Les réflexes à adopter face à un jeune en souffrance mentale

Publié 16/05/2024|Modifié 13/05/2024

L’enfance et l’adolescence sont des périodes de changement, voire de bouleversements dont les effets peuvent être considérables sur la santé mentale. Comment repérer un jeune en souffrance mentale ? Quels sont les bons réflexes à adopter face à cette situation ? Éclairage avec Arnaud Carré, psychologue enseignant-chercheur à l’université Savoie-Mont-Blanc, formateur aux premiers secours en santé mentale.

Un jeune vu de dos.

Comment définir une santé mentale fragilisée ?

En psychologie et en médecine, elle est définie comme une altération des pensées, émotions, et comportements individuels comme sociaux. L’hypothèse d’un trouble comporte une durée minimale et un fonctionnement perturbé de manière significative.
Une altération passagère et associée à un évènement vie ne relèvera théoriquement pas d’une maladie (un deuil, une rupture ou une déception académique).
Un enjeu réside dans la vigilance aux états intermédiaires de détresse et significativement éloignés du bien-être.
Parfois difficiles à identifier, ce sont potentiellement des portes d’entrée vers des troubles caractérisés qui doivent faire l’objet de prévention et d’interventions précoces.
Face à des signaux faibles et parfois non spécifiques, la difficulté est de bien positionnerlecurseur, en évitant deux écueils : passer à côté de la possibilité d’aller mieux car une situation est sous-diagnostiquée, ou, à l’inverse, sur-diagnostiquer.
Parler de trouble psychique peut être stigmatisant ou fragilisant en dehors d’un accompagnement professionnel.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un jeune âgé de 10 à 19 ans sur sept souffre d’un trouble mental (soit 13% sur cette tranche d’âge).

Comment repérer un jeune en souffrance mentale ?

Comme le rappelle Santé publique France, environ la moitié des troubles mentaux se manifeste avant l’âge de 14 ans.
Toutefois, il est souvent difficile d’identifier un changement d’ordre pathologique. Cette période de la vie est marquée par un processus de maturation biologique, affective, identitaire et sociale, qui fait partie de la construction de l’individu.
Certains signes doivent pourtant être regardés de près sans être banalisés au motif qu’ils feraient partie de la «crise d’ado» : sommeil (trop ou pas assez), alimentation (prise ou perte de poids), repli social, changement notable dans la manière d’être avec ses amis ou sa famille, difficulté scolaire, consommation de substances…
Tous les signes teintés d’émotions négatives, voire relatifs à la mort et au suicide, ou à un sentiment d’être « piégé » doivent alerter.

Chaque main tendue est une opportunité de sortir d’un repli sur soi.

Arnaud Carré

Portrait d'Arnaud Carré
Portrait d'Arnaud Carré / Ephée

Une fois ces troubles repérés, quels sont les bons réflexes à adopter ?

Comme pour la santé physique, on peut parler de bonnes pratiques et de « gestes qui sauvent » à travers les premiers secours en santé mentale (PSSM).
Il faut aborder le jeune en toute authenticité et écouter attentivement et sans jugement, puis expliquer ce qu’on a perçu sans « mettre la poussière sous le tapis ».
A la manière d’un scientifique, il faut tester une hypothèse, quitte à la rejeter si elle est erronée.
Chaque main tendue est une opportunité de sortir d’un repli sur soi. La fausse bonne idée, c’est d’imaginer qu’on fera du tort au jeune en lui parlant de sa souffrance.
Souvent, il est imaginé que l’on va amorcer une crise, ou bien qu’une aide fiable n’existe pas.
Une véritable amélioration collective serait de réussir à identifier précocement une situation pour permettre un dialogue et des solutions pragmatiques.
Mais cette démarche implique un changement culturel…

En quel sens ?

Le soutien social doit être repensé.
Aujourd’hui encore, on observe une stigmatisation des troubles de santé mentale.
A l’école ou en entreprise, une personne dont les ressources psychiques sont impactées par un dysfonctionnement n’est souvent pas accompagnée de la même manière qu’une personne concernée par une maladie somatique.
A cela s’ajoute probablement un tabou voire une autocensure liée à un sentiment de honte ou d’anormalité.
En se tenant à distance par crainte d’importuner un jeune en souffrance, on risque de renforcer cette tendance et donner l’impression d’être incompris, voire rejeté.
Cela peut impacter le rétablissement ou un retour serein à l’école.

Le secteur de l’éducation et de la petite enfance doit être pensé comme un maillon essentiel à la santé mentale des jeunes.

Arnaud Carré

Comment accompagner au mieux un jeune en souffrance mentale ?

La santé mentale étant résolument plurifactorielle, nous gagnons à l’aborder sous plusieurs angles.
En tant que parent ou enseignant, on peut constater un état de souffrance, mais se sentir démuni.
Autant que possible, il faut aider à élaborer un ensemble de stratégies daide : médecins, psychologues, structures d’information et de soutien comme le Psycom, l’Unafam, ou Santé mentale France.
Par ailleurs, aux côtés de facteurs biologiques et sociaux, on peut agir sur des facteurs psychologiques comme la régulation émotionnelle ou les compétences psycho-sociales (CPS).
Celles-ci ont pour objectifs d’améliorer les relations àsoi et aux autres. Elles concernent autant les équipes éducatives, les enfants que les familles.
Le travail des « CPS » peut changer le climat d’une classe et promouvoir une santé mentale positive, mais aussi aider à prévenir des conduites à risque et du harcèlement.
En ce sens, le secteur de l’éducation et de la petite enfance doit, à côté de l’architecture médico-psychologique, être pensé comme un des maillons essentiels à la santé mentale des jeunes.

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