Madame la directrice générale, chère Audrey Azoulay,
Mesdames et messieurs les chefs d'État,
Mesdames et messieurs les chefs de Gouvernement,
À l'occasion de votre 41ème conférence générale, le monde entier est une nouvelle fois réuni par ses représentants pour évoquer les grands défis de l'Unesco, qui sont aussi, par définition, ceux de l'humanité. Je veux d'abord féliciter votre directrice générale pour sa récente réélection particulièrement brillante. Madame, vous avez toute la confiance de la France pour la poursuite de votre haute mission.
Voilà 75 ans que l'Unesco est au service de l'idéal de l'humanisme mondial. En 1942, alors que le bruit et la fureur s'abattent sur le monde, certains mesurent que face à l'horreur des camps d'extermination, c'est le concept même d'humanité qui se joue dans ce conflit mondial. C'est là que des hommes comme Paul VALÉRY, Henri BONNET ou René CASSIN défendent pour la première fois la nécessité d'une conférence en faveur du développement de la culture et de l'éducation. Ils affirment que c'est d'abord dans l'esprit des hommes qu'il faut construire la paix.
C'est donc ici, à Paris, que naît l'Unesco. Elle mènera désormais la seule guerre juste, la seule qui vaille d'être menée, celle contre l'ignorance. C'est la première fois que l'humanité à l'unisson se donne pour but de faire partout progresser les valeurs universelles héritées des lumières. Aujourd'hui, voilà donc 75 ans que l'Unesco porte cette ambition dans l'ensemble de ses domaines de compétences.
Le premier, ce fut d'abord celui de préserver un patrimoine universel commun, protéger l'art mondial, c'est défendre l'indivisible héritage dont a parlé André MALRAUX. C'est une idée immense après les censures, les stigmatisations et les autodafés que de considérer comme universel ce que chaque civilisation, chaque culture a produit de plus beau. C'est dans cet esprit que dès 1972, l'Unesco conçoit la convention du patrimoine mondial qui protège les trésors de l'humanité, dont 49 font l'orgueil de la France.
L'Unesco est donc partout mobilisée, non seulement pour défendre l'héritage commun, mais pour promouvoir et développer la culture vivante. Ces derniers mois, la pandémie, en privant des millions de personnes de l'accès aux œuvres de l'esprit, a rappelé que sans elle, il n'y a pas de lien social. Par ailleurs, face à l'uniformisation culturelle qui lamine les identités particulières et le génie des peuples, je veux rappeler le soutien de la France en faveur de la diversité des expressions culturelles, qui s'est notamment traduite par la convention de 2005.
Il va sans dire qu'on ne peut pas garantir un accès universel à la culture sans assurer au préalable l'accès à l'éducation. C'est le rôle central que s'est fixé l'Unesco en menant partout une politique d'alphabétisation efficace, et notamment dans les pays en crise. La réunion mondiale sur l'éducation, qui s'est tenue avant hier, a de nouveau mis en avant la nécessité impérieuse de financer à un juste niveau l'éducation dans l'ensemble des pays du monde, ainsi que l'a souligné le président de la République française.
Dans un monde qui se transforme en permanence, votre institution a montré qu'elle savait se renouveler et répondre aux nouveaux défis. Dans l'ensemble de ses autres domaines de compétences, le bilan de l'Unesco est considérable. Il m'est impossible d'entrer dans le détail de ce travail immense, mais je veux citer l'importance des travaux de la Commission océanographique, du travail engagé sur la bioéthique ou encore du Programme international pour le développement de la communication, qui défend le pluralisme et la liberté des médias.
Véritable conscience des Nations unies, l'Unesco a toujours fait preuve d'une grande lucidité sur l'état du monde et sur ses capacités d'intervention. Aujourd'hui, maillon indispensable du système multilatéral, elle doit plus que jamais se dresser devant la montée des impérialismes et des intolérances qui menacent la notion même de communauté internationale.
En ce sens, au cours des quatre dernières années, l'Unesco a su faire preuve d'une agilité et d'une réactivité en tous points remarquables. J'ai pu ainsi apprécier le travail de votre organisation à Mossoul, largement détruite par de longs mois de guerre, et que l'initiative lancée par l'Unesco permet aujourd'hui de faire renaître. Je salue aussi le travail de votre organisation au Liban avec l'initiative Li Beirut.
Non contente de répondre aux situations de crise, l'Unesco s'est également projetée vers l'avenir. À cet égard, il faut saluer les deux chantiers clés que vous avez décidé d'ouvrir.
Le premier, c'est la réflexion engagée sur l'éthique de l'intelligence artificielle car pour avoir du sens, le progrès technologique doit servir l'épanouissement des populations.
Le second en faveur de l'Afrique, où l'Unesco encourage une culture de la paix et du développement durable, ainsi que l'éducation des filles, qui sont autant de conditions nécessaires au maintien et au renforcement de l'égalité entre les femmes et les hommes.
À cet égard, la prise du pouvoir par les talibans en Afghanistan, nous rappelle l'urgence de ces problématiques qui ne sont évidemment pas seulement africaines. Là-bas aussi, l'éducation des filles, la liberté de création artistique et la liberté des journalistes sont directement menacées. Partout où l'Unesco tentera de dresser la raison contre le fanatisme, l'obscurantisme et la violence faite aux femmes, il trouvera la France à ses côtés.