Discours de M. Jean Castex, Premier ministre, à l’issue du Conseil des ministres

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Jean Castex.

Publié le 28/04/2021

Mesdames et messieurs,
Heureux de vous retrouver un mercredi.
Le Conseil des ministres vient d'adopter deux projets de loi importants qui vont renforcer nos capacités d'action dans la lutte contre deux menaces majeures, même si elles sont différentes : la menace sanitaire et la menace terroriste.
Le premier de ces textes porte sur la gestion de la sortie de la crise sanitaire.
Notre situation épidémique continue de s'améliorer à un rythme régulier. Le nombre de cas quotidiens est passé en moyenne hebdomadaire de 38 000 cas au plus haut de cette troisième vague, à 26 200 très précisément sur les 7 derniers jours. Le fameux R0, bien connu de tous nos concitoyens, était hier à 0,89. Cela veut dire deux choses : le niveau de circulation reste élevé, mais nous sommes sur une vraie tendance à la baisse, même si cette baisse, je le rappelle, est plus lente qu’en novembre dernier, et que son impact sur les hospitalisations ne se traduit encore que très timidement dans l’évolution du nombre de malades en réanimation.
Comme l’indique le titre même du projet de loi que nous déposerons demain sur le bureau des assemblées, il s’agit maintenant de nous projeter sur les modalités d’une sortie de crise, mais une sortie progressive à mesure notamment que la campagne de vaccination se déploie. Cette campagne avance à un très bon rythme avec 469 000 personnes vaccinées sur la seule journée d'hier. Et l'objectif d'atteindre les 15 millions de personnes primo-vaccinées d'ici la fin de cette semaine et les 20 millions à la mi-mai, cette perspective est tout à fait à notre portée. Ce soir, 60 % de nos concitoyens ayant plus de 60 ans auront été vaccinés en première injection.
Une stratégie donc de sortie progressive et phasée, dont les éléments seront présentés par le Président de la République très prochainement, ce vendredi plus précisément.
Cette perspective d'un retour progressif à une vie plus normale doit ainsi nous amener à revoir nos outils juridiques et à les adapter à une situation qui, à compter du mois de juin prochain, ne sera plus celle de l'état d'urgence sanitaire, mais devra nous permettre de répondre à ce que j'appellerais un devoir de vigilance sanitaire, nous donnant également la capacité d'une réaction rapide en cas de nouvelle accélération de l'épidémie, soit à l'échelle du pays, soit à celle d'un territoire particulier.
C'est pourquoi le projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise proposera au Parlement d'instituer un régime transitoire dit de sortie de crise sanitaire courant du 2 juin au 31 octobre prochain. Notre intention, avec la mise en place de ce régime transitoire, est de nous permettre d'accompagner le processus de réouverture par des mesures adaptées à l'évolution de la situation dont nous pensons qu'elle va continuer à s'améliorer progressivement, mais également de disposer des outils nécessaires dans l'hypothèse où l'épidémie connaîtrait des situations de rebond. Ces mesures ciblées porteront par exemple sur les conditions d'ouverture de certains établissements recevant du public ou d'éventuelles limites en matière de déplacements ou de rassemblement sur la voie publique. Le texte nous permettra également de renforcer notre protection face à l'émergence de nouveaux variants.
La première avancée portera sur le renforcement des contrôles aux frontières avec la possibilité d'exiger pour l'entrée sur notre territoire, soit un test négatif comme c'est déjà le cas aujourd'hui, mais également une preuve de vaccination. La seconde avancée renforcera nos moyens de s'assurer du sérieux des conditions d'isolement des personnes soumises à une mesure de quarantaine grâce à la possibilité qui sera donnée aux préfets de refuser un lieu envisagé par l'arrivant sur notre territoire si le lieu ne lui semble ni adapté ni contrôlable.
Conformément à ce que j'avais annoncé devant le Parlement le 1er avril dernier, ce projet de loi comporte aussi plusieurs dispositions préparées par Monsieur le ministre de l'Intérieur visant à faciliter et à sécuriser l'organisation des élections régionales et départementales des 20 et 27 juin prochains. Saisi par le Gouvernement sur ses orientations, je précise que le Conseil scientifique a émis un avis favorable à l'institution de ce régime transitoire. L’examen de ce texte pourra donc débuter dès la semaine prochaine au parlement.
Je souhaite maintenant évoquer le second projet de loi qui a été soumis au Conseil des ministres et qui porte sur la prévention d’actes de terrorisme et sur le renseignement.
Il y a quelques jours, Stéphanie MONFERMÉ, agent du ministère de l’Intérieur en service, était lâchement assassinée dans son commissariat de Rambouillet par un terroriste islamiste. Une nouvelle fois, je veux dire avec gravité et émotion que la République est aux côtés de sa famille, de ses proches et de tous ses collègues qui travaillent tous les jours pour assurer notre sécurité. D’autant qu’à travers Stéphanie MONFERMÉ qu’à travers Samuel PATY, tous deux fonctionnaires de l’Etat, c’est la République qui a été visée. Le Président de la République assistera à ses obsèques et je participerai vendredi avec plusieurs membres du Gouvernement à la cérémonie d’hommage national qui se tiendra à Rambouillet.
Aujourd’hui, plus que jamais, notre message est clair : la République entend continuer à se donner tous les moyens pour lutter pied à pied contre le terrorisme islamique. Depuis le début du quinquennat sous l’impulsion du chef de l’Etat, beaucoup a été fait pour donner au service de renseignement, au service de sécurité intérieure et bien sûr à l’autorité judiciaire, plus de moyens juridiques, humains et techniques pour agir. Dès octobre 2017, la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite loi SILT, a été, je vous le rappelle, l'une des premières votées du quinquennat. Les moyens de nos services de renseignement ont été renforcés comme jamais auparavant. Au total, 1 900 postes auront été créés durant ce quinquennat, 1 260 à la Direction générale de la Sécurité intérieure, dont le budget aura été doublé par rapport à 2015. Nous avons créé le parquet national antiterroriste en 2019 pour renforcer la force de frappe judiciaire antiterroriste. Depuis 2017, 36 attentats ont été déjoués encore récemment à Béziers. Nous prenons par ailleurs le mal à la racine en nous attaquant au terreau sur lequel l'islamisme radical cherche à prospérer. Ainsi, dans la période récente, je vous rappelle que nous avons dissous des associations promouvant cette idéologie, fermé des lieux de culte prêchant la haine ou encore des écoles clandestines. C'est d'autant plus nécessaire que la menace islamiste demeure très élevée et qu'elle évolue dans ses relais et ses manifestations. L'attaque de Rambouillet la semaine dernière, l'assassinat du professeur PATY ou encore l'odieux attentat de Nice en novembre ont été, sans préjudice, bien sûr, des enquêtes judiciaires en cours, le fait d'individus isolés de plus en plus jeunes, le plus souvent inconnu des services de renseignement, qui ont basculé dans une radicalisation folle sans forcément avoir de liens avec des réseaux terroristes constitués.
Face à cette menace plus difficile à repérer, l'État et la justice doivent se doter de moyens renforcés pour détecter, suivre et agir y compris par une veille accrue sur les réseaux sociaux. Nous avons renforcé en décembre dernier la plateforme Pharos chargée notamment de recueillir les signalements sur les contenus terroristes et le projet de loi confortant les principes de la République, en cours d'examen par le Parlement, nous donnera de nouveaux leviers pour agir contre les sites qui véhiculent les appels à la haine et à la violence. Le projet de loi que nous présentons aujourd’hui s’inscrit dans cette même logique et dans cette même cohérence. Ce n’est pas un texte de circonstance, c’est le fruit d’un travail commencé évidemment bien avant le crime de vendredi dernier.
Cela fait plusieurs mois que, sous mon autorité, le Gouvernement y travaille et notamment le ministre de l’Intérieur dont je veux ici saluer l’engagement et la contribution en lien avec plusieurs autres ministres dont monsieur le garde des Sceaux. Ce texte poursuit une double finalité : s’adapter aux nouvelles menaces moins faciles à détecter et prendre appui sur les nouveaux outils liés aux nouvelles technologies. Ce texte concilie une double exigence : celle de donner à nos services, je l'ai dit, plus de moyens pour être plus efficaces, mais aussi celle de respecter totalement nos principes juridiques fondamentaux par un encadrement strict des finalités et des procédures qui régissent les moyens mobilisés pour agir.
Le ministre de l'Intérieur et le garde des Sceaux vont vous présenter maintenant les principales dispositions de ce projet de loi qui illustre, mesdames et messieurs, notre mobilisation permanente en même temps que notre capacité d'adaptation dans la lutte sans merci que nous menons contre le terrorisme islamiste. Monsieur le ministre de l'Intérieur.

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