Déclaration de politique générale d'Edouard Philippe, Premier ministre

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Édouard Philippe.

Publié le 12/06/2019

Assemblée nationale, mercredi 12 juin 2019
Seul le prononcé fait foi
Monsieur le président,
Mesdames et messieurs les députés,
Voilà deux ans maintenant que nous gouvernons et il y a toujours urgence. Peut-être davantage encore.
Urgence économique, comme le crient les salariés des usines de Belfort, d’Amiens et d’ailleurs.
Urgence sociale, comme le crient nos concitoyens des territoires isolés, comme le disent les personnels hospitaliers.
Urgence écologique, comme le crient les jeunes Français à l’encontre des gouvernements et des entreprises qui n’en font pas assez.
Urgence politique. Le 26 mai, l’extrême droite est arrivée en tête des suffrages en France. Comme dans beaucoup de démocraties occidentales, la radicalité politique, nourrie de l’obsession du déclin et de la peur de l’autre, structure désormais une part de notre vie démocratique.
Cette urgence, elle nous rassemble : c’est elle qui a conduit à l’élection du président de la République ; c’est elle qui a donné une majorité au Président lors des élections législatives ; c’est elle qui a guidé votre vote de confiance au Gouvernement il y a deux ans, pour conduire un intense agenda de transformations. Je ne reviendrai pas ici sur la longue liste des réformes que nous avons menées. Les Français n’attendent pas un bilan, encore moins un exercice d’autosatisfaction. Je veux simplement dire au Gouvernement et à la majorité que j’en suis fier, et que je les remercie du travail accompli :
- le chômage est au plus bas depuis 10 ans ;
- l’investissement au plus haut depuis 12 ans ;
- la progression du pouvoir d’achat la plus dynamique depuis 10 ans ;
- la France bat des records d’attractivité.

Cela nous donne des motifs d’espoir et une légitimité pour continuer le travail.
Nous n’avons eu de cesse, ces deux années durant, de tenir le cap fixé par le président de la République. Celui que nous jugions nécessaire pour libérer les forces de notre pays et protéger ses citoyens. Quitte à prendre des décisions impopulaires. Quitte à commettre des erreurs et j’en prends évidemment ma juste part. Quelles qu’ont été les difficultés, l’essentiel des mesures annoncées dans ma précédente déclaration de politique générale est aujourd’hui engagé. Cette fidélité à la parole donnée a forgé la légitimité de notre action.
En novembre dernier, nous avons rencontré la colère. Certains diront que nous l’avons seuls créée. Je ne le crois pas. Cette colère vient de loin et bien des démocraties l’ont ressentie dans des formes variées. Mais peu importe. C’est à nous, gouvernants, parlementaires, qu’elle était en premier adressée. D’une certaine façon, elle nous rappelait à notre promesse de promouvoir le travail et de lutter contre les injustices. Nous avons décidé des mesures puissantes pour répondre aux aspirations des Français. Et pour apaiser.
De cette période, qui m’aura marqué profondément, comme je crois chacun d’entre vous, puis du Grand Débat, qui a permis à des centaines de milliers de Français de se rendre dans leur mairie ou dans des salles publiques pour dialoguer, travailler et réfléchir, le Gouvernement et la majorité entendent tirer la force d’un nouvel élan.
C’est l’« Acte 2 » du quinquennat.
Une nouvelle étape qui marque une césure, à travers un profond changement de méthode, mais qui va de pair avec deux impératifs : la constance et la cohérence, qui sont bien les seules choses que notre pays n’ait jamais tentées.
Constance et cohérence dans l’action. Notre pays a besoin de se transformer. Notre ennemi, ce n’est pas le mouvement, c’est le statu quo.
Constance et cohérence dans nos valeurs ensuite. Nos valeurs, ce sont le patriotisme, l’attachement à la République, l’affirmation de l’idéal européen.
C’est la quête de justice sociale, pas celle qui se paye de mots, mais celle qui se vit au quotidien.
C’est la valeur travail. Cette idée simple que les solutions proviendront du travail et qu’il faut donc le récompenser.
C’est le dépassement des postures et des vieux clivages.
Plus que jamais, notre pays a besoin de l’union des Françaises et des Français qui veulent agir, loin, bien loin, des logiques partisanes.
L’engagement partisan est évidemment respectable. Le Général De Gaulle, qui n’aimait guère les partis politiques, avait tenu à ce que l’article 4 de la Constitution prévoie qu’ils concourent à l’expression du suffrage universel.
Les partis demeurent donc des acteurs centraux de la démocratie. Je ne crois pas pour ma part que les cultures de gauche et de droite aient disparu. Il y a dans notre pays, une culture de gauche. Une culture de droite. Une culture du centre. Le nier, ce serait oublier deux siècles d’histoire politique. Mais ces cultures suffisent-elles à structurer le débat ? Disent-elles quoi faire sur l’Europe, sur l’écologie, sur la politique méditerranéenne, sur la décentralisation ? Je ne crois pas, Mesdames et Messieurs les députés, que le vrai sujet soit aujourd’hui, de savoir comment ressusciter la gauche ou sauver la droite.
Le but est de savoir comment, avec nos héritages, nos sensibilités, nos différences, nous dépassons nos habitudes, pour nous rassembler, pour relever les défis de notre pays et de notre planète. Les maires savent combien la logique de rassemblement est puissante et je salue tous ceux, d’où qu’ils viennent, qui sont prêts à nous rejoindre dans le soutien au président de la République.
Car nous avons beaucoup fait depuis deux ans, mais il reste tant à faire !
Au cœur de l’acte II, il y a d’abord l’ambition écologique.
Plus personne n’a aujourd’hui, le monopole du vert, et c’est aussi cela, le dépassement des anciens clivages.
Je connais les soupçons me concernant. Je viens de la droite, j’ai travaillé dans une grande entreprise française du nucléaire, je suis élu d’une ville industrielle, je ne pourrais donc ni rien comprendre, ni rien faire. Je trouve que c’est faire peu de cas de ma culture politique, de mon expérience au Havre et de ces deux années de gouvernement. Mais oui, j’ai mis du temps, comme d’autres Français, à considérer que ces enjeux étaient aussi urgents que la défense de l’emploi ou la sécurité. Les jeunes nous bousculent, partout dans le monde et en Europe. Partout nous constatons les dérèglements climatiques, la pollution de l’air, des sols et des mers qui menacent notre santé et la biodiversité.
Je ne me ferai pas passer pour un autre. Je ne suis pas un défenseur de la décroissance. Je crois dans la science, je voudrais qu’elle ait plus de place dans le débat public, que nos décisions soient davantage éclairées par elle. Je sais ce que notre pays doit à son agriculture et la chance qu’il a de pouvoir compter sur des agriculteurs exigeants et passionnés. J’aime l’industrie : j’admire ses salariés, ouvriers, techniciens et ingénieurs. Je crois en l’économie de marché régulée par le politique, en l’innovation et en la force de la croissance.
Je crois possible un nouveau modèle économique qui produise des richesses, donc de l’emploi, sans salir, sans contaminer, sans détruire, sans condamner ceux qui viendront après nous ou ceux qui vivent loin de nous. Et je crois qu’à chaque fois que nous mettons une incitation financière publique en place, il faut s’interroger sur son efficacité réelle et songer à la façon dont les acteurs privés prendront un jour le relai. Il faut inventer un modèle économique où la sobriété énergétique, les transports propres, la saine alimentation, le recyclage progressent beaucoup plus vite que le taux de croissance. C’est ma conviction et je veux être jugé sur les actes.
Car ces douze prochains mois seront ceux de l’accélération écologique.
Le premier axe de notre plan de bataille, c’est de rendre plus propre notre économie, et tout d’abord notre manière de produire notre énergie et de nous déplacer.
C’est l’objet des deux projets de loi dont vous êtes saisis, la loi d’orientation des mobilités et la loi énergie-climat. Je souhaite qu’elles puissent être votées avant l’été.
C’est ce Gouvernement qui fermera la centrale de Fessenheim - avant la fin 2020 - et qui a proposé un chemin crédible pour réduire la part du nucléaire à 50 % d’ici 2035, avec le développement massif du renouvelable et notamment de l’éolien en mer. En arrivant aux responsabilités, nous avons concrétisé et considérablement baissé les coûts de six appels d’offre qui étaient bien mal partis. Aujourd’hui, le projet au large de Dunkerque démontre que les coûts baissent encore plus vite quand les projets sont bien montés. Nous pourrons ainsi augmenter le rythme des futurs appels d’offres à un gigawatt par an. C’est une bonne chose pour le prix de l’électricité, pour notre industrie et pour notre planète !
Nous finaliserons d’ici la fin de l’année les contrats de transition écologique à Gardanne, Saint Avold, Cordemais et au Havre, où les centrales à charbon fermeront d’ici à 2022.
Le succès de la prime à la conversion pour l’achat d’un véhicule moins polluant nous permet de doubler notre objectif : nous visons désormais 1 million de familles d’ici la fin du quinquennat.
Nous donnerons une nouvelle orientation à notre politique hydroélectrique. En la matière, on ne régule pas seulement une production électrique, mais des vallées et des régions entières. Nous respecterons le droit européen, mais nous n’accepterons pas le morcellement de ce patrimoine commun des Français.
Enfin, nous négocierons avec la commission européenne une nouvelle régulation du prix de l’électricité, pour que les Français bénéficient davantage de la stabilité et de la compétitivité que nous donnent nos investissements passés.
Nous voulons donner aux Français les moyens de se chauffer sans polluer ni payer toujours plus.
Nous remettrons totalement à plat les aides existantes à la rénovation énergétique. Parce que ces aides sont d’une effroyable complexité. Qu’elles profitent en réalité aux ménages les plus riches. Nous transformerons donc le crédit d’impôt de transition énergétique en une aide plus massive, versée en faveur de ceux qui en ont le plus besoin.
Reconnaissons-le, à part dans le logement social, nous ne disposons pas aujourd’hui des leviers efficaces pour venir à bout des passoires thermiques qui plombent le climat et le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Inventons-les ensemble ! Je sais que les députés feront des propositions, et j’y suis ouvert. Nous en discutions avec Pascal Canfin : il faut sur ce sujet réussir à mobiliser les financements publics et privés, raisonner au-delà des normes et des obligations, mêmes si elles sont nécessaires, réitérer le succès qu’un Jean-Louis Borloo a pu avoir avec l’ANRU en son temps.
Le deuxième axe de notre plan de bataille, c’est de rompre avec le gaspillage. D’en finir avec un modèle de consommation dans lequel les mines sont toujours plus profondes et les montagnes de déchets toujours plus hautes.
J’ai annoncé notre volonté d’en finir avec cette pratique scandaleuse qui consiste à jeter ce qui ne peut être vendu. Cette mesure constitue une première dans le monde. Elle figurera dans le projet de loi de lutte contre le gaspillage qui sera l’une des trois priorités de la rentrée parlementaire en septembre.
Nous avons déjà acté la suppression des produits plastiques à usage unique les plus néfastes. Mais je veux que nous allions plus loin.
Parce que l’Etat se doit d’être exemplaire, tous les produits en plastique jetables seront bannis de l’administration à compter de l’année prochaine.
Je souhaite également que nous nous fixions un objectif de 100% de plastique recyclé et nous lancerons dans les prochains jours une grande concertation notamment avec les collectivités, pour étudier la mise en place d’une consigne sur certains emballages. Les collectivités d’outre-mer pourront, si elles le souhaitent, en devenir des territoires pilotes.
La loi anti-gaspillage prévoira la possibilité d’imposer l’incorporation de plastique recyclé dans toutes les bouteilles en plastique à usage unique.
Enfin, j’ai noté la volonté de beaucoup de parlementaires d’aller plus loin dans la suppression du plastique à usage unique. Un amendement avait étendu cette obligation à toutes les boîtes plastiques. Nous avions considéré ensemble qu’il déstabilisait trop nos industries et qu’il fallait le corriger. Mais son intention était bonne et je vous proposerai dans le cadre de la loi anti-gaspillage, des dispositions pour interdire progressivement les boîtes plastiques qui ne sont pas constituées de plastique recyclé.
S’agissant de l’alimentation également, nous devons produire et manger mieux.
Nous nous battrons en Europe – le président de la République l’a réaffirmé – pour garantir un budget de la PAC à la hauteur des besoins de la transition écologique. Un budget qui protège nos agriculteurs et qui leur donnent les moyens de produire autrement.
Nous réorganiserons également notre police de l’alimentation pour apporter aux Français davantage de garanties sur ce qu’ils consomment.
Nous avons lancé avec succès une démarche nationale pour améliorer l’information sur la qualité nutritionnelle des aliments et développer l’utilisation de Nutriscore dans l’étiquetage des aliments. Nous la défendrons auprès de la Commission européenne et de nos partenaires afin de rendre le Nutriscore obligatoire.
Un mot pour conclure sur ce point : en matière de prévention, le Gouvernement a un bilan que je crois solide, sur le tabac, les vaccinations, la sécurité routière. Agnès Buzyn m’a proposé d’ouvrir une nouvelle étape, pour s’attaquer à l’obésité. Il s’agira d’un objectif national, pour l’école, la santé, le sport, l’agriculture, l’industrie. Je serai heureux d’accueillir les propositions parlementaires sur ce sujet.
Avec François de Rugy, je souhaite que les Français soient les premiers acteurs de la transition écologique.
La convention citoyenne pour la transition écologique et climatique constituera un moment de démocratie participative inédit. Elle pourra proposer de nouvelles mesures ; elle pourra en définir le rythme et les financements. Elle rendra ses conclusions au début de l’année 2020. Le Gouvernement s’engage à traduire ces propositions en projets de loi, en mesures réglementaires voire, pour les plus puissantes, à les soumettre à référendum.
Le Conseil de défense écologique s’assurera pour sa part de la mobilisation au plus haut sommet de l’Etat pour faire de l’écologie une priorité de l’ensemble de nos politiques publiques. Nous devons défendre aussi bien le climat que le pouvoir d’achat, la qualité de l’air que nos industries ou nos emplois. Nous avons là un nouvel « en même temps » à construire, qui appelle les mêmes dépassements : dépassement des oppositions entre producteurs et écologistes, dépassement de nos habitudes de consommation, dépassement des postures. Il faut que nous arrivions à en faire l’affaire de tous. Et il faut que nous nous concentrions sur les résultats concrets, dans le quotidien des Français. Je ne veux pas être l’homme des effets d’annonce, mais celui des engagements tenus.
Au cœur de l’acte II, il y a l’ambition écologique et il y a la justice sociale.
La justice sociale, c’est de permettre à tous de travailler.
Le chômage baisse, il a même atteint son plus bas niveau depuis 10 ans. Avec 93 000 emplois créés au 1er trimestre, les chiffres publiés encore ce matin par l’INSEE montrent que nous sommes sur la bonne voie.
Pour autant, nous n’en avons pas fini avec un chômage de masse qui enferme dans la précarité, qui lamine des familles et des territoires. Chaque période de chômage est une épreuve, est une angoisse. C’est un combat de tous les jours pour celui qui y est confronté. C’est le combat central de mon Gouvernement. Car nous en avons fini avec la résignation et l’idée délétère que tout aurait été tenté contre lui.
Nous avons renforcé le dialogue social dans l’entreprise, pour mettre fin à la peur de l’embauche. Nous avons réformé la formation professionnelle et l’apprentissage, pour développer les bonnes compétences en face des besoins. Nous avons mis en place un plan pauvreté dont l’objectif central est la reprise d’activité. Il faut maintenant achever ce vaste mouvement de réformes et conduire, comme tous nos voisins l’ont fait, celle de notre assurance-chômage.
Avec la ministre du travail, Muriel Pénicaud, nous présenterons la réforme mardi prochain, le 18 juin ; nous nous fixons plusieurs objectifs.
Le premier c’est de mettre fin au recours abusif aux contrats courts.
Nous avons donné aux entreprises plus de souplesse et de sécurité grâce à la réforme du droit du travail et c’était nécessaire. La contrepartie – vous savez combien j’apprécie ce terme – c’est une responsabilité accrue dans le recours aux contrats courts qui empêchent les salariés de construire leur vie avec un minimum de sérénité.
C’est pourquoi, dans les 5 à 10 secteurs d’activité qui utilisent le plus ces contrats et qui génèrent de la précarité, nous instaurerons un principe de bonus / malus sur les cotisations d’assurance chômage.
Dans les autres secteurs, nous prendrons une mesure transversale pour décourager le recours aux CDD d’usage.
Le deuxième objectif de cette réforme, c’est de faire en sorte que le travail paye toujours plus que l’inactivité.
C’est en général le cas. Dans la majorité des situations, les règles d’indemnisation sont bien faites et elles continueront à s’appliquer.
Mais il existe des situations où le montant de l’allocation mensuelle du chômage est supérieur au salaire mensuel moyen perçu. Nous devons y mettre fin.
Le troisième objectif vise à introduire une dégressivité de l’indemnisation pour les salariés qui perçoivent les salaires les plus élevés et qui sont en mesure de retrouver un emploi plus vite que les autres.
Quatrième objectif de la réforme de l’assurance chômage : renforcer l’accompagnement des demandeurs d’emplois.
Vous le savez, le Gouvernement a regretté que les partenaires sociaux n’aient pu, par le dialogue, réformer eux-mêmes le régime d’assurance chômage. Mais nous continuons à penser qu’ils ont leur place dans la mise en œuvre de cette réforme, comme ils ont leur place dans la mise en œuvre de tout l’acte II. En particulier, les nouvelles mesures d’accompagnement, pour lesquelles nous dégagerons de nouveaux moyens, ne doivent pas être pensées uniquement à Paris : les besoins ne sont pas les mêmes selon les bassins de vie et d’emploi. Les travaux que j’ai lancés autour de la mobilisation nationale et territoriale avec les partenaires sociaux devront permettre d’identifier les meilleures solutions et donner une grande marge de manœuvre aux acteurs locaux.
J’ajoute que conformément aux engagements du président de la République, cette réforme donnera accès à l’assurance chômage aux salariés démissionnaires ainsi qu’aux travailleurs indépendants.
La justice sociale, c’est de faire en sorte que le travail paye.
Avec le président de la République, nous avons reçu 5 sur 5 le message d’exaspération fiscale que les Français nous ont adressé.
Ceux-ci ne veulent plus des mots, ils veulent des actes. Nous avons donc décidé une baisse d’impôts historique : au total, les impôts des ménages baisseront durant ce quinquennat de 27 milliards d’euros.
Je vous confirme que la taxe d’habitation sur les résidences principales sera intégralement supprimée pour l’ensemble des Français.
Les 80 % de Français les plus modestes bénéficieront dès ce mois de septembre de la suppression du deuxième tiers de la Taxe d’habitation et leur taxe sera intégralement supprimée en 2020. Pour les 20 % de Français restants, la suppression se déploiera sur trois années.
Nous réformerons le financement des collectivités territoriales, en garantissant leur autonomie financière et le dynamisme de leurs ressources. Jacqueline Gourault et Gérald Darmanin reprendront les concertations avec les associations d’élus dès la semaine prochaine. Comme je m’y suis engagé, l’ensemble des mesures devra figurer dans le projet de loi de finances afin de garantir la visibilité aux maires.
Nous avons choisi de concentrer l’intégralité de la baisse de l’impôt sur le revenu annoncée par le président de la République sur les classes moyennes qui travaillent :
Le taux d’imposition de la première tranche de l’IR, qui regroupe 12 millions de foyers, sera abaissé de trois points. Cela représente un gain moyen par foyer de 350 €, soit, à ce niveau, un tiers de l’impôt en moyenne; c’est massif, c’est clair, c’est net.
Les 5 millions de foyers de la tranche suivante bénéficieront d’un gain moyen de 180€.
Ces baisses seront votées dans le projet de loi de finances pour 2020.
Soyons clairs : baisser les impôts de 5Md€, en une fois, nous obligera à faire des choix pour contenir nos dépenses publiques. Certains opposent parfois ceux qui seraient attachés aux équilibres budgétaires à ceux qui feraient vraiment de la politique. Je crois profondément le contraire. La responsabilité politique, c’est de mettre en œuvre des principes et, en même temps, de respecter le réel.
C’est le choix d’une grande nation, qui veut maîtriser son destin. C’est la marque des premiers ministres qui m’inspirent. Je pense à Pierre Mendès France et Georges Pompidou, à Michel Rocard et Alain Juppé.
Le réel, c’est souvent nos sous. Ceux des Français. Ceux que nous prenons pour financer nos politiques publiques ou la redistribution. Ceux de nos enfants, car les dettes que nous créons, ce sont nos enfants qui les rembourseront.
Le Président a dans cette perspective annoncé la révision de certaines niches fiscales et sociales. Nous nous concentrerons :
- sur les niches anti-écologiques,
- sur les niches concentrées sur les très grandes entreprises,
- ou sur les niches qui en fait réduisent les droits sociaux des salariés, comme la déduction forfaitaire spécifique.
Dans chacun de ces secteurs, la concertation a montré que le changement était possible, mais qu’il devait être progressif. Nous avons appris de la taxe carbone, et nous ferons donc ces réformes, en laissant aux entreprises le temps de s’adapter. Bruno Le Maire et Gerald Darmanin indiqueront au début du mois de juillet les choix du Gouvernement.
La justice, c’est de mieux associer les salariés aux résultats de l’entreprise, de renouer avec l’idée gaullienne de participation.
La prime exceptionnelle de fin d’année qu’avait annoncée le président de la République sera reconduite pour 1 an en 2020, avec le même régime défiscalisé dans la limite de 1 000 € par bénéficiaire. Pour que cet élan soit pérenne, les entreprises devront, pour verser la prime exceptionnelle, mettre en place un dispositif d’intéressement au profit de leurs salariés avant le 30 juin 2020. Nous les y aiderons, en simplifiant la mise en place des accords d’intéressement dans les PME, en les autorisant à tester ces accords sur un an au lieu de trois, en mettant à la disposition des PME des accords-types opposables à l’administration.
La justice sociale, c’est de renouer avec la méritocratie républicaine. Avec l’égalité des chances.
Trop souvent, notre modèle social repose sur des politiques de compensation, qui lissent les inégalités sans chercher à les réduire à la base. La France est un des pays les plus redistributifs au monde et pourtant l’un des pays où le déterminisme social est le plus élevé. Les études PISA montrent par exemple que l’influence du milieu social sur les performances scolaires est parmi les plus élevées.
A cet égard, le dédoublement des classes de CP et de CE1 de zones d’éducation prioritaires mené par Jean-Michel Blanquer restera comme l’une des grandes mesures de ce quinquennat. Nous irons encore plus loin dans le traitement des difficultés à la racine, en rendant l’école obligatoire dès 3 ans, en étendant l’effort de réduction du nombre d’élèves à la grande section de maternelle dans les zones les moins favorisées et en limitant à 24 élèves par classe sur tout le territoire les CP et CE1.
Jean-Michel Blanquer et Sophie Cluzel ont également présenté en début de semaine, après des mois de concertation, les contours d’un nouveau service public d’accueil des enfants handicapés à l’école. Nous voulons en finir avec des systèmes qui bricolent des solutions pour les enfants en situation de handicap, qui trop souvent font leur rentrée après les autres enfants.
Nous poursuivrons la démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur. Avec la réforme de ParcoursSup que Frédérique Vidal a conduite, les jeunes Français choisissent désormais leur voie par vocation, non plus par défaut. Cette réforme qu’on disait impossible, elle est faite, elle marche et elle est juste. On compte déjà 30% de plus de boursiers dans les classes préparatoires parisiennes et les IUT ont admis 19% de bacheliers technologiques de plus.
Renforcer notre modèle social, c’est en combler les failles. C’est l’adapter aux situations individuelles. C’est inventer de nouvelles solidarités.
Je pense aux familles monoparentales qui se sont beaucoup exprimées durant le grand débat. Logement, travail, fins de mois, garde d’enfants, tout est plus difficile quand on est seul. C’est pourquoi, dans le plan Pauvreté, nous avons prévu l’ouverture de 30 000 places en crèches et la formation de 600 000 professionnels. Un service unique d’information des familles sera créé en 2020 pour connaître en temps réel, les places de crèches et d’assistantes maternelles disponibles. Enfin, dès juin 2020, le Gouvernement mettra en place un nouveau système pour protéger les personnes seules contre le risque d’impayés des pensions alimentaires. Sur décision d’un juge, ou sur demande en cas d’incidents de paiement, les pensions seront automatiquement prélevées par la CAF pour être versées à leurs bénéficiaires et c’est la CAF qui déclenchera une procédure de recouvrement en cas d’impayé. Quand la vie est dure, que chaque euro compte, que chaque jour compte, il ne faut pas rajouter de l’inquiétude, de la tension, de la précarité et laisser les familles seules face à l’incertitude sur le versement des pensions.
Je pense à notre système de soins. Nous sommes tous choqués par ces images d’urgences saturées ; de brancards qui s’empilent dans les couloirs ; de professionnels qui enchaînent les heures et les patients. Agnès Buzyn a apporté des premières réponses la semaine dernière, pour mieux reconnaître l’engagement des professionnels et moderniser les locaux. Mais tout le monde sait que la situation des urgences traduit un mal plus profond. Notre ambition est de transformer le système de santé, en ville comme à l’hôpital, pour mettre un terme aux crises qui minent la confiance des soignants et des patients. La loi sera bientôt votée. C’est une grande loi de transformation. Le défi sera alors celui de l’exécution. Nous serons au rendez-vous. Pour l’heure, j’en appelle au sens des responsabilités de tous les professionnels de santé, publics et privés, pour se rassembler autour des directeurs d’ARS, afin de coordonner leur présence estivale et d’anticiper les points de tension à venir.
Je pense au combat pour l’égalité entre les femmes et les hommes que mène le Gouvernement, avec Marlène Schiappa, dans les domaines de l’égalité salariale, de la lutte contre les discriminations et contre les violences.
Je pense aux millions d’aidants qui arrêtent de travailler ou qui réduisent leur activité pour s’occuper d’un proche. Nous demanderons aux partenaires sociaux de se saisir de cette question et nous examinerons comment prendre en compte ces situations dans le calcul des retraites.
Je pense à tous ceux qui sont perdus face à la complexité de notre système d’aides sociales et pour lesquels nous sommes en train de préparer le futur revenu universel d’activité. La concertation a commencé, elle conduira à la présentation d’un projet de loi en 2020.
L’acte II, c’est répondre au défi du vieillissement de la population.
C’est l’un de nos grands défis de société. Certains parlent d’une révolution de la longévité... Nous avons trop tardé pour nous y confronter, parce que les budgets en jeu sont gigantesques, mais aussi peut-être par une forme de déni. Nous le voyons tous avec nos parents ou nos grands-parents : malgré le dévouement des soignants, des familles et des aidants, nous sommes mal préparés.
C’est notre regard qui doit changer. Celui que nous portons sur la place des personnes âgées dans notre société. Le rôle qu’elles peuvent y jouer. Nous devons aussi entendre leur volonté de vieillir à domicile. Entendre les familles qui supportent une charge financière importante et qui souvent sont prises en tenaille entre leurs obligations d’enfants et celles de parents voire de grands-parents. Entendre les personnels, dont le métier doit être revalorisé.
La ministre des solidarités et de la santé présentera à la fin de l’année un projet de loi qui définira une stratégie et la programmation des moyens nécessaires pour prendre en charge la dépendance. Dès le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous enclencherons une première étape, avec des mesures favorisant le maintien à domicile et des investissements dans les EHPAD.
Cela fait 10 ans qu’on promet cette grande réforme de dignité et de fraternité. Nous la conduirons et ce sera un autre grand marqueur social de ce quinquennat. Peut être un des plus importants.
L’autre grand défi de notre génération, c’est la mise en place d’un système universel de retraites.
Nous avons aujourd’hui 42 régimes qui assurent globalement un bon niveau de retraite : la France est un des rares pays où le niveau de vie des retraités est supérieur à celui de la population.
Cependant, notre système n’est ni simple ni juste. Il pénalise les carrières courtes ou hachées. Ce constat est connu. S’y ajoutent des inquiétudes légitimes concernant son avenir.
Le Haut-Commissaire Jean-Paul Delevoye a mené un intense travail de concertation. Il présentera en juillet ses recommandations en faveur d’un système universel permettant à la fois de renforcer l’équité entre générations, la protection des plus fragiles et la confiance des Français.
Ce nouveau système, que nous mettrons en place de manière très progressive, reposera sur un principe simple : les règles seront les mêmes pour tous. C’est-à-dire qu’un euro cotisé ouvrira les mêmes droits pour tous. Ce système sera aussi plus redistributif car il réduira l’écart entre les pensions des plus modestes et celles des plus aisés, entre les pensions des hommes et celles des femmes. Il garantira enfin, comme le Président l’a demandé, que les personnes qui ont travaillé toute leur vie ne gagnent pas moins que 85% du SMIC.
Nous savons tous que ces principes sont justes mais qu’ils nécessitent des évolutions profondes. S’agissant des fonctionnaires par exemple, dont les retraites sont calculées actuellement sur les six derniers mois hors primes, le nouveau mode de calcul, sur l’ensemble de la carrière et sur l’ensemble de la rémunération, devra nous conduire à revaloriser les profils de carrière de certaines professions, je pense en particulier aux enseignants.
Les mêmes règles pour tous, c’est vrai, cela signifie aussi la fin des régimes spéciaux. Cela se fera très progressivement, sans modifier les conditions de départ des personnes qui ont déjà des projets pour leur retraite et en conservant l’intégralité des droits acquis. Ce qui compte, c’est la cible vers laquelle nos régimes vont converger ; pour aller vers cette cible, il faut du temps et de la souplesse. Nous nous en donnerons pour réussir cette transformation.
Enfin, le Président l’a affirmé, nous devons travailler plus longtemps. C’est la clé de la réussite du pays. Je vois bien que cela inquiète. Mais la réalité, c’est qu’il s’agit aussi d’une question de justice. Continuer à partir à la retraite deux ans plus tôt que l’âge moyen des autres pays européens, c’est demander à nos enfants de financer cet écart. Et les Français sont lucides. Déjà, l’âge moyen de départ à la retraite est supérieur à l’âge légal, parce que nos compatriotes ont compris que grâce à leur travail, ils pouvaient bénéficier d’une meilleure pension. Et ils ont raison. Nous maintiendrons la possibilité d’un départ à 62 ans, mais nous définirons un âge d’équilibre et des incitations à travailler plus longtemps. Ainsi, chacun pourra faire son choix, en liberté et en responsabilité.
La condition pour que ce choix existe, c’est que le chômage recule, et c’est la raison pour laquelle nous lancerons un grand plan pour l’emploi des seniors.
L’acte II, c’est aussi répondre à un certain nombre de peurs. Des peurs qui se sont exprimées durant le grand débat. Qui s’expriment depuis des années dans le débat public.
Toutes reposent sur un sentiment de « perte de contrôle ». Perte de contrôle sur les évolutions du monde. Sur le progrès technologique. Sur des menaces réelles ou ressenties. Sur la violence.
Il existe plusieurs manières d’appréhender ces inquiétudes ou ces peurs. On peut les attiser pour en tirer profit. On peut les nier, pour éviter de se poser des questions difficiles. Ou alors, on peut les affronter. En montrant à nos concitoyens que sur tous les sujets, la République a les moyens de garder le contrôle.
Garder le contrôle, c’est d’abord garantir l’ordre public pour tous et sur tout le territoire.
Une de nos premières décisions a été de lancer un vaste plan de recrutement et d’équipements des forces de l’ordre et d’y accorder les moyens. Il y avait urgence. Et on partait de loin.
Une autre décision a été de concentrer les forces dans les quartiers de reconquête républicaine où la délinquance, les incivilités avaient grimpé en flèche.
Les premiers résultats sont là : en 2018, les vols avec armes ont baissé de 10% ; les cambriolages de 6% et les vols de véhicules de 8%.
Durant les douze prochains mois, notre priorité sera de combattre le trafic de stupéfiants qui gangrène des pans entiers de notre territoire. Cela implique d’harceler les points de vente, de neutraliser les échelons de distribution, de faire tomber les têtes de réseaux. Nous procèderons aux changements d’organisation nécessaires pour parvenir à ces résultats opérationnels.
J’ai également demandé à Christophe Castaner un plan pour lutter contre la violence gratuite. Les Français n’en peuvent plus des coups de couteaux donnés pour un mauvais regard ou des batailles rangées entre bandes rivales. Nous ne devons plus rien laisser passer.
Pour réussir, nous devrons finaliser les réformes que nos forces de l’ordre attendent depuis longtemps sur le temps de travail, sur les heures supplémentaires, sur la fidélisation dans les postes et les territoires.
Pour traduire ces orientations, le ministre de l’Intérieur et le Secrétaire d’Etat engageront dès cet été, la rédaction d’un livre blanc sur la sécurité intérieure ainsi que d’une future loi de programmation.
Garder le contrôle, c’est maintenir une vigilance de tous les instants contre la menace terroriste.
C’est continuer de fermer les lieux de culte radicalisés.
C’est poursuivre l’expulsion systématique des ressortissants étrangers en situation irrégulière qui figurent au FSPRT, le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste. Nous en avons expulsé plus de 300 au cours des dix-huit derniers mois.
C’est poursuivre les efforts de recrutement dans le renseignement : il y en aura 1 900 d’ici la fin du quinquennat.
Garder le contrôle, c’est affirmer notre singularité et notre indépendance dans le monde.
Un monde qui est dangereux. Où la France, inlassablement, cherche à porter la voix de la paix et de la stabilité :
- en continuant de promouvoir le multilatéralisme contre la loi du plus fort ;
- en investissant dans l’aide au développement. Au-delà des moyens en hausse que nous y consacrons, pour aller jusqu’à 0,55% du PiB, c’est l’ensemble de notre dispositif qui doit être revu. Une mission est en cours et je sais que les commissions parlementaires ont fait de nombreuses propositions. Le président de la République tiendra un conseil du développement en juillet et à l’issue des rencontres du G7 cet été, Jean-Yves Le Drian préparera un projet de loi qui sera déposé au Parlement à l’automne et discuté en 2020.
La France doit également rester capable de se battre contre ses ennemis.
En Syrie où la fin du califat territorial est une victoire, mais ne marque pas la fin de la menace.
Au Mali, aux côtés de nos alliés.
Je sais que vous vous associerez tous à l’hommage que je veux rendre à celles et ceux qui risquent leur vie pour protéger la nôtre. Mes pensées vont à leurs familles, et plus particulièrement à celles qui ont été endeuillées cette année.
Conformément aux engagements du président de la République, mon Gouvernement a voulu donner les moyens à nos armées de nous défendre. Le 13 juillet dernier, le président a promulgué la loi de programmation militaire pour porter notre effort de défense à 2% du PIB.
C’est un effort massif. Mais il s’agit là aussi d’être constant et cohérent.
Combattre les peurs du pays, montrer que nous gardons le contrôle, c’est avoir le courage d’affronter sans fausse pudeur certaines réalités, notamment concernant la pression migratoire.
Cette réalité, c’est un nombre de demandeurs d’asile qui a baissé de 10% en Europe l’année dernière, mais qui continue d’augmenter en France de 22%. Si nous voulons bien accueillir et bien intégrer ceux qui rejoignent notre pays, nous devons maîtriser ces flux migratoires.
Ce combat est évidemment d’abord européen. Le président de la République l’a annoncé : la France portera dans les prochains mois avec de nombreux partenaires européens, un projet de refondation complète de Schengen.
Nous devrons également prendre nos responsabilités au niveau national. Le droit d’asile est un trésor. Nous y consacrons des moyens en forte hausse. C’est le prix de la fidélité à nos valeurs. Mais c’est aussi pour cette raison que nous devons lutter avec fermeté contre les abus.
Nous continuerons évidemment à offrir aux demandeurs d’asile des conditions d’accueil et de protection sociale conformes à nos principes. Mais nous devons nous assurer que les demandeurs d’asile choisissent la France pour son histoire, pour ses valeurs, pour sa langue, et non parce que notre système serait plus favorable que celui d’autres pays européens. Le fond de ma conviction, c’est que ces sujets devraient faire l’objet d’une harmonisation complète dans l’Union européenne.
Ces questions sont difficiles. Elles soulèvent les passions. Elles touchent aux fondements de notre souveraineté et de nos principes. Il est donc nécessaire d’en débattre de manière régulière et au grand jour avec le Parlement. C’est pourquoi, comme l’a annoncé le président de la République, le Gouvernement organisera chaque année un débat au Parlement sur les orientations de la politique d’immigration et d’asile. Le premier aura lieu au mois de septembre.
Combattre les peurs, c’est lutter contre l’islamisme et faire vivre la laïcité.
Le Gouvernement accompagnera les Musulmans dans la construction d’un islam où les croyants français exercent les responsabilités. Nous ne le ferons pas à leur place, mais nous leur donnerons les moyens.
D’abord, de combattre l’islamisme et les discours de haine sur les réseaux sociaux. Je salue la proposition de loi de Laetitia Avia, qui nous donnera les outils nécessaires.
Ensuite de réformer l’organisation du culte musulman. Des assises territoriales de l’islam de France ont eu lieu l’été dernier. Un large consensus s’est dégagé en faveur d’une structuration départementale. Il est important que des suites soient données à ces attentes.
Enfin, l’islam de France doit recruter et former des imams en France, qui parlent le français. Et mettre fin de manière progressive au système où beaucoup d’imams ou psalmodieurs sont choisis et rémunérés par des Etats étrangers.
S’il faut des dispositions législatives pour garantir le respect de l’ordre public et renforcer la transparence du financement des cultes, en particulier quand ce financement est étranger, le Gouvernement vous les proposera, sans remettre en cause la loi de 1905 ni le libre exercice des cultes.
Combattre les peurs, c’est « remettre de la conscience dans la science » pour paraphraser une formule célèbre. C’est déterminer ce qui est permis et ce qui ne l’est pas dans des domaines où tout devient techniquement possible.
Les Etats généraux de la bioéthique se sont achevés il y a un an. Le Parlement s’est également saisi de ces questions. Le projet de loi que le Gouvernement s’est engagé à préparer pour tirer les conclusions de ces travaux est prêt. Conformément aux engagements du président de la République, il autorise le recours à la procréation médicalement assistée pour toutes les femmes. Sur certaines questions, comme l’accès aux origines, le régime de filiation en cas de PMA avec tiers donneur, plusieurs options étaient possibles, et le Gouvernement a retenu celles qui lui semblaient les plus à même de permettre un débat apaisé.
Le projet de loi sera adopté en Conseil des ministres fin juillet et pourra être débattu au Parlement dès la fin septembre, juste avant la discussion budgétaire. J’ai la chance d’avoir dans mon Gouvernement trois ministres d’exception, une médecin, Agnès Buzyn une juriste Nicole Belloubet et une scientifique Frédérique Vidal. Les débats que vous avez eus avec elle, que j’ai eus avec elles, ont été de grande qualité. Je suis persuadé que nous pouvons atteindre une forme de consensus sur ces dossiers. C’est mon ambition en tout cas.
Combattre les peurs, enfin, c’est regarder l’avenir avec confiance, investir dans l’intelligence, renouer avec l’esprit de conquête.
L’Etat qui devrait raisonner en stratège pour le long terme, est trop souvent englué dans le court terme. Dans la gestion politique à 6 mois. Alors que des entreprises ou des collectivités territoriales déploient des plans d’action à 10 ans, investissent, motivent leurs collaborateurs, cherchent, découvrent.
Il faut, comme le Président nous y a invités, tracer une perspective collective de long terme pour notre pays, donner de la visibilité à chacun sur les objectifs de la Nation à l’horizon 2025. Bâtir un pacte productif. Rattraper notre retard en robotique, comme nous sommes en train de rattraper notre retard en numérique. Devenir le principal hub de l’intelligence artificielle en Europe. Devenir en tout point la Nation la plus attractive, pour le tourisme, la santé, l’industrie…
Offrons à la jeunesse des raisons de s’engager. Pour l’environnement. Pour le développement. Dans les territoires isolés. Via le service national universel que nous commençons à déployer cette année.
Définissons une nouvelle ambition pour la recherche et l’enseignement supérieur. Je vous saisirai d’un projet de loi de programmation et de réforme au printemps 2020.
Combattons les peurs, le repli, et défendons ce que le président de la République a appelé « l’art d’être Français », c’est-à-dire aussi l’art tout court. La culture. Nous poursuivrons le déploiement du Pass culture. Nous réaffirmerons dans le cadre du projet de loi audiovisuel, qui sera discuté au Parlement au tout début 2020, le rôle de l’audiovisuel public dans la diffusion de la culture. Nous défendrons le patrimoine national. Un patrimoine avec lequel, on l’a vu lors de la catastrophe de la cathédrale de Notre-Dame, les Français entretiennent un rapport fort et intime.
L’acte II se joue enfin dans la réforme de l’Etat. Non pas au sens bureaucratique qu’on lui donne souvent, mais au sens qu’on lui donnait en 1935, en 1958, quand déjà, la République cherchait à renouer avec le peuple.
J’ai déjà évoqué, devant vous, le « mur de défiance » qui s’est élevé, au fil des années, entre les Français et ceux qui les représentent ou qui les administrent. J’ai aussi fait le constat avec vous du besoin de proximité et de participation qui s’est exprimé lors du grand débat.
Nous ne répondrons pas à ces attentes avec de simples aménagements. C’est l’ensemble de l’action publique – « du sol au plafond » si vous me permettez l’expression – qu’il faut désormais transformer.
Il y a un an, nous avions présenté un projet de loi constitutionnelle et deux projets de loi complémentaires, organique et ordinaire.
Les circonstances n’ont pas permis leur examen. Mais les discussions se sont poursuivies, en particulier avec le Sénat et avec son président. Les événements des derniers mois nous ont confortés dans notre conviction que ces textes étaient utiles. Et le grand débat nous a permis de les enrichir.
La Garde des Sceaux est prête à présenter dès ce mois-ci trois nouveaux textes en conseil des ministres. Ces textes reprennent le cœur des engagements du président de la République, y compris l’inscription de la lutte contre le changement climatique à l’article 1er de notre Constitution. Ils sont recentrés sur 3 priorités :
- les territoires, avec l’autorisation de la différentiation, l’assouplissement du cadre relatif à la Corse ainsi qu’aux outre-mer ;
- la participation citoyenne, avec un nouveau titre dans la Constitution, la transformation du CESE en conseil de la participation citoyenne, la possibilité de former des conventions de citoyens tirés au sort, la facilitation du recours au référendum d’initiative partagée et l’extension du champ de l’article 11 ;
- la justice, avec l’indépendance du parquet et la suppression de la Cour de Justice de la République.
En parallèle, des gestes ont été faits pour parvenir à un consensus avec le Sénat.
Les dispositions relatives au fonctionnement des assemblées ont été retirées. Nous avons considéré qu’il appartenait aux assemblées elles-mêmes de décider de leurs réformes.
Les dispositions relatives au cumul des mandats dans le temps ont été assouplies pour en exclure les maires de communes de petite taille et prévoir une entrée en vigueur progressive.
Le président de la République a accepté de revoir sa proposition de baisse d’un tiers du nombre de parlementaires pour viser une réduction d’un quart, qui permet une juste représentation territoriale et l’introduction d’une dose significative de proportionnelle.
La réalité aujourd’hui, c’est que nous sommes proches d’un accord sur le projet de loi constitutionnel, mais que ce n’est pas encore le cas sur le projet de loi organique, et en particulier sur la question de la réduction du nombre de parlementaires. Et le Sénat a été très clair sur le fait qu’il n’y aurait d’accord sur rien s’il n’y avait pas accord sur tout. Nous allons donc continuer à chercher à nous rapprocher. Mais nous ne mobiliserons pas du temps parlementaire pour in fine constater le désaccord du Sénat.
Nous ne renonçons pas à nos ambitions, qui, nous le pensons, sont conformes à la demande de nos concitoyens. Nous attendrons le moment propice et la manifestation de volonté du Sénat, qui peut être ne viendra qu’après le renouvellement de la Haute Chambre en 2020. Nous pouvons aussi voter seulement la proportionnelle à l’Assemblée, sans changer le nombre de députés. Et le président de la République a la faculté d’interroger directement les Français sur la réduction du nombre de parlementaires. Ma conviction est que nous ne devons pas résister au désir de changement exprimé par les Français.
Transformer l’action publique, c’est réformer nos administrations et notre service public, à Paris et sur le terrain.
A la suite d’un long travail préparatoire, j’ai signé deux instructions qui remodèlent nos administrations, à Paris et sur le terrain. Dès janvier prochain, 95% des décisions individuelles seront prises sur le terrain. Les services locaux seront renforcés, réorganisés pour plus de cohérence, les administrations centrales allégées et rendues plus agiles.
Dans le même temps, nous achèverons d’ici l’été l’examen de la loi de transformation de la fonction publique et nous donnons plus de pouvoir aux managers. La mission Thiriez démarre ses travaux sur la haute fonction publique, pour rénover profondément son recrutement, sa formation et la gestion des carrières. C’est un dossier déterminant pour l’Etat, parce que pouvoir bénéficier des meilleurs éléments, et des plus dévoués, a toujours été essentiel. Je m’en occuperai personnellement.
Le service public, c’est une promesse républicaine, en particulier pour les territoires isolés, la ruralité, les quartiers, l’outre-mer. Des personnes, un accueil, un conseil. Quel que soit l’endroit où l’on habite, on doit pouvoir rencontrer un de ses représentants.
C’est le sens de la création des maisons France Services que le président de la République a souhaitée. Depuis plusieurs années, les maisons de service aux publics ont tenté d’apporter une première réponse. Certaines le font déjà remarquablement. Je l’ai vu à Montmoreau en Charente. Mais reconnaissons ensemble que les maisons de service public sont très variées et proposent des niveaux de service très différents. Nous devons changer d’échelle et de logique. Partir des besoins de nos concitoyens. Dépasser les frontières des administrations, oublier que nous sommes l’Etat, le département, la CPAM ou la CAF. Cela veut dire des choses simples, comme des horaires d’ouverture élargis, des agents polyvalents, capables d’offrir immédiatement des réponses, d’accompagner vers la bonne porte d’entrée. Dès le 1er janvier 2020, je veux 300 maisons France service pleinement opérationnelles. Et d’ici la fin du quinquennat, nous en aurons une par canton.
J’aurai également le plaisir de signer avant le 14 juillet les contrats de convergence et de transformation avec les collectivités ultramarines. Des contrats qui mettent en œuvre nos objectifs de développement économique et social dans ces territoires, et qui s'inscrivent résolument dans la transition écologique. Je veux redire, comme je l’avais fait lors de ma première déclaration de politique générale, à nos compatriotes ultramarins notre volonté de faire appliquer, en toutes circonstances, ce que j’ai appelé un « réflexe outre-mer ». Nous tiendrons nos engagements.
Transformer l’action publique, enfin, c’est répondre à l’aspiration fortement exprimée dans le grand débat pour plus de simplicité et plus de proximité.
Je suis favorable, pour ma part, à un nouvel acte de décentralisation. Mais je sais que cela prend du temps et que les positions des territoires sont moins unies que nous ne le voudrions tous. C’est bien normal, d’ailleurs, car notre système est devenu compliqué.
Ma conviction, c’est qu’il faut d’abord conforter les maires, qui sont plébiscités par nos concitoyens, pour répondre au sentiment de fracture territoriale.
Je vous propose donc de procéder en deux temps :
- d’abord, en prenant des mesures pour favoriser l’engagement des maires. Elles seront rassemblées dans un projet de loi que le Gouvernement présentera dès le mois de Juillet et que je proposerai au Sénat d’examiner dès la rentrée ;
- ensuite, nous devrons nous accorder avec les élus et leurs représentants sur la meilleure méthode pour clarifier le fameux « millefeuille territorial ». Il faut aller vers des compétences clarifiées, une responsabilité accrue, des financements clairs, comme le président de la République nous y a invités.
J’irai demain solliciter l’approbation de la politique du Gouvernement au Sénat. Mes prédécesseurs l’ont peu fait et encore, seulement lorsque le Sénat était clairement dans la majorité. Convenez avec moi que c’est loin d’être le cas en ce qui concerne mon Gouvernement... J’irai donc demain au Sénat, sans penser revenir avec une majorité. Mais ce sera l’occasion pour le Gouvernement de détailler ce chapitre territorial de l’acte II et le vote permettra à chacun de se prononcer et à nous tous d’y voir plus clair.
Monsieur le président,
Mesdames et messieurs les députés,
J’ai appelé au dépassement pour relever les défis. Mais je reconnais que le Gouvernement aussi doit dépasser ses habitudes, ses inclinations, pour changer de méthode. Le sentiment d’urgence nous a parfois conduits à prendre des décisions rapides, pas assez concertées. C’est toujours une erreur et au final, cela fait perdre du temps. Dans ma vie de maire, j’ai pu constater qu’écouter c’est toujours mieux pour se faire entendre.
En cette troisième année aux responsabilités, nous voulons faire évoluer notre manière de gouverner. Nous sommes et nous demeurerons des réformateurs. Mais nous devons davantage associer les Français à la fabrique de nos décisions. Les transformations que nous avons engagées, beaucoup de nos concitoyens ont pensé que nous les faisions sans eux ; certains ont même cru que nous les faisions contre eux. Je pense notamment aux retraités et aux Français des territoires isolés. C’est à nous de les convaincre que nous les faisons pour eux, à nous de changer de méthode pour les faire avec eux.
C’est le sens de la mobilisation nationale qui réunit sur les territoires élus, partenaires sociaux, associations, services de l’Etat, pour identifier ce qu’on doit changer au service de l’emploi et de la transition écologique. C’est le sens aussi du développement d’une forme de démocratie directe. Parce que le grand débat n’est pas une parenthèse. Mais un besoin de fond de nos démocraties. Le sens enfin de cette attention que nous devons apporter à ce « fameux dernier mètre » qui sépare parfois une décision prise dans un lointain bureau ministériel des Français, qui, seuls, comptent.
Changer de méthode, c’est aussi changer de ton. La détermination, la conviction, la passion que nous mettons à défendre nos idées ne devraient jamais nous conduire à l’arrogance, à l’agressivité, à la caricature. Regardons avec lucidité notre scène politique et nos débats médiatiques. Ils ne sont pas toujours à la hauteur des enjeux. Je ne donne aucune leçon et je ne m’exonère d’aucune responsabilité dans ce domaine. Mais nous avons à traiter de belles questions, qui méritent mieux que des raccourcis, des outrances ou des postures. Ces belles questions méritent, elles aussi, que nous dépassions nos vieilles habitudes ; que nous nous écartions de ces partitions vieillies qui nous font jouer, mal le plus souvent, les mêmes rengaines fatiguées. Nous pouvons faire tellement mieux ! La France, qui est souvent belle dans la tradition et la permanence, n’est jamais aussi grande que dans l’effort et le dépassement.
Dans le pays des Lumières, ce n’est jamais l’argument d’autorité qui doit prévaloir ; dans le pays des Lumières, on doute et on se respecte.
Je ne me résigne pas au rétrécissement du débat public et je souhaite que nous portions ensemble l’espoir d’un ressaisissement, sans gommer nos différences. Il est un joli mot, qui vient de la rude et grave républicaine romaine, mais qui semble parfois faire défaut dans nos démocraties, c’est celui de « civilité ». Une civilité qui va au-delà de la politesse de façade, et qui concerne au fond le respect que l’on doit à tout membre d’une même communauté. Si vous le voulez bien, c’est, après le dépassement, le second terme que j’aimerais placer au cœur de notre projet. Pour marquer le respect, la considération que chacun a le droit le plus fondamental de revendiquer.
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les députés,
Notre feuille de route est claire pour l’année qui vient. Mais notre vision pour le pays va bien au-delà d’une année de travail, aussi intense soit-elle. Nous souhaitons réconcilier la France avec elle-même. Notre pays, qui a tout et que le monde envie, a perdu confiance. En tout cas, des millions de ses citoyens ont perdu confiance en lui.
Cette confiance, nous voulons la rebâtir.
En renouant avec l’idée de rassemblement, car notre pays a besoin d’unité et de respect.
En renouant avec l’idée de puissance, gage de notre grandeur et de nos modes de vie.
En remettant l’humain au cœur de nos préoccupations.
Une France fidèle à elle-même, puissance industrielle, militaire et culturelle, une France travailleuse, solidaire et écologique, qui puise dans ce qu’elle produit la ressource de la justice sociale et qui ne vit pas au crédit de ses enfants, ni de leur environnement.
Je me tiens devant vous pour tenir les engagements du président de la République et mettre fidèlement en œuvre l’intégralité de ce que viens de vous annoncer. Et j’ai l’honneur d’engager devant l'Assemblée nationale la responsabilité du Gouvernement que je dirige sur ce programme.

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