Discours du Premier ministre, Édouard Philippe, sur le bilan 2018 de la sécurité routière

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Édouard Philippe.

Publié le 28/01/2019

Seul le prononcé fait foi
Monsieur le maire,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs,
C’est la deuxième fois que je viens ici. J’étais venu en décembre 2017 visiter l’établissement, rencontrer celles et ceux qui travaillent ici, qui font un travail remarquable, rencontrer les patients, qui se reconstruisent. Et j’avais été très impressionné, par à la fois la dureté de ce qui était arrivé à celles et ceux qui sont accueillis ici, mais aussi très impressionné par leur optimisme et leur envie de se réparer et de continuer à vivre de la plus belle façon possible. Et à l'occasion de ce déplacement, j'avais évoqué Monsieur le ministre, Madame la ministre, la nécessité d'une politique publique de sécurité routière qui soit plus efficace et plus ambitieuse, pour faire en sorte que moins de nos concitoyens meurent chaque année sur les routes et pour faire en sorte que moins de nos concitoyens subissent des accidents, parfois très graves.
Au fond l'idée c'était de se dire qu'il ne fallait jamais céder à la résignation et c'est une des choses que vous témoignez tous les jours ici. Je m'adresse à ceux qui travaillent et à ceux qui sont accueillis ici, vous ne cédez pas à la résignation. Vous considérez qu'on peut faire mieux et qu'on doit faire mieux et c'est assez admirable. Alors en janvier dernier, avec l'ensemble des membres du Gouvernement, après avoir beaucoup travaillé, après avoir pris en compte un certain nombre de remarques qui étaient formulées notamment par le Conseil national de la sécurité routière, nous avons adopté un plan qui comporte 18 mesures pour essayer de lutter contre les principaux facteurs de l'insécurité routière : la vitesse bien sûr, l'usage du téléphone portable, dont on sait qu'il constitue un facteur extrêmement important d’accidentalité, les conduites addictives, la protection des piétons aussi.
Ces décisions lorsqu'elles ont été annoncées ont été très commentées et parmi toutes ces décisions, il y en a une qui a fait l'objet de commentaires peut-être encore plus vigoureux que les autres, c'est celle qui est relative à l'obligation de ne pas dépasser les 80 km/h sur le réseau secondaire sans séparateur central. Cette décision, elle a parfois suscité l'incompréhension et même parfois d'une certaine façon la colère. Evidemment, l'objectif du Gouvernement, l'objectif du Premier ministre, l'objectif, je l'espère, de tous les responsables publics, c'est de faire en sorte que la colère puisse être apaisée.
Comme le président de la République l'a demandé à l'occasion du grand débat national, je crois juste que les Français puissent s'exprimer et reprendre ou poursuivre un dialogue serein sur l'ensemble des sujets qui font leur quotidien. Et après tout la sécurité routière, la route, la voiture fait partie de notre quotidien. Mais je crois qu'il faut le faire en gardant à l'esprit que la seule chose qui vaille, c'est une ambition forte, l'ambition de faire baisser le nombre de vies perdues, l'ambition de faire baisser le nombre de vies abîmées. Je crois donc qu’il est tout à fait légitime de discuter de ce sujet, mais qu'il serait fou de baisser le niveau d'ambition.
Et ce serait d'autant plus déraisonnable que les résultats que nous sommes en mesure de produire pour l'année 2018 sont sans aucune ambiguïté. Ce sont des résultats historiques. Le mot est parfois utilisé, pas forcément à propos mais en l'occurrence, c'est vrai, ce sont des chiffres historiques. Il n'y a jamais eu aussi peu depuis qu'on mesure l'accidentologie routière aussi peu de morts sur les routes françaises. C'est l'année 2018 où l'on aura compté le moins de morts sur les routes françaises, métropole et départements d’outre-mer compris.
En 2018 les chiffres sont les suivants, 3259 personnes ont perdu la vie sur les routes de la France métropolitaine. C'est beaucoup 3259, mais c'est 189 morts de moins qu'en 2017, 189. C'est 3950 blessés de moins qu'en 2017. Et le nombre et je le dis ici à dessein, de blessés hospitalisés pendant plus de 24 heures, c'est-à-dire les plus graves, a baissé de 25%. Je n’ai pas peur de le dire, c'est un chiffre exceptionnel. Donc oui nous sommes capables collectivement de réduire la mortalité, de réduire le nombre d'accidents, de réduire la gravité de chaque accident sur les routes françaises. Les mesures qui ont été mis en place l'année dernière de 80 km/h, les autres, ont joué leur rôle dans cette diminution.
Si on regarde la mortalité du second semestre 2018, c'est-à-dire le semestre où ces mesures ont été mises en œuvre, c'est la plus basse jamais enregistrée. Si on s'intéresse simplement au deuxième semestre 2018, on a 1739 tués en France métropolitaine, il y en avait 1820 en 2017 et en 2013 qui jusqu'à présent été la meilleure année, la moins mauvaise, je ne sais pas comment il faut dire les choses, c'était 1851. Si on compare sur les 5 dernières années et si on regarde exclusivement sur le réseau concerné par la mesure 80 km/h, c'est 116 vies qui ont été épargnées depuis le 1er juillet.
Et donc au fond si je suis venu ici, c'est d'abord pour faire état des résultats que nous obtenons dans cette politique publique et le faire devant vous, le faire devant les Français, mais c'est aussi d'une certaine façon pour vous dire merci. Merci au service de l'Etat qui ont mis en œuvre ces mesures, pour qui la sécurité routière n'est pas un vain mot, quand vous êtes gendarme, mon Général, quand vous êtes policier, Monsieur le directeur général de la police nationale, quand vous intervenez à la fois pour prévenir mais aussi, on le sait, lorsque les accidents ont eu lieu dans des conditions qui sont parfois dangereuses elles-mêmes. J'ai une pensée pour le sapeur-pompier qui est décédé hier à la suite d'une intervention sur un accident de la route et qui a été victime d'un sur-accident. Lorsqu'on intervient en matière de services de secours, on sait toute l'acuité du sujet et tout ce que ça représente dans nos vies à tous. Je pense aussi aux services de secours, les SAMU bien entendu, les pompiers qui sont toujours mobilisés pour intervenir vite et pour essayer de faire en sorte de limiter au maximum les dommages qui sont constatés.
Je voudrais aussi remercier les conseils départementaux, les communes, les grandes métropoles, je sais parfaitement qu'elles ont été les réactions après l'annonce des mesures, je me souviens des polémiques qui ont pu suivre, mais je constate et je veux le dire que l'ensemble des autorités publiques décentralisées, les conseils départementaux, comme les grandes intercommunalités lorsqu'elles en ont la compétence, ont appliqué la réglementation, l'ont fait dans de bonnes conditions et je les en remercie car elles ont fait évidemment preuve d'un sens républicain dont je ne doutais pas, mais que je tiens à souligner.
Je ne veux pas non plus oublier dans mes remerciements les associations, les bénévoles, les intervenants départementaux, qui œuvrent pour la prévention en matière de sécurité routière. Les mesures qui contraignent sont importantes, il faut parfois assumer de les prendre, mais l’information et la prévention sont absolument indispensables, et il y a beaucoup de nos concitoyens qui consacrent de leur temps à aller dans les lycées, aller dans les entreprises, aller dans les écoles, pour dire les choses et pour essayer de faire en sorte qu’on n’oublie pas que la sécurité routière ce n’est pas le sujet des autres, ce n’est pas le destin qui viendrait s’écrouler sur vous, c’est quelque chose sur quoi on a la main, parce qu’on est tous responsables.
Et puis je voudrais remercier, d’une certaine façon aussi, les automobilistes, parce qu’en respectant ces nouvelles règles, ils ont respecté la loi, la réglementation, mais ils ont aussi permis d’atteindre ces résultats qui sont bénéfiques pour tous. Tout à l’heure je crois que le chef d’escadron ici, en Seine-et-Marne, m’a dit que le nombre d’accidents liés à la vitesse dans le département de Seine-et-Marne, où nous nous trouvons, avait été réduit de 8 %, c’est un élément local qu’il est important de souligner.
Je voudrais aussi, après avoir indiqué mes remerciements, appeler chacun à une grande vigilance, à une grande responsabilité, parce que les chiffres que nous communiquons aujourd’hui ils sont bons, mais d’une certaine façon ils restent fragiles. Nous avons vu au cours des quatre dernières années une réaugmentation du nombre de morts et du nombre d’accidents, pourquoi ? Probablement parce que l’effort collectif s’était fragilisé. En novembre et en décembre, avec les événements que nous avons chacun en tête, nous avons constaté un très grand nombre de détériorations commises sur les radars, et avec la disparition des radars il a été observé une réaugmentation de la vitesse moyenne. Il ne faut pas se raconter de mensonges, avec la réaugmentation de la vitesse moyenne, le nombre d’accidents, et leur gravité peut augmenter. Autrement dit, il ne faut jamais se satisfaire d’un résultat, il faut l’avoir en tête, parce qu’il montre qu’il y a des mesures qui permettent d’obtenir des résultats, mais il faut continuer à se battre, collectivement, pour faire en sorte que l'effort ne se relâche pas.
Vous vous souvenez peut-être que j'avais indiqué, lorsque nous avons annoncé cette mesure des 80 km/h, que le surplus des amendes qui proviendraient de cette réglementation, serait dirigé vers le financement de projets visant à améliorer la prise en charge, l'accueil, l'accompagnement, des personnes qui ont subi des accidents de la route, et le fonctionnement des établissements qui les accueillent. Pour l'année 2019, ce seront 26 millions d'euros qui seront mis à la disposition de ces établissements, et de ces associations, par un appel à projets, qui sera lancé la semaine prochaine, et qui permettra, à ceux qui le souhaitent, à ceux qui ont des projets, de venir mobiliser ce fonds pour avoir des ressources supplémentaires et pouvoir accompagner, dans de meilleures conditions encore, celles et ceux qui ont besoin d'être pris en charge.
Aujourd'hui il y a un débat national, il est important que nos concitoyens s'expriment sur le sujet de la sécurité routière, parce que c'est un sujet de notre quotidien. C'est important qu'ils nous disent si oui ou non s’ils partagent l'objectif de faire baisser le nombre de morts et le nombre d'accidentés sur les routes françaises. C'est important qu'ils nous disent comment il est possible de maintenir cette tendance, et peut-être même comment il est possible de l'améliorer. C'est important qu'ils nous disent s’ils sont prêts, ou non, à changer un certain nombre de comportements ou de règles pour faire en sorte que nous puissions maintenir ces résultats et peut-être, le cas échéant, les améliorer encore.
Au cours du mois de février, je ferai connaître département par département les chiffres à chaque président de Conseil départemental - parce que c'est les présidents des Conseils départementaux qui sont les gestionnaires du réseau sur lequel la décision d'abaisser à 80 km/h la limitation de vitesse s'applique - et chaque président de Conseil départemental pourra connaître les chiffres dans son département, sur son réseau, pourra réagir et faire part de ses propositions.
Mais je voudrais vous dire, Mesdames et Messieurs, que quand nous avons pris cette décision, avec le Gouvernement, avec le président de la République, nous avons pris nos responsabilités. Nous avons pris une décision que nous savions impopulaire, et qui s'est révélée impopulaire, mais qui ne nous paraît pas remettre en cause la façon dont nos concitoyens peuvent se déplacer, et qui en revanche produit des résultats.
Je suis fier aujourd'hui et nous sommes fiers des résultats qui sont présentés, fiers de ces vies épargnées, fiers d'avoir considérablement réduit le nombre de nos concitoyens qui se retrouvent confrontés à un drame lié à un accident sur la route. Nous sommes fiers d'avoir pris nos responsabilités, et je pense qu'avant la fin du débat, ou après le débat, chacun devra prendre les siennes, en les assumant devant les Français.
Mais je le redis, pour conclure, ne baissons pas la garde. Se féliciter de chiffres historiques, et ces chiffres sont historiques, c'est bien, mais faire en sorte qu'ils s'inscrivent dans la durée, et peut-être même qu'ils s'améliorent, c'est encore mieux.
Voilà ce que je voulais vous dire, Mesdames et Messieurs, en vous remerciant encore de votre accueil, en disant à ceux que j'ai croisés tout à l'heure, et qui m'ont fait part de leur combat pour se retaper, combien ils sont impressionnants, et combien on est avec eux, à ceux qui les accompagnent et qui se battent tous les jours pour qu'ils aillent mieux, combien ils sont impressionnants et combien nous sommes avec eux, et à l'ensemble de nos concitoyens que la sécurité routière n'est pas un petit enjeu, c'est un enjeu collectif, citoyen.
Je vous remercie.

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