La déclaration de politique générale devant le Sénat

Publié le 02/10/2024|Modifié le 02/10/2024

Après sa déclaration de politique générale devant les députés mardi 1er octobre, le Premier ministre a présenté le cap de l'action gouvernementale aux sénateurs mercredi 2 octobre.

Michel Barnier pendant son allocution au Sénat.
Michel Barnier pendant son allocution au Sénat. - Source : Service d'information du Gouvernement
Après sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale mardi 1er octobre 2024, le Premier ministre, Michel Barnier, s'est adressé au Sénat mercredi 2 octobre. 
Devant les sénateurs, le Premier ministre a détaillé les grandes lignes de la feuille de route de son gouvernement. 

Ce sont des territoires [...] qui, par leur identité, leur énergie, leur culture, leur différence, contribuent à développer notre pays et à le rendre plus fort. [...] Et c'est souvent le succès de ces territoires, parfois des petites communes comme des grandes, qui fait le succès de la France. J'ai toujours eu la conviction qu'on règle mieux les problèmes du quotidien dans la proximité.

Michel Barnier

  • Premier ministre
Michel Barnier
Source :  Sénat

Le Premier ministre, Michel Barnier, prononce sa déclaration de politique générale au Sénat mercredi 2 octobre 2024.

Déclaration de politique générale du Premier ministre Michel Barnier au Sénat – mercredi 02 octobre 2024 15 heures

Michel BARNIER

Eh bien, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, merci sincèrement Monsieur le Président pour votre invitation à m'exprimer très vite devant vous. Merci pour votre accueil auquel je suis sensible, et qui d'ailleurs ne me surprend pas dans une Assemblée que je connais assez bien, puisque j'ai eu l'honneur d'y siéger un court moment pendant deux ans. Mais je n'ai rien oublié et de la cordialité, du respect réciproque, mutuel, et de la qualité des travaux du Sénat. Donc je suis, pour cette raison aussi, plus personnelle, heureux de vous retrouver. 

Et au lendemain de la déclaration de politique générale, je remercie le Garde des sceaux, Didier MIGAUD qui est ici, de l'avoir lu en mon nom, au moment même où je la prononçais à l'Assemblée nationale. Je suis heureux de vous retrouver pour faire le point, peut-être après vous avoir écouté, ou avant même de vous avoir écouté de préciser un certain nombre de sujets ou d'enjeux qui… sur lesquels le Sénat est traditionnellement plus engagé. Voilà, je suis très heureux de saluer votre assemblée, qui représente évidemment d'abord les élus locaux, de métropole, d'outre-mer, de l'étranger, les citoyens aussi, et d'évoquer la feuille de route du Gouvernement. 

Peut-être, juste avant, monsieur le Président, permettez-moi d'évoquer la situation grave du Proche et du Moyen-Orient, puisque l'escalade continue. Et face à cette escalade dangereuse des tensions, vous confirmer que la France, sous l'autorité du Président de la République, restera engagée pour la paix et la sécurité de tous dans cette région. Nous avons condamné avec la plus grande fermeté les nouvelles attaques de l'Iran contre Israël. Et je redis aussi devant le Sénat ce que j'ai dit à l'Assemblée. Pour nous, pour la France, la sécurité d'Israël n'est pas négociable.

[Applaudissements]

Quelques jours avant le très triste anniversaire du 7 octobre, nous pensons à toutes les victimes des attaques du Hamas, des attaques terroristes du Hamas et du Hezbollah qui doivent cesser. Nous pensons aussi à tous les otages dont nous continuons d'exiger la libération de tous les otages qui incluent naturellement nos deux compatriotes. Nous pensons à toutes les victimes. Nous pensons aussi, Mesdames et Messieurs les sénateurs, à toutes les victimes civiles palestiniennes. La violence n'a que trop duré. Et voilà pourquoi la France, avec d'autres, appelle à un cessez-le-feu à Gaza. Au-delà de cette stratégie, nous savons que la clé de la paix, et c'était mon discours déjà, lorsque j'avais l'honneur d'être le ministre français des Affaires étrangères, sous la présidence de Jacques CHIRAC, nous continuerons de souhaiter, de travailler, de militer, pas tout seul, avec les pays de la région, avec les États-Unis et d'autres puissances, pour la clé de la stabilité, de la sécurité durable dans cette région, qui est cette clé de la solution à deux États, même si elle est de plus en plus difficile, même si elle paraît improbable à certains, moi, je continue à penser qu'il faut, à côté d'un État d'Israël garanti dans son intégrité territoriale, dans sa sécurité, définitivement, par tous les pays de la région, offrir une perspective, proposer une perspective, celle d'un État au peuple palestinien. 

L'aggravation de la situation au Liban, un pays qui nous est très cher, que je connais assez bien, exige aussi notre pleine mobilisation avec nos partenaires pour faire cesser les hostilités qui s'enclenchent et qui menacent, elles aussi, toute la stabilité de la région. Nous y sommes engagés, le ministre de la Défense, sous l'autorité du Président de la République, à apporter une aide humanitaire aux victimes civiles de combat. Et nous, nous sommes prêts à toutes les éventualités. Je rappelle, s'agissant du Liban, que 20 000 de nos compatriotes vivent dans ce pays et que nos soldats y sont déployés. Près de 700 soldats au sein de la FINUL. Donc, nous mettrons tout en œuvre pour protéger nos compatriotes, au Liban en particulier, mais aussi au Moyen-Orient, et les assister dans toutes les circonstances douloureuses qu'ils traversent. Ayant évoqué la situation internationale, vous me permettrez de confirmer, là aussi, que la France reste et restera aux côtés du peuple ukrainien qui, deux ans et demi après l'agression russe, continue avec courage de se battre pour défendre son intégrité territoriale, sa souveraineté, sa liberté.

Ce sont des mots, ce sont des valeurs, ce sont des réalités qui sont les nôtres, en tant qu'européens. Et voilà pourquoi nous devons soutenir ce peuple si courageux de l'Ukraine, qui défend là, au risque et au prix de beaucoup de morts, les valeurs européennes que nous avons en partage. Face à ces conflits…. Face à ces conflits, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, face à l'instabilité persistante d'un monde qui est de plus en plus dangereux, instable, fragile aussi, face à toutes les menaces hybrides, celles qu'on connaît, celles qu'on soupçonne, voilà pourquoi l'effort de défense engagé par le Gouvernement depuis plusieurs années, et là encore, le président de la République est pilote, l'effort de défense est évidemment nécessaire et sera poursuivi. 

Mesdames et Messieurs les Sénateurs et Sénatrices, vous connaissez désormais les grandes orientations du Gouvernement, ce Gouvernement qui a été formé il y a quelques jours. Moi-même, je suis arrivé à ce poste, dans cette mission de Premier ministre, il y a 27 jours à peine, 27 jours, après une longue attente, non pas de ma part, mais une longue attente depuis les élections législatives, dans une situation d'ailleurs assez inédite, puisque pour la première fois depuis le début de la Vᵉ République, il n'y a pas du tout, du tout de majorité à l'Assemblée Nationale. Je connais cette difficulté. Je sais que les députés ont le sort du Gouvernement dans leurs mains. Et pour autant, je pense que les deux années et demi qui sont devant nous doivent être utiles.

Et vous avez votre part à prendre dans ce travail d'intérêt national, comme je le souhaite.

Je les ai appelés à cela, les parlementaires de tous les bords et de tous les groupes, à l'Assemblée nationale. Voilà. Nous allons essayer de faire beaucoup avec peu, comme je l'ai rappelé hier, en citant cet ordre de mission que le général DE GAULLE avait adressé en mai 42 à Pierre de CHAUVIGNÉ, l'un de ses aides de camp, qui l'envoyait à Washington pour tenter de créer une antenne de la France libre dans des conditions assez difficiles. Et il lui écrivait de sa propre main : « Je vous demande de faire beaucoup avec peu, et en partant de presque rien ». 

Alors, nous ne partons pas de presque rien. Il y a tellement de ressources, d'énergie, de volontaristes dans notre pays, à tous les niveaux, que c'est ça, la base. Mais ce qui est vrai, c'est qu'on a peu dans nos mains, j'y reviendrai sur le budget, et qu'il faut faire beaucoup. Et à défaut de faire beaucoup dans tous les domaines, il faut s'efforcer de faire bien. Et c'est précisément l'intention du Gouvernement. 

La feuille de route que nous avons exposée hier à la représentation nationale, à l'Assemblée, devant vous, est centrée autour de quelques priorités, pour tenter de donner à notre pays des marges d'action dans une situation particulièrement difficile. Évidemment, la première exigence, parce que c'est une précondition pour agir et pour rester crédible au plan international, rester crédible au plan international, c'est d'améliorer la situation de nos comptes publics.

J'arrive depuis 27 jours, et le déficit que je trouve dépasse cette année 6 % de notre richesse nationale, 6 %. Nos dépenses ont augmenté de plus de 300 milliards d'euros depuis 2019, 300 milliards d'euros. Cela représente, je le disais hier, en moyenne 5 000 euros de plus, non pas de revenus, mais de dépenses publiques, chaque année, pour chaque français, quel que soit son âge. 

Et ces dépenses, Mesdames et Messieurs, parce que c'est la vérité, et je continuerai de dire la vérité, elles sont largement financées par la dette que nous faisons sur la tête de nos enfants, de nos petits-enfants. Et moi, j'ai envie de dire que ma priorité, j'ai parlé aussi de dette écologique. Enfin, cette idée qu'on devrait tenter de laisser la terre, le territoire qu'on gère dans un meilleur état naturel ou écologique que celui dans lequel on l'a trouvé. J'ai envie de dire que la priorité doit être de limiter, de maîtriser, de réduire, si possible, cette dette, pour ne pas la faire peser après nous. Je pense que c'est notre responsabilité. Voilà pourquoi nous avons décidé de marquer clairement cette première étape de notre Gouvernement par un effort difficile, je le sais, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, sur la réduction de nos dépenses. Les 2/3… Les 2/3, si vous le voulez bien, de l'amélioration de nos comptes viendra de là, de la maîtrise de la dépense publique. Et c'est une première depuis longtemps. 

Pour cela, nous devons faire des choix responsables. Et je garderai, en faisant ces choix, en les proposant au Parlement, une attention particulière aux Français les plus fragiles, pour qui les services essentiels, la santé, l'éducation et d'autres, sont essentiels aussi. Et ces choix difficiles qu'ils vont exiger de la part des ministres, je leur ai demandé, mais aussi des parlementaires qui auront à voter, à corriger, à accepter, à amender, à améliorer le projet de loi de finances. Nous les ferons évidemment avec vous. Je sais d'ailleurs que le Sénat avait proposé l'an passé des mesures d'économie très substantielles. Toutes n'ont pas été retenues dans notre proposition de loi de finances, mais nous avons sans doute là un gisement d'économies accessibles. Nous allons les examiner ensemble. Nous le ferons aussi, bien entendu, avec les collectivités territoriales, pas sans elles, pas contre elles. Je dis bien avec elles. 

Nous maîtriserons d'autant mieux nos finances publiques que nous aurons, c'est mon deuxième point de méthode, au-delà de la réduction des dépenses la plus intelligente possible, nous aurons à renforcer l'efficacité de la dépense publique. Cette préoccupation, elle vaut pour toutes nos administrations, celles de l'État, celles des collectivités que beaucoup d'entre vous connaissent ou gèrent. Et c'est ainsi que nous pourrons agir. D'ailleurs, s'agissant des collectivités territoriales, je sais que beaucoup n'ont pas attendu mon discours, ni l'État, pour s'engager dans cette maîtrise et dans une dépense plus efficace des impôts et de la dépense publique. 

Enfin, pour relever le défi de la dette, je ne peux pas, je n'ai pas les moyens, objectivement, de priver le Gouvernement du levier, du troisième levier. Je dis bien le troisième, pas le premier, le troisième levier des recettes. Les baisses d'impôts, depuis 7 ans, ont apporté de l'oxygène à beaucoup de Français, beaucoup d'entreprises, notamment dans les temps difficiles de la crise du covid, Mais dans ces temps d'efforts, de grands efforts pour maîtriser la dépense publique et retrouver ou préserver notre crédibilité internationale, Mesdames et Messieurs, nous allons demander une contribution ciblée, exceptionnelle, temporaire à de très grandes entreprises et aussi aux plus gros contribuables de notre pays. C'est ça qui me paraît correspondre à la justice fiscale. Je n'accepte pas qu'on parle de choc fiscal, de prélèvement général. Ce n'est pas vrai. Nous allons concentrer, je le répète, de manière ciblée, exceptionnelle et temporaire cet effort sur un certain nombre de contribuables, entreprises ou particuliers, qui peuvent un peu mieux contribuer à cet effort national. 

J'ai parlé tout à l'heure de la deuxième dette qui est à mes yeux importante, celle de l'empreinte environnementale. Les transitions écologiques et énergétiques seront des priorités de l'action du Gouvernement. Face à ce défi, là aussi, nous sommes tous concernés, entreprises, collectivités et citoyens. Et je n'ai pas besoin de rappeler, dans ma propre histoire personnelle, l'engagement qui était le mien très tôt, puisque j'ai eu la chance d'être membre du cabinet, tout jeune chargé de mission, de Robert POUJADE, le Premier ministre français de l'Environnement, le Premier ministre qui avait créé Georges POMPIDOU. Nous étions à l'époque le deuxième pays d'Europe après l'Angleterre à nous doter d'un ministère de l'Environnement. Vous savez, Mesdames et Messieurs les sénateurs, je suis attaché au rôle du Sénat. Et ce n'est pas un hasard, d'ailleurs, s'il y a peut-être pour une des premières fois autant de sénateurs et sénatrices dans mon Gouvernement.

[Applaudissements]

Oui, vous faites bien de les encourager, voilà, en tout cas. Je suis attaché au rôle aussi et à la place de nos territoires dans la République. J'ai eu aussi dans mon parcours assez long — et je n'ai pas besoin qu'on me rappelle mon âge — l'honneur et la chance d'être président d’un département pendant 17 ans. Et donc, je n'ai pas oublié non plus tout ce que j'ai appris sur le terrain dans ce département dont sont issus deux d'entre vous que je salue affectueusement, voilà. 

Ce sont des territoires, quels qu'ils soient, chez nous, outre-mer, qui, par leur identité, leur énergie, leur culture, leur différence, contribuent à développer notre pays et à la rendre plus forte. C'est ça dont je parlais au tout début de mon propos. Nous ne partons pas de rien, nous partons de ces territoires. Et c'est souvent le succès de ces territoires, parfois des petites communes comme des grandes, qui fait le succès de la France. J'ai toujours eu la conviction qu'on règle mieux les problèmes du quotidien dans la proximité. L'intuition initiale de la décentralisation, depuis la grande loi Defferre en 82. Je suis devenu président du département précisément en mars 82 en Savoie. Et donc, je n'ai pas oublié les moyens et la liberté nouvelle que donnait cette loi au Conseil généraux à l'époque. Depuis l'intuition initiale de cette décentralisation, moi, je pense qu'il y a une vérité très banale, qui est que sur tous les sujets qui concernent la vie des gens, la décision doit être prise le plus près possible d'eux. Et c'est ce que font d'ailleurs chaque jour les élus locaux et aussi ce que vont faire de plus en plus les préfets. 

Notre force depuis 40 ans a donc été, État et collectivités locales, de nous compléter, de nous renforcer mutuellement, même si je sais bien que depuis 40 ans, il y a eu des hauts et des bas dans les relations entre l'État et les collectivités locales. L'État reste évidemment le garant d'unité monsieur le président. Il donne au nom de la République le cadre de l'activité nationale, les collectivités ont leur rôle pour dynamiser cette activité et la développer en créant dans chaque territoire le cadre le plus propice au développement. Et je veux bien faire mienne cette conviction du président LARCHER, sur laquelle la commune, c'est en effet la petite République dans la grande.

[Applaudissements]

Je suis sûr d'ailleurs que vous avez déjà entendu cette phrase. Et cet équilibre est vital, il est efficace, il repose sur le respect et sur la confiance. Pour que cette confiance soit la règle, je demanderai à mon Gouvernement d'entretenir des relations régulières et profondes avec les élus locaux. Nous devons pouvoir partager avec eux les objectifs de l'action gouvernementale, parce que ce sont les objectifs de la nation et qu'ils ont vocation à y concourir. Et ce sera le rôle, bien sûr, de la ministre en charge du Partenariat avec les territoires et des ministres délégués qui sont auprès d'elle et du ministre de l'Intérieur que vous connaissez bien. Les élus doivent aussi savoir que nous respectons leur rôle, leur responsabilité, leurs compétences. 

Et je pense que nous allons avoir besoin de cette confiance, cet état d'esprit peut-être un peu nouveau, pour travailler ensemble, notamment sur la question de la maîtrise de nos dépenses publiques. Nous allons pouvoir discuter rapidement avec les collectivités territoriales de cette situation budgétaire globale, y compris de la bonne manière de maîtriser l'évolution des dépenses, en demandant à chacun, à tous les niveaux, de prendre une juste part à l'effort collectif. Voilà pourquoi je pense que la situation est suffisamment grave, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, et je pèse mes mots, et c'est ma responsabilité de le dire, pour qu'on partage cet effort intelligemment et en bonne… et en confiance. 

Je voudrais aussi rendre les choses plus simples pour aider les collectivités à agir. Cela passe par une simplification méthodique des règles qu'elles ont à appliquer dans tous les domaines. Cette simplification ne pourra pas se décréter d'en haut seulement, ou pas d'abord. Elle doit se démontrer par l'exemple. Pour cela, nous devons nous engager, nous allons nous engager, État et collectivités, dans une forme de contrat de simplification pour identifier les projets, les actions locales, qui sont aujourd'hui entravés par la complexité des normes. Nous allons débloquer ces projets, projet par projet, action par action, dans un dialogue étroit avec les préfets, les élus locaux. Le choc de simplification sera réalisé sur le terrain et à partir du terrain. Et s'il faut des mesures législatives, ce sera en réponse au constat des obstacles rencontrés sur le terrain. 

Et ce que je viens de dire vaut pour les collectivités locales, ça vaut aussi pour les entreprises, ça vaut également, évidemment, pour les exploitations agricoles et pour les citoyens. La simplification passe aussi par un nouvel effort de déconcentration. De déconcentration dans les toutes prochaines semaines, et en lien avec le ministre du partenariat avec les territoires et le ministre de l'Intérieur, nous allons donner aux préfets, représentants de l'ensemble du Gouvernement dans leur département, des leviers renforcés pour assurer la cohérence et l'efficacité de l'action de l'État et de tous ses opérateurs. 

Nous leur permettrons aussi de déroger, d'expérimenter, de différencier, et je signerai très prochainement une instruction à tous les préfets dans ce sens. Il faut que nous apprenions à adapter nos politiques aux réalités très diverses des territoires, y compris en métropole, encore plus outre-mer. Les exemples ne manquent pas de sujets sur lesquels l'adaptation, la capacité d'adapter et donner à un préfet en bonne intelligence avec les élus locaux, réglerait en amont bien des problèmes. 

Je sais que le Sénat le souhaite en matière d'eau et d'assainissement. La gestion de la ressource en eau et les défis qu'elle porte nous imposent d'agir en responsabilité, ce qui n'exclut pas d'adapter les règles à la réalité des territoires. Voilà pourquoi, 60 ans après la première loi sur l'eau de 1963 et au-delà des travaux qui ont été conduits depuis quelques années, nous allons travailler tous ensemble sur cette question à travers une grande conférence nationale sur l'eau. Nous devons aussi adapter, je l'ai dit hier, je le répète devant vous, la mise en œuvre du zéro artificialisation pour mieux tenir compte des besoins de certains territoires. On ne va pas remettre en cause cette politique dans son essence, dans son objectif, mais nous pouvons sans doute nous donner de la souplesse sur la base de contractualisations locales correctement encadrées pour mieux concilier le développement des territoires auquel vous êtes attachés et l'objectif de sobriété auquel, moi, je reste attaché. 

Je pense depuis longtemps que dans notre pays, les espaces naturels et les ressources naturelles ne sont ni gratuits, ni inépuisables, et que c'est notre intérêt, en parlant des générations futures, de les protéger, de les préserver, parfois de les reconquérir. Mais je pense qu'il y a une marge de négociation et de travail entre ces deux grands objectifs. Je sais aussi que les élus de l'Outre-mer attendent aussi une grande adaptation des politiques publiques, des lois et des règlements à la spécificité de leurs territoires. Le ministre des Outre-mer, que vous connaissez bien, lui aussi, est chargé de coordonner le travail d'adaptation avec les ministères et les collectivités concernés. Je présiderai au début de l'année prochaine un comité interministériel de l'Outre-mer. 

Je pense, Mesdames et Messieurs les sénateurs, que cette simplification, qui va être une méthode de Gouvernement, redonnera de l'oxygène. Nous devons redonner aux élus le pouvoir d'agir et aussi la capacité personnellement, parfois, moralement, de ne plus être découragés. Dans les années passées, alors que je n'avais plus de fonction publique, j'ai eu l'occasion, en Savoie et ailleurs, de rencontrer beaucoup de maires de petites communes découragés, découragés. Ils ont envie d'arrêter, parfois pour des raisons très simples de ne pas trouver secrétaire de mairie ou d'avoir les secrétaires de mairie qui sont, eux aussi, découragés. Donc, l'amoncement, l'inflation normative, les contraintes, je voudrais qu'on donne de l'oxygène dans ce pays. Et puis, je pense profondément que notre pays ira mieux si tout ne tombe pas d'en haut. Nous, nous n'avons pas...

[Applaudissements]

Je pense aussi qu'on n'a pas, au Gouvernement, et même quand on est Premier ministre, on n'a pas la science infuse. Vous avez combien d'exemples dans vos départements, réunions de maires, ou d'associations où vous rencontrez, on vous donne de bonnes idées ? On vous donne de bonnes idées. Si vous me donnez une minute de plus, je peux venir raconter un souvenir personnel que j'ai. Non, non, c'est important, quand on a mon âge, d'utiliser ce qu'on a appris avant. C’est ce que je vais faire, d'ailleurs. En 2008, j'étais ministre de l'Agriculture et ministre de la Pêche. Et cette année-là, l'automne, il y a eu beaucoup, beaucoup de naufrages de bateaux de pêche, avec des morts, d'ailleurs. Et je me souviens être allé à Étaples rencontrer l'équipage d'un bateau qui avait coulé l'avant-veille, la nuit, et de rencontrer les cinq marins pêcheurs rescapés, alors que l'un de leurs camarades avait coulé et qu'on ne l'avait pas retrouvé au milieu de la nuit. Et on sait quand un bateau coule, où il se trouve, puisqu'il y a une balise sur le mât, on ne sait pas où les marins se trouvent quand ils sont rescapés et qu'ils flottent d'une manière ou d'une autre. 

Il y a un jeune marin rescapé qui m'a pris par le bras et qui m'a dit, « Monsieur le ministre, vous êtes bien de la Savoie ». Je dis oui, je suis de la Savoie. « Pouvez-vous m'expliquer pourquoi chez vous, en Savoie, les pisteurs secouristes ont une balise individuelle dans leur anorak, et qu'on a la capacité, pas toujours la chance, de les retrouver sous une avalanche. Et pourquoi nous, on n'a pas une telle balise individuelle sur notre vêtement de flottaison ? » Et voilà une rencontre, dont je me souviens, au cours de laquelle un jeune, qui a eu le courage de me parler, m'a donné une idée que personne ne m'avait donnée avant. Et voilà comment, depuis, on a pu équiper, j'espère que c'est bien le cas aujourd'hui, tous les marins-pêcheurs. Oui, ne souriez pas, ne riez pas. 

Je dis cela pour démontrer, et je l'ai dit au ministre, qu'il faut écouter, et qu'ils ont une autorité morale, une autorité administrative, une autorité politique des moyens, et qu'il faut mettre ces moyens au service des bonnes idées, d'où qu'elles viennent, quel que soit le parti politique d'où elles viennent, et du terrain. Voilà. Pour agir, il faut aussi, Mesdames et Messieurs, de la sécurité juridique. Je souhaite que nous clarifions encore la réglementation relative au conflit d'intérêts, et le garde des Sceaux est attaché à faire des propulsions dans ce sens. Enfin et surtout, assurer l'avenir de nos territoires, c'est répondre à l'attente des Français qui ont besoin d'une plus grande présence des services publics sur le territoire. Nos villes moyennes, nos sous-préfectures, nos villages, tous font la République et méritent que des services publics y demeurent ou y reviennent. C'est ce rôle-là qu'aura aussi, d'animation, la ministre en charge de la Ruralité, du Commerce et de l'Artisanat. Je n'ignore pas tout ce qui a été fait dans les années passées pour répondre à cette attente. Et voilà pourquoi, objectivement, j'ai dit qu'on persévérera, qu'on continuera ce qui marche bien. Le jour où j'ai visité une des 3 000 maisons France Services qui mutualisent, qui regroupent, qui facilitent, et on va continuer ça parce que ça marche et améliorer encore cette capacité d'aller vers les gens le plus près possible. Je serai également sensible à la présence des services postaux plus près des citoyens.

[Applaudissements]

Enfin, quand on parle de services aux citoyens, il y a aussi l'accès aux soins, en commençant par les territoires les moins bien dotés, les plus fragiles sur le plan de la santé. Dans ces territoires prioritaires, nous assurerons redéploiement, un déploiement effectif et rapide des assistants médicaux, des 2 000 nouvelles maisons de santé pluridisciplinaires, des bus de santé qui permettent d'aller à la rencontre des patients, notamment des plus âgés. Et puis, comme je l'ai dit hier, nous avons essayé de trouver des idées innovantes pour que des médecins, des internes, français ou étrangers, puissent être encouragés, voire même parfois des médecins en retraite, s'ils le souhaitent, aider à cette couverture des territoires urbains et ruraux, où il y a urbains et ruraux, où il y a actuellement des déserts médicaux. 

Et puis on se penchera dans le même esprit volontariste sur la question des transports. Il y a des millions de travailleurs qui sont contraints de faire chaque jour plusieurs dizaines de kilomètres pour se rendre sur leur lieu de travail. Ils n'ont pas d'autres moyens de le faire qu'une voiture qui coûte cher, qui est polluante. Je pense qu'en partant des projets locaux, nous devrons trouver des solutions à court terme, notamment en développant les services de car. 

Voilà, Mesdames et Messieurs les Sénatrices et Sénateurs, un autre mot sur un sujet de la vie quotidienne qui doit être examiné et traité avec dignité et avec efficacité, celui de la sécurité. C'est une demande forte, on l'a bien compris les dernières élections, et vous la relayez aussi que celle de la sécurité dans chaque territoire. On va essayer de généraliser la méthode de travail en commun qui a fait ses preuves pendant les Jeux olympiques et paralympiques. On va lutter de manière implacable contre le trafic de drogue, la criminalité organisée, l'économie souterraine qui gangrène beaucoup de territoires urbains et ruraux. Nos compatriotes ont besoin d'être rassurés par une présence plus visible de nos forces sur la voie publique et dans les villes et les villages. C'est à quoi correspond la création que nous confirmerons de nouvelles brigades de gendarmerie et la réduction des procédures administratives qui accaparent les commissariats et les gendarmeries au risque et au prix d'une présence sur le terrain ou dans la rue qui ne peut plus être assurée comme elle le devrait. 

Voilà. Les Français s'attendent à des délais de jugement aussi plus courts, particulièrement pour les mineurs. Nous allons reprendre la discussion sur la création d'une procédure de comparution immédiate pour les mineurs délinquants de plus de 16 ans déjà connus de la justice et qui sont poursuivis pour des actes graves d'atteinte à l'intégrité physique. Nous poursuivrons aussi la réflexion sur les atténuations de l'excuse de minorité. Et puis les Français, s'agissant de ce sujet que nous allons traiter avec gravité et avec dignité, veulent que les peines soient réellement exécutées. Nous proposerons des peines de prison courtes et immédiatement exécutées pour certains délits. Nous allons réviser les conditions d'octroi du sursis, limiter les possibilités de réduction et d'aménagement de peine, et nous allons prévoir un recours plus important aux travaux d'intérêt général, aux amendes administratives et aux amendes forfaitaires délictuelles. Et pour réaffirmer le rôle dissuasif de la sanction. 

Nous allons construire ou reprendre de manière plus volontariste, là aussi, en simplifiant certaines règles qui bloquent les projets, la construction de nouvelles places de prison, ce qui veut dire aussi, Mesdames et Messieurs les sénateurs, qu'on trouve de l'emprise foncière et que l'on trouve des maires et des collectivités qui acceptent d'accueillir une prison sur leur territoire. C'est un chantier d'une très grande ampleur. Il faut aussi qu'on diversifie les solutions d'enfermement ou de surveillance effective en fonction du profil de la personne détenue et de la peine prononcée, notamment pour les mineurs délinquants. Voilà pourquoi je suis favorable à la création d'établissements spécifiques pour courtes peines. Dans cette matière, Mesdames et Messieurs les sénateurs, comme dans toutes celles qui touchent à la sécurité, je veux rappeler, je l'ai dit et je le répète calmement et clairement, que quand il s'agit de fermeté de la politique pénale, il s'agit aussi pour nous, pour le Gouvernement, de respecter évidemment et de faire respecter l'État de droit, et de faire respecter les principes d'indépendance et d'impartialité de la justice. Je suis personnellement et profondément attaché à ces principes. 

S'agissant de la sécurité, je suis également soucieux, on en parlera avec le ministre de la Justice et le ministre de l'Intérieur, que toutes celles et tous ceux qui exercent une autorité publique ou qui rendent un service public soient partout et toujours protégé et respecté. Ce qui n'a pas été le cas toujours dans les temps qui viennent. J'ai eu l'occasion d'appeler le maire de Saint-Brieuc, qui a été sauvagement agressé et qui a d'ailleurs failli être tué la semaine dernière. Il me disait ce souci de protection et éventuellement de respect, mais il me disait aussi qu'il faut qu'on arrive dans nos territoires à se reparler les uns aux autres, sans être obligé d'aller à l'agression ou à la violence, voilà. Je suis très sensible à ce sujet que vous portez pour beaucoup d'entre vous depuis longtemps, voilà. 

Peut-être puis-je évoquer, Monsieur le Président, au terme de cette intervention, ou presque au terme, la question de la maîtrise de l'immigration, qui aussi est un grand sujet que je veux qu'on aborde, là encore, avec de la dignité, avec de la fermeté. En regardant les faits avec lucidité, nous ne maîtrisons plus de manière satisfaisante notre politique migratoire et du coup, nous ne sommes plus en mesure d'assurer objectivement, de manière satisfaisante, nos objectifs d'intégration. Et donc, on échoue des deux côtés et ça ne peut pas durer. Il faut, sans idéologie, sans accepter je ne sais quelle polémique. J'ai dit hier, dans un moment d'utopie, que la question de l'immigration devrait être un sujet d'intelligence nationale. Alors, on va s'efforcer d'aller dans ce chemin et voilà pourquoi on va travailler plus efficacement et en proximité des demandes d'asile pour que les demandeurs obtiennent rapidement une décision. Nous proposerons aussi de faciliter la prolongation exceptionnelle de la rétention des étrangers en situation irrégulière pour mieux exécuter les obligations de quitter le territoire. L'actualité tragique montre à quel point ce plan est important. 

Nous allons renforcer le contrôle de nos frontières. Il y a une décision européenne importante qui a été prise au pacte européen auquel Monsieur DARMANIN, d'ailleurs, a beaucoup consacré d'énergie. Il faut l'appliquer sans délai, mais le compléter aussi en renforçant les moyens de Frontex qui doit être ou retrouver sa mission première de garde-frontière de l'Union européenne. Et puis, nous continuerons aussi longtemps que ce sera nécessaire, et là où ce sera nécessaire, à rétablir des contrôles à nos propres frontières intérieures. Les règles européennes le permettent, et l'Allemagne, d'ailleurs, vient de le faire de son côté. 

Voilà. Je voudrais aussi vous confirmer que nous allons intensifier le dialogue avec les pays d'origine et de transit. Mon Gouvernement ne s'interdira pas de conditionner davantage l'octroi de visas à l'obtention de laissés-passés consulaires dont nous avons besoin pour les reconduites à la frontière. Et nous allons également poursuivre, avec les pays concernés, une discussion sur des accords bilatéraux, parfois très anciens, qui ne correspondent plus aux réalités d'aujourd'hui. Voilà. 

C'est en mettant en œuvre toutes ces mesures, je le répète, avec de la fermeté et de la dignité, que nous serons en mesure de mieux intégrer celles et ceux que nous choisissons d'accueillir chez nous, et qui ne sont pas accueillis de manière digne actuellement, en leur ouvrant plus rapidement l'accès à un titre de séjour, à l'apprentissage de notre langue, et à un logement ou à un emploi. Voilà. 

J'évoquais un dernier chantier hier, sur lequel il y aurait tant à dire, celui de la fraternité, dont notre pays a tant besoin et qui exige de résoudre des inégalités, qui touchent par exemple les personnes en situation de handicap, de soutenir les familles, toutes les familles, de tisser davantage de liens entre les générations, de lutter contre la pauvreté, d'encourager le bénévolat et la vie associative, la création de la diffusion culturelle, qui est aussi une des raisons du lien social dans notre République, comme la valorisation partout, y compris du plus petit village aux plus grandes villes, du patrimoine qui nous est cher. 

Et puis, un mot de ce sujet très grave auquel beaucoup d'entre vous travaillent et sont prêts à travailler, celui de la fin de vie. Je sais l'engagement de beaucoup de parlementaires sur tous les bancs, parfois des débats graves et personnels qui ont lieu au-delà des étiquettes politiques, dans le respect de cette diversité d'opinions et en prenant en compte la gravité de ce sujet, nous reprendrons le dialogue sur le projet de loi tel qu'il a été discuté par l'Assemblée nationale. Nous le ferons à l'Assemblée nationale et au Sénat, en consultation avec les soignants et les associations au début de l'année prochaine pour reprendre le cours de ce débat qui est important et qu'il faudra étudier en toute sérénité. Et sans attendre, on va d'ailleurs continuer à développer l'accès aux soins palliatifs, qui vont être renforcés dès 2025. 

Je ne peux pas conclure ce propos sans vouloir répéter tout ce que je vous ai fait dire hier, sans évoquer nos outre-mer. Je souhaitais suivre personnellement ces sujets en liaison avec le nouveau ministre des outre-mer, qui est placé auprès du Premier ministre. Je crois que nous avons besoin d'une volonté politique forte, durable, de considération, de suivi à Paris, pour relever les défis qui sont très nombreux. Nous le ferons en privilégiant le dialogue avec les élus, avec les acteurs économiques et sociaux dans ces territoires, en respectant leur diversité, leur spécificité, la culture de ces territoires. Il y a dans les outre-mers des handicaps structurels. Il y a aussi des projets, des échanges, des opportunités qui n'intéressent pas que l'outre-mer, qui intéressent la recherche, l'espace, la biodiversité, pour le profit de toute la collectivité nationale. 

Et donc, nous allons travailler avec eux dans cet esprit-là, avec un accompagnement renforcé de l'État, soutien financier, appui en ingénierie, soutien dans les relations internationales dans leur bassin régional. Et cet accompagnement doit se traduire par des contrats pluriannuels, là où il n'existe pas encore, et qui doit être garanti et mis en œuvre au quotidien par l'action des services locaux et centraux de l'État. J'ai parlé du comité interministériel de l'outre-mer qui se réunira au premier trimestre, l'année prochaine, et qui sera préparé par le ministre, en lien étroit avec tous les élus de l'ensemble de ces territoires, et nous y déciderons de mesures concrètes. Voilà. 

Je voudrais là aussi évoquer la Nouvelle-Calédonie. Il y a parmi vous le sénateur XOWIE, le sénateur NATUREL, il y a les députés qui nous ont interpellés tout à l'heure à l'Assemblée nationale, Nicolas METZDORF et Monsieur TJIBAOU. Je voudrais confirmer ici, clairement et solennellement, notre engagement à faire face à l'urgence économique et sociale en Nouvelle-Calédonie, où près de 25 % de la capacité de production, l'économie, a été détruite, 25 % et où il faut reconstruire, redémarrer, préserver l'emploi ou retrouver l'emploi en même temps que retisser du lien social et politique. Voilà. Nous engagerons rapidement aux côtés des acteurs politiques et économiques. J'examine aussi les conditions de prolongation, sur les prochaines semaines, des aides d'urgence qui ont été mises en place depuis le mois de mai dernier, et de nouvelles mesures de soutien aux populations de plus en plus en difficulté doivent être mises en œuvre. Il s'agit de reconstruire, de reconstruire une grande partie de l'économie qui a été détruite durant cette période très difficile. 

Enfin, une mission de concertation, et je vous en remercie, monsieur le président, sera conduite par vous-même, monsieur le président et la présidente de l'Assemblée nationale, que je remercie aussi, sur place, dans un bref délai, une mission de dialogue, d'écoute, de considération qui devrait nous permettre d'engager des discussions sur l'avenir institutionnel de ce territoire et qui ira à la rencontre de tous les acteurs locaux. Outre les sujets économiques et sociaux du territoire que je viens d'évoquer, devront être abordés l'organisation et les compétences des pouvoirs locaux, la composition du corps électoral et son élargissement pour les prochaines élections provinciales, ainsi que les différents autres sujets de nature institutionnelle. 

Je mesure le chemin qui est devant nous pour atteindre, Mesdames et Messieurs les sénateurs et sénatrices, Mesdames les sénatrices, Messieurs les sénateurs, l'ensemble des objectifs que je viens d'évoquer. Je n'ai pas voulu traiter de tout, ce n'est pas l'objet d'une telle déclaration, mais je vais vous écouter. J'essaye de vous répondre. Les ministres sont ici aussi pour prendre en compte ce que vous dites. Je pense que si on arrive à faire bien… Faire bien, pas forcément faire tout et beaucoup, je ne vais pas faire de promesses. Il n'y aura pas de miracle. Ne comptez pas sur moi, dans la situation budgétaire où nous nous trouvons, pour raconter n'importe quoi. Je ne ferai pas autre chose que de dire la vérité et d'expliquer la vérité, et de dire que face à une vérité, à une réalité, il y a deux attitudes: celle qui consiste en une sorte de fatalisme, à dire au peuple : "On ne peut rien faire, c'est trop grave, on baisse les bras", celle qui consiste aussi à reconnaître les réalités et les expliquer aux citoyens, au peuple, qui est capable de comprendre, je le sais, à condition de croire et de respecter ceux qui lui parlent, et puis de modifier, de transformer, d'avancer. 

Voilà, c'est ça, l'état d'esprit qui est le mien aujourd'hui, le volontarisme. Nous avons besoin d'un partenariat serré et solide entre les forces politiques. Nous avons besoin d'un nouveau dialogue social aussi avec les forces syndicales, que j'ai toutes rencontrées, et professionnelles depuis mon arrivée à Matignon. Je pense que le moment doit inviter chacune et chacun à s'inscrire dans cette volonté de coopération. Cette culture un peu nouvelle dans notre pays, que vous connaissez bien dans les collectivités territoriales, vous n'avez pas attendu le Gouvernement, qu'on connaît aussi très bien au niveau européen, qui est la culture du compromis. 

Faire un compromis, ce n'est pas se compromettre. On ne vient pas du même endroit, on ne va pas tous au même endroit, mais pendant un temps et sur certains sujets, on se met d'accord. Moi, j'ai été, pendant 10 ans, commissaire européen. Tous les textes que j'ai pu faire passer, notamment pour la régulation financière après la crise financière qui a détruit des millions d'emplois, pour reconstruire un peu de règles, de morales, de responsabilités, j’ai des banquiers et d’autres acteurs financiers qui n’en avaient pas beaucoup et qui se croyaient tout permis, parce qu'on leur avait tout permis dans une sorte de grand vent d'ultralibéralisme pendant 30 ans. J'ai reconstruit à travers 41 lois, 41 lois de régulation. Aucune de ces lois n'a pu passer sans le compromis entre le Parti socialiste européen, le Parti populaire européen, le centre droit, les Verts, les libéraux et parfois les communistes. Aucune. Je les ai toutes fait passer, ces 41 lois, à travers des compromis. Et personne n'a perdu son âme, personne n'a perdu sa différence, mais nous avons réussi. C'est une culture nouvelle, elle n'est pas forcément nouvelle ici, au Sénat. Elle est assez nouvelle et peut-être encore improbable à l'Assemblée nationale. Mais je vais m'y efforcer de la construire. En tout cas, je suis très heureux, Monsieur le président, de m'être exprimé devant vous. Je vais vous écouter maintenant parce qu'ici, on sait s'écouter et se respecter. On sait ce que ça veut dire de trouver des compromis tout en gardant ces différences. On sait aussi, et j'en termine, que l'effet de suivi et l'effet d'évaluation est aussi important que l'effet d'annonce. Voilà l'état d'esprit du Gouvernement et de son Premier ministre. Merci à tous.

Gérard LARCHER

Merci Monsieur le Premier ministre.

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