Commémoration de l'installation de l'Assemblée consultative provisoire

Publié le 07/11/2024|Modifié le 07/11/2024

Le Premier ministre a assisté jeudi 7 novembre 2024 à la commémoration de l'installation de l'Assemblée nationale consultative provisoire en 1944, « source d'inspiration pour notre action aujourd'hui et demain ».

Michel Barnier s'exprimant au Sénat.
Michel Barnier s'exprimant au Sénat. - Source : Service d'information du Gouvernement
Le Premier ministre, Michel Barnier, est intervenu au Sénat jeudi 7 novembre 2024 au cours d'une séance solennelle de commémoration de l'Assemblée nationale consultative provisoire, installée le 7 novembre 1944. Cette date marque le « jour important où la France a [...] repris son destin parlementaire en main ».
Les travaux de cette Assemblée sont, pour le Premier ministre, une « source d'inspiration pour notre action aujourd'hui et demain ».

Je pense ici, pour la France, à l'importance, à la nécessité du bicaméralisme, mais aussi, [...] pour aujourd'hui et pour demain, à la nécessité de l'union des Européens.

Michel Barnier

  • Premier ministre
Michel Barnier
Source : Sénat

Commémoration de l'installation de l'Assemblée consultative provisoire : discours du Premier ministre.

Michel BARNIER

Merci, Monsieur le Président Gérard LARCHER, 

Madame la vice-présidente de l'Assemblée nationale Naïma MOUTCHOU, 

Mesdames et Messieurs les ministres, 

Mesdames et Messieurs les présidents du groupe, 

Mesdames et Messieurs les sénatrices et sénateurs. 

Je me permettrai à mon tour, Monsieur le Président, de saluer dans vos tribunes beaucoup d'anciens membres de la Haute Assemblée, mais aussi les représentants des organisations (inaudible) et le président de la fondation Charles de Gaulle. Pour tout dire, Monsieur le Président, je suis très touché de votre invitation, heureux et ému d'être à vos côtés pour commémorer l'installation, ici, de l'Assemblée consultative provisoire et de l'être avec plusieurs membres du Gouvernement qui ont siégé dans la Haute Assemblée. Et je suis à cette tribune, Monsieur le Président, n'en doutez pas, à la place qui est aujourd'hui la mienne, avec du respect de la mémoire, de l'humilité aussi, si je puis le dire, de la fidélité. 

Beaucoup a déjà été dit par vous-mêmes et bien dit, Monsieur le Président, par les présidents de groupe sur cette journée importante du 7 novembre 44. Je veux d'ailleurs, Monsieur le Président, vous remercier, et si je puis me permettre, remercier aussi vos équipes, celles du Sénat, pour cet extraordinaire travail de mémoire et d'archives. On l'a vu avec ce petit film qui a été réalisé à l'occasion de cette commémoration. 

Pour ma part, je voudrais simplement et rapidement revenir sur 3 points clés qui font de cette installation un acte historique, fondateur, et qui demeure pour chacune et chacun d'entre nous, à la place où nous sommes les uns et les autres, une source d'inspiration pour notre action aujourd'hui et demain, à la lumière, d'ailleurs, des citations très opportunes, Monsieur le Président, que vous avez faites, et de vos réflexions à la fin de votre intervention.

Je pense ici, pour la France, à l'importance, à la nécessité du bicaméralisme, mais aussi, comme plusieurs présidents du groupe l'ont dit, pour aujourd'hui et pour demain, la nécessité de l'union des Européens. Le 7 novembre 44 est d'abord un symbole démocratique. Paris est libéré le 25 août. Strasbourg sera reprise le 23 novembre. L’installation de l’Assemblée consultative provisoire à Paris est beaucoup plus qu’une simple étape entre ces deux dates marquantes de la libération du pays. C’est le symbole de la reprise du Sénat après la période d’occupation et au terme de très âpres combats, dans lesquels — pour reprendre les mots que nous avons entendus du Général, lui-même — « le destin moral moral et physique », disait-il, de tant d’hommes et de femmes, et pas seulement des Français aura été engagé. 

C’est plus largement le retour de la démocratie au cœur de notre capital. C’est l’idée que la victoire qui a été emportée par le courage et par les armes ne peut être totale sans le retour de la démocratie, de la légalité, des institutions et de la République. Le Gouvernement provisoire de la République française s’est installé à Paris le 31 août 1944. L'installation de l'Assemblée consultative provisoire vient, quant à elle, préfigurer le retour de la vie parlementaire. 

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les sénateurs, à côté du symbole démocratique, il y a l'unité nationale, que plusieurs d'entre vous ont soulignée. L'Assemblée qui s'installe ici en novembre 44 comprend 248 membres, députés ou sénateurs, parmi les 80 qui avaient eu le courage, le courage de refuser les pleins pouvoirs à PÉTAIN. Et il était très émouvant, monsieur le Président, de vous écouter tout à l'heure lire chacune et chacun de leurs noms, des membres des partis, des syndicats, des mouvements de la Résistance représentés au Conseil national de la Résistance, des membres issus des mouvements de Résistance hors de la métropole, des représentants de l'Outre-mer et, à partir de juin 45, des prisonniers et déportés rapatriés d'Allemagne. Il faut réaliser la modernité de cette Assemblée, unique en son genre et qui compte d'ailleurs en son sein, vous l'avez dit vous-même, 16 femmes, de Lucie Aubrac à Madeleine Braun. 

Les membres de cette assemblée avaient des parcours multiples. Pour certains, bien loin, très loin du travail parlementaire. Ils ne venaient pas du même endroit, ils n'allaient d'ailleurs pas tous au même endroit. Ils ont accepté d'unir leurs forces, de travailler ensemble, pour donner leur avis au Comité français de libération nationale et poser ainsi les bases de la France libérée et son nom a été cité par plusieurs d’entre vous, le président Félix GOUIN a pris sa part à cet esprit d’action commune. Ce faisant, et c’est peut-être là un des points principaux, ils ont montré à nos alliés l’unité de vue qui s’est construite progressivement, mais qui finalement existait entre les différents mouvements de la Résistance, et on sait l’importance de cette unité montrée sur le terrain dans les dialogues que le général DE GAULLE a eus à cette époque tragique avec le président américain ou le premier ministre britannique. Une unité en soutien du Comité français de libération nationale, devenu entre-temps gouvernement provisoire de la République française, dont ils ont renforcé la légitimité aux yeux du monde. 

Ce présent, Mesdames et Messieurs les sénateurs, ce symbole démocratique, cette unité nationale, les membres de l'Assemblée consultative provisoire les ont mis, et c'est ça qui me paraît finalement important dans une telle commémoration. Ils les ont mis au service d'une vision d'avenir. Bien sûr, le rôle de l'Assemblée était limité. Elle rendait des avis consultatifs, elle mettait des vœux, mais elle s'est aussi penchée, comme on peut le dire quand on feuillette cette brochure qui est formidable, que je trouve très précise et très bien faite. Elle s'est aussi penchée sur les bons sujets, et ses avis ont été écoutés. Cette capacité de réforme, l'Assemblée en avait fait déjà la preuve depuis Alger. Ainsi, c'est le 24 mars 44, cela a été dit au cours d'un débat sur l'organisation des pouvoirs publics en France après la libération. Vous avez d'ailleurs vous même rappelé, Monsieur le Président, la haute figure de René CASSIN. L'Assemblée consultative adopte l'amendement de Fernand GRENIER. Les femmes, je le cite, seront électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes. Et moins d'un mois plus tard, l'ordonnance du 21 avril 44 accorde enfin le droit de vote aux femmes. Au fil des mois, et après son retour à Paris, l'Assemblée se penchera aussi sur la création des comités d'entreprise, dans les établissements industriels et commerciaux, sur l'accès des femmes à la magistrature, sur le statut des fonctionnaires et sur l'organisation de la sécurité sociale. Elle préfigurera ainsi et aussi les missions de contrôle parlementaire en auditionnant le président du Gouvernement provisoire, qui était venu rendre compte des grandes étapes du rétablissement de la légalité républicaine. 

À la fin du mois de juillet 45, cette assemblée unique en son genre avait accompli sa mission. La victoire s'était accompagnée du retour de la démocratie et de la République. À travers ses avis, l'Assemblée consultative avait contribué à remettre le pays en marche et avait indiqué un horizon, une vision, qui sont encore d'actualité, à mes yeux, pour beaucoup de raisons. Il était alors temps de passer la main à une Assemblée constituante. Pour paraphraser, si je puis me permettre, le général DE GAULLE, dans sa déclaration d'août 45 : la nation pouvait reprendre en main ses destinées. 

80 ans plus tard, il reste dans notre législation et dans notre modèle social des textes qui trouvent leur origine dans les travaux de l'Assemblée consultative provisoire. Il reste dans notre histoire ce jour important où la France a, en effet, repris son destin parlementaire en main. Il était juste, monsieur le Président, de s'en souvenir, et je voulais vous remercier au nom du Gouvernement, d'avoir pris cette belle initiative et d'avoir invité le Gouvernement à y prendre sa part. 

Tout à l'heure, j'entendais votre collègue, Patrick KANNER, citer Édouard DEPREUX dans ses archives : « Si tout le monde était socialiste, il serait plus facile de gouverner », aurait dit le général DE GAULLE. Je ne sais pas si c'est vrai ou juste. Je ne sais pas dire si vous le pensez vous-même, M. le président KANNER. Mais ce dont je suis sûr, Mesdames et Messieurs les sénateurs, Monsieur le président, et à la place où je me trouve aujourd'hui, pour un temps que je ne connais pas, c'est que si tout le monde en France était animé ou est animé aujourd'hui par la mémoire, l'esprit de l'Assemblée consultative provisoire, la fierté républicaine, le travail en commun, le respect, le souci du compromis dynamique et la vision. Si tout le monde était animé par cet esprit-là, et si vous voulez bien vous souvenir, comme vous nous y avez invité avec cette commémoration, Monsieur le Président, si tout le monde est animé en France par cet esprit, cette mémoire, alors je suis sûr d'une chose, c'est qu'il serait et il sera plus facile de gouverner la France.

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