Michel BARNIER
Monsieur le Président, cher David,
Messieurs les vice-présidents,
Madame la secrétaire générale, merci de votre invitation.
Je n'ai pas été choqué du tout par ce que vous avez dit l’un et l’autre, David, André. Et je me retrouve dans beaucoup de ce que vous avez dit, des propositions, des critiques, parfois l’expression d’une certaine colère. Tout à l’heure avec André LAIGNEL, nous nous souvenions d’une période plus ancienne où je lui ai succédé comme le benjamin des présidents de conseil généraux en 82. C’est d’ailleurs un titre qu’on perd assez vite, le titre de benjamin. Et à cette époque André, nous sommes en mars 82 quand je deviens président du conseil général de la Savoie. Je salue d’ailleurs les maires de Savoie qui sont ici et qui ont amené la neige aujourd’hui à Paris.
En mars 82, c’est le début de la décentralisation dans cette grande loi qu’avait voulu Gaston DEFFERRE et François MITTERAND, pour moi d’ailleurs, c'est une des lois, une plus grande loi naturellement avec notamment d’abord l’abolition de la peine de mort du septennat de François MITTERAND. Et l’esprit n’était pas celui que vous avez décrit, l’esprit n’était pas de mettre sous tutelle financière et sous tutelle normative les collectivités locales, c’était le contraire. Je peux ainsi partager sur ce plan-là notamment ce que vous avez dit. Je salue bien sûr parmi vous et au-delà des maires aux conseils municipaux, vos élus qui sont ici, les secrétaires de mairies aussi, dont on sait l’importance, les présidents d’intercommunalité, les élus départementaux et régionaux, les parlementaires nombreux, je suis pour beaucoup de raisons très heureux de participer à ce moment de notre vie républicaine et de le faire en vous remerciant de m’accueillir avec à mes côtés de très nombreux ministres.
Monsieur le Président, cher David, vous avez bien voulu dire qu’ils avaient été présents dans votre congrès, tous m'ont dit qu'ils avaient été heureux de participer à beaucoup de tables rondes et heureux de ce dialogue et parmi lesquels naturellement Catherine VAUTRIN mais aussi dans son pôle du partenariat avec les territoires. Les mots ont du sens. Elle n'est pas la ministre des Collectivités locales, mais du partenariat avec les territoires. Françoise GATEL, en charge de la ruralité, François DUROVRAY, chargé des transports, et Fabrice LOHER, chargé de la mer. D'être aussi aujourd'hui, comme le président l'a dit tout à l'heure, accompagnés pour les ministres et pour d'autres de leur duo, que je salue, Mélissa à mes côtés, qui sont des jeunes et des moins jeunes en situation de handicap et que nous accueillons symboliquement, mais c'est beaucoup plus qu'un symbole, à nos côtés. La présence d'une bonne partie du Gouvernement ici, c'est le lien profond qui unit notre pays, l'État que je représente aujourd'hui avec d'autres au premier échelon de la démocratie. Cette petite République, le président LISNARD a cité, c'est toujours un mot, du président du Sénat, aussi, Gérard LARCHER, témoigne de notre souhait d'avoir un contact direct avec vous, maires de communes, grandes et petites, urbaines ou rurales, de l'Hexagone et des Outre-mer. Je veux saluer ici en particulier vos collègues maires de Nouvelle-Calédonie, mais aussi des autres départements et territoires, dont je sais l'engagement. Je veux leur dire, avec François-Noël BUFFET, le ministre des Outre-mer, qui est aussi ici, que nous sommes attentifs à leurs difficultés, et en particulier en Nouvelle-Calédonie, dans une période extrêmement grave, après des troubles très violents, où 25 % de l'économie du territoire a été détruite. Voilà une des situations que je trouve. L'aide de l'État, notamment financière, mais pas seulement financière, technique, en termes d'ingénierie économique, leur sera bien évidemment destinée dans le cadre d'une convention qui sera conclu prochainement avec le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, dont j'ai reçu le président, monsieur MAPOU, il y a quelques jours, et ce paiement, je le dis à Pascal VITTORI, il n’est peut-être par ici, le paiement interviendra pour ce qui les concerne directement avant la fin de l'année.
Mesdames et messieurs les maires, Dans votre diversité, vous portez ici la voix de millions de Français qui réaffirment d'élection en élection leur attachement à l'institution communale. Ce contact direct entre nous est important, il doit être franc, il l'a été, et donc je serai franc aussi avec vous, parce que nous sommes responsables ensemble, État et commune, du plus petit village de France jusqu'aux plus grandes villes de la République. Je n'oublie jamais que les maires sont depuis toujours les représentants de l'État et de la République sur le terrain, partout sur le territoire. Sans eux, la République est privée de ses bases. Je veux bien soutenir ce qu'a dit David LISNARD tout à l'heure, privé de ses relais, d'une grande part, sa légitimité, pour tout dire, de sa force.
C'est en tout cas ce que j'ai appris, Mesdames et Messieurs les maires, en ayant l'honneur de présider pendant 17 années le Conseil général, on disait comme ça à l'époque, le Conseil départemental de la Savoie. Donc, ce congrès est pour nous, pour moi, un moment important. Il est encore plus cette année qui n'est pas une année comme les autres. Je veux d'ailleurs dire au président LISNARD. Comment disiez-vous, monsieur le Président, flatter au Congrès, taper au budget, c'est ça ? Il n'y a aucune chance que je sois flatté au budget, en ce qui me concerne. [Applaudissements]
Et je vous remercie de ne pas trop me taper au Congrès. [Applaudissements]
Mais j'ai dit d'emblée, monsieur le Président, si je peux être utile dans le temps qui est devant moi, que je ne connais pas dans sa durée. C'est assez motivant, quelque part, de se dire qu'on peut partir demain matin et de se dire que ce n'est pas sûr, et que ça peut durer deux ans et demi. En tout cas, c'est l'horizon normal qui est devant moi, et qu'en deux ans et demi, si on est sérieux, si on ne fait pas d’esbroufes, si on dit la vérité, si on est méthodique, les gens qui me connaissent savent que je suis très sérieux, enfin, un peu trop sérieux, pas très marrant, en tout cas, mais assez méthodique, et que j'attache, monsieur le Président, monsieur le vice-président, autant sinon plus d'importance à l'effet de suivi qu'aux effets d'annonces. Et donc, je serai extrêmement méthodique. Il y a une autre chose que je voudrais dire, que je voudrais tenter pendant ce temps-là, de renverser ce sentiment avec vous, pas sans vous, avec vous d'être sous tutelle normative et financière. Je voudrais renverser cette tendance qui fait que les collectivités que vous représentez, et je pense aussi au département dans lequel je m'exprimais la semaine dernière, ont le sentiment d'être venus au fil du temps, et malgré la décentralisation, ou l'esprit de la décentralisation, d'être devenus de véritables sous-traitants de l'État. Ce n'est pas ça, la vocation des communes. [Applaudissements]
Il y a une autre chose que je veux bien dire, monsieur lePrésident, parce que vous avez parlé des bureaucrates. On a tous besoin d'experts, de techniciens, de gens qui sont évidemment plus intelligents que nous sur certains sujets techniques. On a tous besoin, j'ai besoin.
Mais je pense une chose, monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, c'est qu'aussi bien à Paris, dans toutes nos capitales régionales ou départementales, et naturellement à Bruxelles, que je connais assez bien, je pense une chose depuis longtemps, que quand les bureaucrates prennent le pouvoir, c'est que les hommes politiques leur ont laissé le pouvoir. [Applaudissements]
Voilà pourquoi je pense que ce contact direct est important. Et je sais que c'est une année particulière pour beaucoup d'entre vous, parce qu'il y a de plus en plus de défis, parfois de raisons de baisser les bras, des accidents climatiques, la sécurité, le logement, l'évolution des besoins sociaux. Voilà pourquoi je veux saluer votre action et vous remercier au nom du Gouvernement. C'est aussi une année assez particulière pour le Premier ministre qui se tient devant vous. J'ai entendu tout ce qui ne va pas bien, et vous avez eu la gentillesse de dire que ça datait d'assez longtemps. (rires) Moi, je suis là depuis deux mois et demi. [Applaudissements].
Je ne vous dis pas que je trouve le temps long. Je trouve même que les journées sont assez courtes. Voilà. Et alors… Tout à l'heure, vous avez dit avec beaucoup de force votre exaspération, la blessure qui a été celle de tous les élus locaux d'entendre dire que si la France était en déficit, c'était leur faute. Vous ne m'entendrez pas dire ça parce que je ne le pense pas. C'est aussi simple que ça. [Applaudissements]
Je ne vous dis pas mon sentiment personnel parce que ça n'intéresse pas le grand monde, mais lorsque j'ai entendu de hauts responsables, ancien premier ministre ou ministres, dire que le déficit de la France était la faute du Gouvernement actuel. (rires) C'est la même blessure ou sentiment, disons, d'incompréhension, pour ne pas dire d'injustice, que celui que vous avez vécu. Voilà. Je suis là, non pas parce que je l'aurais demandé, mais parce que j'ai pensé, à l'âge qui est le mien, 73 ans, je n'ai pas besoin qu'on me rappelle mon âge, après avoir été, c'était un grand privilège, président d'un département, après avoir été à 4 reprises, un grand honneur, 4 fois membre d'un gouvernement, et pendant 15 ans à Bruxelles, deux fois comme commissaire, et puis sur cette négociation, presque aussi compliqué que de diriger le gouvernement du Brexit, que je pouvais peut-être utiliser tout ce que j'avais appris et le mettre au service de notre pays. Je ne sais pas le temps que j'ai devant moi. Ça dépend d'une éventuelle coalition des contraires, si je puis dire, à l'Assemblée nationale.[Applaudissements]
Je ne sais pas si ça se produira, j'y suis prêt. Je sais que ce n'est pas ce que souhaitent les Français. Ils souhaitent aujourd'hui de la stabilité, de la sérénité. [Applaudissements]
Et que le Gouvernement fasse, en écoutant, y compris quand il est critiqué, ce qu'il peut pour que ça aille mieux. Et pour... Comment dirais-je ? Ce n'est pas un mot archaïque, créer du progrès, moi, je pense que c'est notre honneur et notre responsabilité dans une commune, au niveau national, au niveau départemental, et quand on est Premier ministre, d'utiliser les outils qu'on a entre les mains. D'abord des valeurs, des convictions, des idées, et puis des lois, un budget, celui de tous les contribuables, qu’ils votent pour vous, qu’ils ne votent pas pour vous, naturellement.
Qu'est-ce qu'on fait avec tout ça ? On doit créer du progrès collectif, voilà. C'est ça l'intention que j'ai, la seule intention que j'ai dans le moment où nous nous trouvons. Et dans l'immédiat et dans l'urgence, l'extrême urgence, Mesdames et Messieurs les maires, nous sommes face à une épreuve budgétaire que nous n'avons pas d'autre choix que de surmonter. Notre dette atteint cette année 3 228 milliards d'euros. 3 228 milliards d'euros. L'année prochaine, elle dépassera 3 400 milliards et la charge de cette dette, vous savez, le prix des intérêts, elle devrait être de 60 milliards cette année. Voilà. Un peu moins que le budget de l'Éducation et un peu plus que le budget de la Défense. Moi, je pense, peut-être naïvement, que cet argent serait beaucoup mieux dépensé autrement dans l'éducation, dans la sécurité, dans l'équipement, dans le partenariat avec les communes. Ça fait 870 euros par an à payer pour les intérêts par Français, c'est-à-dire qu'on ait un mois de vie ou 80 ans, on doit payer 870 euros chacun par an pour les intérêts de la dette. Et si nous voulons relever les défis qui sont devant nous, si nous voulons simplement que notre pays reste souverain, alors nous devons réduire ce déficit et cette dette. Sans parler, Mesdames et Messieurs, de ceux qui nous observent, qui nous attendent, qui ne nous feront jamais de cadeau. J'ai un assez long parcours, ça ne me donne pas le droit de donner des leçons, j'aime bien en recevoir, d'ailleurs, quand elles sont sincères, mais je sais ce que sont les marchés financiers. Parce que pendant 5 ans, j'étais vice-présent de la Commission européenne chargée de la régulation des marchés financiers. C'était en plein cœur de la crise 2010-2014, qui a failli emporter la Grèce et qui a détruit en Europe, chez nous, partout des millions d'emplois. Je recommande de ne pas avoir la mémoire courte et de faire attention à la crédibilité de notre pays et la crédibilité de sa signature, et ça passe par la réduction de la dette au-delà des questions de souveraineté et de désendettement qui intéresse tous les Français, voilà. Et ma responsabilité aujourd'hui, c'est de rendre ces efforts les plus justes possibles. Je veux le dire clairement et solennellement, je le répète, il n'est pas normal ni juste de montrer du doigt les communes, les collectivités locales ou territoriales comme si elles étaient responsables de ce déficit. Ce n'est pas vrai et je ne le ferai donc pas.
Les efforts... [Applaudissements] que nous devons faire, on ne va pas les faire contre les communes ni sans elles, on voudra les faire avec vous. Et nous aurons besoin de vous, les maires, pour faire remonter les difficultés mais aussi pour expliquer aux Français les démarches que nous devons faire ensemble pour rétablir les comptes de notre pays.
Mesdames et Messieurs les maires, dans le monde de plus en plus connecté où nous sommes, où les citoyens peuvent interagir à quelques clics avec l'État, certains pensent que la Commune est dépassée, moi, je pense le contraire. Je pense que vos communes sont une institution profondément moderne. Et dans le monde où nous sommes, où nous avons de plus en plus besoin de racines, de garder nos racines, notre identité, il y a dans la commune beaucoup de choses dont notre époque a besoin. La commune, dans notre histoire, c'est la mise en commun des fonctions essentielles à la vie quotidienne. La commune, pour un territoire, c'est une façon de choisir et de maîtriser son destin. C'est aussi, pour citer à mon tour TOCQUEVILLE, cher David, la force des peuples libres, c’est ce que disait TOCQUEVILLE. J'ai dit l'autre jour au Sénat que j'étais aussi roi où, même s'il y a des polémiques, des opinions différentes, au moment des élections, évidemment, mais peut-être quelques fois après, mais pas souvent, vous donner, dans vos conseils municipaux ou dans les intercommunalités, une belle image de travail en commun, de respect des opinions, d'écoute, de tolérance, voilà. Et quelques fois, je me prends à rêver qu'on puisse retrouver ce genre d'ambiance, par exemple, à l'Assemblée nationale. [Applaudissements]
Le résultat de tout ça, c'est que les communes sont un élément de stabilité, un repère pour nos compatriotes, une façon de prendre l'époque à rebrousse-poil contre l'individualisme, le fatalisme ambiant et le sectarisme sous toutes ses formes. Voilà pourquoi je peux reprendre à mon compte ce slogan ou ce titre de votre affiche. Oui, les communes, heureusement. Mais pour que les communes puissent remplir leur rôle, et je viens sur le fond maintenant, il faut aujourd'hui libérer davantage leurs potentiels, faciliter leur fonctionnement quotidien, qu'elles s'expriment en utilisant ce qu'elles recèlent d'énergie, de volonté et de force, ce qui n'est pas le cas dans le sentiment que vous avez, qui est d’ailleurs un sentiment, mais une réalité, d'être sous tutelle. Il y a trois conditions pour y parvenir ensemble dans le temps et en étant tenaces. Plus de liberté, c'est un mot que votre Président aime bien, qu'il use, je n'ai pas dit qu'il abuse, il l'utilise très souvent. Liberté de faire et de choisir. Des moyens d'action, notamment budgétaires, des marges de manœuvre. Enfin, une vie quotidienne plus simple pour les élus. Je voudrais évoquer précisément possible et rapidement ces trois chantiers. Plus de liberté. Le cœur de votre mandat, c'est la liberté de choisir ce qui est bon pour la commune. Vous le savez mieux que d'autres. C'est aussi cette exigence qu'il faut rétablir. Ça implique un profond changement de notre façon de faire. Il y a un certain nombre de gens qui pensent que la loi et l'État peuvent tout d'en haut, mais doivent tout régler dans le détail. Les mêmes pensent que la loi et les règles doivent être les mêmes partout. Ils ont en quelque sorte peur de concevoir que ces lois pourraient être adaptées, territorialisées dans leur mise en œuvre en fonction des territoires.
La République, Mesdames et Messieurs, protège légèrement l'objectif d'égalité entre les citoyens et les citoyennes, mais cela n'interdit pas d'être pragmatique et d'admettre que là où la situation est différente, elle est évidemment dans les territoires du parcours d'Outre-mer, l’éloignement, l'insularité, mais aussi entre le Nord et le Sud de la France, l'Est ou l'Ouest, et de l'Hexagone, cela n'interdit pas d'admettre que lorsque la situation est différente, la règle doit être et peut être appliquée différemment. Et ce dont nous avons besoin en priorité, c'est de lois moins bavardes, qui s'en tiennent aux objectifs généraux et qui ne cherchent pas à régler tout dans le détail. Il faut ensuite que l'État s'astreigne, lui aussi, à ne prendre des normes de lorsque c'est strictement nécessaire, à ne pas surtransposer, par exemple, les directives européennes.
Je disais ça au Sénat, je le répète devant vous. Nous allons regarder texte par texte, norme par norme, méthodiquement, là où la France, dans une sorte de zèle, a surtransposé les directives européennes, et pas seulement dans l'agriculture [Applaudissements] où Annie GENEVARD, la ministre de l'Agriculture, a commencé ce travail, je le dis aussi en présence du ministre de l'Europe, Benjamin HADDAD, nous allons regarder là où nous avons surtransposé, parfois en croyant bien faire, pas toujours, des normes qui créent contre nos entreprises agricoles, artisanales, industrielles, une concurrence déloyale contre nous-mêmes. C'est ça la situation. Et nous supprimerons, lorsque ce n'est plus justifié ou pas justifié, ces transpositions. Ne sous-estimons pas le problème technique que ça pose. Il faut regarder texte par texte, mais nous allons le faire méthodiquement avec l'ensemble des ministres. Nous devons mettre un terme à cette inflation normative qui s'est emballée à Bruxelles, évidemment, avec le fameux Green Deal, et aussi dans notre pays. Les décideurs locaux, préfets élus, sauront quoi faire de cette liberté retrouvée, et je voudrais reprendre le mot de votre président, « faire confiance. »
C'est comme cela que nous donnerons substance au pouvoir réglementaire local, aujourd'hui inusité, j'ai lu le rapport de M. WŒRTH qui a fait des propositions dans ce sens dont je souhaite m'inspirer. Cette volonté me conduira à prendre dans les semaines qui viennent 4 décisions assez importantes : un, je vais demander à l'ensemble des administrations de proposer en priorité des lois d'orientation ou des lois cadres qui fixent des objectifs plutôt que les moyens et qui laissent aux autorités locales des marges pour interpréter les règles et pour les mettre en œuvre de manière adaptée. C'est un point que votre président a fait tout à l'heure et nous allons aller dans ce sens. Le Gouvernement fera la chasse aux lois trop complexes ou trop détaillées et nous renverrons tous les textes qui ne respecteraient pas cet objectif. Je vais signer une circulaire sur ce sujet avant la fin de cette année.
Deux, nous allons faire évoluer le rôle du Conseil national d'évaluation des normes que préside Gilles CARREZ, pour en faire l'organe de la vérification, bien en amont de leur présentation au Parlement, du respect de l'exigence, de clarté et d'intelligibilité des lois. Ce Conseil national est trop souvent considéré comme un passage obligé et sa saisine est trop formelle, trop tardive. Nous devons en faire un organe de conception, partager des lois et des règlements saisis bien plus tôt qu'il ne l'est aujourd'hui. Trois, nous allons intégrer plus spécifiquement aux études d'impact l'analyse des effets de la loi sur les collectivités territoriales. En amont, l'exercice de leurs compétences donnant ainsi une portée renforcée à l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009. On va faire la même chose d'ailleurs pour les petites et moyennes entreprises avec un test PME pour vérifier à l'avance, avant que la loi française ou européenne avance et ne soit promulguée, quel peut être l'impact de ces textes sur la vie et le budget des entreprises. Si on l'avait fait d'ailleurs sur certains textes européens, on économiserait déjà beaucoup d'argent. Enfin, nous allons entrer dans une démarche résolue d'évaluation et de simplification du stock des normes, cher André LAIGNEL, en nous appuyant sur le Conseil d'État et dans des domaines choisis concernant par exemple l'urbanisme ou l'environnement. Nous allons nous atteler à réécrire depuis la page blanche de notre législation en partant des objectifs que nous poursuivons et des contraintes juridiques qui s'imposent dans une logique de sobriété normative et procédurale. Et ce travail débutera aussi dès la fin de cette année.
Voilà l'évolution que nous allons impulser dans ce temps qui est devant nous. Elle consiste à vous laisser adapter les règlements, les interpréter, et voir en fonction des besoins de votre territoire ce qu'il faut faire chez vous, chez vous, vous-même, pour atteindre les objectifs que la loi et les règlements ont fixés.
Monsieur le Président, si vous m'invitez l'année prochaine, et si je suis toujours là, je veux bien, vous ne m'entendrez pas aujourd'hui faire des promesses ou autre chose, mais je veux bien, devant vous, l'année prochaine, faire le bilan, l'évaluation de ce que je vous aurais dit aujourd'hui. Vous dire là où nous avons réussi, là nous avons progressé. Voilà. Je vais maintenant, si vous voulez bien pour être plus concret, prendre quatre exemples de domaines où cette nouvelle liberté des communes pourrait s'appliquer. Le premier exemple, je me suis exprimé devant le Sénat, c'est la question que vous avez évoquée sur le président, celle de l'eau et de l'assainissement. La loi avait fixé un objectif de mutualisation de la gestion de l'eau, parce que c'est généralement en mutualisant, c'est un mot que j'aime bien d'ailleurs, qu'on se met en mesure de bien gérer cette ressource. Vous avez été très nombreux à faire un effort considérable, contraint, volontaire ou forcé quelquefois, en 10 ans pour atteindre cet objectif et là où c'est fait, on n'y reviendra pas. Ce résultat est positif, mais il faut reconnaître que cet objectif ne se trouve pas toujours à s'appliquer partout avec la même pertinence. D'autres formules que le transfert obligatoire à l'intercommunalité sont possibles, notamment dans des territoires à contraintes spécifiques. Je ne parle pas seulement de la montagne. Nous allons donc avec le Parlement en tirer les conséquences. Il n'y aura donc plus d'obligation de transfert à l'avenir. [Applaudissements]
Et la loi laissera ainsi aux communes le choix de ce que vous voulez faire. Dans toute la gamme des solutions que vous connaissez, si ce n'est pas l'intercommunalité, ça peut être un syndicat, ça peut être aussi la commune seule. Je dis simplement à ce stade, et je l'ai dit aussi devant le Sénat, qu'un tel choix ne devra être fait qu'en conscience, et en mesurant toutes ses conséquences en responsabilité, et je pense aussi que vous n'en avez pas peur dans ce domaine comme dans d'autres, la responsabilité, c'est le corollaire indispensable de la liberté. Deuxième exemple, vous l'avez évoqué aussi, c'est la législation sur le zéro artificialisation nette. Il ne faut pas d'ambiguïté sur ce domaine. Dans mon long parcours, j'ai été aussi ministre d'Environnement et chargé des risques naturels. Là aussi, on a essayé de pratiquer une écologie humaniste et concrète avec et non pas contre. On ne va pas abandonner l'objectif que poursuit le ZAN, qui est de préserver d'ici 2050 nos espaces agricoles et naturels. J'ai appris en Savoie et au ministère que, et vous le savez aussi bien que moi, dans notre pays, les espaces naturels et les ressources naturelles ne sont ni gratuits ni inépuisables. Il faut faire attention. Comme il faut faire attention aux terres agricoles, aux patrimoines, et aussi à ce dont nous avons besoin, en n'ayant pas la mémoire courte, par rapport à beaucoup trop de catastrophes naturelles. Certains d'entre vous en ont vécu, il n'y a pas si longtemps, qui exigent aussi de la prévention. Donc, on ne va pas abandonner cet objectif, mais on va essayer de l'atteindre en adaptant le ZAN quand c'est nécessaire pour atteindre cet objectif. Que ce soit pour les constructions de l'eau, dit devant Valéry LÉTARD, qui est ici, ou pour l'économie, construction d'usines. Le ministre des Comptes publics est ici aussi, Laurent SAINT-MARTIN, et nous avons ce souci de développer l'emploi, surtout dans un moment où il y a depuis de longs mois maintenant des signaux extrêmement concrets de régression, de restructuration. Dans l'immédiat, nous allons faire tout ce qui est possible par voie réglementaire pour vous donner de la souplesse. Voie réglementaire, c'est rapide. Nous allons aussi, par exemple, modifier les textes pour que, un exemple, les jardins pavillonnaires ne soient plus considérés comme des surfaces artificialisées, ce qui dégagera des marges de manœuvre localement et évitera que ces projets ne soient bloqués inutilement. Nous avons besoin de logements, Valérie, et nous avons besoin aussi d'autoriser plus de construction, notamment pour les projets vertueux, comme la construction sur des friches ou des projets de densification. Dans un second temps, en lien très étroit avec le Sénat, que je remercie d'ailleurs pour la proposition de loi qui a été déposée par les sénateurs BLANC et CAMBIER, nous allons travailler dans deux directions dont… avec Catherine VAUTRIN, je crois, beaucoup en parlaient hier dans une table ronde. Nous devons renverser la pyramide. Le ZAN ne doit pas se décliner en cascade et de manière mécanique de la région jusqu'à la plus petite commune. Une fois l'objectif fixé dans le schéma régional d'aménagement, je préfère dire ça plutôt que SRADDET (phon.), il faut laisser le territoire discuter de la façon dont il veut prendre sa part à l'effort. Il faut partir du terrain et laisser s'organiser, d'abord dans chaque département, la discussion qui permettra d'atteindre l'objectif au niveau de la région. Nous allons donc réfléchir en termes de trajectoire plutôt qu'avec des dates couperets. Ce qui compte, c'est que l'objectif soit atteint en 2050, il est d'intérêt général, et qu'on soit en capacité de vérifier de manière régulière que chaque territoire soit nécessaire pour l'atteindre. Il faut laisser le territoire définir le rythme crédible auquel il veut progresser dans l'atteinte de cet objectif. Nous allons travailler dans le cadre d’une loi modifiée pour que ces nouvelles dispositions, tel que je viens de vous le décrire, cette nouvelle liberté, cet oxygène, soit opérationnel dès le premier semestre 2025. [Applaudissements]
Troisième exemple, la prévention des risques. Avec le nouveau plan national d'adaptation aux changements climatiques que j'ai lancé dernièrement, des plans locaux devront être établis dans les territoires pour les rendre plus résilients. En la matière, on voit bien, on sait bien, Mesdames et Messieurs les maires, que les besoins dans la vallée de l'Aude ne sont pas les mêmes que les besoins dans la vallée de la Vésubie. Les maires…
Ce que je sais, c'est que les maires sont toujours en première ligne dans des situations de crise, que ce soit des crises sanitaires, on l'a vu avec le Covid, ou des crises climatiques. Et je sais aussi, j'ai appris partout, et y compris au niveau européen, que prévenir coûte moins cher que réparer. Et que quand on est obligé de réparer, ce qui arrive malheureusement, parce que la catastrophe s'est produite, une réparation préparée, organisée est plus efficace et moins coûteuse qu'une réparation improvisée. Je pense que les maires sont les mieux placés, en lien avec l'autorité préfectorale, pour ce travail de prévention, qui passe aussi par des exercices réguliers, avec la protection civile, les sapeurs-pompiers, les citoyens, ne pas avoir la mémoire courte. Et je vais enfin ouvrir, regardons ce qui s'est passé depuis quelques mois difficile celui de l'assurance et de la réassurance. Des biens publics de vos collectivités pour faire face à l'augmentation à la fréquence, à la violence des crises. Mon quatrième exemple, il porte sur la sécurité au quotidien. Il faut faire confiance et s'appuyer sur l'intelligence locale. Elle est notre meilleur atout pour identifier les besoins qui sont différents d'une région à l'autre. Les maires sont là encore les premiers responsables pour leur commune en matière de sécurité. Ils doivent être pleinement associés aux plans d'actions départementaux et de restauration de la sécurité au quotidien. Le ministre de l'Intérieur a demandé au préfet de chaque département de les élaborer pour la mi-janvier.
Seul ce travail commun, appuyé sur votre expérience, Mesdames et Messieurs les maires, combiné à l'expertise des policiers et des gendarmes, permettra d'améliorer durablement et sérieusement la sécurité au quotidien. C'est la même logique, dans le respect de vos compétences et de vos choix, que je souhaite que nous travaillions ensemble à la rénovation du cadre juridique des polices municipales qui sont devenus une composante à part entière des politiques de sécurité. Et c'est une des discussions, cher David, du Beauvau des polices municipales que les ministres Bruno RETAILLEAU et Nicolas DARAGON ont lancé et vont relancer.
Mesdames et messieurs les maires, la commune a besoin de plus de liberté. Mais la deuxième condition pour faciliter la vie des communes, c'est évidemment que vous ayez les moyens, vos moyens et des marges de manœuvre renforcées. Je veux donc évoquer devant vous, franchement, le contexte budgétaire et les mesures d'économie qui sont demandées à l'occasion du projet de loi de finances pour 2025. Je sais vos inquiétudes et j'ai bien entendu, une fois nouvelle, et sans en être choqué, d'ailleurs, en vous remerciant du ton que vous avez utilisé. Et le président David LISNARD et André LAIGNEL tout à l'heure… Je ne vais pas vous redire les conditions dans lesquelles j'ai dû préparer ce budget. Jamais un Premier ministre depuis 65 ans n'a eu qu'un jour à peine pour préparer le budget. Je ne... Je dis simplement la vérité. Et donc ce budget, il n'est pas parfait. Il comporte parfois des injustices ou des points qu'il faut revoir. Je ne pointerai pas les collectivités du doigt. C'est d'abord à l'État d'assumer la responsabilité du déficit actuel. Et nous le faisons nous-mêmes en faisant plus de 20 milliards d'euros d'économies sur la dépense en 2025, ce qui est massif, ce qui nous oblige à réduire certaines actions là où encore, nous l'assumons. Et, cher David, j'ai bon espoir qu'en réduisant ces budgets publics et en regardant aussi d'assez près tous ces opérateurs que vous avez ciblés tout à l'heure et qui souvent font un travail utile, cela conduise dans une période où l'argent public sera moins abondant à s’efforcer de mieux le gérer. Et moi, je pense qu'on peut faire mieux avec moins d'argent dans beaucoup d'administrations publiques en donnant de la productivité aux services publics, en les assumant de manière plus efficace. Vous le savez aussi, les citoyens les plus aisés et les entreprises bénéficiaires participeront à cet effort. Et enfin, nous avons pris la décision de demander un effort, j'espère le plus juste possible, aux mesures d'économie en fonction de la capacité contributive des collectivités.
La discussion, mesdames et messieurs, se poursuit au Sénat, puisque l'Assemblée nationale a rejeté son propre budget, il y a quelques jours. C'était mieux ainsi, d'ailleurs, parce que ce budget comportait plusieurs exemples à hauteur de plusieurs dizaines de milliards d'impôts nouveaux. (inaudible) feront évoluer le texte initial du Gouvernement. Et je répète, je redis, comme je l'ai toujours dit, que ce budget n'était ni parfait ni définitif. Je vais insister devant vous sur 3 points. La semaine dernière, j'ai évoqué devant les présents départements la modification de la mesure qui prévoit la baisse du taux du fonds de compensation de la TVA. Nous proposons de le faire évoluer en ce qui concerne notamment son caractère rétroactif. C'est une mesure qui aurait conduit à revenir sur des sommes que vous aviez intégrés dans vos budgets et ce ne serait pas juste. Nous allons donc la modifier en lien avec le Sénat et répondre ainsi à votre crainte légitime s'agissant des investissements que vous êtes en train de réaliser. Cela devrait préserver l'investissement public et son dynamisme. [Applaudissements]
Deux. J'ai entendu la demande que les fonds prélevés au titre du fonds de réserve de l'article 64 du projet de loi de finances ne soient pas utilisés pour faire de la péréquation. Les communes qui seront prélevées supporteront déjà une charge importante, je le sais, et elles ne comprendraient pas que ces fonds ne leur soient pas restitués. Nous allons donc inscrire dans la loi, le principe selon lequel les sommes prélevées seront reversées à la collectivité contributrice au Fonds. Le prélèvement permettra en effet de freiner les dépenses de fonctionnement. Nous en avons besoin pour réduire le déficit puisque, vous le savez, les besoins de financement de vos collectivités, de nos collectivités, participent au déficit public européen vu de Bruxelles. Voilà pourquoi nous avons besoin de ce freinage. Mais cet argent vous reviendra à l'issue. L'inverse n'aurait pas été juste. Enfin, nous pourrons étudier les évolutions pour ajuster en fonction de la capacité contributive de chaque commune, ce qui peut aller naturellement dans un sens comme dans l'autre. Juste une précision à André LAIGNEL, j'ai entendu votre remarque tout à l'heure sur la TVA. Ce que je comprends, mais je peux peut-être me tromper, c'est que ce qui concerne la TVA pour 2024, c'est le résultat mécanique de la croissance et de la consommation qui est défaillante ou qui baisse. Ce n'est pas une décision du Gouvernement. Enfin, quatrième point, je l'évoquais également devant les présents départements, le Gouvernement proposera de lisser sur quatre ans plutôt que 3 ans l'augmentation des cotisations des employeurs à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.
Sur tous ces sujets, Mesdames et Messieurs, les maires, et sur quelques autres, nous sommes prêts à continuer notre travail. Laurent SAINT-MARTIN est ici, le ministre des Comptes publics, Catherine VAUTRIN, pour, avec le Sénat, améliorer dans le respect de l'épure budgétaire, et votre Président a bien voulu dire qu'il la faisait sienne, autour de 5 % de déficit en 2025, pour atteindre 3 % en 2029. Le Sénat va travailler activement, comme vous l'a dit le Président LARCHER, et d’ailleurs, je salue le fait qu'il y 9 ministres aujourd'hui qui sont sénateurs, parmi lesquels Nathalie DELATTRE, qui est ici, Marie-Claire CARRÈRE-GÉE, Agnès CANAYER qui est en relation avec le Parlement, de la coordination interministérielle et pour Agnès de la famille et de l'enfance.
Mesdames et Messieurs les maires, il y a une troisième condition pour libérer le potentiel d'écolier, de maire, (inaudible), d'élu, soit plus simple, qu'on facilite votre vie. C'est d'abord protéger et reconnaître le rôle que vous jouez dans la vie quotidienne du pays et des Français. Voilà pourquoi nous allons remettre en chantier le statut de l'élu qui sera proposé à l'Assemblée nationale d'ici le début de l'année 2025, monsieur le Président. Je souhaite qu'il associe l'ensemble des partis politiques et des membres de la représentation nationale, dont certains d'entre eux ont fourni un grand travail depuis quelques mois. Nous allons avancer sur la base de la proposition de Françoise GATEL, qui est ici adoptée au Sénat et qui sera débattue en février, au mois de février, à l'Assemblée nationale. Je souhaite aussi qu'elle soit complétée notamment par les travaux des députés Violette SPILLEBOUT, Sébastien JUMEL et du président Stéphane DELAUTRETTE, qui font des propositions très complémentaires à celles du Sénat en matière de valorisation, d'articulation avec la vie professionnelle, de formation et de reconversion. Sur tous ces points, nous allons avancer, et pas dans 3 ans, dans quelques semaines. Ce texte consacrera enfin, après tant d'attentes, un statut de l'élu, en bonne et due forme, qui figurera en tête du Code Général des Collectivités Territoriales, qui est (inaudible) du respect et la reconnaissance de la République. Puisque nous parlons de respect, je veux, comme votre… [Applaudissements].
Puisque nous parlons de respect, je veux comme le Président l'a fait tout à l'heure, dire un mot de soutien, de solidarité à tous ceux d'entre vous qui ont été victimes de violences insupportables, intolérables et qui sont d'ailleurs souvent seuls pour y faire face dans leur fonction de maire. Je sais aussi qu'hier, Catherine, avec le garde des Sceaux, vous avez dialogué avec une quarantaine de ses maires, dont David LISNARD a cité pour certains le nom. Et je veux confirmer ce qu'a dit le garde des Sceaux. Nous allons surveiller de plus près, très près, cette question et ces personnes seront sanctionnées avec la plus grande sévérité. Ce texte du statut d'élu, c'est aussi l'occasion de réfléchir ensemble à une question qui m'a été rappelée il y a quelques jours par les maires ruraux, celle de l'extension du scrutin de liste paritaire aux communes de moins de 1 000 habitants qui serait un facteur, m'ont-ils dit, de simplification et de rassemblement dans vos communes, représentant une démarche plus positive que le scrutin majoritaire avec Panachage, qui ne facilite pas toujours la vie des élus et notamment des maires, loin s'en faut. J'enlise ce sujet, d'ailleurs, à celui de la taille des conseils municipaux, sur lequel je suis également désireux, monsieur le Président, de vous entendre, si nous trouvons des consensus, je suis prêt à des évolutions. Enfin, je l'ai déjà dit, et je l'aurai dit devant vous, je suis ouvert à une réflexion pluraliste, je veux dire sensible, mais 10 ans après la loi, peut-être est-ce utile d'en faire l'évaluation, concernant l'interdiction actuelle du cumul des mandats. Si cela s'avère nécessaire pour rapprocher nos élus des citoyens et des territoires, cette loi fait qu'aujourd'hui, par exemple, des centaines de parlementaires, il n'y a plus de maire. Il n'y a plus de maire. Je suis ouvert sur cette question, sans tabou et sans idéologie. Faciliter votre vie quotidienne, ça passe aussi par plus de simplicité. Et je veux bien vous soutenir, monsieur le Président, sur le fait qu'il y a des gisements extraordinaires d'efficacité et d'économie dans l'action publique à travers la simplification. Voilà un des grands défis auxquels est attaché le ministre Guillaume KASBARIAN, qui est chargé de cela au Gouvernement. La simplification législative, la sobriété normative, le néogordien normatif est devenu trop épais pour être tranché d'un seul coup et d'en haut. Pour aller plus vite et avoir des résultats, nous allons simplifier par le bas aussi en partant des projets. J'ai lancé tout de suite en arrivant à Matignon France Simplification. Nous en sommes déjà à 50 projets locaux qui été bloqués qui ont été débloqués. C'est par exemple, juste trois exemples, à Cognac, un projet de no-tourisme, Marina FERRARI, la ministre du tourisme est ici, ambitieux, qui était bloqué [inaudible] . Il a été débloqué seulement. Il a été débloqué sur l'île d'Oléron. On empêchait l'intercommunalité de se lancer dans une démarche très vertueuse d'autoconsommation collective. Un arrêté prévoyait une règle inadaptée à la réalité insulaire. L'arrêté sera modifié, le projet autorisé. Dans les Alpes-de-Haute-Provence et ailleurs, des moulins, des granges, des bergeries ne peuvent pas être rénovées sous prétexte qu'ils sont trop dégradés. Les textes concernés seront modifiés sans tarder pour qu'on puisse s'occuper de ce patrimoine. J'ai demandé au préfet de faire remonter par vous et avec vous vers Paris tous les projets qui sont actuellement bloqués pour toutes ces raisons que vous avez citées avec beaucoup d'humour et en même temps de gravité, monsieur le Président, et nous allons méthodiquement les regarder, nous le faisons, ce qu'on peut régler tout de suite, ce qui mérite un peu plus de travail, ce qu'on ne peut pas débloquer, à chaque fois que c'est possible. Et puis, je vais aussi assouplir le pouvoir de dérogation des préfets qui pourront désormais en user plus librement. Je souhaite que nous allions plus loin en créant un régime juridique de la dérogation législative qui permettra dans un cadre précis d'adapter les règles applicables à des projets quand c'est justifié par l'intérêt du territoire et sans avoir à repasser systématiquement par une modification de la loi. Enfin, pour plus d'efficacité, cela passe par des organisations plus simples localement. Je souhaite que l'État se discipline pour faciliter la vie, comme il a su le faire, par exemple, avec les maisons France Service, et qu'il vous accompagne plutôt que vous empêchez de faire. Dans quelques jours, je transmettrai un décret que nous avons élaboré avec le préfet Michel CADOT, qui est là quelque part, et mon cabinet et les services de l'État pour renforcer très considérablement le pouvoir des préfets de département, notamment dans la coordination de tous les services de l'État. [Applaudissements]
Nous allons fusionner à partir du 1ᵉʳ janvier 2025 les dotations de soutien à l'investissement dans un fonds territoire pour que vous n'ayez plus qu'un seul dossier à remplir. Je voudrais rassurer les maires de nos plus petits villages, une enveloppe sanctuarisée, équivalant à la DETR où il sera actuel comme elle est aujourd'hui, restera sanctuarisée dans ce nouveau fonds. Nous allons aussi créer un guichet unique pour que vous n'ayez plus à déposer 3 dossiers différents pour financer le même projet. Et nous voulons harmoniser les calendriers dans lesquels nous vous notifions des subventions. Tout cela sera moins de temps et d'énergie perdu pour vous et des projets qui pourront se concrétiser plus rapidement.
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les maires, plus de liberté, des marges de manœuvre restaurées, une vie quotidienne plus simple, voilà qui devrait aider les communes à libérer, à acquérir ou à retrouver cette liberté pour leur potentiel de développement. Ça donne aussi l'occasion pour vous de jouer un rôle de premier plan dans le renouveau démocratique de notre pays. Avoir plus de liberté pour agir, c'est aussi avoir des possibilités nouvelles d'agir avec les autres, Nous voulons donner un nouvel élan aux coopérations territoriales, y compris transfrontalières. Nous devons articuler de manière beaucoup plus forte nos actions respectives avec celles des départements et des régions. Cela peut prendre des formes diverses et nouvelles, pas forcément institutionnelles. L'important, c'est d'être efficaces ensemble.
Ici, monsieur le président LISNARD, l'Association des maires de France, l'accepte, je lui demande sur ce sujet notamment de nous faire des propositions. Tout cela contribue à ce contrat de confiance que vous avez appelé de vos vœux et auquel Catherine VAUTRIN travaille, sur 3 ans, de telle sorte que vous n'ayez plus ce sentiment que j'ai indiqué au début, d'être des sous-traitants de l'État, ce n'est pas juste, ce n'est pas bon, mais davantage des partenaires et que l'État, en tout cas, ce sera le cas aussi longtemps que je dirigerai le Gouvernement, se comporte, pour vous aussi, en partenaire. Voilà. Ce chantier dépasse le seul cas des communes, mais c'est à travers elles, aujourd'hui, que nous réaffirmerons que la puissance publique locale peut décider, agir, par elle-même, ce qu'il doit l'être.
Mesdames et Messieurs les maires, j'ai été long, je le sais, et je l'ai dit plusieurs fois, le moment est difficile et grave. Nous sommes dans l'urgence, et même dans une extrême urgence, obligés de bâtir un budget crédible qui nous permette de continuer à emprunter à des taux raisonnables, malgré le poids des intérêts que j'ai évoqués tout à l'heure. Mais dans ce budget, permettez-moi de vous le dire, tout est difficile. Au-delà, parce que je ne suis pas là seulement à Matignon pour, avec le Gouvernement, gérer en défensive le dos au mur un budget difficile et faire des économies et freiner. J'ai envie qu'ensemble, on relève la ligne d'horizon. David, vous avez dit tout à l'heure, donner des perspectives. Je ne comprends mon travail à Matignon que dans cette dimension-là. Gérer dans l'urgence ce qui doit l'être et remonter la ligne d'horizon, voilà pourquoi nous préparons avec le Gouvernement un plan de progrès de réforme de notre pays sur les, disons, 3 ans qui viennent. J'ai failli dire 5 ans, mais je ne veux pas passer par-dessus ma condition. 5 ans, c'est la fin de la trajectoire budgétaire à laquelle nous allons arriver en 2029 avec 3 %. 3 %. Mais je sais qu'avant 2029, il y a 2027. Je ne veux pas me mêler de ça, mais 2027, c'est normalement le terme logique, raisonnable pour le travail de ce Gouvernement. Et on peut faire des choses en deux ans et demi. On va faire des choses, on doit faire des choses. On doit créer des progrès. Et on va donc proposer en début d'année une cinquantaine d'actions, pas toujours des lois, mais quelques-unes que j'ai citées, qui formeront cette feuille de route du Gouvernement que nous vous proposerons, qui sera à débattre, à corriger, à compléter, une cinquantaine d'actions et de propositions qui seront mises en chantier pour 3 ans, pour améliorer le travail et l'attractivité, les services publics, la solidarité, la sûreté et la sécurité. Bref, créer du progrès. Et pour moi, je le redis, ce n'est pas un mot archaïque. Le Gouvernement tout entier y travaille, nous ne le ferons pas seul, et je n'imagine pas qu'on puisse faire ça sans le soutien des communes que vous représentez.
Voilà, monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les maires, j'en ai terminé et je vous donne rendez-vous ou à Matignon ou dans vos départements quand vous m’y accueillerez avec les membres du Gouvernement. Si vous me le permettez (ph), je voudrais vous dire, en conclusion, quelques mots un peu plus personnels. Tout le monde sait, vous savez dans quelles conditions j'ai accepté l'honneur et la mission d'être Premier ministre. C'est un moment particulièrement difficile pour notre pays, sur le plan politique, je n'y reviens pas, avec une assemblée où il n'y a pas, pour la première fois depuis 1958, de majorité absolue. Sur le plan économique et de l'emploi, qui se dégrade depuis plusieurs mois, sur le plan géopolitique aussi, Mesdames et messieurs les maires, il faut regarder avec les yeux ouverts ce qui se passe autour de nous. Aux États-Unis, on a eu des menaces précises, et maintenant à peu près certaines, sur le commerce mondial, sur l'exportation de nos produits, et nous devons rester un grand pays exportateur. Pas dans n'importe quelle condition. C'est pour ça que nous nous opposons avec le président de la République extrêmement clairement au Mercosur tel qu'il est aujourd'hui. Mais des menaces sur le commerce, sur la paix, sur la sécurité. Voilà le contexte dans lequel nous travaillons autour de nous et tout ça a un impact chez nous. Tous les jours — puisque j'essaye d'aller au contact des gens — ce matin encore, en saluant beaucoup d'entre vous, vous m'avez souhaité bon courage. Vous entendez aussi, je pense, vos compatriotes vous dire bon courage à vous aussi.
Mesdames et Messieurs les maires, quand on a ce courage, quand on sait être solidaire, quand on se respecte, alors je pense qu'on a de meilleures chances de faire face à l'adversité et de gagner, voilà. J'ai l'image en tête de notre équipe de France de rugby, vendredi soir dernier, voilà [Applaudissements]. Et je ne me compare pas à aucun des joueurs de l'équipe de France que j'ai salués, mais j'ai observé dans ce match formidable l'esprit d'équipe, la loyauté, la solidarité, les règles du jeu, le respect aussi, et puis finalement la ténacité jusqu'au dernier moment pour garder un point d'avance. Voilà pourquoi j'ai cette image en tête.
Et Mesdames et Messieurs, dans ce moment-ci particulier, ce qui est important pour moi, comme Premier ministre, ce qui est important pour vous, comme maire, c'est que les Français sachent qu'il y a, au-delà des querelles, au-delà des divisions, au-delà des petites combines, au-delà des combinaisons et des polémiques, il y a un intérêt collectif, il y a un intérêt commun, il y a l'intérêt national, il y a l'intérêt général du pays. Voilà ce qui est important. C'est ça qui nous permet de tenir bon. Pas qu'une de vos communes, il y a un intérêt commun, plus important que nos propres intérêts à travailler ensemble. C'est pour ça, Mesdames et Messieurs les maires, que j'ai été heureux de vous retrouver, de vous parler franchement. C'est pourquoi aussi je vous remercie de m'avoir écouté, y compris quand on ne partage pas les mêmes idées. Et même si on ne partage pas les mêmes idées, je vous remercie de m'avoir écouté, et de m'avoir entendu, et j'espère de m'avoir compris.
[Applaudissements] [La Marseillaise]