.
Olivier DUSSOPT
Je ne sais pas vous le
dire directement donc je préfère… Vous conviendrez avec moi que la question est
assez technique…
Sylvie CORBIN
Je pense qu’il y a
beaucoup de salariés qui vont être intéressés par ce sujet…
Olivier DUSSOPT
Mais je ne sais pas être
tout à fait affirmatif sur le sujet. Si vous le voulez bien, mon cabinet vous
passe l'information et la partagera avec tous ceux qui sont intéressés.
Sylvie CORBIN
Merci.
Olivier DUSSOPT
Pas d’autres questions ?
Merci beaucoup.