Près de trois semaines après l’entrée en vigueur des mesures de lutte contre l’épidémie, annoncées le 31 mars dernier par le Président de la République, je viens ce soir, avec plusieurs membres du Gouvernement, vous dire où nous en sommes et vous présenter les perspectives qui se dessinent pour les prochaines semaines.
La situation sanitaire s’améliore dans notre pays. Nous constatons depuis dix jours une baisse réelle de la circulation virale : le nombre quotidien de nouveaux malades a baissé de 17 % en une semaine et s’établit aujourd’hui à un peu plus de 30 000 par jour.
Cette décrue concerne près de 80 % des départements. Elle est plus marquée dans les territoires – Ile-de-France, Hauts-de-France, Alpes-Maritimes – où l’épidémie était repartie à la hausse plus vite et dans lesquels nous avions pris des mesures anticipées, dès le 20 mars dernier. Le pic de la troisième vague semble donc derrière nous et la baisse de la pression épidémique est engagée.
Pour autant, nous devons rester très vigilants. Nous avons la confirmation que nous faisons face à une souche – le variant dit britannique – qui est plus contagieuse, et donc plus difficile à combattre, ce qui explique que la baisse que nous enregistrons est moins rapide – deux fois moins rapide - que lors du confinement de novembre. Le niveau de circulation virale se réduit mais il reste élevé dans une très large partie du pays : 15 départements ont un taux d’incidence encore supérieur à 400 pour 100 000 habitants et 30 autres départements se situent entre 300 et 400.
Nous devons donc rester lucides sur la situation et pleinement mobilisés pour poursuivre nos efforts.
On voit bien du reste que l’épidémie reste active partout, chez plusieurs de nos voisins européens en particulier. Je pense notamment aux Pays-Bas ou à l’Allemagne où l’épidémie progresse à nouveau légèrement depuis deux semaines, et ce en dépit de mesures de freinage strictes qui s’appliquent depuis plus de quatre mois déjà.
Dans nos établissements de santé, la pression reste très forte, puisque nous comptons actuellement près de 7 600 personnes hospitalisées en soins critiques dont 6 000 – c’est-à-dire près de 80 % - sont touchées par la Covid. Nous faisons face à cette situation exceptionnelle en ayant réussi à doubler le nombre de lits par rapport à nos capacités normales.
Cela représente une charge très lourde et durable pour l’ensemble des personnels soignants et impose – je tiens à le souligner – des efforts exceptionnels avec la mobilisation de nombreux renforts, des déprogrammations, des transferts de malades entre régions, et des équipes soignantes dont nous devons mesurer le niveau de tension, de fatigue, d’inquiétude, mais aussi de dévouement et d’engagement exceptionnel auprès des malades. Je me rends régulièrement auprès d’eux avec le ministre des Solidarités de la Santé et je veux leur dire, une fois encore, notre reconnaissance et celle de toute la Nation.
Les derniers chiffres semblent toutefois indiquer, là aussi, des signes positifs. À l’échelle nationale, le nombre de patients admis en réanimation a atteint un plateau depuis quelques jours. Les dernières simulations réalisées par l’institut Pasteur laissent penser que nous avons atteint le haut de la vague des hospitalisations, et pouvons espérer le début d’un reflux d’ici quelques jours.
Mais vous le savez, nous devons rester d’autant plus vigilants que l’épidémie reprend fortement dans certaines parties du monde et il est de notre devoir de nous en prémunir en maintenant un haut niveau de contrôle sur les déplacements, notamment vers ou en provenance de pays confrontés à une situation sanitaire à haut risque.
Depuis un an maintenant, je vous rappelle qu’on ne peut rentrer en France en provenance d’un pays extérieur à l’espace européen que dans des conditions très strictes : seuls peuvent venir les ressortissants français et européens, les personnes résidant sur notre sol, ainsi que certaines catégories limitées de personnes justifiant d’un motif impérieux. Tous doivent justifier depuis la fin janvier de la réalisation d’un test PCR négatif et observer une période d’auto-isolement de 7 jours.
L’apparition de nouveaux variants plus résistants aux vaccins, notamment au Brésil et récemment en Inde, justifie de durcir encore nos conditions, pour les arrivées en provenance des pays les plus à risque. À ce jour, ces variants circulent peu sur notre territoire puisqu’ils ne représentent que 4 % des cas positifs. Cette proportion a d’ailleurs tendance à se réduire depuis quelques semaines et il faut tout faire pour cela ne s’inverse pas.
À partir de samedi, un système de contrôle renforcé sera donc mis en place pour les personnes arrivant du Brésil, d’Argentine, du Chili, d’Afrique-du-Sud et d’Inde : la liste des motifs autorisant une arrivée en France sera encore restreinte ; la réalisation d’un test sera systématisée non seulement au départ mais aussi à l’arrivée et, surtout, chaque personne fera ensuite l’objet d’une quarantaine stricte décidée par arrêté préfectoral et assortie de contrôles par les forces de l’ordre. Le ministre de l’Intérieur vous précisera les modalités de ces contrôles renforcés aux frontières.
Nous accentuons également les mesures de protection de nos territoires d’Outre-mer qui font face à des vagues successives sans lien avec ce qui se passe en métropole. C’est le cas aujourd’hui en Guyane, en Martinique et en Guadeloupe où nous venons de renforcer nos mesures et allons intensifier le programme de vaccination, comme à Mayotte et à la Réunion qui sont exposés au variant sud-africain.
Mesdames et Messieurs, l’amélioration relative mais réelle de la situation sanitaire et les mesures renforcées de protection aux frontières nous permettent aujourd’hui de confirmer la reprise des enseignements scolaires la semaine prochaine, comme l’avait annoncé le Président de la République.
Dès ce lundi 26 avril, tous les élèves des écoles maternelles et élémentaires ainsi que leurs enseignants regagneront leurs classes, fidèles à notre objectif depuis la fin du premier confinement d’assurer aux élèves la continuité de ce lien physique le plus qu’il soit possible. J’entends parfaitement les arguments suivant lesquels l’amélioration de la situation sanitaire ne serait pas encore suffisante pour permettre la réouverture des écoles. Mais nous avons la conviction que les dégâts causés par la fermeture prolongée des écoles sont tout simplement catastrophiques et peuvent entrainer des dommages de long terme, en termes éducatifs, mais aussi psychologiques, qui doivent nous préoccuper autant que ceux directement liés à la pandémie. Donc oui, nous assumons, une fois encore, ce choix. Mais nous devons en tirer aussi toutes les conséquences en l’accompagnant de conditions strictes permettant la reprise des cours, lundi prochain, dans un cadre sanitaire le plus protecteur possible. Le ministre de l’Éducation nationale les détaillera dans un instant. Ce cadre prévoit à la fois un protocole très strict et un renforcement massif des capacités de tests à tous les niveaux – élémentaire, collège et lycée – aussi bien pour les élèves que pour tous les personnels de l’Éducation nationale.
Ce seront, dès la semaine prochaine, plus de tests salivaires pour les écoles élémentaires : nous en réalisions 250 000 par semaine fin mars ; nous en proposerons 400 000 par semaine à la reprise, avec la perspective d’atteindre 600 000 tests d’ici la mi-mai. Nous concentrerons ce dispositif de dépistage dans les départements où l’incidence est la plus élevée.
En complément des tests salivaires, la grande nouveauté de la reprise sera le déploiement des autotests. Il s’agit d’un prélèvement nasal mais beaucoup plus simple et léger que pour les test PCR et dont le résultat est connu en 15 minutes. Nous avons passé des premières commandes massives – 64 millions d’autotests – qui arriveront à partir de la semaine prochaine et seront proposés à tous les personnels de l’Éducation nationale dès la semaine prochaine, puis à tous les lycéens, à partir de la semaine du 10 mai. Pourquoi seulement aux lycéens ? Cette limite tient au fait qu’à ce jour, ces autotests sont réservés aux plus de 15 ans. La Haute Autorité de santé se prononcera en début de semaine prochaine sur la possibilité de les proposer à des élèves plus jeunes. En fonction de sa décision, nous nous tiendrons prêts à les déployer plus largement dans des conditions forcément supervisées que nous devrons adapter en fonction des âges des élèves.
Je vous rappelle aussi que, depuis le week-end dernier, la vaccination des personnels enseignants et de la communauté éducative, âgés de plus de 55 ans, a été facilitée avec un système d’accès prioritaire et de places réservées dans nos centres de vaccination. Ce dispositif est ouvert à d’autres professions dites prioritaires, qu’il s’agisse des policiers et gendarmes, des personnels de la petite enfance ou encore de nombreuses professions exposées, comme les conducteurs de bus, les agents de la propreté, ou encore les salariés des grandes surfaces commerciales. La liste de ces professions a été établie à l’issue d’une concertation avec les partenaires sociaux. Le ministre des Solidarités et de la Santé y reviendra dans un instant.
Si nous pouvons procéder à cet élargissement, c’est que notre campagne de vaccination progresse et qu’elle progresse bien. D’ici la fin de la semaine, 14 millions de personnes auront reçu une première dose de vaccin, ce qui représente un quart de la population adulte. Nous affichons aujourd’hui un rythme de vaccination parmi les plus rapides d’Europe qui nous permet de vacciner environ 2,5 millions de personnes par semaine.
C’est le résultat d’une organisation et d’une logistique exemplaires, il est aujourd’hui possible de vous faire vacciner par votre médecin, votre pharmacien, votre infirmière, ou dans l’un de nos 1 700 centres de vaccination, à l’hôpital, et même parfois dans des bus. Partout en France, je visite des centres de vaccination et je vous dire ma fierté de voir toutes ces femmes et ces hommes, souvent bénévoles, qui s’engagent au service des autres, week-end compris, pour aider notre pays à sortir de la crise. Et je suis chaque fois impressionné par la qualité de l’accueil et de l’organisation, l’aptitude à trouver des solutions adaptées, la capacité à faire agir ensemble des professionnels de tous horizons, à proposer cet acte médical dans un cadre parfaitement sécurisé. Je veux à toutes et tous leur exprimer ma gratitude, dans une collaboration exemplaire pilotée par les élus de la République, les préfets, les ARS et les services de l’Assurance maladie.
Déjà, la grande majorité des personnes les plus vulnérables a aujourd’hui été vaccinée. La quasi-totalité des résidents d’EHPAD ; 70 % de nos concitoyens âgés de plus de 75 ans ; et 70 % des professionnels de santé ont aujourd’hui reçu une première dose. Cette stratégie progressive, vise à protéger les plus fragiles et les plus à même de développer des formes graves de la maladie. Notre objectif final reste le même : avoir pu proposer la vaccination à tous d’ici la fin de l’été.
Grâce à cette mobilisation exceptionnelle, nous sommes sur le bon chemin pour atteindre notre objectif de 20 millions de personnes ayant reçu une première injection à la mi-mai et 30 millions à la mi-juin.
Cela suppose d’abord, évidemment, de recevoir toutes les doses que nous avons commandées. Il a pu arriver que nous subissions des retards au cours des derniers mois. C’est plutôt l’inverse depuis quelques semaines puisque les dernières négociations conduites par la Commission européenne nous feront bénéficier de plus de 7 millions de doses supplémentaires que Pfizer nous livrera entre début mai et fin juin.
Cela suppose aussi, au-delà du sujet des livraisons, que nous utilisions tous les vaccins dont nous disposons. Beaucoup de vaccins ont été développées et sont utilisés dans les différents pays du monde. Seul un petit nombre ont été autorisés en France et en Europe, sur la base d’une évaluation et d’un suivi rigoureux qui nous permettent d’en garantir l’efficacité et la sécurité. C’est le cas du vaccin AstraZeneca, dont l’agence européenne du médicament et la Haute Autorité de santé française ont encore réaffirmé récemment qu’il est aussi efficace contre les formes sévères que le Pfizer ou le Moderna.
Certaines formes rarissimes d’effets indésirables ont été constatées. Les autorités médicales en ont tiré les conséquences, recommandant de ne l’utiliser qu’au-delà de 55 ans, ce que nous appliquons évidemment. Je vous rappelle que nous comptons encore 11 millions de personnes de plus de 55 ans qui n’ont pas encore été vaccinées. J’ai 55 ans et je me suis vacciné avec l’AstraZeneca, comme 200 millions de personnes dans le monde. J’invite chacune et chacun de ceux qui le peuvent à en faire de même. Car de notre capacité à étendre rapidement notre couverture vaccinale dépendra évidemment aussi notre capacité à avancer dans la voie d’un retour progressif à une vie normale. Nous y aspirons tous ! Nous l’attendons tous ! Et je pense évidemment, au premier chef, à toutes les femmes et les hommes qui sont aujourd’hui empêchés de travailler, certains depuis maintenant près de 6 mois.
Cette réouverture, comme le Président de la République l’a indiqué le 31 mars dernier, nous voulons qu’elle puisse commencer autour de la mi-mai. Mais compte tenu du contexte sanitaire encore fragile que nous connaissons, nous devrons l’organiser de telle sorte qu’elle se fasse par étape, de manière forcément prudente et progressive.
Si nous voulons pouvoir permettre la réouverture du plus grand nombre possible de lieux et d’activités, cela ne pourra pas être le cas pour tout – notamment pour ce qui entraine des concentrations importantes de public, sans possibilité de respecter les gestes barrière. Et ce qui pourra rouvrir dès la 1ère étape ne pourra le faire que dans des conditions strictes qui s’assoupliront avec le temps, d’ici le début de l’été, en fonction de l’évolution de la situation sanitaire, le cas échéant sur une base territorialisée.
Nous y avons travaillé avec l’ensemble des secteurs professionnels concernés. Et ce travail de concertation va se poursuivre dans les prochains jours. Après les crèches, les écoles maternelles et élémentaires qui rouvriront la semaine prochaine, les collèges et les lycées reprendront en distanciel puis, normalement, à partir du 3 mai, en présentiel dans des conditions de jauge que Jean-Michel BLANQUER précisera. À partir du 3 mai également, nous pourrons lever les contraintes de déplacement en journée et envisager, sous réserve de l’évolution de la situation sanitaire, un nouveau train de réouverture autour de la mi-mai qui pourrait commencer par les commerces, certaines activités culturelles et sportives et les terrasses. Cette liste n’est pas définitivement fixée. Elle sera assortie de conditions particulières, le cas échéant territorialisées, qui évolueront au fil des étapes. Nous aurons l’occasion de donner les orientations et précisions nécessaires dans les prochains jours.
Mes chers concitoyens, les efforts que nous avons consentis vont produire leurs effets. À une condition cependant, dont tout le reste dépend : rester vigilants et mobilisés. Tenir autant que nécessaire. Ne rien lâcher trop tôt au risque de tout compromettre. Adopter une stratégie prudente et progressive. Prendre toutes les dispositions face au risque de résurgence et de mutation du virus. Protéger les plus vulnérables et les plus jeunes. Continuer à donner la priorité à l’école et à l’éducation, à soutenir et à accompagner notre économie, les secteurs les plus impactés et l’ensemble des Français autant de temps qu’il le faudra, anticiper les étapes à venir dans un cadre concerté.
Cette crise sanitaire et toutes ses conséquences nous mettent à rude épreuve et je salue votre courage, votre résistance et l’indispensable respect par l’immense majorité d’entre vous des restrictions diverses que la situation nous impose de prendre. Je pense à toutes celles et ceux qui sont morts de la Covid, à leurs proches et à nos concitoyens qui en portent des séquelles durables. Mais je sais aussi que nous avons de vrais motifs d’espoir : nous progressons, grâce à la solidarité collective et au déploiement massif de la vaccination.
Des perspectives nouvelles s’offrent à nous et nous sommes déterminés à franchir chacune des étapes qui nous conduiront, j’en suis sûr, à un été le plus normal possible. Cela dépend de nous tous.