Mes chers concitoyens, mesdames et messieurs,
Cela fait presque un an que nous faisons face à la plus grave crise sanitaire de notre histoire récente.
Cette crise, nous l’avons combattue ensemble, en nous appuyant sur deux principes qui ont toujours guidé notre action.
Notre premier impératif n’a jamais été négociable : protéger votre santé, réussir à soigner tout le monde, à tout moment, partout sur notre territoire. Cela veut dire aussi protéger notre système de santé en évitant l’engorgement des services hospitaliers et en aidant nos soignants qui accomplissent depuis des mois leur mission avec un dévouement et un engagement admirables. Je vais les voir très régulièrement sur leurs lieux de travail, encore deux fois cette semaine, d’abord pour les écouter, ensuite pour leur apporter l’entier soutien de l’Etat et de la Nation.
Notre deuxième exigence, c’est le devoir de vérité. C’est la condition de la confiance, sans laquelle aucune mobilisation collective n’est possible. Car, oui, face à ce virus, nous devons tenir ensemble, et nous réussirons ensemble, en nous appuyant sur la vigilance et l’esprit de responsabilité de chacune et de chacun de vous.
Ce devoir de vérité m’oblige à vous dire ce soir que la situation sanitaire de notre pays s’est dégradée au cours des derniers jours.
Nous avons compté hier plus de 30 000 cas positifs, un chiffre que nous n’avions plus atteint depuis novembre dernier. Après plusieurs mois marqués par un plateau se situant entre 15 000 et 20 000 cas par jour, le virus gagne de nouveau du terrain depuis une semaine.
Le virus progresse en France, comme presque partout en Europe – je pense à l’Allemagne, à la Belgique, aux Pays-Bas ou à l’Italie, même dans les pays qui ont confiné. Comme chez nous, il se passe quelque chose depuis quelques jours.
Dans tous ces pays, l’explication la plus évidente tient à l’apparition de cette nouvelle forme du virus, que l’on appelle les souches variantes, dont nous mesurons la progression jour après jour. La plus répandue dans notre pays, vous le savez, est de loin celle dite du variant anglais qui concerne désormais à peu près la moitié des personnes atteintes de la Covid en France.
Ce variant, nous savons depuis la fin janvier qu’il se diffuse à bas bruit et qu’il est susceptible de produire, à un moment donné, une nouvelle flambée épidémique parce qu’il est plus contagieux.
Avec le Président de la République nous avons souhaité, le mois dernier, nous donner tous les moyens d’éviter un nouveau confinement que nous avions envisagé fin janvier sur la base de projections qui nous prédisaient une dégradation rapide et brutale de la situation. Cette décision s’est avérée la bonne ; elle nous a permis de gagner du temps. Or ce temps est précieux, car chaque jour, nous avons un peu plus de personnes vaccinées.
Et pendant ce temps, notre activité économique ne s’est pas effondrée, nos commerces ont pu rester ouverts, nos enfants ont pu aller à l’école dans les zones bien entendu qui n’étaient pas en vacances. Il faut imaginer qu’autour de nous, je pense au Royaume-Uni ou à l’Allemagne, les enfants n’ont pas mis les pieds à l’école depuis plus de deux mois. Grâce aux efforts de tous, nous avons, pendant plusieurs semaines, réussi à stabiliser l’épidémie. C’est une réussite collective que je veux saluer.
J’entends également certains appeler à un confinement dur et immédiat dans l’espoir de nous débarrasser une bonne fois pour toutes du virus. Quatre semaines et puis on est débarrassé. Malheureusement, notamment en raison de la propagation des variants, c’est loin d’être aussi simple. Voyez d’ailleurs que les confinements très durs auxquels ont procédé certains de nos voisins ne leur ont pas permis d’atteindre l’objectif « zéro Covid ».
Un confinement peut être nécessaire, mais il n’est jamais anodin. Il signifie des fermetures de commerces ; la fermeture des écoles ; des limitations drastiques des déplacements. J’observe d’ailleurs que beaucoup de ceux qui appellent au confinement en général se disent très souvent, quand on les interroge plus précisément, opposés à chacune de ses modalités : il faudrait confiner mais sans fermer les commerces, sans fermer les écoles, sans rétablir l’attestation de déplacement.
Le confinement est ainsi un levier auquel nous devons recourir, quand on ne peut pas faire autrement. Il faut le faire à bon escient, au bon moment et dans la bonne mesure. Il faut tout faire pour le retarder pour laisser à la vaccination le temps de produire des effets.
Notre objectif reste le même : tenir, traverser cette crise qui se prolonge en sauvant le maximum de vies, en protégeant nos hôpitaux mais aussi, autant que nous le pourrons, en préservant nos modes de vie, notre économie, l’éducation de nos enfants. La recherche de ce juste équilibre, de ce difficile équilibre, a toujours été et restera la colonne vertébrale de notre action.
C’est pourquoi notre choix de ne pas confiner à une contrepartie : être extrêmement réactifs aux premiers signes de reprise épidémique.
C’est ce que nous avons fait ces derniers jours en engageant des actions ciblées sur certains territoires marqués par une augmentation particulièrement forte de l’épidémie.
En Moselle, face à l’émergence du variant sud-africain qui représente 60% des cas positifs, la vaccination des professionnels de santé a été accélérée et la stratégie Tester Alerter Protéger a été démultipliée ;
A Mayotte où la situation a conduit à la mise en place d’un confinement qui sera prolongé pour au moins 15 jours de plus ;
A la Réunion où, comme à Mayotte, nous déploierons les moyens humains et matériels nécessaires pour venir en soutien des structures de soins ;
Enfin, dans l’aire urbaine de Nice et dans l’agglomération de Dunkerque, où la circulation a atteint des niveaux 3 à 4 fois supérieurs à la moyenne nationale, et où un confinement sera mis en place le week-end à compter de ce samedi.
Nous devions agir et nous l’avons fait, avec le soutien des élus de ces territoires dont je veux saluer ici l’esprit de responsabilité. Le confinement le week-end est une mesure lourde, ce d’autant qu’elle se conjugue avec le couvre-feu maintenu à 18 heures.
C’est une mesure intermédiaire, dont nous espérons qu’elle permettra d’infléchir la tendance observée. C’est une mesure ciblée sur certains territoires, où l’épidémie s’emballe, ce qui nous semble la bonne méthode pour pouvoir agir vite et fort, là où c’est nécessaire, sans impacter des territoires où l’épidémie recule, il y en a, ou circule moins fortement.
Et, sur cette base, il apparaît aujourd’hui que la situation épidémiologique et hospitalière dans d’autres agglomérations ou départements suscite une vigilance maximale car ces territoires cumulent des indicateurs défavorables : un niveau d’incidence élevé, autour de 250 cas pour 100 000 habitants, une part de variant supérieur à 50 %, une pression hospitalière proche du seuil critique et, enfin, une circulation virale qui commence à s’accélérer sérieusement.
Ces départements sont au nombre de 20. Ils s’affichent sur la carte et concernent toute l’Ile-de-France, une grande partie des Hauts-de- France et de Provence-Alpes-Côte-D’azur, mais aussi les départements du Rhône et de la Drôme, de la Moselle et de la Meurthe-et-Moselle, et enfin l’Eure-et-Loir.
Nous plaçons donc ces départements en surveillance renforcée. J’ai demandé aux préfets des départements concernés d’engager des concertations avec les élus en vue d’inviter sans attendre tous les habitants à la plus grande vigilance et d’envisager, dans tout ou partie de ces territoires, des mesures de freinage proches de celles mises en place à Nice et Dunkerque.
Nous ferons un point la semaine prochaine et nous déciderons alors : si, et seulement si, la situation continue de se dégrader, nous prendrons des mesures renforcées qui entreront en vigueur à compter du week-end du 6 mars.
Mes chers concitoyens, je mesure ce que peut être votre lassitude, et peut-être même votre découragement, alors que nous sommes engagés dans cette bataille depuis bientôt 12 mois. Le virus évolue et se transforme. Certains d’entre vous peuvent se demander si nous verrons bientôt le bout de ce jour sans fin.
J’en ai l’absolue conviction. Et cette conviction se fonde sur des premiers signes tangibles, des premiers motifs d’espoir nous permettant d’envisager dans les prochains mois un retour à une vie plus normale. C’est la campagne de vaccination ; c’est notre stratégie de dépistage que nous améliorons sans cesse ; c’est aussi l’arrivée prochaine de nouveaux traitements.
La campagne de vaccination se poursuit et s’amplifie. A la fin de ce mois de février, plus de 4 millions de vaccins auront été administrés à plus de 3 millions de personnes, avec, là encore, le concours des élus locaux, et des professionnels de santé que je veux remercier une fois encore.
Nous vaccinons beaucoup, et surtout, je veux insister auprès de vous, nous vaccinons les bonnes personnes, c’est-à-dire celles qui peuvent développer les formes les plus graves de la maladie, présenter des séquelles lourdes et parfois en mourir. Vous le savez, il s’agit des personnes les plus âgées et / ou présentant des pathologies, appelées comorbidités, qui les rendent particulièrement vulnérables à la maladie et que l’on retrouve dans les services hospitaliers.
C’est pour cette raison que nous devons poursuivre la vaccination des personnes de plus de 75 ans et amplifier la vaccination des personnes atteintes de comorbidités, car les statistiques nous montrent qu’elles présentent de plus fortes probabilités d’être hospitalisées ou d’être gravement atteintes.
Et cette stratégie se déploie. Si certains pays qui nous entourent ont à ce jour davantage vacciné que nous, la France est en tête pour la vaccination des personnes les plus exposées aux formes graves de la Covid, comme l’illustrent les graphiques à l’écran.
L’âge moyen des personnes vaccinées est en France de 72 ans, contre 65 en Allemagne et 55 en Italie. Près de 80 % des résidents d’EHPAD, là où le taux de mortalité est le plus élevé, ont été vaccinés. Plus du quart des personnes de plus de 75 ans a été vacciné.
D’ores et déjà, nous constatons que le virus circule moins chez les personnes âgées qu’en population générale ; depuis deux semaines, l’incidence baisse chez les plus de 80 ans quand elle augmente dans toutes les tranches d’âges inférieures ; l’âge moyen des personnes admises en réanimation diminue. Cela montre que les effets de la campagne de vaccination commencent à se faire sentir sur nos concitoyens les plus âgés, donc les plus fragiles, qui sont désormais mieux protégés.
Aujourd’hui marque une étape nouvelle, avec l’entrée en scène des médecins généralistes et des pharmaciens. Dans un premier temps, les généralistes vont pouvoir vacciner les patients âgés de 50 à 64 ans atteints de comorbidités, soit un objectif de 2,4 millions de personnes.
Avec le ministre des Solidarités et de la Santé, j’ai donné ce matin, symboliquement, le coup d’envoi de cette campagne. Et d’ici fin mars, les deux tiers des personnes de plus de 75 ans seront vaccinées et nous ouvrirons début avril la vaccination aux plus de 65 ans. Pour autant, nous dépendons de la fabrication et de la livraison des doses commandées par l’Union européenne et il nous faudra nous armer de patience. Mais je sais que vous mesurez ce chantier titanesque et sans précédent que représente pour l’industrie mondiale de produire des centaines de millions de doses de vaccins en un temps record – des vaccins eux-mêmes découverts en un temps record. Il n’en reste pas moins qu’à la mi-mai, la totalité des personnes de plus de 50 ans se seront vu proposer la vaccination.
Olivier Véran et le professeur Alain Fischer reviendront sur la stratégie vaccinale dans un instant.
Nous pouvons aussi compter sur notre système de dépistage, notre stratégie tester-alerter-protéger que nous ne cessons de renforcer. L’accès aux tests est facilité, notamment dans les établissements d’enseignement avec le déploiement des tests salivaires qui doivent rapidement nous permettre de tester 300 000 enfants par semaine (près de 6 fois plus qu’aujourd’hui) et donc de mieux les protéger. Pour l’ensemble du pays, les délais de dépistage et de rendu des résultats continuent de se réduire. Le tracing, la surveillance, des cas contacts est désormais quasi-immédiat après l’identification d’un cas positif. Et le dispositif d’accompagnement à domicile des personnes isolées se déploie partout sur le territoire national. Et là encore, pour la mise en œuvre de ce dispositif totalement gratuit, un grand merci aux professionnels de santé, notamment dans les laboratoires, les caisses l’assurance-maladie, les ARS, les collectivités locales et les associations.
Troisième motif d’espoir, l’arrivée prochaine de nouveaux traitements qui pourraient permettre d’éviter l’apparition de formes graves de la maladie. Il s’agit notamment des anticorps monoclonaux, qui vont vous être présentés par le ministre des solidarités et de la santé.
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M. Olivier Véran , ministre des Solidarités et de la Santé
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M. Alain Fischer, président du conseil d’orientation de la stratégie vaccinale
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Mes chers concitoyens
Les 12 derniers mois que nous avons traversés resteront dans l’histoire comme une épreuve exceptionnelle : exceptionnelle par sa nouveauté, exceptionnelle par sa dimension planétaire, exceptionnelle par les contraintes inédites qu’elle nous a fait subir mais aussi par les ressources que nous avons su mobiliser pour y faire face. Des ressources scientifiques, des ressources médicales, des ressources financières mais aussi morales et psychologiques.
Cette épidémie nous a éprouvés par sa durée et sa dureté, par ses évolutions souvent imprévisibles. Mais cette épidémie, nous en verrons le bout : la progression de la campagne vaccinale nous permet de nous fixer un cap, la fin du printemps. A cet horizon, la protection des plus vulnérables devrait nous permettre de réduire les effets de cette épidémie sur la population toute entière.
D’ici là, nous devons tenir ensemble. Nous devons poursuivre nos efforts, rester vigilant à titre individuel, rester solidaires sur le plan collectif.
Et savoir adapter nos mesures à l’évolution de la situation, sans retard ni précipitation.
Dans la recherche des bons équilibres.
Dans le dialogue, toujours, avec les élus et les territoires.
Dans la transparence et la vérité.
Dans le respect de notre seul objectif : vous protéger.