Gabriel ATTAL
Bonjour,
Je suis ici avec Sarah El Haïry qui est chargée de l'enfance et de la jeunesse, et Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté et de la politique de la ville.
Je suis venu dire ici 3 choses. La première, c'est que je tiens mes engagements. J'avais dit, dès ma déclaration de politique générale à la fin du mois de janvier, que je souhaitais, face au phénomène de la délinquance et de la violence chez les mineurs, que nous ayons davantage recours aux internats pour mieux prévenir les dérives et prévenir la délinquance. Chose promise, chose faite, quelques mois plus tard à peine : le premier de ces nouveaux internats qu'on souhaite ouvrir a démarré ici à Nice pour ce qu'on appelle un séjour de rupture, c'est-à-dire des jeunes qui ne sont pas des jeunes délinquants, mais qui sont des jeunes qui ont besoin d'un cadre, parce qu'ils ont des mauvaises fréquentations, parce qu'ils ne respectent pas les règles, puissent avoir un séjour ici pendant deux semaines pour contribuer à les remettre dans le droit chemin.
Mais les internats, je le précise aussi, ce sera deux choses : ces séjours pendant les vacances, mais aussi des placements en internat au long cours. On a 50 000 places d'internat disponibles en France. On sait qu'on a beaucoup de jeunes qui en auraient besoin. Et donc, on va faciliter, inciter davantage au placement de ces jeunes en internat pour leur donner un cadre, leur rappeler quelles sont les règles et les couper de mauvaises fréquentations.
La deuxième chose que je suis venu dire ici, c'est que le sursaut démarre tout de suite. J'avais parlé de ces internats dans ma déclaration de politique générale. Le premier ouvre ici à Nice aujourd'hui. Un certain nombre de mesures que j'ai annoncées vont prendre effet très rapidement. D'ici à la semaine prochaine, le garde des Sceaux signera la circulaire pénale sur les questions des atteintes à la laïcité pour sanctionner davantage les agressions qui se font sur fond d'atteinte à la laïcité. J'ai annoncé également dans ma déclaration de politique générale, et la semaine dernière à Viry-Châtillon, que je souhaitais qu'on puisse avoir un nouveau dispositif pour qu'il y ait l'équivalent des travaux d'intérêt général pour les mineurs, les moins de 16 ans.
D'ici à la semaine prochaine, le garde des Sceaux signera aussi le texte qui nous permettra une entrée en vigueur de ces mesures d'intérêt éducatif dès la rentrée des vacances. Et c'est un nouveau dispositif, de nouvelles sanctions qui répondront à une forme de principe que j'ai édicté dans ma déclaration de politique générale, qui est aussi une forme de mantra, je l'assume : « Tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies, tu défies l'autorité, on t'apprend à la respecter ».
Et donc, j'en viens au troisième point : mon souhait, c'est qu'on puisse avoir évidemment un investissement majeur dans la prévention. C'est le cas ici avec les internats, avec d'autres dispositifs, le Beauvau de la prévention de la délinquance qu'animera Sabrina Agresti-Roubache, mais aussi qu'en termes de sanctions, on puisse aller beaucoup plus vite, avec des sanctions beaucoup plus rapides, beaucoup plus immédiates, parce que c'est évidemment l'intérêt éducatif pour les jeunes que d'avoir des sanctions plus rapides, plus efficaces, plus adaptées, pour éviter ensuite que la délinquance s'accroisse. Pardon, vous aviez une question.
Journaliste
Oui, comment est-ce que vous allez recruter ces jeunes qui vont être pris dans les internats, quelle que soit leur forme ?
Gabriel ATTAL
Alors, on voit qu'ici, les jeunes présents ont été « fléchés » soit par des associations qui les suivent déjà, soit par leur établissement scolaire.
Il y a plusieurs jeunes. Certains avaient déjà connu un conseil de discipline, avaient été exclus temporairement ou définitivement de leur établissement. Leur établissement scolaire a proposé à leurs parents qu'ils puissent faire ce séjour de rupture ici, en internat. Et donc, c'est comme ça qu'on va fonctionner. Du repérage à travers les associations, les collectivités locales, à travers les services de l'éducation nationale aussi. Mon objectif à terme, c'est d'avoir une forme de volontariat dirigé. C'est-à-dire qu'on incite très fortement des familles dont on identifie que leur enfant est en train de dériver, que les familles puissent accepter le placement d'internat de leur enfant et qu'il y ait une forme d'incitation, c'est-à-dire qu'il peut y avoir des familles qui sont dépassées - on en parle souvent avec le garde des Sceaux - il peut aussi y avoir des familles qui sont défaillantes. Il y a une vraie différence entre les deux.
Quand vous êtes dépassé, c'est que malheureusement, vous ne vous battez pas à armes égales face à des phénomènes de mauvaises fréquentations de votre enfant ou de réseaux sociaux qui font que vous avez beau essayer de lui donner un cadre, de le remettre dans le droit chemin, vous n'y arrivez pas. Là, vous êtes dépassé et on doit vous aider.
Ensuite, vous avez des parents qui sont défaillants, c'est-à-dire qu'ils ne cherchent pas à trouver des solutions. Et donc, je souhaite qu'on arrive à un système où, lorsqu'on identifie qu'un jeune part à la dérive, on peut proposer à ses parents une place en internat, que les parents ont le choix d'accepter ou non ; mais que si les parents le refusent et que, ensuite, le jeune se livre à des actes de délinquance, ça puisse accroître la responsabilité des parents. Et vous savez qu'on tient beaucoup à ce sujet-là aussi : que pour les parents défaillants, on puisse aller chercher davantage leurs responsabilités.
J'ai annoncé un certain nombre de mesures aussi qui vont faire l'objet de la concertation qui sera menée par les ministres, et notamment le garde des Sceaux, pour qu'on puisse plus facilement reconnaître le manquement à l'obligation parentale de parents qui sont défaillants. Aujourd'hui, il faut attendre un manquement grave pour pouvoir retenir le non-respect de l'obligation parentale. Je souhaite qu'on puisse faire évoluer la loi pour que plusieurs manquements légers et répétés puissent également nous permettre de retenir le manquement à l'obligation parentale.
Et ensuite, il y aura de nouvelles sanctions pour les parents qui ne respectent pas leurs obligations, et notamment qui pourront aller jusqu'aux travaux d'intérêt général. Et donc il faut que le placement en internat soit systématiquement proposé comme une solution. Si des parents le refusent et que leur enfant ensuite se livre à de la délinquance, ça sera une forme de circonstance aggravante dans leur responsabilité.
Journaliste
Monsieur le Premier ministre, vous avez parlé des questions de laïcité. La semaine dernière, vous avez parlé d'entrisme islamiste dans les écoles, des préceptes de la charia qui y ont cours. Comment répondre à ces problématiques, alors même que certains disent que vous reprenez les éléments de langage du Rassemblement national ?
Gabriel ATTAL
Vous savez, moi, j'ai toujours été constant sur ce sujet-là. Je suis très attaché à la laïcité et attaché aussi à expliquer, faire comprendre à nos jeunes, qui parfois ne le mesurent pas, ce qu'est la laïcité. Que la laïcité, c'est une liberté. La laïcité, c'est ce qui permet de se forger une conviction. Quand on est enfant, on doit évoluer dans un cadre scolaire, dans un environnement qui est neutre de toute influence religieuse. Parce que quand on est à l'école, c'est le moment où on se forge son esprit critique qui nous permet, ensuite, quand on est adulte, de faire ses choix. C'est très important de le rappeler, et oui, j'assume totalement les mots qui ont été les miens sur l'entrisme.
On le voit, j'ai eu l'occasion de le voir en tant que ministre de l'Éducation nationale, on le voit qu'il y a des groupes, plus ou moins organisés qui cherchent à tester en permanence notre résistance, notre capacité à faire respecter la laïcité, qui cherchent à pousser des jeunes à faire une forme de prosélytisme religieux au sein de leur établissement scolaire. Ce qui m'a amené, en tant que ministre de l'Éducation nationale, à prendre une décision que j'assume, d'interdire le port de tenues religieuses, l’abaya et le kamis, interdiction qui est respectée. Il n'y a plus de port de l’abaya et du kamis dans nos établissements scolaires. Et quand certains cherchent à le porter, il y a des sanctions qui sont prononcées.
Donc : comment fait-on respecter la laïcité ? D'abord, il y a l'éducation, faire comprendre ce qu'est la laïcité, pourquoi il y a des règles et comment elles s'appliquent. C'est le sens de ce que j'ai lancé aussi en tant que ministre de l'Éducation nationale, qui commence à s'appliquer, des temps d'apprentissage dès l'école primaire sur la vie en société, le respect des règles, la tolérance, le respect de la différence. Il y a 1500 écoles qui ont démarré ces temps d'apprentissage cette année, en janvier dernier, et ça sera généralisé à l'ensemble des écoles primaires à la rentrée. Puisqu'on le voit, ce phénomène, malheureusement, se manifeste de plus en plus dès l'école primaire.
Ensuite, c'est le renforcement de l'enseignement moral et civique, l'éducation civique. Le président de la République a indiqué que nous allions doubler le volume horaire à partir de la rentrée prochaine pour mieux faire comprendre, mieux expliquer la règle. Donc ça, c'est sur le premier point, l'éducation.
Ensuite, il y a le soutien aux enseignants. Parce que ceux qui sont en première ligne sur ces questions de laïcité, ceux qui « subissent » en première ligne les atteintes à la laïcité, ce sont nos enseignants, nos personnels de direction, c'est l'ensemble des personnels éducatifs. On doit être davantage à leur côté. D'où le renforcement des équipes Laïcité et valeurs de la République dans les rectorats, qui peuvent se déplacer dans les établissements pour être aux côtés des personnels. D'où le renforcement des sanctions aussi en cas d'atteinte à la laïcité — j'ai évoqué à l'instant la circulaire pénale que prendra le garde des Sceaux.
La ministre chargée de l'Éducation nationale a par ailleurs annoncé que, désormais, l'Éducation nationale fera systématiquement un article 40, c'est-à-dire qu'elle saisira la justice quand il y aura une atteinte à la laïcité.
Et j’en viens donc au troisième point, c’est celui des sanctions, des sanctions exemplaires. Je rappelle que quand j'étais ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, j'avais décidé d'un temps d'hommage dans tous les établissements scolaires en mémoire de Samuel Paty et de Dominique Bernard qui ont été assassinés, je le rappelle, par le terrorisme islamiste. Et j'avais indiqué que toute contestation de ce temps d'hommage donnerait lieu à des sanctions administratives dans l'établissement et judiciaires. Ce sont plusieurs centaines d'articles 40 de saisine de la justice qui ont été prononcées, des procédures judiciaires qui se poursuivent, mais qui ont d'ores et déjà conduit à des sanctions.
C'est vraiment sur ce triptyque que je veux avancer sur cette question-là. D'abord l'éducation, ensuite le soutien à nos personnels et enfin les sanctions. Et j'assume totalement les mots qui ont été les miens sur l'entrisme. Il faudrait être aveugle ou de très mauvaise foi pour ne pas le constater. Ce sont nos personnels eux-mêmes qui nous le disent régulièrement.
Journaliste
Monsieur le Premier ministre, quel est le coût de la généralisation d'un tel dispositif, à la fois ces stages de rupture, mais aussi les places en internat ? Est-ce compatible avec l'état de nos finances publiques ? Est-ce que vous pourriez nous détailler aussi ce qui est prévu pour les mineurs délinquants, détailler un petit peu le dispositif et nous expliquer pourquoi la ministre de l'Éducation nationale n'est pas à vos côtés aujourd'hui ? Est-ce que c'est le signe d'une… peut-être d'une divergence de point de vue sur cette question ?
Gabriel ATTAL
Sur le premier point : le coût. Il y a un coût, évidemment. Je crois que ça a été indiqué tout à l'heure par le président du département que pour ce séjour, le coût était de 60 000 euros, je crois. Je dirai deux choses à propos de ce coût.
1. C'est le premier du genre et donc forcément, ensuite, en navigation entre guillemets, on va regarder là où il peut y avoir de la rationalisation qui est faite, des économies qui sont faites. Mais c'est important, quand vous lancez un dispositif, de mettre le paquet au départ pour pouvoir mesurer ce qui peut être amélioré ou pas.
Deuxième chose : pour moi, c'est un investissement. Je préfère dépenser de l'argent pour des internats qui évitent à des jeunes de partir à la dérive et de devenir délinquants plutôt que de devoir dépenser beaucoup plus ensuite pour réparer la délinquance en créant des places supplémentaires dans des centres éducatifs fermés ou en réparant des dégâts qui ont été commis sur des équipements publics ou privés d'ailleurs. Donc, j'assume totalement.
Pou moi, c'est de la bonne dépense et c'est compatible avec l'état de nos finances publiques. Il y a 50 000 places qui sont ouvertes, c’est-à-dire qui sont déjà financées et qui sont vides. Il faut qu'on les utilise davantage.
Sur le deuxième point, vous noterez qu’il y a plusieurs ministres autour de moi, dont Sarah El Haïry, qui est par ailleurs rattachée également à l'Éducation nationale, et la ministre chargée de l'Éducation nationale, qui était avec moi à Viry-Châtillon jeudi. On est en plus sur une période de vacances scolaires, donc ce n'est pas à proprement parler un déplacement pour l'éducation nationale. L'important, c'est que tout le monde soit mobilisé autour de la feuille de route que j'ai annoncée et tout le Gouvernement l'est.
C'est très interministériel, ce que j'ai annoncé. Le sursaut d'autorité dont notre pays a besoin et qui pour moi a démarré, ça concerne tous les ministères et tous les pans de la société.
Et enfin, sur la dernière question, sur les mineurs délinquants, j'ai annoncé un certain nombre de mesures supplémentaires, et également l'ouverture de réflexions sur d'autres mesures. Sur les mesures que j'ai annoncées, j'ai d'abord annoncé que je souhaitais qu'on puisse aller un cran plus loin sur certains dispositifs. Exemple : un jeune qui a commis un acte de délinquance qui est sous contrôle judiciaire, qu'on puisse le mettre en placement de nuit pour éviter que pendant la durée de son contrôle judiciaire. Quand il attend la sanction, il sort le soir, la nuit, surtout si ses parents n'arrivent pas à le faire rester chez lui : qu’on puisse lui imposer d'être placé dans un établissement la nuit. La journée, il va en classe. Le soir, il est placé dans un établissement. Ça, c'est une première évolution que je propose, qui sera dans le texte que nous présenterons.
Deuxième mesure que je propose, la composition pénale, qu’on puisse aller plus vite dans les sanctions. Mesure qui est portée par le garde des Sceaux. Exemple : un jeune qui fait du rodéo urbain, qui empêche tout un quartier de dormir la nuit avec sa moto, qu’on puisse immédiatement lui saisir sa moto, ce qui n’est pas possible aujourd’hui. Il faut un certain temps. Il faut réunir le tribunal avec un juge pour enfant, des assesseurs. Là, il faut que ça soit possible tout de suite.
Troisièmement, amendes immédiates aussi. Aujourd’hui, pour prononcer une amende, il faut encore une fois réunir le juge des enfants, les assesseurs en format tribunal. Je souhaite que le procureur puisse immédiatement prononcer cette amende sans attendre la décision par un juge. C'est dans les mesures que je propose pour aller plus loin, qui sont déjà prévues dans le texte.
Ensuite, il y a un certain nombre d'ouvertures, de réflexions qui méritent d'être menées dans un temps ramassé de 4 à 8 semaines avec les formations politiques, avec un certain nombre d'acteurs. J'en citerai deux. D'abord, toujours dans cette logique d'efficacité pour aller plus vite, la possibilité de créer une comparution immédiate pour des mineurs. Aujourd'hui, si vous avez deux jeunes, un de 17 ans, un de 18 ans qui sont interpellés parce qu'ils ont commis un acte de délinquance, celui de 18 ans va pouvoir être jugé tout de suite. Celui de 17 ans va être déféré immédiatement pour reconnaître sa culpabilité. Mais pour la sanction, il va falloir une procédure plus longue avec plusieurs mois pour qu'il puisse être sanctionné. Dans le cas où il y a par exemple une récidive, je souhaite qu'on puisse aller vers une comparution immédiate. C'est ce sur quoi le garde des Sceaux va travailler pour dire que, dans ces cas-là, le jeune en question, y compris s'il est mineur, peut faire l'objet d'une sanction immédiatement. Ça, c'est la première piste sur laquelle on va travailler dans les semaines qui viennent.
La deuxième, c'est celle de l'excuse de minorité, dans des cas, là aussi, de récidive ou des cas graves, qu'on puisse atténuer l'excuse de minorité. Évidemment, il faudra mettre un âge à partir duquel on peut le faire, donner un certain nombre de conditions. Et j'ai missionné le garde des Sceaux pour qu'il puisse animer cette concertation et ce travail dans les toutes prochaines semaines, pour que, d'ici à l'été, on puisse annoncer des décisions sur le sujet.
Journaliste
Monsieur le Premier ministre, comment on fait pour généraliser ce qui nous a été présenté ce matin ? C'est que pour deux semaines, pour 20 jeunes. Comment on fait pour généraliser sur toute la France ? D'autant que c'est sur la base du volontariat, on a vu les jeunes, ils ne sont pas trop enclins, mais à la limite, ce sont ceux dont les parents ont fait la démarche de les inscrire là. Mais ceux dont les parents ne s'en occupent pas ou ne sont pas forcément pour ça que… Comment on fait pour s'occuper d'eux ? Et puisqu'on parle des parents, il y a Éric Ciotti tout à l’heure - je ne le vois pas - mais qui a dit : « En gros, on avait fait des trucs sous Sarkozy, ça a été abrogé sous François Hollande ». Vous reprenez aujourd'hui des propositions. Est-ce que vous voulez aller plus loin sur la responsabilité parentale ? Il a parlé notamment des allocations.
Gabriel ATTAL
Sur le premier sujet : comment on généralise ?
D'abord en travaillant tous ensemble avec les collectivités locales pour pouvoir mettre en place ce dispositif partout. Je souhaite que dès cette année, ce dispositif de séjour de rupture pendant les vacances existe dans chaque département. Donc ça, ça va être travaillé par les ministres avec les collectivités locales pour que ça puisse avoir lieu partout. Et ensuite, encore une fois, on a des places d'internat qui sont disponibles. Donc il y a un enjeu d'organisation et les ressources sont là.
Deux : comment fait-on pour généraliser puisque c'est sur la base du volontariat ?
Ça rejoint un peu ce que j'ai dit tout à l'heure. Moi, je veux mettre en place un système de volontariat dirigé. Vous l'avez dit, il y a des parents et on en a vu des exemples. Et en plus, ils ont pris la parole devant les médias, devant tout le monde, ce qui n'est pas forcément évident, qui ont dit : « Voilà, moi, je suis dépassé. Je n'arrive pas à lui faire lâcher son téléphone. Je n'arrive pas à le convaincre de rester à la maison le soir plutôt que de sortir la nuit avec des jeunes qui font n'importe quoi. Je suis dépassé, je n'arrive plus à le faire ». Ça, c'est ce qu'on appelle des parents dépassés et ils sont d'accord pour qu'on puisse placer leur enfant en internat.
Ensuite, il y a des parents défaillants, c’est-à-dire, qui constatent cette dérive et qui ne font rien pour l'arrêter. Et là, ça rejoint les annonces que j'ai faites tout à l'heure. Je souhaite qu'on puisse retenir davantage la responsabilité des parents dans ces cas-là. C'est-à-dire que les cas dans lesquels on reconnaît un manquement à l'obligation parentale qui soit plus important, on n'attend pas uniquement un manquement grave, mais que plusieurs manquements légers, répétés puissent nous permettre de sanctionner les parents pour manquements à l’obligation parentale.
2) Que les sanctions soient plus fortes, notamment, j'ai parlé des travaux d’intérêt général, pour que ça soit plus incitatif. Et qu’à la fin, on dise :
« Votre enfant dérive, on lui propose une solution en internat et on va même mettre un système pour que pour les familles les plus précaires, ça coûte zéro ». Il y a déjà des régions, par exemple, où il n'y a pas de reste à charge pour les familles. Si on met bout à bout tout le financement public des collectivités et de l'État, on peut y arriver. Donc, on lui propose un internat. Si vous le refusez, mais que votre enfant ensuite devient délinquant, à ce moment-là, on retient votre responsabilité. Donc, je pense que ça aidera à ce que le recours à ce dispositif soit plus important.
Et enfin, sur la question de la responsabilité financière des parents : on le dit souvent avec le garde des Sceaux, l'objectif n'est pas d'ajouter de la misère à la misère. Ce que je veux, c'est que les dispositifs que nous prenons soient efficaces. L'efficacité, pour moi, ce n'est pas d'ajouter de la misère à la misère, c'est d'être incitatif pour les parents. Il y a notamment un point qui me tient à cœur, c'est qu'on puisse aller chercher la responsabilité financière des deux parents. Souvent - et on l'a vu pendant les émeutes - des jeunes délinquants, c'est des jeunes qui sont dans des familles monoparentales, donc qui habitent avec leur mère seule, le papa est parti parfois depuis un certain temps et ne s'en occupe plus. Aujourd'hui, dans le droit actuel, quand vous sanctionnez et que vous prenez des sanctions financières, le seul parent qui est sanctionné, c'est celui chez qui vit l'enfant, donc en l’occurrence la mère célibataire. On va faire changer la loi. C'est ce que j'ai proposé aussi jeudi dernier, et ça sera dans le texte, pour que désormais, le juge puisse aller chercher financièrement les deux parents, y compris si le père est parti depuis très longtemps et ne s'occupe plus du tout de ses enfants, qu’il puisse aussi être sanctionné financièrement parce qu'on ne peut pas se désintéresser de ce que devient son enfant. Et donc, pour répondre à ce que vous évoquiez sur les allocations familiales, une mesure comme celle-ci ne concerne que la mère célibataire puisque, par définition, c'est elle qui reçoit les allocations. Or, mon objectif, c'est que les deux parents puissent être poursuivis et puissent être responsabilisés.
Journaliste
Monsieur le Premier ministre, Éric Ciotti a semblé se féliciter ce matin du fait que vous ayez nommé les choses à Viry-Châtillon jeudi. Hier, Jordan Bardella se félicitait, lui, du fait que vous repreniez, par exemple, la question de l'emprise islamique. Est-ce que vous ne craignez pas que cette séquence-là et ce discours sur l'autorité, alimentent la chronique d'une dérive droitière de votre Gouvernement ?
Gabriel ATTAL
Non mais, je tiens ce discours depuis que je me suis engagé au politique au niveau national. J'ai commencé en 2018 comme secrétaire d'Etat chargé de la jeunesse et du Service national universel (ndlr :SNU), avant d'être relayé par Sarah El Haïry. C'est exactement le discours que je tenais dans le cadre de la mise en place du SNU. En tant que porte-parole du Gouvernement, j'ai toujours été extrêmement ferme sur ces questions, et notamment les questions de laïcité. Et ensuite, en tant que ministre de l'Éducation nationale, j'ai eu l'occasion de montrer, pendant le moment où j'occupais cette fonction, que j'étais très ferme sur ce sujet-là.
Vous savez, ce qui m'importe, ce n'est pas de regarder d'où viennent politiquement telle ou telle mesure ou telle ou telle déclaration. Je ne pense pas que c'est ce qui importe les Français. Ce qui m'importe, c'est de prendre, c'est d'abord d'avoir un discours de vérité et de lucidité. Reconnaître ce qui va et ce qui ne va pas, et y compris de reconnaître des choses qui ne vont pas, alors que ça fait quelques années qu'on est aux responsabilités, parce qu'on ne peut pas tout régler d'un coup de baguette magique. Je pense qu'on a fait beaucoup, notamment pour réarmer nos forces de police, notre système judiciaire en moyens, avec des recrutements de plusieurs milliers ou dizaines de milliers de personnels. Et sur la question du sursaut d'autorité et du réarmement civique, comme l'a dit le président de la République, on n'y est pas encore arrivé. Et c'est là où on doit continuer à monter d'un cran. Et pour y arriver, moi, je cherche des mesures qui sont efficaces. Je ne me préoccupe pas de savoir qui a proposé telle ou telle mesure. Ceux qui font ces genres de commentaires, voilà... Vous évoquiez notamment Jordan Bardella, je pense que c'est de la politique politicienne. Ce n'est pas ça qui m'intéresse. Et je pense que les Français sont très éloignés de ça.
Journaliste
Qu'est-ce que vous répondez à Monsieur Estrosi qui demande que Nice fasse partie de l'expérimentation sur les amendes concernant le port d'armes blanches ?
Gabriel ATTAL
On va regarder, bien sûr. On est toujours très attentifs aux demandes qui sont formulées par les collectivités locales et la ville de Nice, singulièrement, qui est très engagée sur ces questions de sécurité, qui collabore et qui coopère très bien avec les services de la police nationale. On va regarder…
Journaliste
Et vous pensez que c’est une bonne idée ?
Éric DUPOND-MORETTI
Sur cette question, tu…
Gabriel ATTAL
Bien sûr.
Éric DUPOND-MORETTI
Sur cette question, j'ai vu une polémique absolument ahurissante. Madame Le Pen - mais pas qu'elle - dit que cette mesure est une mesure laxiste du ministère de la Justice. Cette mesure a été demandée par les policiers et par les magistrats pour aller plus vite, pour être plus efficace. Il s'agit de confisquer des armes qui sont remises par ceux qui les portent. Je voudrais vous dire que c'est l'article 25 de la loi de programmation du ministère de l'Intérieur voté à l'unanimité, et donc en particulier par le Rassemblement national, il y a de cela des mois. Il faut avoir un peu de mémoire. C'est quelque chose qui va permettre de confisquer des armes qui circulent. C'est très efficace.
Merci, Monsieur le maire, de vouloir être au cœur de cette expérimentation qui va avoir lieu. Mais créer des polémiques là-dessus, franchement, vous voyez, vous me donnez, Monsieur, l'opportunité de rectifier le tir, si je puis me permettre cette expression, et je vous en suis infiniment reconnaissant.
Journaliste
Un mot aussi sur le... ça fait partie du débat sur les allocations pour les personnes étrangères…
Gabriel ATTAL
Oui.
Journaliste
…et leur durée de résidence en France. Vous assumez d'aller aussi sur ce terrain-là ?
Gabriel ATTAL
C'est une annonce que j'ai faite il y a un an. À l'époque, j'étais ministre chargé des Comptes publics. J'avais présenté un plan contre la fraude et toutes les fraudes. Contre la fraude fiscale, j'ai pris des mesures fortes, notamment contre la fraude fiscale des plus grands groupes ou des plus fortunés, et on a vu que l'année dernière, on a eu, à la suite de ce plan, une année record en matière de recouvrement de fraude fiscale : plus de 15 milliards d'euros.
Et j'ai aussi assumé de prendre des mesures contre la fraude sociale, la fraude de cotisation sociale ou la fraude aux allocations sociales. J'avais notamment annoncé que je souhaitais rehausser la durée de résidence en France pour bénéficier des allocations sociales. Jusqu'à présent, pour bénéficier par exemple des allocations familiales, du minimum vieillesse, des APL, il faut résider la moitié de l'année en France. Vous faites 6 mois en France, vous pouvez faire les 6 autres mois à l'étranger et bénéficier de ces allocations. J'ai annoncé que je souhaitais rehausser cette durée. Et aujourd'hui même, au Journal officiel, est paru le décret qui a rehaussé à 9 mois ces allocations familiales minimum vieillesse. Et je vous annonce qu'en juin prochain, nous publierons le décret pour les APL, les allocations logement, pour que ça soit également rehaussé.
L'objectif, encore une fois, c'est de dire qu’un euro de la solidarité des Français doit être un euro justement versé à ceux qui en ont besoin. Quand on passe la moitié de l'année à l'étranger, a priori, c'est qu'on a peut-être moins besoin de la solidarité nationale. Donc, j'assume de rehausser cette durée nécessaire, passer en France sur l'année pour bénéficier des allocations. Je vous rappelle par ailleurs que j'ai annoncé aussi qu'on allait prendre des mesures supplémentaires pour mieux contrôler que les personnes résident effectivement en France, notamment en ayant recours aux fichiers des passagers de compagnies aériennes pour vérifier que les personnes, effectivement, passent bien la durée requise tout au long de l'année pour bénéficier des allocations. Moi, je ne cherche évidemment à stigmatiser personne. Je suis attaché à notre modèle social et à la solidarité. Mais je pense que ce que les Français attendent, et c'est aussi ce que j'attends et c'est ma responsabilité, c'est que l'argent de la solidarité aille vraiment à ceux qui en ont besoin et qui respectent toutes les règles. Merci beaucoup.