Hier beaucoup de nos compatriotes ont fait grève ou ont manifesté dans les rues de Paris ou d’autres grandes villes de France pour dire leur inquiétude ou leur opposition à la mise en place d’un système universel de retraite. Aujourd’hui encore, la grève est importante. Elle est moins puissante à l’Education nationale, mais elle reste forte dans les entreprises de transport public au premier rang desquelles la SNCF et la RATP.
Comme tous les Français, je sais que lorsque des grèves importantes se déroulent dans ces entreprises de transport public, la vie de nos concitoyens s’en trouve affectée. Il est plus difficile de se rendre au travail, plus délicat d’aller chercher ses enfants à l’école, parfois compliqué de pouvoir rendre visite à ses proches.
J’entends bien entendu tous ceux qui exercent leur droit parfaitement légitime de faire grève et de manifester. Mais j’entends aussi ceux qui souffrent d’une certaine façon et qui subissent les désagréments liés à l’exercice de ce droit. Je veux leur dire que le Gouvernement, conscient des difficultés qu’ils rencontrent, continuera de mettre à leur disposition le maximum de moyens destinés à limiter l’impact de ces grèves. Je pense à l’incitation au covoiturage. Je pense évidemment au télétravail. Je pense à la mise en place de lignes de bus à l’intérieur des villes ou, le cas échéant, entre les villes. Je pense enfin à la meilleure information possible, avec notamment le site info.gouv.fr.
Ma logique n’est pas et ne sera jamais celle de la confrontation. J’ai vu depuis le début de ce débat, depuis que nous avons commencé à travailler sur la question de la mise en place d’un système universel de retraites, certains désigner des catégories de Français en les accusant de tous les maux. J’en ai vu d’autres diffuser des chiffres qui ne correspondent pas à la réalité et qu’ils savent faux, des fake news comme on dit parfois en mauvais français et en bon anglais. Des simulateurs qui ne correspondent à rien, sinon à l’envie de ne pas informer correctement nos concitoyens. Je le déplore, car je pense que la mise en place d’un système universel de retraite permettant de garantir à tous nos concitoyens leur retraite et celle de leurs enfants et de mettre en place un système plus juste et plus solide, mérite un débat de fond, un débat éclairé. Un débat auquel je le sais, nos concitoyens sont prêts.
Car nos concitoyens savent que la très grande diversité des 42 régimes de retraite actuels ne peut pas perdurer. Ils savent qu’il faudra un jour renoncer à des régimes spéciaux qui ne sont plus compris. Ils savent même qu’au fur et à mesure, nous allons devoir travailler un peu plus longtemps. Je ne dis pas que c’est de gaieté de cœur, mais c’est ce qui se passe dans tous les autres pays comparables à la France. Et c’est ce qui se passe déjà en France d’une certaine façon, puisque s’agissant du régime général par exemple, nos concitoyens partent en moyenne après - et largement après - l’âge légal de départ à la retraite.
La question qui se pose vis-à-vis de ces adaptations, de ces transformations, est la suivante : voulons-nous les faire brutalement dans l’urgence ou préférons-nous les mettre en place raisonnablement, progressivement, sans brutalité, alors que nous avons le temps. C’est évidemment ce second choix qu’a fait le Gouvernement et la majorité.
Je voudrais dans cette période de grève et d’inquiétude adresser quelques messages simples. A tous les Français d’abord, je veux dire que si nous cherchons à mettre en place ce système universel de retraites, c’est parce que nous avons la conviction qu’il permettra à chaque Français de cotiser de la même façon et de bénéficier des mêmes droits. Le système que nous voulons installer est un système juste qui remplace la solidarité au sein de chaque métier par une solidarité véritablement nationale où tous les Français sont solidaires de tous les Français quel que soit leur statut, leur métier, le régime de retraite auquel ils étaient affiliés.
Aux salariés des entreprises publiques de transport qui se sont fortement mobilisés hier et qui restent mobilisés aujourd’hui, je le dis tranquillement : la mise en place d’un système universel de retraites implique la disparition des régimes spéciaux. Je ne crois pas que les Français puissent durablement accepter des régimes qui conduisent aujourd’hui certains à partir alors qu’ils font le même métier avec un peu plus et beaucoup plus tôt que d’autres.
Mais si je dis cela, je dis également à tous les personnels de la RATP et de la SNCF, et à tous les Français, qu’il ne serait pas raisonnable, pas acceptable, pas juste de changer les règles en cours de partie et de placer des femmes et des hommes qui, de bonne foi, parce que c’est leur droit, ont fait des choix de vie, des choix d’investissement, des choix d’organisation familiale sur le fondement d’un régime auquel ils pouvaient légitimement aspirer.
C’est la raison pour laquelle j’ai indiqué – et je la répète aujourd’hui – ma disposition totale pour faire en sorte que les transitions soient progressives, afin de ne pas être brutales. Nous le devons à chacun. C’est une affaire de justice individuelle et de justice sociale. Je rencontrerai dans quelques minutes le président de la SNCF et la présidente de la RATP, et je suis persuadé qu’avec les organisations syndicales, nous trouverons le bon point d’équilibre qui permettra à la fois de rassurer les personnels sur leur avenir, sans renoncer à la volonté très ferme qui est la nôtre de projeter le pays dans le futur et de mettre en place ce système universel.
J’ai vu également la mobilisation importante des enseignants, et je comprends parfaitement les inquiétudes qu’ils formulent. Il est vrai que l’application absurde des nouvelles règles les pénaliserait. Et c’est d’ailleurs tellement vrai que nous avons dit dès le début, avec le Président de la République, que nous nous engagions à ce que les pensions des enseignants de France ne baissent pas. Je veux le dire de la façon la plus claire possible : le système universel n’est pas la baisse des pensions des enseignants. Au contraire, c’est la revalorisation progressive de leur traitement de façon à ce que leur pension, leur pouvoir d’achat au moment des retraites ne baisse pas.
Un dernier mot : je crois – et je l’ai toujours dit – au dialogue social. Il est arrivé dans les mois et peut-être dans les années qui ont précédé ce moment, que certains critiquent le Gouvernement pour la verticalité avec laquelle il aurait pris des décisions.
Nous avons, s’agissant de la mise en place du système universel de retraites, fait le choix du dialogue social. De janvier 2018 jusqu’à juillet 2019, dans la première phase. Puis de août 2019 jusqu’à la semaine prochaine, nous avons fait le choix avec le Haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul DELEVOYE, avec la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès BUZYN, de rencontrer, de discuter avec le plus grand nombre possible d’organisations syndicales et avec les Français. Je rappelle la consultation qui a été engagée par le Haut-commissaire et les réunions publiques tenues par le Président de la République, par moi-même, par le Haut-commissaire, afin d’échanger avec les Français sur ce système universel que nous voulons construire.
Le dialogue social, c'est respecter le calendrier, que nous nous sommes fixé. C’est écouter et essayer d’intégrer les propositions qui sont formulées. C’est la raison pour laquelle la ministre des Solidarités et de la Santé et le Haut-commissaire aux retraites rencontreront lundi l’ensemble des organisations syndicales et patronales pour clôturer le cycle de négociations sociales et de débat avec les Français qui a été ouvert sur le sujet des retraites. Ils établiront un bilan complet des attentes, des préoccupations, des points d’accord et des points de désaccord.
Je présenterai ensuite mercredi prochain à 12 heures au Conseil économique, social et environnemental, qui est la Chambre du dialogue social et des corps intermédiaires, l’intégralité du projet du Gouvernement. Le débat pourra ainsi s’organiser autour de propositions claires qui prendront en compte bien des propositions formulées par les organisations syndicales et qui garantiront aux Français la justice, la solidité et la solidarité de leur système de retraite.