Monsieur le Premier ministre, cher Jean-Marc AYRAULT,
Madame la secrétaire d’État,
Madame la Maire de Nantes et présidente du conseil de surveillance du CHU,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Madame la présidente de région,
Monsieur le président du conseil départemental,
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le préfet de région,
Monsieur le directeur général de l’ARS,
Monsieur le directeur général du CHU,
Monsieur le président de la commission médicale d’établissement et tous les acteurs de la communauté hospitalière,
Madame la présidente de l’Université de Nantes,
Monsieur le directeur de l’Ecole centrale,
Mesdames et Messieurs,
Merci beaucoup de m’accueillir ce matin pour ce moment dont je mesure, pour celles et ceux qui ont été à l’origine, combien il est solennel, combien il est important. Vous avez raison madame la maire : c’est un moment symbolique. Si j’ai souhaité être avec vous ce matin, en ce moment important, c’est évidemment d’abord en pensant aux nantaises, aux nantais, à tous les habitants du département et de la région compte tenu de ce qu’est le rôle d’un centre hospitalier universitaire, aussi important que celui de Nantes, et particulièrement dans les temps que nous traversons évidemment. S'occuper du temps présent, c'est majeur. Quand ces derniers sont troublés, montrer que les perspectives sont là, que l'avenir s'éclaire, c'est évidemment très important.
Je suis déjà venu au CHU de Nantes depuis que je suis Premier ministre. Je suis allé avec vous ce matin, voir un centre de vaccination, et je voudrais dire ici une nouvelle fois, inlassablement, le soutien qu'à travers moi, la Nation apporte à tous ces professionnels et j'ajoute à tous ces bénévoles, qui font face, en particulier dans le secteur de la santé, à cette crise sanitaire terrible par son intensité, par sa durée. Elle affecte le monde entier, et notre pays en particulier. Je ne sais ce que l'histoire en retiendra, il est évidemment beaucoup trop tôt pour le dire, mais je voudrais, au-delà de toutes les discussions, les divergences, parfois les polémiques inévitables dans une grande démocratie, vous dire ma fierté de ce que je vois, vraiment, de tous ces gens qui se mobilisent inlassablement, qui ne décrochent pas face à l'adversité, qui se serrent les coudes, qui ne recherchent pas la lumière, qui ne disent rien, mais qui agissent au quotidien, depuis des mois et des mois, et qui sont toujours là.
Je veux saluer la résilience du peuple français, de ceux qui sont en première ligne, mais finalement, quelque part, nous le sommes tous, c'est aussi le propre des crises. Bien sûr, on attend beaucoup des pouvoirs publics et du service public, de l'État en premier lieu, et c'est parfaitement normal. Nous essayons, nous aussi, d'être à la hauteur de ce rendez-vous historique. Mais la force de ces crises, c'est de montrer si le peuple tout entier, chacun de nous, dans notre responsabilité individuelle et collective, nous faisons face et de ce point de vue-là, évidemment, on peut mettre l’accent sur les comportements non adaptés. Mais ils ne doivent pas cacher l’immense mobilisation, en particulier ici à Nantes, mais partout dans le pays que je parcours en permanence, que vous, nous pouvons ensemble constater.
Alors, évidemment la crise n’est pas finie, chacun le sait : elle évolue. Nous devons nous adapter en permanence, pour faire face. Quelle est notre responsabilité collective ? Bien sûr de faire face. Je viens de l’indiquer comment digérer la crise, si tant est que ce mot soit le plus adapté. Il s’agit de soigner, de vacciner et de prévenir ; d'adopter aussi, ne l'oublions pas, toutes les mesures économiques et sociales qui sont nécessaires pour faire face à toutes les conséquences de cette crise. Ne laisser tomber personne comme nous nous sommes ensemble employés à le faire depuis le début. Mais je crois que ce que l'on attend aussi de nous, c’est de tirer et au plus vite toutes les conséquences que cette crise appelle. Tout ce qu'elle a mis en évidence : nos forces, j’y faisais référence, mais aussi nos faiblesses, nos retards, nos difficultés. Rien ne serait pire, me semble-t-il, que de se dire : bon, on essaie de gérer, on colmate, on y arrive, on va s'en sortir, bien sûr. Mais il faut faire un arrêt sur image et se dire voilà : qu'est-ce qu'on en retire de tout ça ? À commencer, bien sûr, par notre système de santé. On peut tous ce le dire car je pense que c'est une responsabilité collective. Oui, nous n'avons pas suffisamment investi dans notre santé publique pendant des décennies.
Nous devons réinvestir notre système de santé. C'est un des enseignements majeurs de cette crise. Ce n'est pas le seul et ce que vous faites ici à Nantes nous offre aussi des perspectives et nous montre le chemin. Voilà un projet qui est la preuve tangible de ce réinvestissement. Alors bien sûr, me direz-vous, 10 ans, il a commencé bien avant la crise sanitaire. On peut se dire en France, 10 ans finalement, vous êtes des gens rapides et efficaces Madame la présidente de région. Je dis ça pour en rire, mais nous pourrions en pleurer. Et là aussi, il faudra tirer quelques enseignements pour que tous ces projets, qu'ils soient sanitaires ou autres, ne mettent pas, croulant sous les procédures, autant de temps pour se concrétiser parce qu'ils correspondent à l'intérêt de nos concitoyens. Donc 10 ans, disais-je, et je ne parle pas de petites choses, je crois poser la première pierre du plus gros projet hospitalier en cours en France.
Rien que ça, ça méritait ma venue, Mesdames et Messieurs. Sans doute celui, je le dis, qui bénéficiera du soutien le plus fort de la part des pouvoirs publics compte tenu de son ampleur, de son importance et de sa qualité. Il existait donc, je le disais, avant la crise. Mais il est l’illustration que nous avons pris conscience que les choses n'étaient plus tout à fait comme avant, notamment à Nantes. Car là où le projet existant, je parle sous couvert du directeur général de l’ARS, laissait à l'établissement, Monsieur le directeur général, une charge de financement extrêmement forte, obérant ses capacités futures, là où il prévoyait de supprimer 500 postes, nous avons décidé, parce que cet investissement dans la santé est d'utilité publique, d'accroître les moyens pour ce projet. D'abord, en soutenant mieux l'investissement, vous avez raison. Nous avons ajouté 175 millions d'euros pour porter le montant de l'investissement de l'État à 400 millions d’euros et nous avons décidé que les suppressions de postes qu'il prévoyait seraient tout simplement annulées.
Il faut passer à l'action. Vous avez très bien décrit ce projet, son insertion urbaine, tout ce que vous allez faire à côté, l'unité que sa réalisation a supposée, je vous en félicite. Il faut maintenant que ce projet, très attendu par la population, vous l'avez dit avec tout ce qu'il comporte – je ne reviens pas sur l'humanisation, des chambres individuelles, la qualité fonctionnelle et tout ce que le président de la CME nous a exposé tout à l'heure – il faut le concrétiser au plus vite au service de la population. Il esta effectivement, je veux y insister devant vous, très symbolique de la politique que nous conduisons à l'échelle de la Nation.
L'hôpital et les services de santé en général ont d'abord comme première richesse des femmes et des hommes, des femmes et des gens. Le cap est clair, il a été fixé dans ce qu'on appelle « le Ségur ». Ce dernier est le fruit d'une négociation entre partenaires sociaux. Ce n'est pas une décision que le Gouvernement aurait prise seule. Je veux vous rappeler ses 3 dimensions fondamentales qui nous réunissent, j'en suis persuadé.
Les hommes et les femmes d'abord, c'est quoi ? Pour aller à l'essentiel, c'est d'abord des revalorisations salariales parce qu'il est capital d'attirer et de conserver. Vous voyez bien la situation actuelle : nous avons beaucoup de postes vacants. Non pas que nous aurions serré les budgets, mais parce que nous n'arrivons pas à pourvoir des postes budgétaires créés. Il y a une grande confusion que certains, c'est la période, veulent entretenir. J'ai connu des périodes, effectivement où les postes n'étaient pas pourvus parce qu'ils étaient supprimés. Bien sûr, ce n'est pas le cas aujourd'hui. Donc, il faut rendre à nouveau attractif pour tous les personnels le fait de travailler dans la santé. Le Ségur sur ce volet-là, c’est 10 milliards d'euros. Alors, ah bien sûr, sitôt signé, ce n'est pas assez, mais enfin 10 milliards d'euros, j'appelle l'attention, je l'ai déjà dit : « c'est mesurable », c'est le plus gros effort jamais réalisé d'un seul coup depuis la création de la Sécurité sociale, au bénéfice des personnels hospitaliers en particulier.
Tout le monde ici le sait, les moyens donnés à notre santé, ça s'appelle « l'ONDAM », l'Objectif national des dépenses d’assurance maladie. Sur les 10 dernières années jusqu’en 2017, l'Ondam exécuté chaque année en moyenne est de 2,35 %, alors que nous savons tous que les dépenses de santé, les besoins des hôpitaux, compte tenu du vieillissement de la population, des exigences techniques et médicales, etc progressent plus vite. Nous sommes passés, nous sommes passés à un rythme, à un rythme de 4,75 % et cette année, l'Ondam que vous avez voté, mesdames et messieurs les parlementaires s'élève à 5,6 %. Nous avons changé de braquet. Il y aura toujours des gens, ce qui est compréhensible, pour dire que c'est encore insuffisant. Pour dire que dans les mesures que nous avons décidées, il y a un simple rattrapage. Certes, mais la tendance est engagée, elle était indispensable. Il en va de même sur les qualifications et les formations, sujet essentiel.
Je l'ai déjà dit, je ne vais pas me répéter, mais quand même, on manque de médecins. Pas qu'à l'hôpital. Les médecins, on les recrute en application de ce qu'on appelle le numerus clausus. Tout le monde connaît cela. Il a été créé en 1972. Cette année-là, le numerus clausus annuel, mesdames, messieurs, s'élevait à 8 588. En 2017, à 8 124. Plus bas. Comme si entre 1972 et aujourd'hui, la population n'avait pas augmenté, comme si la population n'avait pas vieilli et était donc, comme on vous dit, plus requérante en soins. Comme si les pratiques des médecins et leur temps de travail n'avaient pas évolué. Et là, on fait semblant de s'étonner quand même ! C’est étonnant, on manque de ressources médicales. Vous vous rendez compte ? Et que fait le Gouvernement ?
Nous avons desserré le numerus clausus très fortement. Nous sommes aujourd'hui très précisément en 2021 à 10 648. Mais je ne peux pas vous dire que ces gens-là arriveront demain matin. Parce qu'il faut un certain temps, comme aurait dit Fernand RAYNAUD, pour former un médecin. Heureusement d'ailleurs. De la même façon – je dis cela devant la présidente de région, car nous n'aurions pas pu le faire sans eux – nous avons très fortement augmenté les places dans les instituts de formation de soins infirmiers : +20 % d’un coup, et dans les instituts de formation d'aides-soignants. Tout cela est concret. Il a fallu trouver de la place, on s’y est tous mis. Je suppose que tel fut le cas dans cette belle région. Mais là non plus, ils ne peuvent pas arriver du jour au lendemain. Même si vous le voyez, on fait appel à des étudiants, que ce soit en médecine ou infirmiers. Bon, bref, la tendance est là. Il faut qu'on se serre les coudes dans l'intervalle, qu'on trouve des solutions innovantes et vous le faites et nous le faisons. Mais cette prise de conscience est très concrète. Elle est à l'œuvre.
Nous posons aujourd'hui une première pierre. Cela veut dire qu'il faut faire des travaux considérables et ô combien nécessaires dans notre système hospitalier. Ça s'appelle cette fois-ci le volet investissement du Ségur, qui touche évidemment les établissements de santé public ou privé, et les EHPAD, et les EHPAD, 19 milliards.
On a connu le plan Hôpital 2007, le plan Hôpital 2012 : c'était très bien, mais celui-là, c'est deux fois les deux réunis. Nous réinvestissons la santé. C'est un impératif. Si nous ne le faisons pas, nos compatriotes ne reprocheraient pas tant d’avoir mal géré la crise sanitaire, je pense que nous faisons collectivement nos meilleurs efforts, mais de ne pas avoir su en tirer les conséquences structurelles qu’elle appelle immanquablement.
Et il y une troisième conséquence sur un autre secteur où nous avons trop longtemps baissé la garde : c’est l’innovation et la recherche en santé. Quel Français, quel responsable de tout bord n’a pas été, comment dirions-nous, ému, contrarié, froissé, blessé par le fait que la France, le pays de Pasteur n’ait pas été dans la course au vaccin ? Mais là aussi, pardon, quand on regarde aussi les investissements de la France dans ce domaine, les difficultés procédurales de tous ordres qu'on a mis dans la mise sur le marché des innovations, des produits de santé, des médicaments, ne faisons pas semblant de nous étonner.
Nous ne sommes pas là pour pleurer sur le lait renversé, Mesdames et Messieurs, on est là pour regarder l'avenir. Nous avons réinvesti le sujet des investissements. Il y a eu le PIA que nous avons réorienté, j'ai compris, donc, qu'il y avait un projet ici, c’est ça ? Réponse bientôt, Madame la maire, Madame la présidente, Messieurs, Madame la présidente d'université, Messieurs les représentants du CHU. Allez-y, allez-y, foisonnez, portez-vous candidat uni parce que le président de la République l'a annoncé, il y a eu le Plan de Relance.
Et puis, il y a maintenant France 2030. Parce que derrière, effectivement, il faut mieux faire travailler la santé, l'innovation et la recherche, l'industrie. Là aussi, dois-je rappeler à cette docte assemblée que depuis 1980, en moyenne annuelle, la France a perdu 50 000 emplois industriels. Je ne vais pas me réjouir que depuis 3 ans, on en a recréé 30 000 parce qu'on est encore loin du compte. Mais si je croise ces sujets de santé et ces sujets de recherche, d'innovation et d'industrie apparaît un mot Mesdames et Messieurs : la souveraineté. Tous ces masques produits dans le Sud-Est asiatique, tous ces produits de santé que nous avons laissés se délocaliser, je veux vous dire la fierté qui a été la mienne, une des plus grandes fiertés, outre les moments, bien sûr, où je viens à Nantes, est de permettre des relocalisations. Il y a plein d'exemples comme celui que je vais vous donner, plein aujourd'hui, grâce au plan de relance. Je me suis rendu en Isère, dans une usine qui avait délocalisé une dizaine d'années auparavant, la production de paracétamol dans un pays du Sud-Est asiatique. Grâce à nos investissements, le chef d'entreprise a décidé de relocaliser sur le territoire national. D'ailleurs, en créant davantage d'emplois qu'il n'y en avait.
Il y a plein d'exemples de relocalisations nationales pour créer des produits de santé, des médicaments, des médicaments thérapeutiques, des productions industrielles dans ce secteur de la santé. Il n'y a pas que des grandes entreprises, il y a beaucoup de PME innovantes et je le dis à dessein ici dans votre région. Et vous comprendrez que j'y suis attaché partout sur le territoire national. Nous avons aussi, je ne saurais l'oublier, des impératifs d'un meilleur aménagement du territoire. Oui, c'est une question de souveraineté qui est à la clé. Et pour nous, je veux quand même en profiter pour le dire, la souveraineté ce n’est pas le repli, ce n’est pas l’enfermement. On ne tourne pas le dos au monde, et encore moins à l’Europe.
Et je veux revendiquer devant vous, au moment où la France assure la présidence du Conseil de l’Union européenne, tous ces projets à la fois qui visent à mieux protéger l’Europe, je pense en particulier à la taxe carbone aux frontières, mais aussi à tous ces projets dans le cadre de la relance européenne visant à relocaliser, à permettre, à donner à nos industriels des moyens et de la compétitivité pour produire en Europe et en France. Ce sont des enjeux essentiels qui sont devant nous. Que la cérémonie d’aujourd’hui me permette de l’illustrer est voyez-vous, vous le comprenez, particulièrement important parce que nous sommes au carrefour de ce que vous avez voulu, vous les élus du territoire, c'est-à-dire améliorer la vie quotidienne de vos concitoyens.
Nous allons aller bien au-delà ensemble avec tous les projets que vous portez. Nous allons renforcer notre pays dans toutes ses dimensions. Les enjeux sont là. Alors vous avez, Mesdames, parfaitement raison : on les atteint d’autant mieux qu’on est unis. Unis, c’est se retrouver sur l’essentiel, ce n’est pas gommer les différences politiques, bien sûr. C’est la force de notre histoire et de notre démocratie. Mais il y a des moments en particulier lorsque l’on est confrontés à des crises profondes où nous devons savoir sur l’essentiel au moment où d’autres vont chercher au contraire à diviser, à fracturer le peuple français, nous devons, comme nous le faisons au service de projets, au service de nos concitoyens, nous retrouver autour de l’essentiel, c'est-à-dire la République.
Je vous remercie.