Seul le prononcé fait foi
Mesdames et Messieurs les ministres,
Monsieur le maire,
Monsieur le proviseur,
Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
« Vague mais enthousiasmant ». Il paraît que c’est la réponse que reçut celui qui inventa le web, il y a tout juste 30 ans. En mars 1989, un jeune physicien britannique, Tim BERNERS-LEE, a cette idée géniale de mutualiser le savoir de l’humanité, en utilisant le débit du réseau Internet, qui existait déjà, pour créer une passerelle entre tous les ordinateurs de la planète. Ce faisant, il a complètement changé le monde. Quand il est arrivé avec cette idée, et qu’il l’a soumise à son patron ou à celui qui vérifiait ce sur quoi il travaillait, sur la note d’explication qu’il écrivait pour justement justifier son idée, il a vu arriver ‘’Vague mais enthousiasmant’’. J’espère que ce matin, je ne vais pas être vague et que je vais être enthousiasmant, mais je voudrais, si vous me le permettez, essayer d’être précis, et d’indiquer un certain nombre de bonnes nouvelles.
En décembre 2017, à Cahors, nous avons lancé une stratégie ambitieuse en matière de couverture numérique des territoires. Nous l’avons fait, parce que nous avions parfaitement conscience que l’équipement numérique du territoire, la capacité à pouvoir disposer, profiter de l’ensemble des instruments numériques, était un enjeu, à la fois économique, démocratique, de confort et d’équilibre territorial. Un vrai enjeu national.
Pour le faire, on s’est appuyé sur les objectifs qui avaient été fixés par le président de la République pendant la campagne présidentielle, c’est-à-dire permettre à chacun d’accéder à un bon débit pour 2020, et permettre à chacun d’accéder au très haut débit dès 2022. Et puisque nous avions fixé une stratégie en décembre 2017, il ne me semble pas inutile, il me semble même assez nécessaire d’indiquer où nous nous trouvons dans l’exécution de cette stratégie. De voir si nous allons dans la bonne direction ou s’il faut corriger un certain nombre d’aspects.
Je le redis, le défi auquel nous sommes confrontés est un défi technique : comment équiper le territoire. C’est aussi un défi démocratique, un défi économique. Depuis décembre 2017, tous les acteurs s'accordent sur le sujet, et nous en avons eu ce matin, Monsieur le maire, une illustration réjouissante. La couverture Internet, la couverture numérique fixe du territoire a très largement progressé.
Grâce à la mobilisation des opérateurs, que je veux saluer aujourd'hui, le déploiement de la fibre s'est très fortement accéléré en 2018. En 2018, il y a 3.5 millions de lignes qui ont été ouvertes. En 2016, c'étaient 2 millions. En 2019, cette année, on devrait pouvoir obtenir l'ouverture de 4 millions de nouvelles lignes. C'est-à-dire que l'on en fait de plus en plus et de plus en plus vite.
Aujourd'hui en France, 13 millions de foyers sont éligibles à la fibre. Parmi tous les pays de l'OCDE, c'est en France que l'on observe la plus forte progression du taux de commercialisation de la fibre à domicile. Nous avons donc dépassé un certain nombre de pays qui nous devançaient. Et nous sommes en fait au coude à coude avec les Etats-Unis. Ce qui est intéressant c'est que ces avancées concernent aussi bien les zones denses, les milieux urbains, les métropoles que les zones moins denses.
Sur les zones moins denses, parce que c'est un peu plus compliqué de trouver l'équilibre économique et de mettre en oeuvre cette politique, nous avons décidé de faire en sorte d'apporter une aide aux réseaux d'initiative publique. L'Etat a consacré 3.3 milliards d'euros, dans le cadre du « Plan France Très Haut Débit ». L'année dernière, c'est 1 milliard d'euros qui ont été utilisés pour soutenir les projets numériques des collectivités. En 2019, d'autres décisions seront prises pour faire en sorte que ce rythme puisse être maintenu. J'ai d'ailleurs signé, cette semaine, huit nouvelles décisions de financement, qui vont permettre d’engager 242 millions d'euros à destination de toute une série de départements : l'Indre-et-Loire, le Loir-et-Cher, la Seine-Maritime, la Haute-Garonne, la Vendée, le Vaucluse, l'Ariège, les Pyrénées-Orientales, le Maine-et-Loire. Dans le Gers, c'est près de 50 millions d'euros qui sont apportés et qui viennent s'additionner au déploiement porté par l'ensemble des acteurs réunis dans le syndicat Gers Numérique à savoir le Département, la Région et les collectivités territoriales.
C'est beaucoup d'argent, beaucoup d'argent intelligemment dépensé au service de nos territoires. Que les choses soient très claires, ce n'est pas simplement de l'argent dépensé au bénéfice des entreprises ou de certaines entreprises, et sans que cela puisse profiter aux personnes physiques ou à la population. Ce matin, à Mirande, nous avons entendu toute une série d'acteurs économiques. Certains étaient très locaux, d'autres intervenaient dans le monde entier. Certains étaient des représentants de l'artisanat, d'autres intervenaient en matière agricole ou d'industrie agroalimentaire.
Dans tous les domaines, quelle que soit la forme des entreprises, l'accès au numérique, l'accès à la fibre, est un enjeu de prospérité. C'est un enjeu de développement. Vous comprenez donc que les sommes considérables que nous engageons, sont en réalité des investissements au bénéfice de la totalité de la population.
Fin 2017, à Cahors, j'avais également lancé une procédure pour permettre aux collectivités d'accélérer leur déploiement, en bénéficiant de meilleures conditions de marché. C'est la procédure dite AMEL. Un an après, grâce à cette procédure, 20 départements ont obtenu des engagements fermes et contraignants des opérateurs privés, pour déployer la fibre sur leur territoire à coût zéro pour la collectivité. Ce qui prouve que même en zone rurale, les subventions publiques ne sont pas toujours un passage obligé pour avancer, en matière de couverture numérique. Et les propositions d'engagement des opérateurs couvrent de l'ordre d'un million et demi de lignes supplémentaires.
Malgré ces avancées, nous savons qu'un certain nombre de foyers n'auront pas de haut débit avec la fibre en 2020. Nous le savions, parce que le territoire français est vaste, parce que la densité est parfois faible, parce que les reliefs peuvent être compliqués. En effet, il est difficile d'amener la fibre jusqu'à la dernière maison du dernier hameau de la dernière vallée. C'est la raison pour laquelle nous lançons aujourd'hui de façon opérationnelle, ce que nous avons appelé avec Mounir MAHJOUBI le guichet Cohésion numérique, pour soutenir via les opérateurs, l'équipement de ces foyers en solutions de réception hertziennes. Une enveloppe de 100 millions d'euros va permettre d'attribuer jusqu'à 150 euros par foyer, auxquels les collectivités locales pourront, si elles le souhaitent, ajouter leurs propres aides. Je crois que le département du Gers s'est mobilisé sur ce sujet.
L'idée est de dire que si on ne peut pas amener la fibre et le haut débit partout, il faut pouvoir accompagner le consommateur final dans un équipement qui lui permettra de bénéficier du même service. C’est pragmatique, mais c'est la seule façon de tenir les objectifs que nous nous sommes fixés, et ça permet, effectivement, de trouver des solutions.
Là où les câbles ne passent pas, chaque foyer pourra acquérir une antenne satellite, une antenne radio, un boîtier 4G fixe. Le dispositif est opérationnel dès aujourd'hui pour le satellite et pour la boucle locale radio. Pour la 4G fixe, ce sera le cas à la fin du premier semestre. De nouvelles offres viendront progressivement enrichir le guichet, comme le lancement d'un nouveau satellite Eutelsat fin 2019. Il existe, au fond, des solutions pour tous ceux qui n'auront pas le haut débit filaire en 2020. Nous allons donc, sur ce plan-là comme sur les autres, respecter les engagements présidentiels.
Pour la couverture mobile du territoire, nous avons conclu en janvier un « New Deal » avec les opérateurs, qui donne des résultats également très prometteurs. En janvier 2018, les quatre principaux opérateurs télécom ont conclu un accord historique, grâce à la mobilisation très vive de Julien DENORMANDIE, que je veux à nouveau saluer. Ils ont pris des engagements solides pour couvrir massivement le territoire. Avec eux, nous avons changé de logique. Nous avons, comme le dit très bien Julien DENORMANDIE, cessé d'exiger beaucoup d'argent, en leur mettant beaucoup de pression, ce qui faisait qu’ils se concentraient sur les zones les plus rentables. Il leur revenait désormais de s'attacher non pas aux zones les plus rentables, mais justement à ces zones où les questions d'aménagement du territoire étaient les plus importantes. Ce changement de logique, cette capacité, cette obligation, cette invitation pressante, disons-le, à la mutualisation, nous a permis et nous permet d'obtenir collectivement de très bons résultats. L'idée, c'est d'en finir avec les zones blanches. Une petite révolution a commencé, qui va changer le quotidien de nos concitoyens.
Les opérateurs se sont engagés à généraliser la réception 4G sur leurs réseaux mobiles existants d'ici à 2020. Plus de 4 000 pylônes ont ainsi été équipés en 4G depuis janvier 2018.
Vu ce qui reste à faire, c’est à peu près la moitié du chemin pour 2020. On est dans les temps, sans traîner.
Chaque opérateur a aussi l’obligation de couvrir 5000 nouveaux sites, identifiés par les collectivités territoriales. Pour 2019, 700 sites par opérateur doivent être déterminés. C’est déjà le cas pour 207 d’entre eux, que j’officialise aujourd’hui par un arrêté.
Cet accord permettra aussi de couvrir, d'ici 2020, tous les axes routiers prioritaires de France, ce qui représente pas moins que l’équivalent du tour de la Terre. L’accord couvrira aussi, d'ici 2025, les TER et les RER. Les déploiements ont largement commencé, comme on l’a vu ce matin en inaugurant le site de Labejan qui couvrira l’axe Auch-Mirande.
Cet accord permet enfin d’améliorer la couverture à l’intérieur des bâtiments, ce que proposent désormais tous les opérateurs.
Nous visons par ailleurs un effort de transparence.
Grâce au travail de l’ARCEP que je tiens à saluer tout particulièrement, nous publions aujourd’hui deux nouveaux outils. Un atlas cartographique départemental complet, préparé avec les opérateurs. Il présente l’ensemble des antennes existantes et surtout, celles qui vont arriver. Je suis confiant dans la bonne volonté de tous les opérateurs pour jouer pleinement le jeu de la prévision, sans cacher leur copie, pour ne pas attiser les inquiétudes ou les frustrations.
Nous lançons également, sur le site « cartefibre » de l'ARCEP, la carte des déploiements actuels et prévisionnels de la fibre. C'est-à-dire qu'en indiquant votre adresse, vous ne saurez plus seulement si vous êtes éligibles ou non à la fibre, si vous êtes raccordable, mais vous aurez aussi une estimation de la date d'arrivée de la fibre. Ceci change, évidemment, tout puisque vous pouvez choisir la technologie qui vous intéresse, en sachant qu'à un moment donné, avec une information précise, vous pourrez avoir accès à la fibre.
Ces avancées imposent de recruter et de former massivement.
En 2022, nous allons avoir besoin de 28 000 personnes supplémentaires pour installer la fibre. On compte en France 190 organismes de formation aux métiers de la fibre, mais en moyenne, ils ne sont pourvus qu'à 60% de leur capacité. Cela veut dire que les offres de formation existent mais cela veut, aussi, dire qu'il y a beaucoup de jeunes ou de moins jeunes gens, qui ne se forment pas dans des domaines où il est certain qu'ensuite, on peut trouver une activité durable. L'ambition de notre Gouvernement, grâce au Plan d'Investissement dans les Compétences, est d'accompagner davantage de nos concitoyens vers ces métiers de la fibre.
Il faut également accompagner nos concitoyens les plus éloignés du numérique. Évidemment, tout cela est plus facile si on le fait au plus près, c'est-à-dire localement, qu’il s’agisse des réseaux d'accompagnement traditionnels comme les maisons de service au public, ou d'initiatives originales comme le « camping-car connecté » qui se déplace vers les exclus du numérique.
Pour consolider toutes ces structures de proximité, nous lançons aujourd'hui, avec Mounir MAHJOUBI, le Pass Numérique, qui vise à donner une capacité numérique à ceux qui en manquent. Par exemple, quelqu'un qui exprime ses difficultés à faire sa déclaration d'impôts en ligne se verra remettre, par l'agent d'accueil du centre des impôts, un pass numérique, qui lui indique comment et où il peut se former et qui l'accompagne financièrement pour être certain qu'il dispose de la bonne formation.
C'est une expérimentation qui a été conduite depuis 2017 en Gironde, en Ardèche, en Guyane ou à la Réunion. Nous allons généraliser cette pratique et apporter 10 millions d'euros, aux côtés des collectivités, pour financer cette avancée.
Ces avancées technologiques ne sont pas une fin mais un moyen dont tous nos concitoyens vont pouvoir profiter. Le 1er avril, je crois comprendre qu'à Auch, un Forum de l'agriculture digitale et durable est organisé par La Mêlée et GascoFarming, à l'initiative du député Jean-René CAZENEUVE, pour présenter des solutions technologiques et numériques aux agriculteurs soucieux d'amorcer la transformation de leurs exploitations.
Pour les jeunes garçons et les jeunes filles qui restent exclus du numérique, l'enjeu est tout aussi vital. Les exclus du numérique, ce ne sont pas simplement ceux qui n'auraient pas accès aux ordinateurs ou les personnes âgées qui, par nature, ne voudraient pas se frotter à ces machines curieuses. Ce n'est pas vrai du tout. Ceci est une caricature. Beaucoup de jeunes gens ont une utilisation et un accès au numérique beaucoup trop faibles, et à certains égards, très insatisfaisants. Il faut donc accompagner très tôt tout le monde si l'on veut faire reculer ce que certains appellent l'illectronisme.
Raccorder tous nos territoires aux réseaux fixe et mobile est donc essentiel pour éviter le décrochage ou le découragement de ces jeunes. Le désenclavement numérique est donc une priorité, au même titre que le renforcement des services publics de proximité et que le désenclavement physique. Parce que la fibre, c’est bien, mais les routes aussi. Je sais l'attachement qui existe sur le dossier de la RN124, d'abord, parce que, le député Jean-René CAZENEUVE m'en parle avec une certaine forme d'insistance, il faut bien le reconnaître, et aussi avec une assez grande forme de régularité. Il y a 20 ans que le projet a été déclaré d’utilité publique. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de prioriser, parmi la vingtaine de kilomètres qui restent à aménager, la déviation de Gimont. Dès ce semestre, le marché de travaux sera engagé et la déviation sera mise en service en 2021. Dans la continuité de cet engagement, la mise à 2x2 voies entre Gimont et l’Isle-Jourdain sera aussi mise en oeuvre.
Toutes les voies de désenclavement doivent donc être empruntées. Pour que la cohésion républicaine ne soit pas un beau concept, « vague et enthousiasmant ». Mais un réseau très concret, tissé d’innombrables canaux, technologiques, géographiques et surtout humains. C'est un bel enjeu. Nous avançons bien et ce grâce à un travail collectif avec les opérateurs et les collectivités territoriales. Nous avançons avec ambition, et nous allons y arriver.