Avis du CNCPH sur le rapport du Gouvernement au Parlement sur la politique du handicap

Publié le 15/07/2024|Modifié le 15/07/2024

La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, prévoit qu’à l’issue de chaque conférence nationale du handicap qui se tient tous les trois ans, le « Gouvernement dépose sur le bureau des assemblées parlementaires, après avoir recueilli l'avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées, un rapport sur la mise en œuvre de la politique nationale en faveur des personnes handicapées ». Le présent avis du CNCPH porte sur le projet de rapport transmis par le Gouvernement en juin 2024.

Visuel avec le logo du CNCPH et le titre : avis du 10 juillet 2024, avis du CNCPH sur le rapport du Gouvernement au Parlement sur la politique du handicap - Source : CNCPH

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De la conférence nationale du handicap du 11 février 2020 à celle du 26 avril 2023 et dans les mois qui ont suivi, l’action publique pour améliorer et garantir l’accès des personnes handicapées à leurs droits s’est révélée intense. La période a été marquée par plusieurs événements

La pandémie de covid-19 a eu de nombreuses répercussions sur l’activité des acteurs de l’autonomie des personnes handicapées, comme l’ensemble de notre pays, et a conduit à inventer de nouvelles réponses et les modalités d’une co-construction des politiques publiques davantage ouverte et réactive.
L’audition de la France en 2021 par le comité des droits des personnes handicapées des Nations Unies pour évaluer la mise en œuvre de la convention relative aux droits des personnes handicapées a également marqué un tournant. Les observations finales du comité des droits nous conduisent à renforcer la place incontournable de la convention dans la conduite de nos politiques publiques. Elles nous incitent aussi à réinterroger régulièrement leur cadre de référence pour privilégier l’approche par les droits.
La préparation des jeux olympiques et paralympiques de Paris a également dominé les travaux de cette période. Au-delà de l’héritage qu’il conviendra d’évaluer à l’issue des jeux, l’organisation de l’événement a suscité une mobilisation sans précédent et une incontestable accélération de l’accessibilité de dispositifs et d’équipements. La préparation des jeux de Paris a également permis d’encourager la pratique d’activités sportives par les personnes handicapées et d’impliquer organisations de personnes handicapées et experts d’usage dans l’accompagnement de ce rendez-vous planétaire. Néanmoins, l’opportunité d’accélérer le rattrapage du retard accumulé en matière d’accessibilité n’a pas été saisie par tous les acteurs, notamment dans le secteur essentiel des transports.
Des décisions fortes et nécessaires ont été confirmées, tels que la mesure de « déconjugalisation » de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), l’octroi de droits sans limitation de durée aux personnes dont les limitations d'activité ne sont pas susceptibles d'évolution favorable, la prise en compte par la prestation de compensation du handicap (PCH) de la parentalité et de la surdicécité, ou encore le remboursement intégral des fauteuils roulants et le bénéfice nouveau de 4 points de charge supplémentaires pour le calcul des bourses sur critères sociaux des étudiants en situation de handicap.
Plusieurs chantiers nationaux lancés par la puissance publique ont par ailleurs permis de renforcer l’accès au droit commun en privilégiant l’accessibilité des dispositifs et services publics destinés à l’ensemble des Français, le déploiement des maisons France services, comme la création de France Travail, y ont contribué.
C’est au cours de cette même période que le Premier ministre, Jean Castex, a décidé que le comité interministériel du handicap se réunirait désormais deux fois par an pour assurer un suivi plus régulier de la mise en œuvre de la feuille de route du gouvernement et l’actualiser autant que nécessaire. Ses successeurs, Elisabeth Borne et Gabriel Attal, ont confirmé ce nouveau rythme. Le décret du 30 août 2023 prévoit par ailleurs la participation du président du conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) aux réunions du comité interministériel, confirmant ainsi l’intention de conforter le CNCPH dans sa mission de contribuer à la co-construction des politiques publiques.
Chaque comité interministériel fait l’objet d’échanges préalables entre le CNCPH et le réseau des hauts fonctionnaires au handicap et à l’inclusion. La collaboration avec ce réseau s’est particulièrement intensifiée ces quatre dernières années sous l’impulsion du secrétariat général du comité interministériel du handicap qui assure également le secrétariat général du CNCPH.
Plus récemment, le nouveau réseau des sous-préfets référents handicap et accessibilité est venu compléter l’écosystème des acteurs publics engagés dans la concrétisation des mesures des feuilles de route de la conférence nationale du handicap et du comité interministériel du handicap.
A l’issue de la conférence nationale du handicap (CNH) du 26 avril 2023 qui fait l’objet du présent rapport, des modalités inédites de suivi des mesures annoncées ont été retenues avec un nouveau comité de suivi de la CNH. Il se réunit deux fois par an, en alternance avec le comité interministériel du handicap. Il implique les parties prenantes du comité de pilotage qui avait été chargé de coordonner les travaux préparatoires de la CNH, avec, entre autres, les cabinets du président de la République et du Premier ministre, la ou le ministre en charge des Personnes handicapées, le CNCPH, le collectif handicaps, les représentants des collectivités territoriales, les ministères et les hauts fonctionnaires au handicap et à l’inclusion. C’est la première conférence nationale du handicap qui fait l’objet d’un tel suivi.
Des espaces de co-construction auxquels contribue le CNCPH ont été confirmés ou réactivés, comme le comité national de suivi de l’école inclusive ou la commission nationale culture et handicap. D’autres ont vu le jour, tels que le comité national de suivi de l’enseignement supérieur inclusif. Ils sont généralement co-animés par le ministre concerné et le ministre chargé du handicap. Ils permettent, à condition d’être réguliers, un suivi plus rapproché et plus concret des mesures envisagées puis décidées en liaison avec les administrations des ministères concernés.
Dans le prolongement de la CNH du 26 avril 2023, cette méthode de suivi s’est confirmée avec l’installation d’une conférence permanente du parasport, d’un comité national de suivi de la transformation de l’offre médico-sociale. Dans la même dynamique et avec la détermination partagée de permettre en priorité l’accès au droit commun, la participation du CNCPH au comité de pilotage de France services ou encore au nouveau comité national pour l’emploi a été prévue. le CNCPH a été associé au conseil national de la refondation, impulsé par le président de la République, et dispose désormais d’un siège au conseil économique, social et environnemental (CESE).
Enfin, le conseil national consultatif des personnes handicapées a été renouvelé en janvier 2020, puis en août 2023, selon de nouvelles règles renforçant la place des personnes directement concernées.

L’accessibilité, la mère des batailles

Bien que censées être le socle de toute la démarche engagée, les politiques d’accessibilité de nos environnements semblent, dans le rapport comme dans les faits, reléguées au second plan.
Pilier de la loi du 11 février 2005 et de la convention relative aux droits des personnes handicapées, l’accessibilité du cadre bâti, de la voirie, des transports et du numérique est la condition de l’autonomie de chacune des personnes handicapées. L’accès à l’école, à l’enseignement supérieur, à l’emploi, à la formation professionnelle, à la santé, à la culture, aux sports, à l’information, à la culture, aux loisirs, aux vacances, à la vie politique et associative, sont tributaires de cette accessibilité dans ses différentes modalités. Sans accessibilité des lieux, des moyens de se déplacer et de communiquer, l’accès au droit commun n'est tout simplement pas possible.
L’absence de portage politique et d’accompagnement à la suite de l’adoption de la loi du 11 février 2005 a souvent conduit les acteurs publics et privés à se permettre de renoncer à leurs obligations et à laisser les échéances passer. Si la mise en place des agendas d’accessibilité programmée (Ad’AP) en 2014 a permis de maintenir une relative mobilisation, l’étendue des dérogations possibles et l’absence de contrôle ont contribué à rendre l’indice d’accessibilité « ressentie » particulièrement bas chez les personnes concernées et régulièrement empêchées dans leur vie quotidienne.
Le refus de revenir sur la loi portant évolution du logement de l'aménagement et du numérique (« loi  Élan ») du 23 novembre 2018 qui a supprimé l’obligation, pourtant nécessaire, d’assurer l’accessibilité de 100% des logements neufs, la suppression de l’observatoire de l’accessibilité et de la sécurité des établissements d’enseignement – sans s’assurer de la reprise de ses missions essentielles par d’autres acteurs –, l’incapacité à définir une stratégie de développement de l’accessibilité des sites internet publics, la difficulté manifeste à collecter des données sur le niveau d’accessibilité des équipements et des services, sont autant de signaux confirmant l’absence de volonté de faire de l’accessibilité une politique prioritaire.
Toutefois, progressivement, souvent tardivement, des impulsions ont été apportées à l’occasion des précédents comités interministériels et conférences nationales du handicap, ou de débats parlementaires préalables à l’adoption de lois. La conférence nationale du handicap de 2023 a permis, par la voix du président de la République, d’entendre une tonalité nouvelle qui reste encore à faire vivre et à partager avec l’ensemble des acteurs.
La création d’un fonds territorial d’accessibilité à destination des établissements recevant du public (ERP), privés de 5ème catégorie, particulièrement présents dans la vie quotidienne des Français, est un choix salué par le CNCPH. Mais son arrivée tardive, à quelques mois du terme des agendas d’accessibilité programmée (Ad’Ap) en 2024, et sa faible mobilisation par les acteurs visés à l’heure où ces lignes sont rédigées, confirment l’urgence d’engager une campagne d’information auprès de tous les acteurs économiques et du grand public sur les obligations d’accessibilité.
« On fera un bilan en 2024, mais il faudra à ce moment-là envisager un système de sanction. On le sait bien », affirmait à juste titre le président de la République le 26 avril 2023. L’inaccessibilité est un délit, et les sanctions, qui ne sont pas une fin en soi, s’imposent après vingt ans de discours se voulant incitatif.
En ce qui concerne l’accessibilité des transports, le CNCPH relève l’accessibilité de 60% des arrêts prioritaires dans le transport public routier urbain et interurbain, le schéma directeur national d’accessibilité programmée de la SNCF qui porte l’accessibilité de 90 des 160 gares prioritaires nationales (84 gares mises en accessibilité à la fin 2022) et les schémas régionaux d’accessibilité programmée pour l’accessibilité de 368 gares prioritaires régionales (hors Ile-de-France), dont 184 gares ont été aménagées fin 2022. Cependant, pour le CNCPH, les acteurs publics ne doivent pas se contenter des gares prioritaires mais doivent bien viser l’accessibilité de l’ensemble des gares du territoire français.
Par ailleurs, si l’installation de comités consultatifs pour l’adaptation des dispositifs d’accessibilité des groupes Aéroports de Paris (ADP) et RATP est mentionnée dans le rapport, il n’est pas précisé quelles actions de mise en conformité ont été engagées au sein de la RATP et dans le transport aérien. La casse du matériel médical en soute dans les avions, comme l’impossibilité d’entrer dans les avions avec un fauteuil roulant, sont déplorées.
Les transports sont indispensables à l’accès aux soins et à la santé des personnes. Aussi, il reste encore à renforcer la fiabilité de ces transports (horaires, annulations, etc.), leur adaptation (par exemple, les ambulances) ainsi que le système de remboursement (qui encourage le covoiturage avec des arrêts multiples qui dégradent le service).
L’élan finalement apporté à l’accessibilité numérique pour que les sites publics se conforment à la réglementation, avec des moyens conséquents pour former et accompagner, ainsi qu’un arsenal de sanctions sous la responsabilité nouvelle de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), était attendu. Atteindre l’objectif d’accessibilité de 100% des démarches dites essentielles à la fin 2025 est impératif. Empêcher tout nouveau dispositif public numérique d’être déployé sans que son accessibilité ne soit garantie, s’impose également. L’annonce au Journal officiel du 25 février 2024 de la généralisation du service de visio-plainte sans que son accessibilité n’ait été anticipée met en lumière l’absence de protocole empêchant ces erreurs.
La diversité et l’ampleur d’autres chantiers engagés par ailleurs, comme ceux de l’édition adaptée, de la mise en place d’une solution d’accessibilité téléphonique universelle (SATU), et de l’accès aux offres culturelles accessibles avec le pass culture, confirment l’utilité de la mobilisation conjointe et régulière de l’ensemble des ministères, des composantes du CNCPH et d’experts d’usage. Les travaux engagés sur le droit aux vacances, comme sur l’accès au sport, appuient cette dynamique. 
L’accessibilité électorale fait l’objet d’une mobilisation historique du CNCPH qui est à l’origine des premiers mémentos destinés aux candidats, aux organisateurs des scrutins et aux médias d’information, diffusés dès les élections présidentielles et législatives de 2007. Le CNCPH est témoin de l’amélioration constante des dispositifs permettant aux citoyens et électeurs en situation de handicap de participer aux scrutins et aux campagnes électorales qui les précèdent.
La demande du CNCPH d’inscrire dans le code électoral cet impératif d’accessibilité a été entendue par les parlementaires qui ont inséré dans la loi du 29 mars 2021 relative à l’élection du président de la République un alinéa précisant que : « Les candidats veillent à l'accessibilité de leurs moyens de propagande électorale aux personnes en situation de handicap, en tenant compte des différentes formes de handicap et de la diversité des supports de communication. Ils peuvent consulter à cette fin le Conseil national consultatif des personnes handicapées, qui publie des recommandations ou observations ». 
La nouvelle obligation désormais faite aux candidats de déposer une version facile à lire et à comprendre (Falc) de leur profession de foi et le renforcement de l’accessibilité des contenus audiovisuels des campagnes officielles – leur audiodescription, leur sous-titrage et leur interprétation en langue des signes française étant systématiquement assurés et confirmés par chaque décision de l’Arcom relative aux élections – améliorent incontestablement le dispositif. Mais ces dispositifs n’arrivent que trop tardivement dans le processus et restent très éloignés de la possibilité d’une réelle participation de tous les citoyens au débat public en ne permettant pas concrètement le choix éclairé des électeurs : les versions Falc des professions de foi, dont la qualité et la pertinence ne sont pas systématiquement garanties, ne sont disponibles que quelques jours avant le scrutin, et l’impact des spots audiovisuels de la campagne officielle sur le choix des électeurs reste encore à démontrer.
C’est pourquoi le CNCPH préconise d’envisager une obligation nouvelle d’accessibilité à l’attention de toutes les formations politiques qui font l’objet d’un financement public, et des groupes parlementaires, pour que la totalité de leurs communications vers le public soient conformes aux standards d’accessibilité, dans la durée et la continuité dans leurs activités, et non plus seulement lors des consultations électorales. Le CNCPH invite également à réinterroger la faculté de La Chaîne Parlementaire et de Public Sénat de s’affranchir des règles d’accessibilité qui s’imposent aux chaînes publiques, alors qu’elles représentent de véritables opportunités d’accompagner et d’accélérer l’accès de tous les citoyens au débat public.
Le CNCPH regrette par ailleurs que malgré toutes les intentions affichées à ce sujet, aucune mesure concrète n’ait encore été prise pour garantir aux élus eux-mêmes handicapés la possibilité d’exercer leur mandat sans aucune contrainte, alors que le sujet est désormais suffisamment documenté. Là encore, ce sont l’accessibilité du processus électoral et de la communication des formations politiques au quotidien, ainsi que la possibilité d’exercer un mandat, qui déterminent la capacité de centaines de milliers d’électeurs à prendre leur part au débat.
Un des préalables au plein exercice de sa citoyenneté est l’accessibilité de la communication publique et gouvernementale. Si elles étaient déjà appréhendées et envisagées, l’amélioration et la visibilité de cette accessibilité se sont accélérées avec la crise du covid-19 qui a imposé à la puissance publique d’être en capacité de se faire comprendre, régulièrement et sans délai, par la totalité de la population. C’est ainsi que le service d’information du gouvernement (SIG) et le CNCPH ont co-construit la charte d’accessibilité de la communication publique et gouvernementale, qui a depuis fait l’objet d’un accompagnement financier permettant l’ouverture de marchés spécifiques pour que les ministères puissent mobiliser les prestations nécessaires, et la mise en place de plusieurs sessions de formation organisées à l’intention des communicants publics. Les prises de parole des ministres et leurs dossiers de presse sont davantage accessibles, les allocutions du président de la République, ainsi que ses interviews audiovisuelles, et les campagnes de communication font l’objet de dispositifs d’accessibilité de plus en plus performants. Cela n’est pas encore systématique, loin de là, mais la dynamique engagée doit être soutenue.
Cette certitude que l’accessibilité doit s’imposer en priorité dans les politiques publiques engagées, conduit le CNCPH à rappeler régulièrement que l’accès de tous les enfants à l’école suppose l’accessibilité des établissements scolaires et de leurs équipements. Il en est de même pour les établissements d’enseignement supérieur. À ce titre, le CNCPH se réjouit que ses travaux et sa mobilisation aient permis la décision de lancer un appel à projets pour identifier, en vue de la rentrée universitaire 2024, trois premiers établissements qui assureront une fonction de démonstrateur d’accessibilité. Ils viseront ainsi l’excellence en matière d’accessibilité en développant des environnements exemplaires garantissant à chaque étudiant qui s’y trouve, quels que soient ses éventuels handicaps, d’être autonome à toutes les étapes de son quotidien. Le CNCPH recommande de dupliquer cette initiative pour concevoir, dans des termes similaires, des lieux d’accès aux soins.
Cruciale pour permettre l’accès à un emploi et s’y maintenir, l’accessibilité des lieux de travail (ou bâtiments à usage professionnel) attend son décret depuis la loi du 11 février 2005. Le CNCPH estime que les projets de texte envisagés jusqu’alors sont inaboutis et inopérants. Il déplore l’absence de concertation préalable sur l’étendue et les objectifs d’une telle accessibilité, pour co-construire ensuite avec l’ensemble des parties prenantes, dont les principaux intéressés, les dispositifs qui s’imposent. Le CNCPH préconise que ce chantier soit repris et mené à son terme en 2024.
Le CNCPH réitère enfin sa recommandation d’inscrire dans le code de la commande publique un critère d’accessibilité par défaut à l’ensemble des procédures de marché public, afin que tous les soumissionnaires précisent les modalités d’accessibilité des travaux, fournitures et services qu’ils s’engagent à livrer et que les titulaires des marchés en garantissent le respect absolu.
La création en 2022 d’une nouvelle délégation interministérielle à l’accessibilité renforce le dispositif permis, entre autres, par la coordination interministérielle à l’accessibilité et à la conception universelle, assurée au secrétariat général du comité interministériel du handicap, par la délégation ministérielle à l’accessibilité du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, et par la direction interministérielle du numérique, un service du Premier ministre, placé sous l’autorité du ministre de la Transformation et de la Fonction publiques. Avec le réseau des hauts fonctionnaires au handicap et à l’inclusion, les administrations des ministères mobilisées en fonction de leur champ de compétences, et le nouveau réseau des sous-préfets référents handicap et accessibilité encore peu visible, le portage et le suivi des politiques d’accessibilité se sont amplifiés, notamment grâce à la régularité des réunions du comité interministériel du handicap Il reste, selon le CNCPH, à passer de l’actuelle complémentarité entre ces différents acteurs à une véritable coordination avec une force de frappe et au service des acteurs publics et privés pour accompagner et sécuriser la montée en charge de l’accessibilité en France. La proposition de créer une agence nationale de l’accessibilité et de la conception universelle reste d’actualité. Le secrétariat général à la planification écologique, voulu et créé par Elisabeth Borne lorsqu’elle était Première ministre, représente également une référence utile.
Le CNCPH salue le développement de la plateforme collaborative Accèslibre et du projet similaire envisagé pour les transports. Ces dispositifs participent à l’information des personnes concernées pour qu’elles puissent anticiper et organiser leurs déplacements. Toutefois, l’observatoire de l’accessibilité des établissements d’enseignement a été supprimé et l’observatoire interministériel à l’accessibilité et à la conception universelle (Obiaçu) mis à l’arrêt. Les parties prenantes ne disposent plus d’outils partagés de mesure et de suivi de l’accessibilité en France. Un espace de confrontation régulière des points de vue entre les représentants des principaux intéressés et les acteurs impactés par les obligations d’accessibilité reste nécessaire pour se concerter sur les modalités de respect des normes. Aussi, le CNCPH appelle à la création d’une conférence permanente de l’accessibilité et de la conception universelle pour recréer les conditions de cet échange et de mutualisation des données.

Du droit à l’accompagnement dès le plus jeune âge au droit à l’éducation

Depuis 2020, l’élargissement des critères pour l’application du bonus handicap permet d’apporter une réponse ajustée à un nombre croissant d’enfants en situation de handicap, et l’extension du bonus aux accueils de loisirs devrait permettre d’accueillir plus et mieux les enfants en situation de handicap. Une attention particulière sur les contenus de formation initiale et continue de l’ensemble des acteurs du secteur de la petite enfance et de l’enfance doit accompagner l’engagement financier porté par la caisse nationale des allocations familiales (CNAF) pour consolider l’accueil de tous dans les crèches et en périscolaire.
Si les services de repérage et d‘accompagnement précoce pour les enfants de 0 à 6 ans ont été mis en place, les délais d’attente restent encore trop importants pour les enfants et leur famille. Le manque de moyens et/ou de personnels dans les centres d’action médico-sociale précoce (CAMPS) ne permet pas de poser un diagnostic dans un délai raisonnable. Le développement de ces diagnostics pour les 7-12 ans doit s’accélérer. Lorsque le repérage n’est pas réalisé à temps, c’est une perte de chance pour la santé et la scolarité de l’enfant.
Tous les enfants ont la capacité d’apprendre et de progresser. Tous les enfants ont leur place à l’école en tant qu’élèves, dans une école prenant en compte leurs besoins spécifiques. Dans ses observations finales suite à l’audition de la France en 2021, le comité des droits des personnes handicapées des Nations Unies se dit « préoccupé par le nombre élevé d’enfants handicapés inscrits dans des structures d’éducation ségrégative, notamment des structures d’accueil médico-sociales ou des classes séparées dans des écoles ordinaires, car cela perpétue la stigmatisation et l’exclusion ».
Au-delà des dispositifs développés, le rapport n’indique pas d’analyse qualitative sur la réalité des parcours et de leur diversité. Il ne présente pas de données sur l’évolution des perceptions et des pratiques des enseignants pour une école réellement pour tous : l’école est-elle aujourd’hui davantage « inclusive » dans ses pratiques ?
L’école doit prendre appui sur l’accessibilité universelle (du cadre bâti, des pratiques pédagogiques, de l’organisation générale des établissements scolaires, de l’ensemble des différentes composantes de la vie scolaire, etc.). L’aide humaine à l’école reste pourtant le premier levier mis en avant par le gouvernement. Elle représente une part conséquente du budget, y compris dans l’enseignement agricole. 6 élèves sur 10 bénéficient dorénavant d’une aide humaine sans analyse de l’impact de cet accompagnement sur les parcours des élèves concernés, ni évaluation de la qualité de cet accompagnement aujourd’hui.
30% des postes fléchés pour des enseignants spécialisés ne sont pas pourvus à ce jour et ce pourcentage va être en augmentation dans les années qui viennent au regard du faible nombre de départs en formation réalisés chaque année. Ce constat devrait inciter à mettre en œuvre un véritable plan de formation ambitieux, en formation initiale et continue.
La question de la coopération avec le secteur médico-social reste un parent pauvre des politiques publiques. Le décret sur le fonctionnement en dispositif, prévu par l’article 31 de la loi de la confiance de 2019, a finalement été publié au Journal officiel du 6 juillet 2024, 5 ans après la promulgation de la loi. La création des pôles d’appui à la scolarité (PAS), dont 3000 seront déployés d’ici 2026, est une opportunité pour donner un nouveau souffle à cette coopération. Ils doivent être une réponse aux enfants à besoins éducatifs particuliers, mais aussi garantir une organisation ajustée venant en appui des équipes éducatives et enseignantes, au cœur des établissements scolaires en développant l’appui ressources, condition indispensable pour améliorer l’accessibilité de l’école. Les perspectives d’installation d’établissements médico-sociaux dans les écoles ou de développement de « SESSAD-école » (service d’éducation spéciale et de soins à domicile) doivent également participer au changement de paradigme. Il est nécessaire de s’engager aujourd’hui à publier les textes rénovant la coopération.

Le droit à la santé pour un meilleur accès aux soins et à la prévention

L’accès à la santé et aux soins des personnes en situation de handicap est primordial. Même si des difficultés dans le parcours des personnes persistent, des avancées sont relevées, comme la détection précoce des enfants de 0 à 6 ans, le bonus inclusion pour les crèches, les consultations dédiées, ou encore le déploiement d’un volet dédié sur la plateforme www.monparcourshandicap.gouv.fr. D’autres volets du droit à la santé restent en revanche encore trop peu ou pas développés : les consultations blanches et la vie intime, affective et sexuelle.
Des mesures ont été prises pour améliorer l’accès à la santé des enfants, mais des efforts sont encore nécessaires. Les services de repérage, tels que les plateformes de coordination et d'orientation (PCO), ont été mis en place mais les délais d’attente restent trop importants pour les personnes et leur famille et varient fortement d’un territoire à l’autre.
Malgré quelques avancées, l’accueil des enfants en situation de handicap issus de l’aide sociale à l’enfance (ASE) reste largement insuffisant par manque de moyens des structures, mais aussi par manque de formation des professionnels et des familles d’accueil. Les enfants de l’ASE, plus que les autres, sont victimes encore trop souvent de violences.
La CNCPH salue le plan de lutte contre les violences faites aux enfants. Les unités d’accueil pédiatriques enfants en danger (UAPED) doivent se déployer d’ici à 2026. Le CNCPH sera très attentif à leur mise en place et la nécessaire information à faire auprès des jeunes concernés et des professionnels pour faire connaître ces unités.
L’accent a été mis sur la prévention et l’accès aux soins des personnes en situation de handicap. Cependant, l’accès aux soins reste très difficile aujourd’hui pour les personnes concernées car l’accessibilité des centres de soin n’est pas garantie et ne prend pas en compte tous les handicaps. Or, même si des consultations spécialisées se développent, le droit commun doit rester la norme car, dans de nombreux cas, une consultation spécifique n’est pas nécessaire. Des professionnels suffisamment formés à l’accueil de patients en situation de handicap pourraient permettre de pallier ce manque.
À la demande du CNCPH, le nouveau fonds territorial d’accessibilité, créé en novembre 2023, finance également les travaux et dispositifs pour accélérer l’accessibilité des cabinets médicaux et paramédicaux. Ainsi, une aide de l’État peut couvrir 50% des dépenses engagées, dans la limite d’un plafond de 20 500 €. Mais ce fonds reste encore peu mobilisé.
Par ailleurs, les dispositifs Handiconsult, Handibloc, les téléconsultations accessibles ou encore les consultations blanches ne sont pas suffisamment développées et sont méconnues des personnes concernées ou de leurs aidants.
Un autre axe majeur de l’accès à la santé est la lutte contre les discriminations et les violences sexuelles. Afin de reconnaître les violences, les signaler et s’en préserver lorsqu’on est en situation de handicap, le site Mon Parcours Handicap a lancé une nouvelle rubrique « Prévention des violences ». La mise en place des centres ressources Intimagir permet également d’écouter et d’informer les personnes en situation de handicap sur leur vie intime, affective, sexuelle, la parentalité et les violences sexuelles, et d’orienter vers des interlocuteurs adaptés à leurs besoins. Ces dispositifs, essentiels pour lutter contre les discriminations et les violences sexuelles, sont insuffisamment connus des personnes concernées et doivent faire l’objet d’une communication de plus grande ampleur. Le déploiement des missions des centres de ressources Intimagir nécessiterait aussi des financements complémentaires.
Les consultations Handigynéco sont actuellement disponibles dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) mais ne le sont pas encore pour les filles et femmes vivant à domicile. Ce dispositif devrait donc être étendu et rendu accessible à toutes les personnes concernées.
Lors de son discours prononcé à la conférence nationale du handicap (CNH) du 26 avril 2023, le président de la République a réaffirmé sa volonté d’avancer sur l’accès à la vie intime, affective et sexuelle des personnes en situation de handicap : « Avoir une vie comme tout le monde, c'est aussi avoir une vie affective, amoureuse, intime et sexuelle. Je l'avais évoqué lors de la précédente CNH. Nous avons désormais l'avis du CCNE [comité consultatif national d’éthique] de juillet 2021 et les propositions du CNCPH sur lesquelles nous appuyer. Ce n'est pas un tabou, c'est un enjeu de bien-être, de santé. La ministre va finaliser d'ici l'été le plan d'action qui sera mis en œuvre pour lever les entraves et avancer sur ce sujet, ô combien important, avec plusieurs de ses collègues du Gouvernement ». 
Le CNCPH déplore que ce droit à la vie intime, affective et sexuelle ne soit toujours pas concrétisé pour nombre de personnes en situation de handicap. Bien que le président de la République ait affiché un cap clair lors de la CNH, le plan d’action est toujours attendu et ce rapport du gouvernement n’éclaire pas davantage sur les projets envisagés. C’est pourtant à la demande du gouvernement, dans le prolongement de la prise de position du comité consultatif national d’éthique (CCNE), que le CNCPH avait mené une large concertation, conclue par un débat public et la publication de 13 recommandations qui restent d’actualité.
L’annonce d’un remboursement des fauteuils roulants sans reste à charge pour les personnes est un acte fort qui répond à un besoin confirmé. La mesure est supposée être opérationnelle dès novembre 2024. Le CNCPH insiste pour que cette mesure prenne en compte l’ensemble des cas de figure rencontrés et ne dégrade pas l’autonomie des personnes concernées. Il importe que le nouveau dispositif prenne en compte les équipements dits « optionnels », nécessaires à l‘autonomie et à la santé des personnes concernées, et garantisse une prise en charge intégrale sans reste à charge.
De même, l’amélioration de la prise en charge par la prestation de compensation du handicap (PCH) des aides techniques à la communication alternative et améliorée (CAA) fait partie des mesures incontournables afin de permettre à chaque personne de disposer des moyens et outils pour communiquer et s’exprimer. Cette mesure n’est toujours pas opérationnelle, le CNCPH souhaite qu’elle ne soit pas reportée en 2025, contrairement à la décision du comité interministériel du handicap, réuni le 16 mai 2024.

Une transformation de l’offre et un accès aux droits et aux compensations qui demeurent incomplets

Dans son discours du 26 avril 2023 à la conférence nationale du handicap (CNH), le président de la République a encouragé les acteurs de la transformation de l'offre à « continuer de promouvoir un modèle social de handicap basé sur la désinstitutionalisation » dans « le sens des orientations du comité de l’ONU ».
Or, malgré la mise en avant dans le rapport de certains principes fondamentaux comme l’autodétermination, la facilitation des choix de vie, ou encore la diversification de l’offre qui sont en cohérence avec cette orientation vers une désinstitutionalisation, le CNCPH constate que les moyens nécessaires pour réaliser cette transformation de l’offre ne sont pas toujours précisés ou ne sont pas centrés autour des personnes concernées, mais autour des établissements et services médico-sociaux et des milieux protégés.
En ce qui concerne l’accès aux droits, un chantier est ouvert pour fixer une feuille de route 2027 des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Le CNCPH confirme l’importance de concevoir un formulaire simplifié et de renforcer l’homogénéité territoriale afin que l’accès aux droits ne soit pas différencié en fonction des départements. La révision du guide barème des déficiences et des incapacités est par ailleurs annoncée pour 2025, il importe que le CNCPH y soit associé de bout en bout.
Dans le volet compensation, la revalorisation de la prestation de compensation du handicap (PCH) aide humaine est saluée. Mais en ce qui concerne la PCH emploi direct, les dispositions prises ne permettent pas aux employeurs de respecter les obligations du code du travail, ils restent en grande difficulté, ainsi que les personnes qu’ils emploient.
Hormis la référence à la déconjugalisation, le sujet de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) est quasiment absent de ce rapport. Selon le CNCPH, l’AAH doit être replacée au centre des préoccupations pour envisager un changement du mode de calcul. La question des ressources dont disposent les personnes handicapées de manière large doit faire l’objet d’une réflexion partagée, notamment sur le sujet de la retraite et des ressources des personnes handicapées vieillissantes. Aujourd’hui, l’accès aux droits à la retraite est rendu compliqué par l’accumulation des dispositifs : allocation personnalisée d’autonomie (APA), PCH et AAH. La concertation devra également porter sur l’allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) qui est allouée aux personnes jusqu’à 20 ans, soit deux ans après la majorité des personnes, en les maintenant symboliquement dans une situation de minorité.

Des approches diverses en faveur de l’emploi qui restent à développer et renforcer

Si la période récente est marquée par une baisse notable du nombre de demandeurs d’emploi, le taux de chômage des personnes handicapées, est en forte baisse également mais reste plus élevé que celui de l’ensemble de la population (12% contre 7,5%).
Évoquées plus haut, la mise en place de France Travail qui devrait renforcer l’accès des personnes handicapées au droit commun, comme nos débats sur l’accessibilité des lieux de travail, ont dominé les travaux des deux dernières années.
Il en est de même du plan de transformation des établissements ou services d’aide par le travail (ESAT) qui reste aujourd’hui inachevé. Cette transformation n’entraîne à ce stade que la création de très peu de véritables droits nouveaux pour les personnes concernées et s’imposant à leurs employeurs. La liberté et la capacité des travailleurs en ESAT à travailler en milieu « ordinaire » nécessite une coopération entre les acteurs de l’emploi et les établissements – qui reste encore largement à construire, ainsi qu’un accompagnement pérenne qui pourrait être assuré par le dispositif d’emploi accompagné (à la suite de l’accompagnement obligatoire de l’ESAT), dispositif dont les financements devront être sécurisés.
Le CNCPH confirme que la refonte de la « restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi » (RSDAE) est attendue depuis plusieurs années, notamment pour faciliter le cumul d’un emploi en milieu protégé et un emploi en milieu ordinaire.
Enfin, l’ouverture du compte personnel de formation (CPF) pour les travailleurs en ESAT reste une avancée théorique. Pour la concrétiser, de nouvelles formations adaptées devront être conçues et intégrées au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP).

Les grands absents du rapport : l’égalité femmes-hommes et le volet international

Si les violences faites aux femmes ont bien été mentionnées, le CNCPH regrette que le sujet de l’égalité femmes-hommes ne soit pas développé dans le rapport. Des progrès importants sont pourtant attendus, alors que de nombreuses femmes et jeunes filles handicapées ne se voient pas proposer les mêmes formations que les autres. Ainsi, le CNCPH est préoccupé par les taux élevés de chômage et d’emploi à temps partiel chez les femmes handicapées, la surreprésentation de celles-ci dans les emplois précaires et les difficultés qu’elles rencontrent s’agissant des perspectives de carrière et de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.
Malgré la déconjugalisation de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), les femmes en situation de handicap restent vulnérables sur le plan financier et font face à des difficultés importantes dans l’accès à leurs droits.
Le CNCPH regrette aussi l’absence d’un volet international dans ce rapport. Les éléments ne manquent pourtant pas, comme les liens développés avec les associations impliquées dans l’aide aux Ukrainiens, ou encore la présence d’une délégation française à la Conférence des États parties de l’ONU.
Alors qu’une stratégie européenne relative aux droits des personnes handicapées (2021-2030) affiche des ambitions importantes, elle n’est pas évoquée dans le rapport. Il aurait pourtant été opportun d’y préciser la manière dont la France souhaite mettre en œuvre cette stratégie. Il en est de même pour la décision du comité européen des droits sociaux, décision rendue en réponse à la réclamation collective de plusieurs associations française, et qui avait conclu en 2023 à la violation par la France de plusieurs articles de la charte sociale européenne.

Recommandations du Conseil national consultatif des personnes handicapées

Au cours de la période couverte par le rapport, se sont enchaînés le rattachement d’un secrétariat d’État chargé des politiques d’accessibilité et « du handicap » au Premier ministre pendant 5 ans (de 2017 à 2022) et le retour d’un ministère délégué dans le département des politiques de solidarité. Au-delà des configurations gouvernementales qui sont amenées à évoluer au rythme des aléas de la vie politique française, le conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) confirme la nécessité de garantir un dispositif administratif et collégial stable et pérenne d’animation interministérielle impliquant chaque ministre et chaque administration. La régularité des réunions du comité interministériel du handicap, comme le réseau des hauts fonctionnaires au handicap et à l’inclusion, évoqués en introduction de cet avis, y contribuent et doivent être sécurisés. Le secrétariat général du comité interministériel du handicap, rouage essentiel de cette animation interministérielle, doit être renforcé dans ses missions et conserver son rattachement initial au Premier ministre. Le nouveau réseau des sous-préfets handicap et accessibilité devra par ailleurs gagner en visibilité.
La nouvelle période qui s’ouvre devra aussi permettre de renforcer et de sécuriser les processus de prise en compte des sujets relatifs aux handicaps dans les projets de loi, le dispositif actuel de « fiche handicap » dans l’étude d’impact jointe aux projets de loi est inopérant et ne permet plus d’anticiper sur les situations de handicap en amont de l’élaboration des textes législatifs du gouvernement. Il en est de même pour les propositions de loi qui sont des textes d’initiative parlementaire et qui ont acquis ces dernières années une nouvelle importance liée au phénomène nouveau de majorité relative.
Il importe également que ministres et administrations soient parfaitement formés aux enjeux de la convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations Unies et que le suivi des observations finales du comité des droits, suite à l’audition de la France en 2021, fasse l’objet d’un point d’étape systématique lors des réunions du comité interministériel du handicap.
Le pilotage des politiques publiques dont il est question ici ne saurait se passer d’une connaissance fine et régulière des besoins des personnes handicapées, de leurs familles et aidants, des professionnels qui contribuent à leur autonomie. La maitrise des données relatives à l’accessibilité et à l’accès au droit commun doit encore être assurée pour éclairer les parlementaires, les collectivités territoriales et l’ensemble des parties prenantes. C’est le sens de la proposition du CNCPH d’instaurer une conférence permanente de l’accessibilité et de la conception universelle qui se verrait confier, entre autres, les missions de l’observatoire interministériel à l’accessibilité et à la conception universelle (Obiaçu). De même, le CNCPH confirme sa préconisation de créer un observatoire national des besoins. Annoncée lors du comité interministériel du handicap du 16 mai 2024, la mise en place d’un observatoire des besoins par chaque agence régionale de santé (ARS) est une première réponse, elle sera utilement complétée par un dispositif similaire national impliquant le CNCPH et l’ensemble des parties prenantes. Il nous faut désormais partir des attentes des personnes pour y répondre efficacement, et non plus demander aux personnes de s’adapter à l’offre existante de services.
Au-delà des moyens nouveaux dont dispose désormais le CNCPH, le renforcement de la co-construction des politiques publiques, gage d’une plus grande efficacité, devra être poursuivi. Il s’agira, entre autres, de s’assurer de la saisine systématique du CNCPH sur l’ensemble des projets susceptibles de concerner directement ou indirectement les personnes handicapées ainsi que leurs aidants familiaux et professionnels.
Le CNCPH rappelle que dans ses observations finales suite à l’audition de la France en 2021, le comité des droits des Nations Unies souligne que notre pays « n’a pas pris de mesures pour revoir et aligner sur la Convention sa législation et ses politiques nationales, départementales et municipales relatives au handicap, ainsi que ses lois et politiques fondées sur le modèle médical ou une vision paternaliste du handicap, notamment la définition du handicap figurant dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui est axée sur la prévention du handicap et le traitement médical des incapacités, y compris des handicaps psychosociaux et de l’autisme, et le modèle de la « prise en charge médico-sociale », qui perpétue le placement systématique des personnes handicapées en institution ».
 Le comité des droits a également relevé que le refus de procéder à des aménagements raisonnables n’est pas considéré en France « comme une forme de discrimination fondée sur le handicap dans toutes les sphères de la vie, mais seulement dans celles du travail et de l’emploi et de l’éducation dans le contexte des examens ».
Aussi, alors que se profile le 20ème anniversaire de la loi du 11 février 2005, le CNCPH recommande que soient engagées dès à présent la révision de la définition du handicap, de laquelle dépend le bon équilibre de nos politiques publiques, et la prise en compte comme une forme de discrimination le refus de procéder à des aménagements raisonnables dans toutes les sphères de la vie.

À propos de ce rapport

Le CNCPH indique sa satisfaction quant à l’élaboration et à la diffusion de ce rapport prévu par la loi du 11 février 2005. Il est indispensable à l’information des parlementaires et des parties prenantes des politiques publiques pour prendre connaissance des chantiers engagés, et des éventuelles contraintes rencontrées, pour les évaluer. Ce document est également utile pour s’assurer de la bonne articulation entre la trajectoire affichée à l’issue de la conférence nationale du handicap du 26 avril 2023 et les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale suivants.
Le CNCPH regrette que l’absence de rapport suite à la conférence nationale du handicap du 11 février 2020 n’ait pas permis de disposer de cet outil nécessaire au suivi et à l’évaluation des politiques engagées. Les renvois du présent rapport à l’année 2017 n'en facilitent pas la lecture objective. 
Le CNCPH encourage l’Assemblée nationale et le Sénat à engager un débat autour des perspectives développées dans ce rapport, comme la loi du 11 février 2005 les y invite.
Paris le 10 juillet 2024

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