Le Premier ministre Manuel Valls a sollicité, mercredi 25 novembre 2015, l'autorisation du Parlement de poursuivre l’engagement des forces françaises en Syrie, en vertu de l’article 35 de la Constitution. Dans un discours devant les députés, lu au même moment par Laurent Fabius au Sénat, le Premier ministre a rappelé que, dans la guerre contre Daech, le 13 novembre a changé la donne. « Daech veut nous frapper, nous frapperons plus fort. Nous frapperons juste. Et nous gagnerons ! Oui, même s’il faut du temps, même s’il peut y avoir d’autres épreuves, nous gagnerons cette guerre contre la barbarie ».
« Le vendredi 13 novembre, Daech a frappé la France. Frappé comme jamais » , a rappelé Manuel Valls, mercredi 25 novembre, devant l'Assemblée nationale. Cette attaque, qui visait la France dans ce qu'elle représente : sa jeunesse, sa diversité, ses lieux de vie et de culture, son art de vivre, ses principes universels, a fait 130 victimes, de 20 nationalités.
« Face à ce totalitarisme islamiste, la France mène et mènera une guerre implacable. Daech veut nous frapper, nous frapperons plus fort. Nous frapperons juste. Et nous gagnerons! Oui, même s’il faut du temps, même s’il peut y avoir d’autres épreuves, nous gagnerons cette guerre contre la barbarie ».
Des actions sur notre territoire
Dans le cadre de l'état d'urgence, depuis le 14 novembre :, plus de 1 400 perquisitions administratives ont été ordonnées ; 241 armes ont été saisies dont une vingtaine d’armes de guerre ; 272 personnes ont été assignées à résidence.
Dans la nuit du 13 au 14 novembre, le président de la République a décrété l'état d'urgence. Il est désormais prolongé pour trois mois, sur l'ensemble du territoire. La loi renforçant les dispositions de la loi de 1955 relative à l'état d'urgence, présentée par le Premier ministre, a été adoptée le 20 novembre, et publiée dès le lendemain avec application immédiate.
Des moyens supplémentaires sont actuellement affectés à la protection du territoire : 120000 policiers, gendarmes et militaire sont mobilisés ; de nouveaux recrutements seront réalisés ; des dispositions vont venir renforcer l'arsenal juridique.
« L’épicentre du terrorisme de Daech, c’est la Syrie. Depuis cet épicentre, les attentats s’organisent et se planifient. Dans ces repaires, les commandos viennent se former et prendre leurs ordres. C’est de là – nous le savons – qu’ont été commanditées les attaques visant notre pays » , a rappelé le Premier ministre. Il était de la responsabilité de la France d'intervenir militairement en Syrie, comme elle le faisait déjà en Irak depuis septembre 2014. C’est pourquoi, le 7 septembre 2015, le président de la République a lancé l’offensive des forces aériennes dans le ciel syrien. Depuis, Rafale et Mirage ont multiplié les missions, pour observer, d'abord, acquérir du renseignement, mieux connaître et localiser les points stratégiques de l’ennemi. C’était une étape indispensable avant d’entrer en action. Pour frapper, ensuite, des centres névralgiques, des postes de commandement, des camps d’entraînement. Les forces françaises ont détruit, comme les forces américaines et russes, des infrastructures pétrolières, privant les terroristes d’une partie de leur manne financière.
300, C'est le nombre de frappes menées depuis que les forces françaises sont engagées au Levant.
« Le 13 novembre a changé la donne ». Depuis dix jours, les forces aériennes françaises ont intensifié leurs frappes, élargi leurs cibles, étendu le périmètre et la fréquence de leurs missions. Huit raids ont été lancés sur Raqqa. De nouveaux sites de Daech en Irak, à Mossoul, ont été bombardés hier encore, ce qui porte à plus de 300 le nombre de frappes menées depuis que les forces françaises sont engagées au Levant. La présence, depuis 48 heures, du porte-avions Charles-de-Gaulle en Méditerranée orientale donne une force accrue pour amplifier les opérations, aussi bien en Syrie qu’en Irak. Les capacités sur zone ont été multipliées par trois.
« Ce combat contre le terrorisme, c’est aussi celui des Nations unies », a poursuivi Manuel Valls. Le Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité, vendredi 20 novembre, la résolution 2249 qui appelle à amplifier l'action contre les groupes terroristes djihadistes. C’était une demande de la France, exprimée au lendemain des attentats. C'est un combat que la France mène également au sein d'une coalition internationale d'une trentaine d'États. Et le rapport de forces sur le terrain commence à s’inverser : les villes de Baïji et Sinjar ont été reconquises ; Daech commence à subir des dommages sérieux, à éprouver des difficultés pour organiser les ravitaillements à Mossoul, pour payer ses combattants. « Daech commence donc à reculer. C’est la preuve que Daech peut être vaincu ».Pour aller plus loin , il faut mobiliser une coalition plus large. Avec les États-Unis, bien sûr - le président de la République était, hier, à Washington où il a rencontré Barack Obama. Ensemble, ils ont affirmé une volonté commune: agir encore plus étroitement, militairement et diplomatiquement ; mais aussi avec les États membres de l'Union européenne, car le combat contre le terrorisme, «c'est le combat de l’Europe entière, de tous les pays de l’Union, car les terroristes se jouent des frontières ». Pour la première fois, la France a invoqué au lendemain des attentats l’article 42-7 du Traité de l’Union européenne, faisant appel à la solidarité de nos partenaires pour qu’ils contribuent directement aux opérations militaires, qu’ils apportent leurs concours logistiques. « Tous nos partenaires ont entendu cet appel ». Pour mobiliser l’Union européenne, le président de la République rencontre ses principaux dirigeants: lundi 23 novembre, le Premier ministre britannique, David Cameron, qui va demander à son Parlement l’engagement de la Grande-Bretagne en Syrie; mercredi 25 novembre, la chancelière allemande Angela Merkel ; jeudi 26 novembre, le Premier ministre italien, Matteo Renzi, qui sera à Paris.
« Laisser Daech proliférer, c’est faire planer une menace de déstabilisation de tout le Moyen-Orient » , c'est pourquoi ce front doit être mondial. François Hollande rencontre également, jeudi 26 novembre, le président russe Vladimir Poutine. Si la France agit déjà en coordination avec les Russes, qui interviennent directement en Syrie depuis seulement six semaines, « il ne doit y avoir aucune équivoque possible quant aux objectifs poursuivis, qui doivent uniquement viser à la destruction de Daech ». « Ce front mondial contre Daech ne peut pas intégrer le régime syrien ! Car enfin! Si Daech a pu autant prospérer, c’est parce que le régime de Bachar Al-Assad lui a laissé les coudées franches ».
Ce front mondial doit, enfin, apporter tout son soutien à ceux qui se battent contre les troupes de l’État islamique, c’est-à-dire notamment les Kurdes et les groupes de l’opposition syrienne modérée. L'action aérienne de la France doit appuyer les opérations terrestres. Celles-ci ne peuvent être conduites que par les forces insurgées locales, y compris kurdes, renforcées, le cas échéant, par des armées sunnites de la région.
Un engagement diplomatique
« L’action militaire ne sera pas suffisante pour stabiliser la Syrie, prévenir l’effet de contagion sur les pays voisins, et endiguer le flux des réfugiés se dirigeant vers l’Europe » , a souligné Manuel Valls. Une transition politique est nécessaire en Syrie, qui poserait les bases d’une réconciliation nationale. C'est le sens des efforts diplomatiques et des initiatives portées par le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius.
C'est également le sens des rencontres de Vienne, auxquelles la France contribue activement en parlant à tous les acteurs de la région : la Turquie, la Jordanie, le Liban, mais aussi l’Egypte, l’Arabie Saoudite, les pays du Golfe. « Il faut maintenant accélérer ces négociations. Car nous sommes encore loin du compte, même s’il y a un certain nombre d’acquis ».
Le message de la France est clair : « notre ennemi, c'est Daech ». Mais le régime de Bachar Al-Assad ne peut représenter l'avenir : « Non! Le régime syrien ne peut en aucun cas être un partenaire » , a réaffirmé le Premier ministre. « Non, la coopération anti-terroriste ne peut être ni envisageable, ni utile, avec ce régime qui lui-même recourt à la terreur. Ce n’est pas envisageable aujourd’hui. Comme cela ne l’était pas en mars 2012 quand la France a pris la juste décision de rompre les relations avec la Syrie, au lendemain des massacres de Deraa et d’Homs ».