Monsieur le maire de Marseille, cher Benoît,
Monsieur le ministre de l’Éducation nationale,
Madame la ministre chargée des collectivités territoriales,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Vous qui nous accueillez ici dans vos locaux, d'habitude, je dis toujours dans vos superbes locaux, non, là, je ne le dirai pas ce matin et pour cause. Oui, Monsieur le maire, vous avez raison et je vous remercie d'emblée des propos que vous avez tenus et auxquels je souscris sans réserve. Oui, vous avez raison de l'affirmer, l'État est là, l'État est présent. Il l’est, je dois le dire dans la conception que nous nous en faisons partout où des populations, des territoires sont frappés par l'exclusion, le retard, la difficulté. C'est profondément l'essence même de l'État républicain. L'État est là et l'État tient ses engagements. Il s'est exprimé par le premier de ses représentants, le président de la République, venu, vous l'avez rappelé, il y a quelques semaines annoncer Marseille en grand. Évidemment, vous en avez parfaitement compris le sens. Un message d'avenir. Marseille a des difficultés, oui. Il faut les regarder avec lucidité, il faut les régler, mais le message premier envoyé aux Marseillaises et aux Marseillais, c'est un message d'espoir à la hauteur de son riche passé et de sa position inestimable.
Le président de la République a fixé un certain nombre d'orientations. Nous avons travaillé dans l'intervalle. Le maire de Marseille a fait valoir les intérêts de Marseille. Le maire de Marseille a sensibilisé l'ensemble des protagonistes sur la situation, nous venons d’en visiter une, de ses écoles qui effectivement, je le dis devant vous, autant en ma qualité de Premier ministre que d'ancien maire sont dans une situation particulièrement défavorable. J'insiste, je ne vais pas me lancer dans l'analyse des causes, dans le procès du passé, ça ne nous avancerait pas à grand-chose, à dire la vérité. La réalité est là. Et c'est cette situation tout à fait exceptionnelle qui justifie, je le dis et le revendique devant vous, l'intervention de l'État.
Je n'oublie pas que les écoles, ça doit remonter, Monsieur le ministre, à la Troisième République, dans leur patrimoine immobilier sont de la responsabilité des communes de France qui, en règle générale, vous l'avez dit, effectivement, y tiennent comme à la prunelle de leurs yeux. Bon, nous avons donc cette situation. Elle appelait une réponse d'urgence, une réponse dérogatoire avec une intervention de l'État inhabituelle. Mais je le dis, c'est vraiment le rôle de l'État. Il y a des difficultés spécifiques, nous devons être aux côtés, bien sûr, des élus, des populations, des enfants. C'est évidemment notre fil conducteur dans cette affaire. Et par rapport à la population à laquelle nous nous adressons, je veux avec vous, Monsieur le maire, me réjouir de la rapidité avec laquelle nous avons su ensemble tenir l'engagement pris par le Président de la République. Il y a aussi, en l'espèce, un sujet de crédibilité et d'autorité de l'action des pouvoirs publics globalement considérés.
Alors oui, le sujet est large, nous parlons sous votre contrôle de 174 écoles d’une commune, ce qui vous place déjà dans une situation particulière qui en compte 472. Nous sommes accordés sur les montants, vous les avez indiqués, Monsieur le maire. Je vous les confirme. Nous allons d’ailleurs les formaliser. Nous avons d’ores et déjà inscrit, parce que comme j’ai l'habitude de le dire, l’amour, c’est bien, les preuves d’amour, c’est mieux, nous avons d'ores et déjà inscrit 254 millions d'autorisations d'engagement, comme on dit dans le projet de loi de finances pour 2022, qui devrait être voté dans les tout prochains jours, tout comme la garantie d'emprunt sur un volume de 650 millions que vous avez également évoqué. Et nous montrons par différents canaux jusqu'à 400 millions le soutien de l’État pour ce plan qu'il nous faut maintenant démarrer de manière énergique, de manière rapide, de manière visible pour les parents, pour les enfants, pour les enseignants, c'est absolument impératif.
On ne va pas rentrer dans l’arrière-cuisine parce que je ne suis pas certain qu'elle intéresserait grand-monde. Mais je rappelle quand même que nous avons, pour ce faire, acté ensemble la création de ce qu'on appelle une société publique locale d'aménagement d'intérêt national détenue à parts égales et qui sera chargée, donc, de piloter ce programme et de veiller à sa bonne exécution. Derrière cette société, il y a le partenariat, nous signons, nous travaillons ensemble dans l'intérêt collectif. Nous montrons aussi, je l'ai dit, pour celles et ceux qui étaient là hier à l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, où les grands élus étaient réunis, nous montrons à nos concitoyens en ces temps troublés que lorsque l'intérêt supérieur est en jeu, nous savons par-delà nos différences légitimes, nous accorder et travailler ensemble.
Donc aujourd'hui, 14 décembre, nous concrétisons déjà, nous allons passer à l'acte, à l'action pour rattraper ce retard et réparer ce tord qui est fait aux enfants de Marseille et qui, vous l'avez dit, n'est pas juste. Vous avez, Monsieur le maire, évidemment à bon droit, souligné le caractère hautement symbolique hier, nous parlions santé, par les temps qui courent, ça s'impose, et le premier acte après la santé que nous posons pour Marseille en grand, c'est l'éducation. Je parlais tout à l'heure d'avenir. C'est chargé de sens, vous l’avez dit, c'est chargé de sens. Tout commence par ça. Et comment devant Jean-Michel Blanquer , ne pas exprimer ma fierté, madame la directrice ! Nous avons visité vos locaux. C'est vrai que ce n'est pas brillant. C'est vrai qu'il faut faire quelque chose d'urgence et nous allons avec Monsieur le maire le faire. Mais j'ai pu voir ici comme ailleurs, pardon, mais ici en particulier, vos classes dédoublées. La présence d'enfants en inclusion avec du personnel dédié qui les accompagne, qui illustre aussi, je le dis, à Marseille comme ailleurs, cette priorité que nous devons accorder à l'éducation et notamment aux plus jeunes années de la vie où, comme chacun sait, tout se joue.
Ici, nous avons choisi de le faire à votre invitation, monsieur le maire, dans un quartier très pauvre où les difficultés sociales s'accumulent et où, sans doute l'éducation est la première des réponses républicaines. C'est aussi la raison pour laquelle le Président de la République a dit, lorsqu'il s'est exprimé ici sur ce sujet des écoles : « Nous devons aller plus loin et en profiter pour ne pas simplement restaurer, réparer », c'est indispensable, il faut le faire, mais encore « pousser plus loin l’innovation pédagogique, voire comment peuvent être, dans le prolongement des réformes initiées depuis le début du quinquennat, davantage imaginatives, davantage créatives, on va mener ce projet expérimental ».
Ah ! Je sais qu’il fait débat. Bon, en apparence, vous savez, c’est ne rien faire qui n’en crée pas, mais ne rien faire, Monsieur le maire, nous conduit, nous en sommes aujourd’hui devant la preuve vivante à des situations qui peuvent être extrêmement préjudiciables. Donc, oui, nous assumons, nous assumons qu’il faut expérimenter des chemins nouveaux, l'autonomie des établissements, les responsabilités confiées aux directeurs plus importantes, il y a d'ailleurs, dois-je le rappeler, une proposition de loi qui achève son parcours au Parlement. Nous allons donc essayer d'aller plus loin et c'est avec une grande satisfaction, je vous le dis, que je constate que dans 58 écoles de Marseille, des enseignants, des équipes pédagogiques ont fait le choix de s'engager dans ce projet pédagogique innovant, expérimental que le chef de l’État a appelé ici à Marseille.
Nous devons toujours essayer de nous améliorer, de transformer, de progresser. Je voudrais d’ailleurs remercier ces enseignants et les assurer sous couvert du ministre qu’ils continueront à bénéficier de tous les moyens de l'accompagnement dont ils ont besoin, pour permettre à ces projets de se déployer, si possible dès la rentrée de septembre 2022. Évidemment, là aussi, Monsieur le maire, nous aurons besoin de travailler avec vous, l'articulation avec le temps périscolaire est l'un des sujets clés de la réussite de ces expérimentations et de ces innovations.
Je voudrais aussi remercier Christian ABRARD, que nous avons chargé, que le ministre a chargé, de piloter cette expérimentation, évidemment, le recteur de DASEN, inspecteur des académies et toute la communauté éducative, n’ayez pas peur, n’ayez pas peur de ces choix nouveaux, de ces chemins innovants, nous les évaluerons, nous les ferons pas à pas, de façon déterminée mais pragmatique. Et je pense que tout est là. C'est ce que je disais hier en matière de santé, nous devons faire face à la crise, mais en même temps tout de suite en tirer des conséquences plus structurelles. C'est une façon comme ce que nous faisons aujourd'hui, Monsieur le maire, d'essayer de réparer le passé et ses souffrances, mais de porter un message d'avenir.
Car vous l'avez dit, Marseille, ça, j'en suis absolument convaincu, en a tous les atouts, toutes les possibilités. C'est une grande et belle ville. Nous allons parler d'autres sujets, tout est sur la table : la sécurité, les transports, la rénovation urbaine dans ces quartiers. Dois-je vous rappeler, Monsieur le maire, Mesdames et Messieurs, que nous avons, que j'ai relancé la politique de la ville, c'était à Grigny en janvier de cette année, avec des moyens supplémentaires pour l'ANRU, avec des moyens supplémentaires qui se déploient ici à Marseille. Là encore, conformément à l'engagement du Président de la République, deux médiateurs d'éducateurs de rue au service de ses populations, au service de la ville de Marseille et de son avenir.
Oui, je vous confirme mon intention personnelle, à Marseille comme ailleurs, de suivre l'exécution de ce que dans un instant, nous allons signer. Parce que là encore, quelles que soient les idées, quelle que soit la qualité de nos intentions, nous serons, vous, comme moi, assurément jugés sur la réalisation. Donc, cher Monsieur le maire, désormais au travail !