Élisabeth BORNE
Monsieur le préfet
de région, Madame la préfète de police,Mesdames et Messieurs les
parlementaires, Monsieur le président du Conseil régional, cher Renaud,Monsieur le maire, cher Benoît PAYAN, Madame la présidente de la métropole,
chère Martine VASSAL, Mesdames et Messieurs les présidents de Conseils
Départementaux,Mesdames et Messieurs les Maires, Mesdames et Messieurs les
élus, Mesdames et Messieurs.Quand vous m'avez invitée, Monsieur le président,
cher Renaud, à participer à cette quatrième convention annuelle des maires de
la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, je n'ai pas hésité. D'abord parce que je
connais l'importance de votre région pour notre pays. Provence-Alpes-Côte
d'Azur, c'est une France miniature. C'est à la fois le littoral, la plaine et la
montagne. Ce sont des villes denses et des petits villages. C'est le tourisme,
le patrimoine, l'attractivité. Ce sont tous les âges de la vie qui se côtoient.
Ce sont aussi tous les défis de notre pays et l'envie de les surmonter. Ensuite, je souhaitais venir à cette convention, car c'est l'occasion de
poursuivre, avec vous, avec les maires, avec les élus locaux, un dialogue
riche, transparent et constant. Je m'y attelle depuis mon arrivée à Matignon.
J'ai déjà eu l'occasion d'échanger avec un certain nombre d'entre vous. Je me
suis exprimée devant plusieurs fédérations d'élus et je participerai, dans
quelques jours, au congrès de l'Association des maires de France. Et peut-être,
je voudrais dire aux maires qui sont ici, à quel point je suis consciente des
inquiétudes que la période actuelle peut créer. Je suis bien consciente que
toute l'instabilité liée à la guerre en Ukraine, à la crise énergétique,
est source d'inquiétudes pour beaucoup d'entre vous. Et je voudrais vous
assurer qu'avec mon Gouvernement, nous sommes particulièrement attentifs à la
situation des collectivités locales. Je ne vais pas vous re-détailler toutes
les dispositions que nous avons prévues dans les projets de loi de finances.
Mais, nous avons, pour la première fois depuis 13 ans, augmenté la DGF, pour
s'assurer que 95 % des collectivités auront une DGF stable ou en augmentation,
malgré les mécanismes de péréquation. Nous mettons en place un amortisseur
électricité, un filet de sécurité, pour vous protéger de la flambée des prix de
l'énergie. Donc, je voudrais vraiment vous assurer que nous serons à vos côtés
pour traverser des prochains mois qui s'annoncent difficiles. En tout cas, ce
dialogue, je m'y attelle, donc je le disais, et avec un objectif clair : faire
que ce dialogue soit la méthode, la signature de mon Gouvernement. Et je le
souhaite, en particulier, avec les maires, qui sont les visages accessibles et
visibles de l’action publique.Vous êtes directement en prise avec les réalités
que vivent nos concitoyens. Vous prenez des décisions, dont vous mesurez tout
de suite les effets sur nos compatriotes. Vous êtes à la fois essentiels pour
la réussite des politiques publiques et indispensables pour relayer les
préoccupations des territoires et les difficultés des Français. Vous donnez du
temps, de l'énergie pour vos communes, pour vos administrés ; vous acceptez
d'être en première ligne. Et je sais ce qu'il en coûte parfois, et je voudrais
avoir une pensée pour Jean-Mathieu MICHEL, ancien maire de Signes, tué il y a
un peu plus de 3 ans. [Applaudissements]. Mesdames et Messieurs les maires,
pour avancer, pour construire, pour agir, nous avons besoin de vous. Et si j'ai
voulu me rendre à cette convention, c'est parce que je souhaitais saisir une
main tendue. Cher Renaud, il y a quelques semaines, vous l'avez rappelé, devant
les régions de France, j'ai évoqué les grands sujets sur lesquels nous pouvions
travailler ensemble, collectivités et Gouvernement. Parmi eux, un défi revêt
une urgence particulière : la transition écologique. Le dérèglement climatique
n'est plus aujourd'hui une affaire de spécialistes. Il a fait irruption dans le
quotidien des Français. Chacun a pu mesurer ses conséquences ravageuses cet
été. Face à l'urgence, la solution sera collective. Elle se fera à tous les
niveaux. Au niveau international, bien sûr. Et le président de la République a
réaffirmé nos engagements et appelé la communauté internationale à l'action la
semaine dernière, à la COP 27, au niveau européen autour des engagements du
Green Deal, au niveau national, évidemment, j'y reviendrai, et au niveau local,
bien sûr, car les collectivités ont entre leurs mains les compétences
essentielles pour mener et réussir la transition écologique. Je dirais même que
la transition écologique sera locale ou qu'elle ne sera pas. Aussi, quand j'ai
proposé aux présidents de région d'expérimenter, ensemble, en fonction des
territoires, vous avez, cher Renaud, immédiatement répondu présent. Avec
d'autres régions, nous travaillerons sur l'emploi, la formation, la mobilité,
ry vous avez souhaité pour votre part que la région Provence-Alpes-Côte d'Azur
soit pilote dans la déclinaison territoriale de la planification écologique. Ce
choix, je sais que c'est une évidence pour vous. La région
Provence-Alpes-Côte-d'Azur, au sud de notre pays, dotée d'une biodiversité et
de paysages exceptionnels, fait partie des plus touchées, des plus concernées
par la montée des températures et par les événements climatiques extrêmes.
C'est aussi un engagement qui vous est cher. Dès 2017, puis en 2021, vous avez
mis l'adaptation et la lutte contre le changement climatique au cœur de
l'action régionale en adoptant un plan climat, une COP d’avance, avec 6 axes :
l'air, la mer, la terre, l'énergie, les déchets et la vie au quotidien. Et il y
a un peu plus d'un an, c'est aussi votre région qui accueillait ici, à
Marseille, le Congrès mondial de la nature de l'UICN. Entre les Alpes et le
littoral méditerranéen, entre la vallée du Rhône et la plaine de la Crau, la
diversité géographique de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur en fait un
laboratoire idéal de la planification écologique. Mesdames et Messieurs, pour
la planification écologique, comme pour les autres défis qui attendent notre
pays, nous avons un devoir et une volonté de réussir. Pour y parvenir, je suis
convaincue que nous devons avancer ensemble et agir de concert. Aussi, je
souhaite bâtir avec vous une méthode de travail claire, autour de 3 principes.Le premier principe, c'est de partir des réponses des territoires. Maires, présidents d'intercommunalité, présidents de département ou présidents de
région, vous détenez dans vos collectivités, bon nombre des leviers pour
améliorer la vie des Français. Vous faites preuve d'innovation, vous
expérimentez et vous construisez des solutions concrètes, au service de nos
concitoyens. Vos expériences et vos ambitions doivent pouvoir être partagées.
Vos bonnes pratiques doivent pouvoir être connues, reconnues, dupliquées. Vos
projets doivent être des sources d'inspiration. Mobilisons vos expériences locales
pour répondre à nos défis communs. Répliquons ce qui a fonctionné dans vos
territoires et apprenons collectivement des fausses pistes et des obstacles que
vous avez rencontrés.Le second principe que je vous propose, c'est la
contractualisation. Nous devons nous engager autour d'un programme de travail
commun, avec des objectifs à atteindre et des moyens à déterminer. C'est tout
le sens de l'agenda territorial que le ministre en charge de la Cohésion des
territoires, Christophe BÉCHU, est en train d'établir, en lien avec les
collectivités. Notre objectif est d'avoir de la lisibilité sur les réformes à
venir, leur calendrier et nos modalités de travail. Les expérimentations menées
par les régions nourriront cet agenda. Je souhaite que ces expérimentations
s’articulent également avec la contractualisation entre l’État et les
collectivités. Le protocole que nous signerons dans un instant, c’est la
démonstration d’une volonté commune, il ose innover, proposer. Pour vous donner
un exemple, la volonté de la région de renforcer son action en matière de
transport décarboné se traduira dans le volet des CPER, dédié aux mobilités,
qui sera négocié dans les prochains mois.Enfin, le troisième principe que je
vous propose pour notre travail commun me tient à cœur, je l'ai évoqué dès ma
déclaration de politique générale, c'est la différenciation, et je sais que ce
principe est une attente forte des collectivités. Nous devons tenir compte des
spécificités de chaque territoire, de leurs diversités, de leurs atouts et de
leur fragilité. La Provence du Lubéron n'est pas la Côte d'Azur. Les réponses
apportées dans les territoires pré alpins diffèrent de celles des côtes
varoises. Aussi, nous devons donner des marges de manœuvre aux uns et aux
autres, et vous faire confiance pour prendre les décisions les plus adaptées.
[Applaudissements] Les expérimentations qui seront engagées dans la région dans
les prochains mois sont la traduction concrète du principe de différenciation.
Il ne s'agit pas de favoriser telle ou telle collectivité, mais de reconnaître
la faculté des élus à porter des priorités et des idées novatrices. C'est
essentiel, c'est le principe même de libre administration. Mesdames et
Messieurs, je viens vous proposer une méthode de travail commune. Je souhaite que
nous la mettions en œuvre dès maintenant, pour la transition écologique, dans
la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Notre défi est immense, réduire de 55 %
nos émissions de gaz à effet de serre, d'ici 2030, et atteindre la neutralité
carbone, d'ici 2050. Concrètement, cela veut dire que nous devons faire plus en
8 ans, que ce que nous avons fait en 32 ans. Et ce n'est pas tout, nous devons
aussi protéger nos concitoyens des effets inéluctables du changement
climatique, restaurer la biodiversité qui nous protège, préserver nos
ressources qui ne sont pas inépuisables. En somme, garantir à toutes les
Françaises et tous les Français un environnement plus sain où il fait bon
vivre. C'est un défi colossal, mais nous en sommes capables. Pour y parvenir,
nous nous sommes dotés d'une stratégie : la planification écologique avec
France Nation verte. France Nation verte, ce sont des actions tangibles pour
agir dans tous les domaines. Concrètement, avec chaque secteur et chaque
territoire, nous allons fixer des objectifs et établir un plan d'action avec
des jalons et des moyens. Des échanges ont déjà commencé avec les différents
secteurs. Et nous aurons d’ici la fin de l’année, une vision globale de notre
planification écologique. C’est une méthode inédite, car jamais nous n’avons
abordé la question de la transition écologique de manière aussi complète et
organisée. Et, nous nous appuierons sur le Conseil national de la Refondation
pour lever certains obstacles identifiés grâce à une véritable co-construction
avec les acteurs directement concernés. Alors, certes parler d’indicateurs, de
jalons ou de concertation, peut paraître technique, mais je crois qu’il vaut
mieux être efficace, que sensationnaliste. Cette méthode, ce sont des
engagements concrets, ce sont des étapes connues, ce sont des moyens et des
leviers identifiés, ce sont des évolutions visibles. C'est toute une manière de
produire, de consommer, d'investir, de créer, que nous nous mettons en capacité
de changer. Cher Renaud, vous voulez faire de Provence-Alpes-Côte d'Azur une
région verte. Alors, construisons ensemble, pour votre territoire, la première
déclinaison territoriale de la planification écologique. [Applaudissements].Nous devons d'abord réduire les émissions de gaz à effet de serre. Nous y parviendrons,
notamment grâce à la décarbonation de notre industrie. Le président de la
République a annoncé, mardi,, que l'État allait investir quatre milliards d'euros
dans la décarbonation des 50 sites industriels les plus émetteurs de France. La
zone industrielle de Fos représente à elle seule 20 % des émissions
industrielles du pays. La décarboner, c'est une opportunité immense pour
réduire nos émissions et nous le ferons ensemble. Nous y parviendrons aussi, en
produisant de l'énergie décarbonée. Nous travaillerons ensemble, par exemple,
au déploiement d'éoliennes en mer ou à la production d'hydrogène décarbonée.
Enfin, le dérèglement climatique rend d'autant plus nécessaire notre travail
commun pour préserver les ressources en eau. Je souhaite que nous nous engagions
davantage pour améliorer la performance des réseaux d'irrigation et pour une
plus grande réutilisation des eaux usées traitées. Et je vous annonce
aujourd'hui, que nous augmenterons les moyens des agences de l'eau de 100
millions d'euros, dont 40 millions d’euros pour l’Agence de l'eau Rhône
Méditerranée Corse. Avec ces moyens supplémentaires, l’agence pourra notamment
mettre en place des projets pour prévenir les sécheresses qui vont
malheureusement se multiplier. Troisième chantier prioritaire : les transports.
L’ambition de la région en tant qu’autorité organisatrice de la mobilité
permettra d’offrir à chacun des solutions de transports décarbonés et d’adapter
votre réseau de transport aux effets du dérèglement climatique. Le volet
mobilité du CPER en sera la concrétisation. Plusieurs projets sont prévus et je
pense naturellement à la ligne nouvelle Provence Côte d’Azur, le long du
littoral. C’est un des plus gros projets ferroviaires depuis 150 ans, grâce à
la volonté de l’État et des collectivités. Le financement de cette opération
fera d’ailleurs l’objet d’un amendement dans le projet de loi de finances pour
2023, selon les modalités que vous aviez appelées de vos vœux, cher Renaud. La
rénovation énergétique est un autre pilier de notre planification écologique.
L’État mobilisera des moyens en contribuant à rénover nos bâtiments publics et
en soutenant l’accompagnement mis en place par la région, pour la rénovation
énergétique des logements pour les ménages des classes moyennes. Enfin, je
souhaite insister sur un dernier chantier, particulièrement structurant :
l’aménagement du territoire. L’expérimentation menée par la région sera utile
dans notre volonté collective de maîtriser l’artificialisation des sols. Vous
le savez, nous nous sommes fixé un objectif : diviser par deux le rythme
d’artificialisation en 10 ans et parvenir au zéro artificialisation net, d’ici
2050. C’est une nécessité, si nous voulons stocker du carbone, préserver notre
biodiversité et la richesse de notre patrimoine agricole, mais aussi nous
protéger face aux impacts du dérèglement climatique, en particulier contre les
inondations. Sur ce sujet, là encore, la région Provence Alpes Côte d’Azur
était précurseure. Mais je connais néanmoins vos inquiétudes, en tant que maire
ou président d’intercommunalité. C’est pourquoi j’ai demandé au ministre de la
Transition écologique et de la Cohésion des territoires de mener une
concertation, d’ici la fin de l’année, sur la manière la plus équitable de
prendre en compte les projets d’envergure nationale dans le décompte de
l’artificialisation, et je pense par exemple aux infrastructures portuaires du
grand port maritime de Marseille. Vous évoquerez aussi la façon de pleinement
tenir compte des opérations de renaturation. Mesdames et Messieurs, ce sont
cinq chantiers fondamentaux, mais bien d'autres nous attendent. Cependant, pour
vous permettre d'agir et d'innover, vous avez besoin de moyens à la hauteur des
enjeux. C'est pourquoi j'ai décidé de créer un fonds d'accélération de la
transition écologique des territoires. Il viendra soutenir les actions des
collectivités et sera l'incarnation de France Nation verte, dans les
territoires. Ce Fonds vert sera doté de 2 milliards d'euros dès l'année
prochaine, qui seront intégralement territorialisés. Cela permettra aux préfets
de région de construire, avec vous, une action ambitieuse, coordonnée et
adaptée aux spécificités de chaque territoire.Mesdames et Messieurs, il y a
sept mois, pratiquement jour pour jour, ici même, au Pharo, le président de la
République a fixé une volonté et un cap pour accélérer notre transition
écologique et faire de la France une nation verte. Comme il l'avait annoncé, en
tant que Première ministre, je suis en charge de la planification écologique.
C'est une première dont notre pays peut être fier. Aujourd'hui, cette ambition
s'incarne dans une stratégie et dans des actes concrets. Aujourd'hui, à
Marseille, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur devient le fer de lance de la
planification écologique dans les territoires. Une région verte, dans une
France verte, c'est notre ambition commune. Nous y parviendrons ensemble, pour
notre pays, pour nos territoires, pour notre jeunesse. Vive la République et
vive la France !