Présentation du plan de résilience économique et sociale

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Jean Castex.

Publié le 16/03/2022|Modifié le 17/03/2022

Le Premier ministre a présenté un plan de résilience économique et sociale pour faire face, notamment, aux augmentations brutales du prix de matières premières liées à la guerre en Ukraine. Jean Castex a indiqué que ce plan sera évolutif pour s'adapter au plus près des conséquences engendrées par ce conflit.

Source : Présentation du plan de résilience économique et sociale
Mesdames et Messieurs, mes chers concitoyens, En faisant le choix de s’attaquer à la souveraineté, à la liberté, à l’existence même de l’Ukraine et de ses 44 millions d’habitants, la Russie a posé un acte de guerre que la Communauté internationale et l’Europe ne pouvaient laisser sans réponse. Plus que jamais, la France reste totalement mobilisée pour poursuivre le dialogue et essayer par tous les moyens de ramener la paix. Mais nous devons regarder la réalité en face, dans sa vérité et sa cruauté : les forces militaires russes avancent, bombardent les villes, frappent les populations civiles, et commencent manifestement à lancer les coups les plus aveugles et meurtriers, pour tenter de prendre les grandes villes du pays. Nous sommes et resterons aux côtés des Ukrainiens. Jusqu’au retour à la paix et à la démocratie. Nous continuerons de les aider par tous les moyens – soutien politique, soutien matériel, soutien financier, soutien militaire – et bien-sûr soutien humanitaire en accueillant celles et ceux, surtout des femmes et des enfants, qui se sont résolus à quitter leur pays pour trouver refuge en Europe. A cette heure, ils sont près de 3 millions et sont surtout pris en charge dans les pays voisins de l’Ukraine. Et, comme l’a rappelé hier le Président de la République, notre devoir est de prendre toute notre part de cet effort de solidarité, aux côtés de nos voisins européens, et avec toute l’humanité requise. Une plateforme de solidarité nationale - « Je m’engage pour l’Ukraine » - a été mise en place et a permis de recueillir déjà près de 90 000 propositions d’hébergement. Une coordination étroite a également été mise en place avec les collectivités territoriales, les entreprises françaises, les syndicats et le milieu associatif pour fédérer les initiatives et les bonnes volontés. Ces initiatives sont l’honneur et la fierté de la France comme le sont ces innombrables manifestations de solidarité à travers des dons d’argent, de vêtements et de matériels par nombre de nos concitoyens. Plus de 5 300 personnes ont déjà été accueillies et bénéficié d’un hébergement. Nous devons nous préparer collectivement, avec nos partenaires européens, à accueillir des flux de réfugiés bien plus importants dans les semaines à venir. Ces derniers attendent de nous ce soutien, ils attendent surtout que nous les aidions à regagner le plus vite possible leur pays, dans la paix et la liberté. Pour cela, nous devons assumer d’engager avec la Russie un rapport de forces politique et économique sans concession aucune. La fermeté et l’unité des 27 États de l’Union européenne se sont exprimées, dès le 1er jour, par la mise en place de sanctions sans précédent dans notre histoire, et sans commune mesure avec ce qui avait été fait en 2014 lors de l’invasion de la Crimée. Ces sanctions prises au travers de 5 paquets successifs, le dernier datant d’hier, ciblent tout particulièrement les dirigeants russes et leurs cercles rapprochés, mais plus largement le système bancaire russe, les réserves de sa banque centrale, les exportations de produits sensibles ou de luxe, les autorisations de navigation maritime et aérienne, les autorisations de diffusion des médias de l’État russe, et d’autres encore. Je le dis très clairement, ces mesures portent, elles ont d’ores-et-déjà fortement fragilisé l’économie russe. Et la communauté internationale n’hésitera pas à les durcir encore si l’évolution de la situation l’exigeait, jusqu’à atteindre le cœur même du système financier et des ressources économiques de la Russie. Je veux être clair, si nous espérons que la raison reprendra ses droits, si nous devons absolument tout faire pour favoriser une solution diplomatique, nous avons tout autant le devoir de nous préparer à une crise longue, et accepter que les mesures que nous avons déjà prises et celles que nous pourrions prendre demain, aient des conséquences potentiellement lourdes sur la Russie mais aussi, indirectement et évidemment à un moindre degré, sur nos propres économies. C’est inévitable et c’est la contrepartie même de la réalité et de l’efficacité de nos sanctions. Et pour autant, il n’est pas question de nous exposer sans nous protéger. Nous devons prendre sans délai les mesures qui s’imposent pour limiter les impacts sur nos entreprises, sur nos emplois, sur notre pouvoir d’achat. Et nous devons tout autant renforcer notre souveraineté en réduisant le plus rapidement possible notre dépendance à un certain nombre de matières premières et de sources d’énergie importées de Russie. C’est dans ce double objectif que le Président de la République a chargé le Gouvernement de préparer un plan de résilience économique et sociale. Un plan de résilience au sens de résistance et de protection, au sens de plus d’autonomie et plus de souveraineté. Un plan conçu pour notre pays mais construit évidemment dans un cadre de cohérence et de solidarité européennes. Un plan qui doit être efficace à très court terme pour faire face aux conséquences immédiates de la crise mais qui doit nous permettre aussi de tirer les conséquences de cette crise pour les années à venir. Cette crise affecte bien sûr au premier chef les entreprises françaises qui sont directement exposées aux échanges commerciaux avec l’Ukraine, la Russie ou la Biélorussie, ou qui sont directement implantés dans ces pays. Mais cette crise aura des conséquences bien plus larges, notamment du fait de l’augmentation des prix de l’énergie et des matières premières qu’elle induit. Au cours des dernières semaines, le prix du pétrole est monté jusqu’à atteindre le double de ce qu’il était en 2019 ; plus encore, les pics observés pour le gaz et l’électricité se sont situés à des niveaux plus de 10 fois supérieurs au cours des dernières années. Les marchés de matières premières, notamment des métaux comme le nickel et des matériaux semi finis, s’emballent également, tout comme celui des céréales ou des engrais. Ce choc vient frapper des filières qui connaissaient déjà des tensions d’approvisionnement suite à la forte reprise économique des derniers mois, comme l’industrie et l’agriculture, mais aussi la pêche ou encore les transports. Face à toutes ces conséquences économiques et sociales, l’État sera au rendez-vous. 1/ Le plan de résilience que je vous présente aujourd’hui a pour première priorité de protéger les ménages et les entreprises face aux conséquences immédiates du choc. J’ai annoncé samedi dernier un renforcement du bouclier tarifaire pour les ménages. Depuis la rentrée de septembre dernier, l’État a engagé près de 20 milliards d’euros pour maîtriser les impacts des hausses du prix de l’énergie. En particulier, le tarif du gaz est bloqué depuis le 1er octobre et la hausse des tarifs de l’électricité a été limitée à 4 % en 2022 et un chèque énergie exceptionnel a été mis en place. Dès la hausse du prix des carburants, fin octobre dernier, nous avions mis en place une indemnité inflation de 100 € qui a été versée à 38 millions de personnes. Nous avons également revalorisé l’indemnité kilométrique. Chacun voit bien que contrairement à ce qu’on entend parfois, l’État ne s’est pas, ni de près ni de loin, enrichi sur le dos des Français : les dépenses engagées à ce jour – plus de 22 milliards d’euros - pour protéger leur pouvoir d’achat sont très, très supérieures au supplément de recettes fiscales liées à l’augmentation des prix qui a été de l’ordre de 4,5 milliards d’euros. Grâce à cela, grâce aussi à notre parc nucléaire, l’inflation dans notre pays a certes augmenté, mais, mes chers compatriotes, elle reste au plus bas niveau de tous les pays européens. Pour autant, les hausses du prix du baril, observées depuis le début de la guerre en Ukraine, nécessitaient que nous allions plus loin, en agissant vite et particulièrement pour ceux qui utilisent leur véhicule. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement met en place, à compter du 1er avril, et pour une durée de 4 mois, une « remise carburants » de 15 centimes par litre pour réduire le prix à la pompe. Cette remise concernera tous les Français, sur le territoire métropolitain et dans les Outre-mers, les particuliers comme tous les professionnels. Pourront notamment bénéficier de la mesure les routiers, les taxis et les transporteurs sanitaires, les agriculteurs, les acteurs des travaux publics et les pêcheurs, mais aussi toutes les professions qui utilisent beaucoup leurs véhicules, telles que les aides à domiciles. J’annonce aujourd’hui que ce dispositif sera étendu au gaz naturel véhicule et au GPL. L’État sera particulièrement vigilant sur la bonne application de cette remise par les distributeurs et j’attends aussi de ces derniers qu’ils contribuent à ce dispositif pour aller au-delà des 15 centimes. Les échanges ont commencé sous l’égide de Bruno Le Maire et je me félicite des premiers retours positifs que nous avons, le groupe TOTAL nous ayant déjà donné son accord de principe pour aller au-delà de l’effort de l’État. Bruno Le Maire développera dans un instant les modalités de sa mise en œuvre. Face aux multiples conséquences de la crise, notre deuxième objectif doit être de protéger notre économie, dans tous les secteurs exposés, afin d’éviter les faillites et de préserver les emplois. Les outils qui ont fait leurs preuves pendant la crise sanitaire seront de nouveau mobilisés, et adaptés aux spécificités de cette crise. Car cette crise est différente de celle du Covid où toute l’économie s’était brutalement arrêté. Notre économie fonctionne, elle reste dynamique, et elle doit surtout le rester. Nous devons donc agir mais le faire avec les bons instruments et en accompagnant spécifiquement les secteurs les plus en difficultés, et notamment les entreprises qui se trouveraient directement frappés par l’augmentation des prix de l’énergie. Le Gouvernement met ainsi en place une nouvelle aide qui bénéficiera aux entreprises dont les dépenses de gaz et d’électricité représentent une part élevée des charges, soit au moins 3 % de leur chiffre d’affaires, et qui pourraient faire des pertes sur 2022 du fait du renchérissement de leurs dépenses en énergie. Cette aide bénéficiera aux entreprises sans condition de taille ou de secteur et permettra la prise en charge de la moitié du surplus de leurs dépenses énergétiques, et ainsi d’effacer la plus grande partie de leurs pertes. En complément de cette aide spécifique, nous renforçons trois dispositifs déjà connus mais néanmoins très importants pour traverser les prochains mois. D’abord, le prêt garanti par l’État (PGE), dont le plafond d’emprunt sera relevé jusqu’à 35 % du chiffre d’affaires, contre 25 % aujourd’hui, ce qui permettra aux entreprises affectées par cette crise de faire face en cas de difficulté pour rembourser leurs échéances dans les prochains mois. Deuxième dispositif : les reports de charges fiscales et sociales dont l’accès sera facilité pour les entreprises mises en difficulté par l’augmentation des prix de l’énergie ou la perte de débouchés à l’exportation. Elles pourront à cet effet saisir les services de la DGFiP et des URSSAF, auxquelles les instructions correspondantes vont être données. Enfin, troisième levier, le recours à l’activité partielle : j’ai décidé de prolonger le dispositif d’activité partielle de longue durée (APLD) de 12 mois supplémentaires, pour les accords déjà signés et nous mettons en place un accompagnement par les services de l’État pour les branches et les entreprises non couvertes à date qui pourront signer des accords jusqu’à la fin de l’année 2022, à quoi je les invite vivement. Au-delà de ces mesures générales, nous devons nous doter de réponses spécifiques pour accompagner plus fortement des entreprises et des secteurs qui sont déjà plus particulièrement impactés ou susceptibles de le devenir à très court terme. Première mesure ciblée : le soutien aux pêcheurs, avec comme priorité de maintenir les activités de pêche qui contribuent à notre souveraineté alimentaire. Aujourd’hui, certains navires restent à quai compte-tenu du niveau particulièrement élevé du prix des carburants qui représente parfois plus des deux-tiers de leurs charges. Le Gouvernement apportera une aide financière exceptionnelle équivalente à 35 centimes par litre de gazole de pêche dès le 16 mars et jusqu’au 31 juillet. Le dispositif sera ouvert dès demain matin, pour que tous les bateaux déclarés puissent reprendre la mer au plus vite avec l’assurance de bénéficier du dispositif de soutien. Je sais que les pêcheurs pourront aussi compter sur un soutien complémentaire des collectivités locales et en particulier celles des collectivités qui gèrent les infrastructures portuaires qu’ils utilisent. Deuxième mesure ciblée : le soutien aux agriculteurs avec notamment une aide aux éleveurs qui doivent faire face à l’envolée du coût de l’alimentation animale dans un contexte déjà marqué par des cours historiquement élevés. Cette aide, transitoire sur une période de 4 mois, va permettre de compenser les pertes des élevages le temps que les mécanismes des négociations commerciales, dont l’encadrement est aujourd’hui renforcé grâce à la loi EGALIM2, assurent la transmission à l’aval des hausses du coût de production des produits. Une enveloppe financière de 400M€ sera provisionnée à cette fin. Par ailleurs, en plus du bénéfice de la remise de 15 centimes, nous agirons pour améliorer la trésorerie des exploitations en versant dans les prochaines semaines un acompte de 25% du remboursement de la TICPE sur le GNR. Troisième mesure ciblée : le secteur du transport. En premier lieu, le Gouvernement s’engage à ce que la « remise carburant » de 15 centimes par litre n’affecte pas le niveau des indexations gasoil durant quatre mois. Dit autrement, les 15 centimes doivent effectivement bénéficier aux entreprises de transport. Cela représente une aide financière de près de 1500 € sur le plein d’un camion sur 4 mois. Ce soutien permet d’accompagner la période de transition à partir du 1er avril, le temps que la hausse des carburants soit correctement répercutée dans les prix. Compte-tenu de la spécificité de ce secteur qui dépend très fortement des prix du carburant et de l’envolée des prix depuis le début du mois de mars, j’ai demandé au Ministre des transports qu’il réunisse les acteurs du secteur pour définir dans les tous prochains jours les modalités d’un complément d’aide au titre des pertes des dernières semaines. Pour terminer, le Gouvernement met en place un soutien spécifique à la trésorerie en accélérant le rythme de remboursement de la TICPE, pour le passer d’un rythme trimestriel à un rythme mensuel. Quatrième mesure ciblée : des dispositions pour le secteur du BTP, très impacté par la volatilité du prix des matériaux de construction ou des carburants. De nombreux chantiers ont été conclus sans clause de révision des prix adaptée à la situation. C’est la raison pour laquelle je demande aux acteurs publics d’appliquer lorsque c’est possible la théorie de l’imprévision pour les marchés publics ne comportant pas de clause de révision de prix et de ne pas appliquer les pénalités de retard lorsque ce dernier est justifié par la prolongation d’un délai de livraison de la part d’un fournisseur à cause de la crise. Enfin, nous prévoyons un soutien spécifique aux exportateurs. Du fait des perturbations des chaînes logistiques et de l’ampleur des incertitudes engendrée, la crise actuelle amplifie les coûts de l’international pour nos entreprises. Pour autant, je le dis à nos chefs d’entreprises : nous ne devons pas céder à la tentation du repli. Je ne le dis pas seulement aux quelques milliers d’entreprises exportatrices vers la Russie, la Biélorussie et l’Ukraine, qui bénéficieront bien sûr d’un accompagnement personnalisé pour trouver de nouveaux marchés. Je le dis également aux 136 000 entreprises exportatrices, et à toutes celles qui pourraient le faire : l’État sera là pour vous accompagner. Nous allons donc réactiver deux dispositifs d’accompagnement qui ont fait leurs preuves : d’une part, le chèque relance export et le chèque VIE. Nous mobiliserons également l’assurance prospection pour soutenir l’effort de réorientation de certaines exportations vers de nouveaux marchés et de développer les prospects à l’export des entreprises. Face à une telle situation, je sais pouvoir compter sur l’esprit de responsabilité des acteurs économiques et sur l’exigence de solidarité au sein des filières, pour passer ces temps difficiles. C’est pourquoi j’ai mandaté la médiation des entreprises pour lutter contre les abus et s’assurer de la bonne application des règles encadrant les relations commerciales. 2/ Au-delà de cette réponse immédiate, ce plan de résilience doit aussi viser à nous protéger dans la durée en poursuivant deux objectifs stratégiques : accélérer la sortie des énergies fossiles et renforcer notre souveraineté industrielle et alimentaire. Cette crise renforce en effet les constats que nous avions collectivement déjà posés depuis 5 ans et qui se sont vus renforcés avec la crise du COVID d’abord et la crise actuelle également. Ces constats sont ceux de la nécessaire souveraineté énergétique, industrielle et technologique que nous devons viser. Produire notre énergie, comme le Président l’a récemment rappelé à Belfort. Produire et recycler nos matières premières quand cela est possible. Produire nos composants, nos voitures, nos puces électroniques. Tout cela est indispensable dans le monde tel qu’il se dessine. C’est tout le sens de la politique de réindustrialisation que nous menons, avec les baisses de fiscalité, la politique d’attractivité et les plan France relance et demain France 2030. Les sujets ont d’ores et déjà été identifiés, il nous faut accélérer. La première priorité est énergétique. Il s’agit d’amplifier les actions permettant de réduire notre dépendance énergétique dans la durée avec l’objectif de sortir intégralement du gaz et du pétrole russe d’ici 2027. De manière urgente, cela consiste à : sécuriser notre approvisionnement en gaz pour l'hiver 2022/2023, en prenant les dispositions réglementaires nécessaires pour que les stockages de gaz français soient remplis ; augmenter nos capacités d’importation en gaz naturel liquéfié de manière à pouvoir diversifier davantage nos sources d’approvisionnement ; accélérer le développement des énergies renouvelables, notamment le biogaz mais également les énergies renouvelables électriques qui permettront d’éviter de bruler du gaz pour produire de l’électricité ; réduire notre consommation en gaz, avec un renforcement des aides pour décarboner les réseaux de chaleur et pour favoriser les chaudières n’utilisant pas les énergies fossiles ; accélérer notre transition industrielle vers de la décarbonation de nos transports et notre industrie. C’est bon pour nos emplois industriels et pour le climat. Et je le dis, parce que nous pouvons tous faire quelque chose pour notre pays, économiser le plus possible, à chaque fois que cela nous est possible, l’énergie qui est une denrée rare et, nous le voyons, chère. La seconde priorité porte sur notre souveraineté technologique, industrielle et alimentaire. Très concrètement, il s’agit d’accélérer la sécurisation de l’approvisionnement en intrants critiques pour nos grandes filières industrielles, qu’il s’agisse du nickel, de l’aluminium, du cuivre, du titane, mais aussi des intrants critiques nécessaires aux secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire. Enfin, en matière alimentaire, il nous faut développer des sources d’approvisionnement alternatives et en particulier augmenter notre production. Sur tous ces sujets de souveraineté, les ministres compétents doivent, en lien étroit avec les filières, me faire des propositions opérationnelles rapidement. Parallèlement, il nous faut aussi simplifier nos procédures. Nous avons déjà commencé de le faire mais il faut accélérer pour raccourcir nos délais et permettre le déploiement plus rapide des projets de production d’énergie ou d’intrants critiques sur notre sol. En conclusion, je veux insister sur deux éléments de méthode : 1/ Ce plan s’inscrit dans le cadre d’une réponse coordonnée au niveau européen, dans la lignée du sommet de Versailles conduit par le Président de la République. Car c’est le cadre européen qui doit nous permettre une réponse au bon niveau d’ambition. Mais aussi car nos politiques énergétiques, agricoles et industrielles sont interconnectées. 2/ Ce plan doit être évolutif, parce que la situation l’est, que les sanctions et les contre-sanctions le sont aussi. Ce que nous proposons aujourd’hui constitue donc une première réponse qu’il va très probablement falloir faire évoluer dans le temps. Je resterai fidèle à la méthode qui est la mienne et que j’ai appliquée dans la gestion de la crise sanitaire : d’abord, la concertation qui sera constante avec les élus, avec les acteurs économiques et sociaux ; ensuite, une mise en œuvre qui devra être, autant que faire se peut, territorialisée sous la responsabilité de nos préfets et en association étroite avec les élus et les acteurs locaux ; enfin, je l’ai dit, la nécessité de s’adapter autant qu’il sera nécessaire à l’évolution de la crise et de ses impacts sur notre économie. Les ministres vont maintenant vous en présenter les éléments détaillés. Bruno LE MAIRE Merci Monsieur le Premier ministre, comme vous l'avez indiqué, la guerre en Ukraine se traduit par une flambée des prix de l'énergie dont nos compatriotes souffrent directement : le prix du gaz, prix de l'électricité, prix de l'essence qui avait déjà fortement augmenté auparavant en raison de la vigueur de la reprise économique. Donc, tout cela se traduit par des difficultés au quotidien pour tous ceux qui doivent se chauffer, prendre leurs véhicules employés comme nous tous de l'énergie. Premier message que je voudrais passer à la suite du Premier ministre, c'est qu'aucun pays en Europe, aucun n'a autant protégé ses compatriotes contre cette flambée des prix de l'énergie. Les prix du gaz ont été démultipliés par 10. La facture de gaz de nos compatriotes n'a pas été multipliée par 10 parce que le Premier ministre a décidé un gel des prix du gaz. Les prix d'électricité ont augmenté de plus de 40 %, mais la facture a été plafonnée à 4 %. Et ça se traduit de manière plus globale par les chiffres de l'inflation. L'inflation en France est une des plus faibles de la zone euro. Elle est deux points inférieure au niveau d'inflation qu'il y a en Allemagne et largement inférieure à l'inflation que nous avons également en Italie, en Espagne ou dans d'autres pays de la zone euro. C'est cette protection-là contre la flambée des prix de l'énergie que nous voulons maintenir et qui fait l'objet, comme l'a indiqué aussi le Premier ministre, d'un large consensus européen. Nous avons eu hier à Bruxelles, entre les ministres des Finances des 27, de très longues discussions sur la réponse économique la plus appropriée. La réponse économique la plus appropriée est une réponse ciblée qui doit protéger les ménages contre l'augmentation des prix de l'énergie et qui doit protéger les entreprises qui sont les plus touchées par les conséquences de la guerre en Ukraine et de la flambée de ses prix. Pourquoi une réponse ciblée ? D'abord parce qu'elle est plus juste, et ensuite, parce qu'elle évite d'alimenter à son tour les tensions inflationnistes. C'est précisément ce que nous voulons éviter avec nos partenaires européens, ce que nous avons décidé hier avec les autres ministres des Finances et avec la Commission européenne. Cette réponse ciblée, elle se traduit donc d'abord par la remise de 15 centimes d'euro par litre de carburant. Comment est-ce qu'elle va fonctionner ? C'est une remise qui sera faite aux metteurs sur le marché. Ils sont entre les pétroliers et les distributeurs. En gros, c’est les grossistes de l'essence et du carburant. La DGCCRF vérifiera que ces 15 centimes de rabais qui sont faits aux metteurs sur le marché sont bien répercutés intégralement à la pompe sur toutes les pompes de France. J'appelle à mon tour les pétroliers et les distributeurs qui ne l'ont pas encore fait à compléter cet effort de l'Etat. J'ai reçu ce matin le président de Total, Patrick POUYANNÉ, qui s'est engagé à faire à son tour un effort sur la réduction du prix par litre de carburant. Je crois que nous arriverons à protéger les Français uniquement si c'est une décision collective dans laquelle tout le monde s'engage : distributeurs, pétroliers et Etats. S'agissant des entreprises, deux types d'instruments, là aussi ciblés, sont en cours de décision au sein de l'Union européenne. J'ai eu ce matin une longue discussion avec Margrethe VESTAGER pour préciser un certain nombre de ces instruments et ils permettront d'accompagner de la manière la plus solide possible les entreprises qui aujourd'hui, je le sais, notamment les PME, sont très inquiètes de voir leurs factures d'électricité, leurs factures de gaz exploser. Toutes ces entreprises auront droit à des aides à la trésorerie et à des subventions directes. Les deux instruments seront mis à notre disposition par la Commission européenne. Sur les aides à la trésorerie, il y aura 3 sortes d'aides. D'abord, le prêt garanti par l'Etat. Il reste accessible, comme vous le savez, jusqu'au 30 juin de cette année. Mais les entreprises qui ont souscrit un PGE ou qui voudraient souscrire un PGE jusqu'au 30 juin pourront aller non plus jusqu'à 25 % de chiffre d'affaires, mais jusqu'à 35 % de chiffre d'affaires. Elles peuvent rajouter 10 points. Et à partir du 1er juillet 2022, il y aura un nouveau prêt garanti par l'Etat, dont le montant, pour le moment, est fixé à 10 % du chiffre d'affaires. Je reste prudent car tout ça n’est pas encore définitivement validé sur le montant du chiffre d'affaires par la commission européenne. Ce nouveau prêt garanti par l’Etat sera disponible à partir de début juillet, on a donc le relai du précédent et jusqu’à la fin de l’année pour les entreprises qui seraient particulièrement impactées par les conséquences économiques de la crise ukrainienne. Beaucoup d’entreprises, beaucoup de PME m’ont dit qu’elles pouvaient avoir besoin de cet instrument. Elles y auront donc droit. Nous allons, avec la fédération bancaire française, travailler sur les modalités et les critères de ce nouvel outil dans les heures et les jours qui viennent. Le deuxième instrument de trésorerie, ce sont les prêts industries de BPI France. Ce prêt, il a un intérêt, c’est qu’il est plus long que le PGE puisqu’il a une durée de 10 ans. Il permet par exemple de financer un changement d'outil de production pour une PME, pour une ETI, si vous voulez précisément changer d'outil de production pour ne plus employer du gaz, vous pourrez le faire. Il y a 700 millions d'euros sont disponibles et nous avons décidé, avec le Premier ministre d'ouvrir ces prêts à l'industrie de Bpifrance, aux secteurs du bâtiment et des travaux publics. J'y reviendrai. C'est un secteur qui est très touché aujourd'hui par la situation de crise sur les marchés de l'énergie. Enfin, dernier instrument, ce sont les reports de charges. Je demanderais aux Urssaf d'autoriser les demandes de report de charges des entreprises qui sont impactées par la crise ukrainienne. Au-delà de ces trois instruments de trésorerie, je rappelle que toutes les entreprises qui sont en grande difficulté et qui auraient besoin d'un étalement jusqu'à 10 ans de leurs prêts garantis par l'Etat peuvent s'adresser au médiateur du crédit dans chaque département. Cette demande avait été faite par beaucoup d'entreprises. Je constate que pour le moment, seule une petite dizaine d'entreprises ont fait appel à cette possibilité-là. Elle est ouverte, je le rappelle. Vous pouvez demander, dans les cas de difficultés particulières, un étalement jusqu'à 10 ans du prêt garanti par l'Etat que vous avez déjà souscrit. Le deuxième série d'instruments, ce sont les subventions publiques. Ce sont des aides directes de l'Etat qui pourront aller jusqu'à 25 millions d'euros. C'est le texte européen qui est sur la table aujourd'hui. Ces subventions couvriront une période de 9 mois, donc jusqu'à la fin de l'année 2022. C'est pour cela que nous parlons d'aides ciblées. Elles seront concentrées sur les entreprises qui remplissent trois conditions. La première, c'est de connaître une hausse de 40 % de ces factures d'électricité ou de gaz depuis le début de la guerre en Ukraine. La deuxième condition, c'est d'avoir dans son chiffre d'affaires des factures d'électricité et de gaz qui représentent plus de 3 % du chiffre d'affaires. Ce qu'on appelle les gazo-intensifs ou les électro-intensifs. Pour être éligible, il faut que votre facture d'électricité ou de gaz représente plus de 3 % de votre chiffre d'affaires. C'est bien l'objectif ciblé sur ceux qui prennent de plein fouet cette augmentation des prix du gaz et de l'électricité. Enfin, troisième condition, il faut réaliser des pertes d'exploitation puisque nous sommes là pour aider les entreprises qui sont en difficulté réelle. Nous avons là aussi, avec le Premier ministre, fait le choix d'ouvrir cette aide qui ira jusqu'à 25 millions d'euros à tous les secteurs d'activité, de façon à pouvoir embrasser tous ceux qui connaîtraient vraiment des difficultés. L'évaluation préalable que nous avons, c'est que les secteurs qui seront les plus concernés seront l'industrie, l'industrie métallurgique, l'industrie chimique, l'industrie du papier et du carton, certaines industries agroalimentaires comme les sucreries qui doivent chauffer leurs produits et certaines productions agricoles, Monsieur le ministre de l'Agriculture le sait mieux que personne. Avec ces aides, nous pourrons couvrir une partie de la hausse des factures d'électricité et de gaz. Les modalités pratiques de mise en œuvre administrative font encore l'objet de discussions au niveau européen. Nous les dévoilerons dans les tout prochains jours. Je voudrais insister également sur deux ou trois points complémentaires qui me paraissent très importants dans cette période de crise. Le premier, c'est la solidarité dans les filières et je voudrais vraiment lancer avec beaucoup de gravité un appel à la solidarité entre TPE, PME et donneurs d'ordre. Il faut que les TPE et les PME puissent modifier leurs contrats avec leurs clients pour prendre en compte les hausses de prix. Sinon, si les choses sont totalement bloquées, que des hausses de prix ne peuvent pas passer, qu'il n'y a pas de solidarité de filière, c'est les plus petites entreprises qui vont souffrir le plus. C'est justement ce que nous voulons éviter. Nos dispositifs le permettent mais il faut que les donneurs d'ordre jouent aussi le jeu et fassent preuve de solidarité avec leurs entreprises sous-traitantes TPE et PME. Et nous souhaitons que le médiateur des entreprises accompagne chacune des filières avec des comités dédiés pour résoudre les tensions qui peuvent être liées aux approvisionnements et pour veiller à ce que cette solidarité économique se traduise en actes. Pas simplement des belles paroles, mais des vrais actes de solidarité à l’intérieur des filières. J’ai également demandé à la DGCCRF de jouer tout son rôle avec beaucoup de rigueur pour s’assurer du respect des règles de contrat dans les domaines du transport et dans les domaines de l’agroalimentaire. Deuxième remarque générale, c’est sur le secteur du BTP, bâtiment et travaux publics. Nous les avons reçus à plusieurs reprises. Chacun sait que la crise a un impact très fort sur le secteur parce qu’ils sont confrontés à une volatilité au quotidien du prix des matériaux de construction, du bois, de l’acier, de l’aluminium qui est souvent vertigineuse et qui leur pose des difficultés considérables. Les contrats sont parfois sans clause de révision des prix et il y a un manque complet, hélas, de visibilité sur les coûts et de visibilité sur les délais d'approvisionnement. Nous avons donc pris un certain nombre de décisions pour soutenir le secteur du bâtiment et des travaux publics. Il bénéficiera d'abord, je le rappelle, des 15 centimes de réduction à la pompe. Nous demanderons en deuxième lieu à tous les acteurs publics d'inclure des clauses de révision des prix dans les contrats publics pour qu'ils prennent en compte la hausse du coût des intrants. Et nous leur demandons de n'appliquer aucune pénalité de retard dans des circonstances dues à la crise ukrainienne. C'est une mesure de justice et de solidarité aussi. Enfin, conformément à la demande du bâtiment et travaux publics, nous accélérons la publication des index du bâtiment qui permettra de réviser le prix de certains marchés sur une base beaucoup plus régulière, alors que la mise à jour se fait tous les trois mois actuellement. S'agissant des contrats de droit privé, toujours dans le bâtiment et travaux publics, je veux rappeler qu'il est possible de les réviser en cas de changement de circonstances imprévisibles qui rend l'exécution du contrat de droit privé trop coûteuse. C'est ce qu'on appelle la théorie de l’imprévision. Les contrats peuvent donc être amendés pour intégrer ces hausses massives de coûts après une négociation de bonne foi avec le client. Là aussi, c'est un principe de solidarité et de bon sens qui doit s'appliquer dans ces circonstances tout à fait particulières. Un tout dernier mot, enfin, à la suite de ce que disait le Premier ministre sur la sortie de la dépendance aux intrants russes. C'est un enjeu absolument majeur pour des points critiques comme le titane, le palladium, le néon. Nous allons donc lancer un appel à projets pour subventionner jusqu'à la fin de l'année à hauteur de 15% pour les grands groupes et 35% pour les petites entreprises les projets qui permettraient de réduire la dépendance aux produits venus de Russie : les usines de recyclage, les changements de procédés de production. Toutes les entreprises qui ont un projet dans ce domaine-là, qui leur permettent de se libérer de la dépendance à l'égard des intrants russes, pourront le financer dans des conditions bien meilleures que celles qui existaient jusqu'à auparavant. Merci beaucoup, Jean CASTEX Merci beaucoup Monsieur le ministre. J'invite Julien DENORMANDIE, ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, à évoquer le secteur agricole et alimentaire. Julien DENORMANDIE Merci Monsieur le Premier ministre. Comme vous l'avez indiqué, Monsieur le Premier ministre, la guerre en Ukraine a des impacts importants sur l'agriculture et les filières agroalimentaires en France. Mais tout d'abord, je voudrais le réaffirmer avec force devant vous, il n'y a pas de risque de pénurie en France car notre agriculture, notre chaîne agroalimentaire est solide. Elle est forte, elle est souveraine et c'est ce à quoi nous nous employons depuis maintenant plus de 5 ans, renforcer cette souveraineté, et c'est ce à quoi nous allons continuer à agir. En revanche, il y a plusieurs défis qui imposent des réponses fortes. En effet, la crise a des impacts immédiats et importants sur les filières agricoles françaises. D'abord, l'augmentation des prix de l'énergie et, par effet immédiat, celui des engrais, dont certains sont importés depuis la Russie ou la Biélorussie. Ensuite, l'augmentation des cours mondiaux des céréales, dont 30% des exportations mondiales sont assurées par l'Ukraine et la Russie, même si en France nous sommes encore une fois indépendants et même exportateurs. Enfin, l'augmentation du coût de l'alimentation animale dont l'Ukraine est un important producteur et qui représente parfois jusqu'à 60% du coût des intrants pour un éleveur en France. Alors, dans ce contexte, le plan de résilience que nous vous présentons cet après-midi a pour premier objectif de faire face à ces défis. Ainsi, quatre mesures principales sont prises. Face à l'augmentation importante du coût du carburant, nous apportons plusieurs réponses dans le domaine agricole. La mesure annoncée par le Premier ministre de remise sur les carburants de 15 centimes hors taxes au 1er avril s'applique aussi au gazole non routier utilisé par les agriculteurs à cette mesure car nous sommes conscients de l’impact sur les trésoreries des exploitations agricoles de la situation, le Gouvernement met en place le remboursement anticipé de la TICPE de 2021 et sur demande un acompte de 25 % pour la TICPE 2022 qui seront versés après déclaration dès le 1er mai de cette année. Ces mesures doivent conduire à réduire le coût du carburant et soulager la trésorerie de nos agriculteurs et éleveurs. Ensuite, face à l’augmentation importante du coût du gaz, nous rendons éligibles les entreprises agricoles, forestières, agro-alimentaires à l’aide aux entreprises consommatrices de gaz et de l’électricité que le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance vient de détailler. Cette aide transversale, je le rappelle, permettra aux entreprises dont les dépenses de gaz et d’électricité représentent au moins 3 % des charges et qui devraient être déficitaires en 2022 du fait du renchérissement de leur dépense en énergie de voir la prise en charge de la moitié du surplus des dépenses énergétiques dans la limite de leur perte. Or, dans le domaine agricole, nombreuses sont les entreprises répondant à ce critère de 3 %. Je pense par exemple aux maraîchers, aux producteurs de volailles, aux sucreries, aux entreprises laitières qui sèchent le lait et bien d’autres. Troisième mesure : face à l’augmentation du coût de l’alimentation animale dans les élevages, nous prenons une mesure exceptionnelle en mettant en place une aide aux éleveurs pour prendre en charge une partie du surcoût alimentaire. Concrètement, cette aide est ciblée sur les élevages fortement dépendants d’achats d’aliments et qui connaîtront des pertes liées à cette hausse. Cette aide sera d’une durée de 4 mois sur une période à compter du 15 mars et les premiers versements interviendront sous deux mois. Un maximum de 400 millions d’euros, vous l’avez dit monsieur le Premier ministre sera alloué à cette aide et j’organiserai dans les tous prochains jours une consultation des représentants du secteur notamment de l’élevage pour préciser avec eux le dispositif. Enfin, quatrième mesure : face aux difficultés supplémentaires, l’enveloppe des prises en charge des cotisations sociales sera abondée dès cette année à hauteur de 60 millions d’euros supplémentaires pour prendre en compte les exploitations confrontées à des hausses de charge qui dégradent leur compte d’exploitation de manière significative. Mesdames et messieurs, au-delà de ces 4 mesures fortes, nous avons un second objectif : celui de sécuriser nos producteurs, nos transformateurs, ainsi que notre production agricole et alimentaire, dès cette année 2022. Les filières françaises doivent en effet continuer à produire, car l'Europe et la France, grandes puissances agricoles, ont une responsabilité : celle de nourrir son peuple et au-delà, contribuer à nourrir le monde. Or, de l'autre côté de la Méditerranée, des pays pourraient faire face à des famines compte tenu de la situation en Ukraine, un des greniers du monde, mais également compte tenu des sécheresses qui frappent en ce moment même certains pays d'Afrique du Nord. Or, nous devons assumer notre rôle nourricier. Alors pour cela, nous allons prendre 4 mesures additionnelles. Premièrement, nous entamerons sans délai de nouvelles négociations commerciales pour sécuriser nos propres producteurs et entreprises agro-alimentaires. En effet, compte tenu de la modification significative des conditions économiques, les distributeurs doivent adapter les contrats, les liant à de nombreux fournisseurs. De nouvelles négociations doivent ainsi être ouvertes sur la base d'un dialogue transparent et constructif entre les parties avec la mise en œuvre des mécanismes d'indexation, de renégociation ainsi que du cadrage des pénalités logistiques. L'ensemble des acteurs de la chaîne agroalimentaire sera réuni dès vendredi par le ministère de l'Économie, des Finances et de la Relance et le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation. Je tiens également à préciser que l'Etat prendra sa part et sera exemplaire dans le cadre des contrats relevant de la commande publique. Deuxièmement, nous sécuriserons la campagne 2022 en engrais. Si les besoins en engrais, très important, car il s'agit là de la nourriture des plantes, si les besoins en engrais sont couverts pour le printemps, un plan de sécurisation des engrais pour la prochaine campagne d’automne 2022 sera mise en oeuvre comportant notamment la mise en place d’un groupe de sécurisation de ces matières premières importées, et de la production d’engrais sur notre propre sol, mais également l’adaptation ou le report de mesure réglementaire pouvant impacter la disponibilité des engrais en 2022, mais également le développement de l’usage des engrais organiques que nous produisons sur notre propre territoire. Troisième mesure, nous devons produire plus de protéines végétales dès maintenant. Nous activerons ainsi des mesures européennes exceptionnelles en 2022, par exemple, la valorisation des jachères que j’ai porté au niveau européen avec d’autres États membres, et qui devrait connaître une issue favorable. Enfin, il nous faut sortir plus rapidement de notre dépendance. De manière structurelle, la France, vous le savez, a déjà fait de l'indépendance alimentaire et de la souveraineté agroalimentaire sa priorité politique depuis 5 ans. Le plan France relance, le plan France 2030 ont d'ores et déjà contribué à cette consolidation de notre souveraineté agroalimentaire. Mais ce plan de résilience est aussi l'occasion d'accélérer cette transformation de long terme au service de notre indépendance et de notre souveraineté, notamment sur plusieurs points. D'abord sur la mise en œuvre d'un plan souveraineté azote, en privilégiant la production d'engrais verts et le développement de filières de valorisation d'engrais organique. Ensuite, par le renforcement du plan protéines végétales dans le cadre de France 2030, appelé de ses vœux par le président de la République, également par le développement d'un plan de souveraineté énergétique, agricole et alimentaire pour accélérer le développement des énergies renouvelables et la décarbonation de l'amont agricole. Enfin, par l'élaboration d'un plan souveraineté français et européen dédié aux fruits et légumes, et associant étroitement nos territoires ultramarins. Voilà, mesdames et messieurs, les différentes mesures que nous prenons pour répondre à ces deux objectifs. Un, faire face au défi. Deux, consolider notre souveraineté agro alimentaire. Et en conclusion, permettez moi simplement de dire que malgré les difficultés, je sais que les agriculteurs, les pêcheurs, les industries agroalimentaires sont mobilisées, pour une nouvelle fois dans la crise, être au rendez-vous de leur rôle nourricier. Et je tenais à les en remercier, nous leur devons beaucoup. Jean CASTEX Merci beaucoup, monsieur le ministre. J'invite enfin à s'exprimer Madame Barbara POMPILI, ministre de la Transition Écologique et Solidaire. Madame la Ministre. Barbara POMPILI Merci Monsieur le Premier ministre. Et comme vous l'avez indiqué, pour pouvoir faire face aux conséquences du conflit terrible qui a éclaté en Ukraine, le Gouvernement a souhaité prendre des dispositions immédiates, pour soutenir les entreprises et les secteurs les plus directement impactés. Bruno LE MAIRE et Julien DENORMANDIE viennent de les détailler. Mais nous avons également décidé de prendre des mesures pour renforcer notre résilience énergétique durant les mois à venir. Nous le savons tous, la France et l'ensemble des pays européens doivent sortir au plus vite de leur dépendance aux énergies fossiles russes et aux énergies fossiles tout court. C'est un impératif climatique, mais nous voyons aujourd'hui à quel point c'est aussi un enjeu de souveraineté énergétique. La volonté affichée par le président de la République et la présidente de la Commission européenne est de ne plus dépendre du tout du gaz et du pétrole russes au plus tard d'ici 2027, comme vous l'avez indiqué tout à l'heure. Je rappelle la situation dans laquelle se trouve la France : Notre pays est moins dépendant des fossiles russes que d'autres pays européens. Nous bénéficions d'une production d'électricité fortement décarbonée et que nous voulons massivement renforcer dans les années à venir, comme cela a été précisé à Belfort par le président il y a quelques semaines. Mais chacun sait que malgré ces atouts, près de deux tiers de notre consommation d'énergie reste d'origine fossile, dont une partie vient de la Russie, et que concrètement, nous avons encore besoin de gaz pour nous chauffer l'hiver, et de pétrole pour faire rouler nos voitures ou nos camions. Le Gouvernement est donc pleinement mobilisé pour sécuriser nos approvisionnements dans les mois à venir, et accélérer la sortie de notre dépendance aux énergies fossiles. Concernant nos approvisionnements en gaz pour l'hiver prochain. Nous avons pris des mesures pour sécuriser le remplissage de nos stocks de gaz dans les mois à venir. La France dispose déjà d'une réglementation exigeante qui impose que nos stocks de gaz soient remplis au moins à 85 % au début de chaque hiver. Nous avons demandé aux fournisseurs de gaz de commencer à remplir les stock dès à présent. Et nous prendrons les dispositions réglementaires nécessaires pour que nos stockages soient bien remplis dès cet été. Nous travaillons également avec la Commission européenne pour que ces règles permettant de garantir un bon niveau de remplissage des stocks de gaz soit étendu à l’échelle européenne et une proposition législative en ce sens sera présentée dans les prochaines semaines. Parallèlement, nous renforçons nos capacités d’importation de GNL par nos 4 ports méthaniers pour faciliter la diversification de nos sources d’approvisionnement auprès d’autres pays que la Russie là encore un travail de coordination européenne étroite est engagé pour mieux maîtriser les approvisionnements et les prix du gaz importé en Europe. Nous sommes également mobilisés pour augmenter nos capacités de production de biogaz, dont je rappelle qu'elles ont été multipliées par 5 lors des deux dernières années et représenteront 10 % de notre consommation de gaz à l'horizon 2030. Nous maximisons notre production d'électricité décarbonée, que ce soit par notre parc nucléaire ou renouvelable, afin de réduire notre besoin de gaz pour la production d'électricité l'hiver prochain. Je rappelle que nous produisons encore de l'électricité avec du gaz. J'ai notamment demandé un rapport dès le mois de décembre à EDF pour identifier les leviers permettant une plus grande disponibilité du parc nucléaire dès l'hiver prochain, dont nous aurons prochainement les premiers retours. Enfin, de nouvelles mesures de simplification sur les énergies renouvelables seront mises en place dans les prochaines semaines afin d'accélérer leur déploiement sur nos territoires. Je citerai par exemple la prise en charge accrue de 40 à 60 % des frais de raccordement pour les installations de biogaz effective depuis cette semaine. Nous suivons aussi attentivement les approvisionnements en produits pétroliers. En la matière, la problématique est un peu différente, la dépendance européenne au pétrole russe est moindre. Le pétrole est plus facilement transportable et nous disposons de stocks stratégiques à hauteur de 90 jours qui nous garantissent plusieurs mois d'autonomie en cas de rupture d'approvisionnement. La réorganisation des flux que nous observons actuellement à l'échelle européenne peut néanmoins induire localement des tensions logistiques auxquelles nous sommes vigilants, tout particulièrement dans l'ouest de la France. Au-delà de ces questions d'approvisionnement, notre plan vise également à réduire la demande en pétrole et en gaz naturel réel afin de limiter notre dépendance. Nous mettons en place des outils adaptés à chaque consommateur particuliers, entreprises, collectivités qui souhaitent accélérer leur transition énergétique et réduire leur facture à court terme. Ce plan s'inscrit bien entendu, Monsieur le Premier ministre, dans la continuité des actions engagées depuis le début du quinquennat. Que ce soit pour accélérer le verdissement de notre parc automobile. Je rappelle que près de 1,5 million de bonus et primes à la conversion ont été distribués en 5 ans pour aider nos concitoyens à passer à l'électrique. Nous avons également donné un grand coup d'accélérateur à la rénovation thermique avec plus d'un million d'aides MaPrimeRénov depuis son lancement le 1er janvier 2020 et 2,7 milliards d'euros de France relance pour rénover nos bâtiments publics. Nous décarbonons notre industrie, avec au total 6,2 milliards d'euros d'investissements dans France Relance et France 2030. Nous soutenons la bascule vers la chaleur renouvelable grâce à l'augmentation de 70 % du Fonds chaleur depuis le début du quinquennat. La situation actuelle implique plus que jamais d'accélérer durablement cette dynamique pour renforcer encore le rythme de décroissance de la demande en gaz et en pétrole, avec comme boussole l'objectif de réduction de 55 % des émissions de CO2 d'ici 2030 fixé au niveau européen. Les perspectives des prochaines années en matière de nouveaux efforts sur la décarbonisation de la chaleur, des bâtiments ou encore de l'industrie seront détaillées en temps voulu. Mais je peux d'ores et déjà vous annoncer des mesures à court terme. Premièrement, nous allons dès cette année accroître de 40 % les crédits d'intervention du Fonds chaleur. Je rappelle que ce fonds opéré par l'Ademe est destiné principalement aux collectivités et aux entreprises. Il permet notamment de financer les investissements pour remplacer du gaz naturel par des énergies renouvelables, biomasse, géothermie, etc., et dans des systèmes de chauffage. Ces 150 millions d'euros de moyens supplémentaires permettront par exemple de soutenir très rapidement des projets de conversion de réseaux de chaleur à la biomasse, moyen très efficace de réduire notre demande en gaz naturel. Deuxièmement, nous allons renforcer MaPrimeRénov afin d'accélérer le remplacement de chaudières à énergie fossile par des solutions de chauffage renouvelable comme les pompes à chaleur. Le Gouvernement a décidé d'augmenter de 1 000 euros à partir du 15 avril prochain et jusqu'à la fin de l'année 2022, les aides à MaPrimeRénov accordé pour l'installation d'un système de chauffage vertueux qui permet de sortir du gaz ou du fioul, comme les pompes à chaleur, y compris hybrides, ou des chaudières biomasse. Et pour ne plus inciter les ménages à rester dépendants du gaz, les forfaits pour l'installation de nouvelles chaudières au gaz seront parallèlement arrêtés. En cumulant les aides MaPrimeRénov et les certificats d'économie d'énergie, il sera ainsi plus avantageux pour les ménages les plus modestes de choisir une pompe à chaleur ou une chaudière biomasse et de se passer du gaz. C'est une mesure d'accélération juste, simple, efficace et cohérente avec notre action en faveur d'une moindre dépendance aux énergies fossiles. Troisièmement, nous lancerons en début avril un appel à projets exceptionnel de France 2030 pour accélérer la décarbonisation de notre industrie. Nous souhaitons cibler les entreprises les plus exposées à la hausse des prix des hydrocarbures pour qu'elles accélèrent leurs projets d'efficacité énergétique ou de substitution du gaz naturel par de la biomasse. Quatrièmement, nous lançons un plan de sortie accélérée des hydrocarbures pour des bâtiments de l'Etat et ses opérateurs. Cette action s'accompagnera de la mise en place d'un fonds qui financera des travaux à impact rapide sur la réduction de consommation de gaz et de fioul, en particulier des remplacements de chaudières fossiles par des solutions renouvelables. Et par souci d'exemplarité, le Premier ministre signera également dans les jours à venir une circulaire appelant l'ensemble des services publics à réduire d'un degré la température de chauffage afin d'économiser l'énergie et de réduire la facture. Les actions que je viens de vous décrire sont des mesures d'accélération qui visent à produire des effets dès les prochains mois. Elles seront complétées par une campagne de communication sur les éco-gestes et aussi sur toutes les aides que je viens de vous détailler. Elles seront bien sûr complétées dans le cadre d'un plan d'action pluriannuel au moment de l'élaboration de la programmation pluriannuelle de l'énergie et de la stratégie nationale bas carbone, dès l'été prochain. Vous l'aurez compris, dans cette période difficile et incertaine, notre mobilisation est totale pour assurer nos approvisionnements dans les mois à venir, et ce, quelle que soit l'évolution de la situation internationale, tout en maintenant clairement et fermement le cap de la transition énergétique. Quelles que soient les obstacles devant nous, cette transition vers un monde sans énergie fossile constitue plus que jamais la voie la plus sûre et la plus efficace pour nous renforcer et garantir notre avenir et notre souveraineté énergétique. Merci. Jean CASTEX Merci. J'invite peut-être les ministres restent là, Barbara, à me rejoindre pour pouvoir répondre à certaines de vos questions, si vous le voulez bien. Alors, on va te passer un micro, merci beaucoup. Renaud NARAYEN Bonjour Renaud NARAYEN du journal Les Echos. J'aurai des questions pour savoir. Vous allez lancer beaucoup de mesures aujourd'hui, j'aurais voulu savoir le coût de ces mesures, combien ça coûterait au budget de l'Etat ? Par ailleurs, vous annoncez plus de 20 milliards sur le bouclier tarifaire pour les Français. Est-ce que vous pouvez détailler un petit peu plus le niveau exact, parce qu’on était plutôt à 24 milliards il y a une semaine, il s'est ajouté la remise de 15 centimes, donc je voulais savoir quel niveau exactement. Et dernière chose, est-ce que toutes ces nouvelles aides, ces nouvelles mesures, vont nécessiter un budget rectificatif et la convocation du Parlement avant les échéances électorales ? Merci. Jean CASTEX Merci. Deuxième question peut-être ? Jérémy MAROT Oui, bonjour ! Jérémy MAROT de l’AFP. Même question que mon confrère sur le chiffrage global. Est-ce que vous pouvez aussi détailler certaines enveloppes ? Notamment, vous avez parlé du fonds de 400 millions pour les agriculteurs, mais peut-être pour les transporteurs aussi, le BTP. Il y a peut-être du détail là-dessus. Est-ce que vous pouvez aussi revenir sur les négociations qui sont en cours avec les pétroliers et les distributeurs ? Monsieur le Maire, vous évoquiez des négociations fructueuses avec Total. Mais quid de la grande distribution, par exemple, et d'autres pétroliers surtout ? Jean CASTEX Allez, une troisième et on va prendre ce premier lot. Journaliste (inaudible) d’Europe 1, bonjour, vous avez annoncé beaucoup de dettes sur le gaz, l'essence ou le gazoil, mais quid du kérosène, est-ce qu’il y aura des aides pour le secteur aérien ? Jean CASTEX Très bien, alors l'essentiel des questions sont pour le ministre de l'Economie et des Finances, sans surprise, alors le détail du coût et la répartition de ce dernier. Il y a aussi peut-être une question pour le ministre de l'Agriculture, si j'ai bien compris sur le kérosène ensuite. Bruno LE MAIRE Alors sur le coût total, les chiffres que nous avons donnés avec le Premier ministre, c’est que nous avons déjà une facture totale de plus de 20 milliards d'euros qui se décompose principalement en plafonnement du prix du gaz. On est à 10 milliards d'euros aux tarifs du gaz tel qu'il était il y a quelques jours. 8 milliards d'euros pour le plafonnement à 4 % des tarifs d'électricité. Il faut rajouter le chèque énergie, il faut ajouter l'ensemble des mesures qui ont déjà été prises. Donc ça, ça fait une enveloppe de 20 milliards d'euros. Il faut y rajouter un peu plus de 2 milliards d'euros que coûtera le rabais de 15 centimes d'euro par litre de carburant. Donc, nous sommes à 22 milliards d'euros. S'agissant des… Jean CASTEX (Inaudible), vous avez rajouté de vous-même de 3,8. Bruno LE MAIRE L'inflation de 3,8 si vous voulez la mettre le paquet global, je ne faisais que le décompte énergie. Donc, on peut rajouter effectivement… du coup, vous arrivez à une somme qui approche les 25, 26 milliards d’euros au total. S’agissant des dépenses pour les entreprises, la dépense principale, c’est la subvention directe de 25 millions d’euros pour les entreprises qui répondent aux trois conditions que nous avons indiquées, notre évaluation préalable de 3 milliards d’euros, pour le coût de cette mesure. Je reste extrêmement prudent parce que vous imaginez bien qu'il n'est pas simple de distinguer dès maintenant toutes les entreprises qui rentreront dans le cadre de cette aide et qui rempliront bien ces trois conditions. Les 40 %, le 3 % de prix de l'énergie dans le chiffre d'affaires, mais notre évaluation préalable est de 3 milliards d'euros. S'agissant de Total, et des grands distributeurs, nous allons continuer de rencontrer l'ensemble des acteurs, les uns après les autres pour les inciter à faire des mouvements dans la bonne direction, c'est-à -dire réduire eux aussi le tarif à la pompe par litre de carburant. Je laisserai à Total le soin d'annoncer le chiffre qu'ils ont retenu pour leurs réductions de carburant. Jean CASTEX Là-dessus juste, c'est le ministre qui est à la manœuvre. Je l'avais déjà dit d'ailleurs publiquement, compte tenu de ce qui s'est passé et des conséquences sur les comptes de ces entreprises, le Gouvernement demande qu’un effort clair soit fait et il faut qu’on ait… vous vous posez peut-être la question sur l'ensemble des secteurs, il faut qu’il y en ait un qui commence très nettement pour tirer les autres. En tout cas, c'est un sujet sur lequel nous serons extrêmement déterminés. Je tiens à le dire ici très clairement, et Bruno n'a pas tout à fait répondu, mais tu allais peut-être le faire sur la question de savoir s'il fallait solliciter le Parlement pour une loi de finances rectificative. Bruno LE MAIRE Alors, nous n'avons pas dans les sommes qui sont indiquées, besoin d'une loi de finances rectificative. Nous avons les réserves financières, tant que ça reste une réponse ciblée, nous avons les réserves financières suffisantes pour couvrir les dépenses immédiates. Les dépenses immédiates, c’est lesquelles ? C’est les subventions. Jean CASTEX Donc c'est clair, ça veut dire que dans le budget, dans la loi de finances pour 2022 telle qu'elle a été votée par le Parlement, nous n'avons pas à ce stade et compte tenu des mesures qui ont été annoncées aujourd'hui, plus celles que j'ai annoncé moi-même samedi, c'est-à-dire les 15 centimes, nous n'avons pas besoin de re-solliciter le Parlement pour un acte budgétaire, c'est-à-dire pour être clair, comme vous l'avez dit, une loi de finances rectificative. Ensuite, il y avait le détail, peut-être, je crois sur l’enveloppe agricole. Non ? C’est ça ? Intervenant non identifié (inaudible) Journaliste Vous avez donné en détail pour les agriculteurs, 400 millions. Est-ce qu'on peut avoir d'autres détails, par exemple pour les pêcheurs ? Quelle est l'enveloppe pour les pêcheurs ? Et les autres secteurs ? Jean CASTEX Oui, on vous donnera tous ces éléments tout à l'heure, donc la part de l'Etat, encore une fois, c'est une aide financière exceptionnelle qui vaudra donc à 35 centimes par litre de gazole de pêche. Donc, on est en train d'évaluer combien ça représente, mais ça, on vous le donnera. Et par ailleurs, donc on souhaite qu'un effort complémentaire, je ne l'ai pas dit, soit fait par la filière avec laquelle nous sommes en discussion et avec les collectivités locales qui sont… qui ont la responsabilité des ports régionaux. En règle générale, ce sont les régions, mais il peut y avoir aussi des ports départementaux en ce que ceux-ci lèvent une fiscalité affectée dont sont redevables les marins pêcheurs, pour qu'il y ait là aussi un effort complémentaire à celui fait par l'Etat sur le kérosène. Je ne sais pas lequel d’entre vous pourrait répondre sur le kérosène. Est-ce qu’il y a des spécificités sur le kérosène ou sur le secteur aérien ? Bruno LE MAIRE Sur le secteur aérien, nous verrons s'il rentre dans les critères qui sont indiqués. Donc, appliquons les critères que je vous ai indiqué avec les trois conditions et nous verrons s'il remplit ces conditions ou pas. Jean CASTEX En tout, ce n'est pas des aides spécifiques, il n’y a pas d'aides spécifiques pour répondre à votre question, comme on peut en dégager pour les quatre secteurs que j'ai cités dans mon exposé. Bruno LE MAIRE Je rappelle juste que sur le kérosène, il n'y a pas d'aides spécifiques qui… On est dans un cadre de concurrence internationale. Donc la seule chose, c'est de voir si les compagnies aériennes peuvent rentrer dans le cadre des aides. Je n'ai pas encore fait tous les calculs pour savoir si ce sera le cas ou non. En revanche, il faut s'attendre à une répercussion sur les billets, ça c'est certain. Jean CASTEX Allez, on prend un autre… oui, Monsieur. Intervenant non identifié (Inaudible) pour CNews Canal+, vous avez annoncé Monsieur le Premier ministre, au tout début de votre intervention que nous devions nous préparer, je vous cite à une crise longue, combien de temps clairement l’Etat pourra ainsi aider les entreprises ? Est-ce que vous nous dites aujourd’hui le temps qu’il faudra et avons-nous la capacité de le faire si ce conflit est amené à perdurer des mois, voire des années. Merci. Romain CLUZEL Bonjour Romain CLUZEL de RMC. J'avais une question qui, je pense va peut-être avoir une réponse proche de celle sur le secteur aérien, concernant les professionnels qu'on considère comme gros rouleurs taxis, VTC, infirmiers ou auto-écoles. Est-ce qu'elles se retrouvent dans cette aide nouvelle dont vous parliez ou bien il y a-t-il des mesures spécifiques ? Merci. Anne BOURSE Oui, Anne BOURSE France Télévision, concernant les agriculteurs. Vous avez parlé des engrais, mais est-ce qu'il y aura une aide spécifique ? Est-ce que c'est dans l'enveloppe des 400 millions parce que ça préoccupe beaucoup les agriculteurs ? Jean CASTEX Allez, une dernière peut-être, Madame, je vous en prie. Intervenante non identifée Merci, bonjour. Valérie N.(Inaudible), pour Contexte, c'est aussi une question sur les engrais, vous avez… J'ai compris qu'il y aurait peut-être des reports de réglementations pour faciliter la mise à disposition des engrais. Est-ce que vous pouvez préciser de quoi il s'agit ? Merci. Jean CASTEX Alors, je réponds à la première question, puis mes collègues répondront aux autres. Oui, nous pensons que la crise va s'installer dans la durée. Vous avez entendu que j'ai annoncé des mesures pour une durée de 4 mois, on verra bien où nous en sommes à ce moment-là. Ce que je peux vous dire, d’ores et déjà c’est que les ministres réfléchissent à des dispositifs d'aides plus ciblés qui pourraient prendre le relais à l'aide général enfin en particulier aux 15 centimes que j'ai annoncé samedi dernier. C'est le premier élément de réponse. Le deuxième élément de réponse, c'est que vous avez sans doute suivi, comme moi, les conclusions du sommet de Versailles, où un certain nombre de demandes, de commandes ont été passées par les chefs d'Etat et de Gouvernement à la Commission, notamment sur un certain nombre de sujets de résilience qui pourraient donc, le cas échéant, donner lieu à une intervention de l'Europe, surtout, précisément si la crise s'installe dans la durée. Sur les agriculteurs ou peut-être sur les autres professions. Il n’y a eu deux questions sur les agriculteurs. Bruno LE MAIRE Si les professions taxis ou je crois que (inaudible) avait répondu dans son propos introductif. Je veux juste bien préciser des choses. Pas d'ambiguïté sur le kérosène. Toutes les compagnies mondiales sont concernées par l'augmentation des prix du kérosène. Donc, elles vont toutes augmenter les prix de leurs billets et faire la répercussion dans les prix de leurs billets. Sur l'aide européenne de 25 millions d'euros. Sauf à ce qu'il y ait des factures de gaz et d'électricité très importantes chez Air France, nous vérifierons. Je ne pense pas que ce soit le cas. Je rappelle que l'aide européenne, c'est uniquement dans le cas d'une facture de gaz ou d'électricité qui est très importante et qui représente plus de 3 % de votre chiffre d'affaires. Ça ne couvre pas la facture essence ou autre carburant. C'est ce qui explique que le Premier ministre ait annoncé des aides spécifiques sur le secteur du transport, des taxis ou des pêcheurs puisque ça ne peut pas rentrer dans le cadre du calcul de cette aide. L’aide européenne, c'est uniquement en fonction des prix du gaz et de l'électricité. Jean CASTEX Monsieur le ministre de l’Agriculture. Julien DENORMANDIE Oui, merci Monsieur le Premier ministre. Sur la double question sur les engrais. D'abord, sur la stratégie vis-à-vis des engrais. On a une chance en France, c'est qu'on est dans une forme d'indépendance vis-à-vis de la production des engrais, ce qui n'est pas du tout le cas pour beaucoup de pays européens. Et sachant qu'en France, la réalité impose à dire que nous avons des capacités de production, mais nous sommes dépendants dans l'approvisionnement de certains intrants pour faire fonctionner les capacités de production. Une fois que j'ai dit ça, notre stratégie est la suivante. D'abord d'assurer la capacité de production en France d'engrais et, de manière plus générale, en Europe. Le pire serait d'avoir une pénurie des engrais en Europe car si pénurie des engrais en Europe, vous avez, cela veut dire que la récolte suivante sera très fortement impactée avec une plus faible production et donc, moins de capacités de pouvoir nourrir à la fois de notre peuple européen, mais également nos partenaires et notamment nos partenaires du bassin méditerranéen qui souffrent d'une terrible sécheresse et qui sont eux-mêmes dépendants, par exemple, des importations de blé russe et ukrainien. Le deuxième élément, ça veut dire de sécuriser l'approvisionnement en intrants pour faire fonctionner nos usines, ce à quoi nous nous employons avec le ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance. Et le troisième volet, c'est de s'assurer que nos agriculteurs et la capacité d'achat des engrais. Et là, vous avez plusieurs cas de figure. Si vous êtes céréaliers, vous bénéficiez de l'augmentation des cours des céréales, dont l'origine explique aussi l'augmentation des cours des engrais. Vous pouvez avoir des cas de trésorerie qui fait que les annonces en termes de trésorerie faites par le ministre tout à l'heure sont très importantes, car vous avez un décalage entre l'augmentation du prix des engrais et les ventes des céréales. Mais la solution est, au final, assez simple. Vous avez en revanche un deuxième cas qui sont les éleveurs pour schématiser, parce qu'il y a évidemment d'autres cas de figure et sur les éleveurs, c'est pour ça que nous faisons cette aide dédiée aux éleveurs sur l'alimentation animale pour pouvoir venir les aider en trésorerie et faire face à des postes d'intrants qui vont augmenter, notamment celui permettant in fine de nourrir leur propre bétail. D'où le fait que les mesures que nous avons sectorisées soient de manière générique sur le GNR utilisé par tous les agriculteurs de manière spécifique sur le gaz dans les cas de figure où le gaz est utilisé, je pense aux maraîchers, je pense à certains éleveurs ou à des capacités comme la sucrerie et de manière très ciblée, les éleveurs vis-à-vis justement de leur capacité de production alimentaire. Sur le report de la réglementation, en fait, aujourd'hui, tout ce qui doit nous permettre à la fois d'utiliser les engrais organiques et de s'assurer que nous n'aurons pas de pénurie en termes d'engrais produits par les usines d'engrais doit être mis en place. Vous savez qu'il y avait aujourd'hui des discussions, des concertations sur un certain nombre de textes, notamment sur des stocks ou sur aujourd'hui, des facilités apportées sur l'utilisation des engrais organiques et la décision prise par le Premier ministre, c'est de faire en sorte qu'il n'y ait pas de difficultés dans les prochains mois donc, de reporter les discussions qui étaient en cours sur un certain nombre de textes pour s'assurer que nous ne mettions pas des tensions sur le marché des engrais au moment où on se parle. Intervenant non identifié Merci beaucoup. Une dernière question. Elisa BERTHOLOMEY Merci Elisa BERTHOLOMEY pour BFM TV. Vous avez répété tous successivement que ce n'était pas un nouveau Quoi qu'il en coûte. Mais pour rebondir sur la question posée à mes collègues tout à l'heure, est-ce qu'il y a une limite d'aide, un budget maximal que vous ne pourriez pas dépasser si cette crise dure et nécessite de nouvelles mesures ? Et vous avez beaucoup parlé des secteurs et des entreprises que vous allez accompagner, vous avez annoncé cette mesure d'aide pour les consommateurs de 15 centimes pour le litre d'essence. Est-ce que vous envisagez de prendre d'autres mesures pour les consommateurs spécifiquement ? Et si oui, lesquelles ? Merci. Bruno LE MAIRE Alors, tout ça d'un équilibre à trouver les dépenses publiques que nous avons engagées à la demande du Premier ministre, sur la protection des consommateurs contre la flambée des prix de l'énergie, elles ont une contrepartie positive, très positive, c'est que nous avons un niveau d'inflation en France plus faible que dans les autres pays européens et d'ailleurs, dans les discussions que j'ai eues avec mes partenaires européens, ce qui m'a frappé hier, c'est que tout le monde est sur la même ligne. Tout le monde est parfaitement convaincu que le seul choix responsable, c'est de protéger les consommateurs, notamment les plus modestes et les entreprises les plus exposées. Le deuxième choix, qui fait l'unanimité parmi les 27, c'est que la réponse doit être ciblée. Vous voyez le chiffre que je vous ai donné sur la stricte dépense budgétaire, je ne parle pas des prêts : 3 milliards d'euros. Je rappelle à titre puisqu'on oublie ce qui a été fait par le passé, que le Fonds de solidarité, c'était 35 milliards, que l’activité partielle c’était 35 milliards, que le “quoi qu’il en coûte” c’était des sommes qui n’avaient absolument rien avoir. Nous ne sommes pas dans une réponse de type “quoi qu’il en coûte” mais dans une réponse ciblée, d’abord parce qu’elle est plus juste et parce que nous ne faisons pas face à un choc de demande nous faisons face à un choc d’offre et que nous voulons tirer les leçons de ce qui a été fait dans le passé quand il y a eu un choc pétrolier. On avait répondu avec une injection massive de politiques budgétaires tous azimuts et cela avait alimenté une spirale inflationniste. C’est exactement ce que nous voulons éviter. Donc le choix stratégique que nous faisons avec le Premier ministre et le président de la République, et qui est un choix coordonné entre les 27, c’est d’avoir une réponse ciblée qui protège les ménages qui en ont le plus besoin, qui protège les entreprises qui sont les plus exposées à la flambée des prix du gaz et de l’électricité. C’est sûr que si vous êtes une entreprise dans laquelle les coûts de production le gaz ça représente 5-6-10% de vos coûts de production, vous vous retrouvez totalement injustement pénalisé, surtout si vous ne pouvez absolument pas répercuter les prix. Je donne l’exemple qu’a donné Julien qui est très bon qui est celui des producteurs de sucre et qui ont des tours de séchage de betteraves. Ces tours de betteraves fonctionnent au gaz. Leurs concurrents ont des tours de séchage qui fonctionnent différemment, notamment une alimentation par de la bagasse. Donc le cours du sucre va très peu bouger, mais le coût de production pour les producteurs de sucre français va exploser. Si on ne les aide pas, ils meurent. C’est justement ce qu’on veut éviter avec le Premier ministre, faire en sorte que la réponse soit ciblée pour protéger les entreprises qui en ont le plus besoin et accompagner les ménages. Barbara POMPILI Oui, les aides qui sont apportées aux consommateurs, vous parlez des 15 centimes, il ne faut surtout pas les mettre en oubliant les mesures structurelles. Aujourd’hui, quand vous augmentez Ma Prime Renov’ pour pouvoir changer une chaudière au gaz par une chaudière à pompe à chaleur par exemple, non seulement, grâce à l‘augmentation de l’aide, vous allez pouvoir payer votre pompe à chaleur autant si ce n'est moins cher que si vous achetiez une chaudière à gaz ; et en plus, votre facture annuelle sera divisée par trois. Donc ce sont des mesures très claires de pouvoir d'achat. Et elles s'ajoutent aux mesures qui existent déjà pour aider aussi nos concitoyens qui aujourd'hui voient les prix à la pompe exploser et que nous aidons là ponctuellement, et que nous aidons dans l'urgence, à pouvoir investir dans des véhicules, électriques notamment, qui leur permettront ensuite de payer beaucoup moins cher l'utilisation de leurs véhicules. Donc ce sont vraiment des mesures en tout temps, des mesures d'urgence et des mesures de moyen et long terme. Jean CASTEX Voilà. Et pour conclure, je vous répondrai ce que j'ai déjà dit tout à l'heure, ce plan de résilience devra s'adapter aux circonstances, comme nous l'avons toujours fait pour la gestion de la crise sanitaire, pour aujourd'hui la gestion de la crise internationale. Nous sommes des gens pragmatiques. Je crois que les réponses qui ont été, qui sont apportées aujourd'hui, en ce moment par la France, dans un cadre européen, visent à faire face de la façon la plus précise, la plus adaptée, la plus juste à la situation que nous traversons et nous verrons comment cette situation évolue. Je vous remercie.
12 objectifs pour répondre à l'urgence <br> - Source : Source : Service d'information du Gouvernement <br>

12 objectifs pour répondre à l'urgence <br>

12 objectifs pour répondre à l'urgence <br> - Source : Service d'information du Gouvernement <br>
Objectif 1 : renforcer le « bouclier tarifaire » pour les ménages et les petites entreprises
Objectif 2 : soutenir les entreprises dont les dépenses de gaz et d’électricité représentent une part élevée des charges
Objectif 3 : éviter les faillites des entreprises affectées par le choc
Objectif 4 : accompagner les entreprises impactées par les mesures de restriction des exportations, des importations et des activités, ainsi que par les perturbations du commerce international
Objectif 5 : faciliter la recherche de débouchés alternatifs des entreprises exportatrices
Objectif 6 : apporter des soutiens ciblés aux secteurs les plus exposés à la hausse du coût des intrants
Objectif 7 : sécuriser l’approvisionnement en intrants critiques
Objectif 8 : responsabiliser les donneurs d’ordre et faire jouer les solidarités de filières
Objectif 9 : renforcer la souveraineté énergétique
Objectif 10 : renforcer la souveraineté alimentaire de l’Europe
Objectif 11 : faciliter l’implantation en France des activités permettant de réduire nos dépendances
Objectif 12 : renforcer la cybersécurité des administrations, des entreprises et des infrastructures.

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